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Les travaux focalisés sur la féminisation des conseils d’ad ministration via les politiques de quotas

1.3 Que sait-on sur le lien entre diversité ou mixité et performance des entreprises

1.3.3 Les travaux focalisés sur la féminisation des conseils d’ad ministration via les politiques de quotas

Finalement, plusieurs travaux économiques se sont focalisés sur les variations exogènes de la mixité au sein des conseils d’administration générées par la mise en place de politiques de quotas. Les politiques de quotas concernent essentiel- lement la présence des femmes au sein des conseils d’administration ou de sur- veillance, avec l’idée que féminiser ces conseils devrait induire dans un second temps une féminisation des directions d’entreprise et permettre de limiter les in- égalités femmes/hommes au sein des entreprises dans leur ensemble. Ces politiques sont soutenues par la Commission européenne qui recommande la mise en place d’un quota de 30 % de femmes minimum parmi les conseils d’administration à l’ho- rizon 2015, et 40 % à l’horizon 2020 (European Commission, 2012). La première politique de quota en Europe a eu lieu en Norvège qui fait figure de pays pionnier en la matière, en ayant voté dès 2003 une loi obligeant la proportion de femmes au sein des conseils d’administration à dépasser 40 % à partir de 2008. Les premiers pays à avoir suivi cette exemple sont la France, l’Italie et la Belgique. En France, c’est la loi Zimmermann du 27 janvier 2011 qui prévoit que pour les entreprises cotées et celles de plus de 500 salariés et présentant un chiffre d’affaires ou un bilan d’au moins 50 millions d’euros, la proportion des membres du conseil d’admi- nistration ou de surveillance de chaque sexe ne peut pas être inférieure à 20 % à l’horizon 2014, puis à 40 % à l’horizon 2017.

La réforme norvégienne a eu un effet majeur sur la composition des conseils d’administration puisque la part des femmes y est passée de 8 % à plus de 40 %. Ahern et Dittmar (2012) et Matsa et Miller (2013) montrent qu’elle a induit une baisse de la performance économique et financière des entreprises concernées et confirment ainsi les résultats de Adams et Ferreira (2009). Une dernière étude plus récente (Dale-Olsen et al., 2013), mais fondée sur une méthodologie plus critiquée (Ferreira, 2010; Smith, 2014) trouve que les quotas n’ont pas eu d’effet, sauf pour les entreprises étant les moins performantes où l’effet aurait été positif.

Une explication possible aux effets plutôt négatifs observés suite à la politique de quotas norvégienne est que, compte tenu du nombre très faible de femmes occu-

Données et méthodes

pant un poste de direction ou un siège au sein d’un conseil d’administration avant la réforme, il ait fallu recruter des femmes encore inexpérimentées pour ce type de fonction. Ahern et Dittmar (2012) montrent ainsi que les entreprises affectées par les quotas ont effectivement recruté majoritairement des jeunes femmes avec un haut niveau de formation initiale, mais sans expérience aux postes de direction d’entreprise. Une autre explication est qu’elles prennent des décisions moins sus- ceptibles de maximiser la performance financière. Matsa et Miller (2013) montrent ainsi que les politiques d’emploi ont été largement affectées par l’augmentation de la proportion de femmes au sein des conseils d’administration induite par les quotas en Norvège. Les entreprises où les femmes sont plus nombreuses au sein des conseils d’administration licencient moins, et ont de ce fait un coût de la main d’oeuvre plus élevé. Une explication possible à cela est que les femmes se soucient davantage du sort de leurs salariés et des effets délétères du chômage. Sur la plu- part des autres aspects, en revanche, les décisions managériales des hommes et des femmes apparaissent similaires. Il faut enfin souligner que les études existantes ne sont pas suffisamment postérieures à la mise en place des quotas pour permettre d’en mesurer les effets à long-terme.

L’étude que nous présentons dans ce rapport cherche à contribuer aux littéra- tures en management et en économie i) en essayant d’identifier des effets causaux de la présence de femmes sur les performances des entreprises et pas seulement de simples corrélations, ii) en examinant séparément les effets de la présence de femmes dans l’ensemble des entreprises et au sein des seuls postes de direction et iii) en analysant l’impact de la mixité sur les performances non seulement écono- miques, mais aussi sociales des entreprises. Nous ne disposons pas en revanche de données sur la composition des conseils d’administration, et la question des effets de la présence de femmes au sein de ces conseils est donc de facto exclue de notre étude.

CHAPITRE

2

DONNÉES ET MÉTHODES

Pour évaluer l’impact de la féminisation sur les performances socio-économiques des entreprises, il est nécessaire de mobiliser de riches données statistiques dispo- sant à la fois d’informations sur la composition démographique des entreprises et d’indicateurs sur leurs performances. Nous commençons par présenter les sources de données utilisées pour l’étude (partie 2.1). Nous décrivons ensuite nos mesures de la féminisation des entreprises et montrons que les entreprises françaises ap- paraissent moins féminisées que leurs homologues britanniques (partie 2.2). Les principaux indicateurs de performance retenus pour l’étude sont détaillés dans la partie 2.3, puis le vaste ensemble de techniques économétriques mis en œuvre pour analyser le lien entre mixité professionnelle et performance des entreprises est dé- crit dans la partie 2.4. Nous nous attachons en particulier à préciser la méthodologie employée pour tenter d’appréhender l’effet causal de la mixité sur la performance des entreprises, et non de simples corrélations entre ces variables.

2.1

Données