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Typologie des manières de penser la qualité chez les éleveurs du SVO

Les éleveurs du SVO ont décidé d’adhérer à une coopérative, et de partager un même cahier des charges. Mais tous ne s’approprient pas la notion de qualité de la même manière.

14 Afin d’avoir une idée des différents profils d’éleveurs qu’il peut y avoir au sein du SVO, nous avons décidé de partir des définitions de la qualité données par ceux-ci. En analysant les pronoms et le vocabulaire employés par les éleveurs dans la définition de la qualité, nous avons identifié trois manières de définir la qualité : la qualité perçue à travers un cahier des charges, la qualité en tant que résultat de la mobilisation des compétences de l’éleveur et la qualité comme réponse aux attentes des consommateurs.

a. La qualité, c’est le cahier des charges

Ce premier profil s’illustre par des éleveurs donnant une définition très calquée sur le cahier des charges :

- « Ah la volaille, c’est le bien-être animal surtout. C’est…beaucoup de surveillance, c’est…je sais pas, c’est le plein air, c’est plein de trucs comme ça » ;

- « La durée de l’élevage, les conditions d’élevage, le parcours plein air…voilà. […] Et puis la durée de l’élevage, l’alimentation…enfin la durée de l’élevage qui va avec le Label Rouge ».

Ces définitions se caractérisent d’abord par une absence de pronoms personnels, hormis le « je sais pas » qui marque l’hésitation. Les termes employés sont très impersonnels et font appel à des concepts officiels ou génériques : le bien-être animal, le plein air, la durée de l’élevage, les conditions d’élevage, l’alimentation. Nous pouvons voir que ce vocabulaire est issu d’une référence au cahier des charges plutôt qu’à un discours personnel de l’éleveur.

Généralement, les éleveurs qui donnent ce genre de définition sont arrivés très récemment au SVO, ce qui laisse à penser qu’ils n’ont pas encore eu le temps de s’approprier la notion de qualité et que se référer au cahier des charges comme gage de qualité les rassure.

b. La qualité, c’est le résultat de la mobilisation des compétences

Ce deuxième profil s’illustre par des éleveurs qui ont toujours le cahier des charges propre au Label Rouge comme référence, mais qui s’impliquent personnellement dans leur discours :

- « D’ailleurs ça fait quelques années…j’ai jamais mis d’antibios aux poulets moi. S’il y a un problème avant d’en mettre on fait ce qu’on peut pour pas…on essaie des alternatives […] » ;

- « […] au moins on sait ce qu’on donne et on sait ce qu’on mange aussi. […] au moins on sait comment ils sont élevés, on sait comment ils sont traités ».

Ici, nous retrouvons des pronoms personnels : « je » ou « on » qui fait référence au groupe auquel appartient l’éleveur. Leur emploi révèle une implication personnelle dans la définition de la qualité et une forme d’appropriation de cet enjeu par les éleveurs. Il y a une notion d’adhésion, d’appartenance à un groupe avec les mêmes compétences et les mêmes intérêts.

Les éleveurs qui se situent dans cette catégorie prennent des initiatives personnelles, font des choix raisonnés et argumentés. Ces éleveurs ont en général fait des études agricoles, appartiennent au SVO depuis cinq ans ou plus et pratiquent la vente directe. Ils accordent beaucoup d’importance à l’autonomie dans le travail qui leur laisse suffisamment de marge de manœuvre pour pouvoir appliquer leur savoir-faire. Avoir de l’autonomie dans le travail

Figure 7 : Etalage de volailles au marché des Halles de Tours (FERRAND – 2020)

15 implique que le cahier des charges ne soit pas source de contraintes trop importantes et que l’exploitation soit de taille raisonnable, pour ne pas être débordé par la charge de travail.

c. La qualité, c’est la réponse aux attentes des consommateurs

Ce troisième profil s’illustre par des éleveurs qui projettent leur définition de la qualité sur celle des consommateurs de leurs produits :

- « Les amateurs recherchent de beaux animaux. Les éleveurs recherchent une chair de qualité » ;

- « C’est une volaille qui va dehors, qui…qui met un certain temps à pousser. C’est pas du…et puis…faut que la viande et l’os, faut que ça soit bien fini. Ça c’est du poulet sinon c’est pas du poulet […] le fait qu’ils vont dehors, moi ça me va ».

Cette catégorie de profil ne regroupe que ces deux éleveurs cités. L’un est éleveur indépendant et l’autre est membre du SVO. Ces deux éleveurs pratiquent la vente directe. C’est d’ailleurs le seul mode de commercialisation de l’éleveur indépendant et le deuxième éleveur cherche à atteindre les 20% d’animaux vendus en vente directe permis par son organisation de production. Ils sont également séduits par le modèle de l’élevage familial, telles les poules autrefois élevées dans la cour de la maison.

Bien souvent les éleveurs ne rentrent pas dans une seule catégorie, ou bien ils peuvent changer de manière de percevoir la qualité au cours de leurs parcours, en fonction des expériences vécues.

Nous avons vu que la qualité regroupait surtout des moyens matériels pour les éleveurs du SVO, sans toutefois tomber dans l’excès d’investissement qui serait contre-productif.

Voyons maintenant comment cette qualité est mise en valeur dans un but commercial.

II/Analyse des observations réalisées sur les marchés et sur internet : les consommateurs peuvent se rassurer eux-mêmes sur la qualité des volailles

Nous avons vu dans la partie précédente que l’ancrage au territoire n’était pas porté par les éleveurs du SVO. Ceux-ci vendent essentiellement leurs volailles aux abattoirs : six parmi les quatorze éleveurs interrogés vendent tout ou partie de leurs volailles en vente directe. De plus, les éleveurs n’ont pas d’idée précise des débouchés des volailles vendues à l’abattoir, sauf évidemment pour la part de volailles qu’ils récupèrent éventuellement pour les vendre eux-mêmes. Nous allons voir maintenant les moyens de valoriser la qualité des volailles de l’Orléanais, sur les marchés ou sur internet.

1. La valorisation des volailles commercialisées ne porte pas sur l’ancrage au territoire