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Typologie des procédés scripturaux proposée par Louise-Amélie Cougnon (2015)

1. Communication numérique écrite et SMS

1.2. Recension des études sur les SMS

1.2.7. Typologie des procédés scripturaux proposée par Louise-Amélie Cougnon (2015)

Pour Cougnon (2015, p. 48-56), les procédés scripturaux des SMS ont comme principal objectif l’abréviation du message. Pour cette auteure, l’objectif d’établir une typologie des procédés scripturaux présents dans les SMS est de distinguer les erreurs d’écriture, les fautes d’orthographe par exemple, des procédés utilisés pour l’abréviation des messages. Donc, pour Cougnon, tous les éléments qui sont présents dans sa typologie représentent les procédés auxquels ont recours les utilisateurs de SMS pour rédiger leurs messages. Tout autre élément ne faisant pas partie de cette typologie peut être considéré comme une erreur d’écriture.

Les abréviations graphiques 1) Abréviations graphiques sans incidence phonique

1.a) L’apocope

• Apocope simple à poss pour « possible » • Abréviation sémantisée à t pour « tu » ou « te »

• Abréviation suivie d’un point à auj. pour « aujourd’hui » • Neutralisation des graphèmes muets en finale absolue à ils port

pour « ils portent » 1.b) L’aphérèse

Ce procédé scriptural est l’un des moins utilisés dans les SMS, mais il y est tout de même présent à lut pour « salut »

1.c) La syncope

• Effacement du schwa à l’intérieur du mot à ramner pour « ramener »

• Squelettes consonantiques à prbl pour « problème »

2) Spécialisation de caractères

2.a) La siglaison à tlm pour « tout le monde » 2.b) L’acronymie à lol pour « laughing out loud »

3) Abréviations graphiques avec incidence phonique 3.a) Par la lettre à r pour « air »

3.b) Par le chiffre ou le nombre à 2mande pour « demande », 10cute pour « discute »

3.c) Par le signe à pl@ pour « plate » 3.d) Par des graphies à koi pour « quoi »

4) Blancs graphiques

Les auteurs de messages SMS ont tendance à supprimer les espaces entre les mots, donnant comme résultat une agglutination de lettres. Pour marquer la séparation entre les mots d’une même phrase, les auteurs de messages peuvent avoir recours aux lettres majuscules à GPréfèrPaséMySwaréDsTèBra

Les émoticônes 1.a) Marque d’humeur à J

1.b) Marque de complicité à ;) 1.c) Marque d’ironie à :p

La ponctuation et casse expressives, caractères échos 1.a) Démultiplication d’un même signe de ponctuation à !!!!! 1.b) Répétition de caractères à ouiiiiiiiiii

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Comme nous pouvons le constater, les typologies des procédés scripturaux sont nombreuses et les dénominations accordées aux procédés varient selon les chercheurs. Le tableau 2, ci-dessous, présente un récapitulatif des typologies proposées par tous les chercheurs mentionnés ci-dessus.

Anis (2003) Fairon (2006) Véronis et Guimier De Neef

(2006)

Crystal (2008)

réductions graphiques

phonétisations graphies phonétisantes pictogrammes et logogrammes

réductions phonétiques

rébus squelettes consonantiques sigles et acronymes

squelettes consonantiques

orthographe phonétique

rébus omission de lettres

syllabogrammes et rébus

phénomène graphique

troncations orthographe non conventionnelle

logogrammes et paralogogrammes

icônes et symboles sigles abréviation

étirements graphiques

phénomène lexical logogrammes véritables nouveautés

troncations morphosyntaxe étirements graphiques

anglicismes syntaxe agglutinations de mots

verlan

onomatopées

Panckhurst (2009) Liénard (2012) Cougnon (2015)

substitutions abréviation abréviations graphiques

réductions troncation émoticônes

suppression, absence ou raréfication

élision d’éléments sémiotiques ponctuation et casse expressives, caractères échos

augmentation et ajouts siglaison siglaison

notation sémio-phonologique notation sémio-phonologique

écrasement de signes écrasement de signes

emprunts emprunts

émoticônes émoticônes

répétition de signes répétition de signes

2. Anglicismes

Comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, les procédés scripturaux présents dans les SMS sont nombreux. Seulement deux chercheurs accordent une catégorie aux anglicismes dans leur typologie : Jacques Anis (2003) et Fabien Liénard (2012, p. 150). Cependant, tous les autres chercheurs dont nous avons retenu la typologie reconnaissent l’emprunt linguistique comme une des caractéristiques de la communication numérique écrite dont le SMS fait partie. Fairon et ses collaborateurs (Fairon, Klein et Paumier, 2006, p. 32) soulignent l’emprunt à la langue anglaise dans leur procédé de phonétisation des chiffres (2day), Véronis et Guimier De Neef mentionnent les néologismes « […] dont les plus frappants sont sans doute les anglicismes […] » (Véronis et Guimier De Neef, 2006, p. 234), Crystal (2008, p. 128-129) insiste sur les abréviations empruntées de l’anglais, Panckhurst reconnaît la présence dans les SMS « […] d’emprunt néologique, faisant intervenir l’usage de langues étrangères […] » (Panckhurst, 2009, p. 40) et Cougnon (2015, p. 155) signale la présence d’éléments allogènes pour désigner toute unité lexicale dans une autre langue que le français. Comme nous pouvons le constater, même si seulement deux auteurs attribuent une catégorie aux anglicismes dans les procédés scripturaux, tous s’entendent sur la présence de ceux-ci dans les SMS. Dans la présente section, nous allons définir ce qu’est l’emprunt linguistique et présenter la grille des anglicismes de l’OQLF. Les anglicismes n’étant pas tous de la même nature, nous jugeons pertinent, pour la présente étude, de brosser un portrait des six catégories d’anglicismes proposées par l’OQLF, car ce sont sur ces catégories que reposera notre analyse des anglicismes présents dans les deux sous-corpus retenus pour notre étude.

2.1. Emprunt linguistique

Pour commencer, il est important de faire la distinction entre une langue et l’usage de cette langue afin de mieux comprendre la notion d’emprunt linguistique. La langue peut être définie de la façon suivante « […] un système linguistique dont les composantes sont

sémantiques, phonologiques, orthographiques, morphologiques et syntaxiques » (Loubier, 2011, p. 10). En d’autres mots, la langue est un ensemble de codes. L’usage, quant à lui, représente la façon dont les locuteurs utilisent véritablement cette langue, ces codes, au quotidien dans leur communication.

L’emprunt linguistique représente à la fois un procédé et un élément emprunté. Lorsqu’il s’agit du procédé, l’emprunt linguistique est défini de la façon suivante par l’OQLF : « On parle d’emprunt linguistique lorsque les utilisateurs d’une langue adoptent un mot ou un trait linguistique d’une autre langue, par exemple, un sens, une forme, une prononciation ou une structure syntaxique » (Office québécois de la langue française, s.d.). La notion « d’adoption » dans ce contexte fait référence à l’usage de la langue et au fait que les locuteurs d’une langue décident d’utiliser un certain mot provenant d’une autre langue. L’élément emprunté est, quant à lui, le trait linguistique ou l’unité lexicale provenant d’une autre langue. Dans la présente étude, nous traitons d’anglicismes, donc d’emprunts linguistiques qui proviennent de la langue anglaise.

L’emprunt linguistique se fait lorsque deux langues se côtoient. Cette proximité entre les langues conduit d’abord à une interférence linguistique, qui mène ensuite aux emprunts linguistiques. Au Québec, les locuteurs français sont en contact direct avec l’anglais et de nombreux Québécois sont bilingues, notamment sous l’influence du reste du Canada et des États-Unis. C’est donc par un contact direct avec la langue anglaise que l’interférence linguistique se présente. Ailleurs dans la francophonie, l’interférence linguistique avec la langue anglaise peut aussi se faire avec contact direct, mais aussi sans contact direct. Les locuteurs français sont exposés à la langue anglaise, particulièrement à l’anglais américain, notamment par la musique, le cinéma, la littérature, etc.

L’interférence linguistique avec la langue anglaise est donc très présente, notamment au Québec, mais aussi partout dans le monde. L’anglais représente la langue du politique, de l’économie et des sciences. D’un point de vue sociolinguistique, nous empruntons à une langue de prestige, à une langue qui contribue à un enrichissement du point de vue social. La langue anglaise répond à ces critères, et c’est pour cette raison que les emprunts linguistiques à cette

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langue sont très répandus. Morel et Pekarek-Doehler mentionnent que, d’un point de vue sociolinguistique, certains phénomènes découlant de l’interférence linguistique peuvent s’expliquer :

[…] sous l’angle des fonctions et ‘valeurs’ attachées à l’utilisation d’une langue plutôt que d’une autre, qui seraient intimement liées à une situation socio-historique et linguistique spécifique et à des qualités symboliques, politiques et économiques attachées de manière plus ou moins stable à différentes langues (Morel et Pekarek-Doehler 2013, p. 30).

En raison de son histoire, la langue anglaise représente, au Québec, une langue associée aux pouvoirs politique et économique, ce qui explique en partie les anglicismes présents sur le territoire québécois.

2.2. Types d’anglicismes

Comme mentionné précédemment, l’emprunt (d’unité ou d’un trait linguistique) peut être de nature lexicale, sémantique, phonologique ou syntaxique. Dans cette section, nous présenterons les divers types d’anglicismes. Pour ce faire, nous nous baserons sur la grille des anglicismes élaborée par l’Office québécois de la langue française. L’OQLF propose six types d’anglicismes : l’anglicisme intégral, l’anglicisme hybride, l’anglicisme sémantique, l’anglicisme syntaxique, l’anglicisme morphologique et l’anglicisme phraséologique.

2.2.1. Anglicisme intégral

L’anglicisme intégral est l’emprunt d’un mot ou d’un groupe de mots, sans modification ou adaptation ou avec modification ou adaptation mineure, dans la langue emprunteuse. Il s’agit donc d’un emprunt « […] sans que la graphie anglaise ni, dans certains cas, la prononciation n’aient été modifiées pour en faciliter l’emploi en français » (OQLF, s.d.). Par exemple, les mots

fun et joke ont été empruntés à la langue anglaise et ont subi des modifications ou adaptations mineures en langue française.

Dans certains cas, les anglicismes intégraux peuvent être tronqués, c’est le cas du mot snow, utilisé pour désigner snowboard (OQLF, s.d.). Il arrive parfois qu’un mot emprunté subisse une modification minimale du point de vue graphique ou phonétique afin de faciliter sa prononciation en français (OQLF, 2018).

2.2.2. Anglicisme hybride

L’anglicisme hybride est défini par l’OQLF (s.d.) comme étant une construction d’une nouvelle forme linguistique en français en empruntant un mot à la langue anglaise et en le modifiant, généralement par l’ajout ou le remplacement d’un suffixe français. Il s’agit donc de l’utilisation d’un mot anglais que nous modifions en ajoutant un suffixe. Par exemple, le mot « saver » est un anglicisme hybride de to save.

L’anglicisme hybride peut aussi se réaliser lorsque nous empruntons un seul des éléments à un mot composé anglais (OQLF, s.d.). Par exemple, c’est le cas lorsque nous utilisons « adresse mail » pour email address.