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2. Revue de littérature

2.4 Travail du sol

Le travail du sol en perturbant l’équilibre et la structure physique du sol occasionne également des changements biologiques et chimiques du sol (N’Dayegamiye, 2007). Le travail conventionnel par labour est souvent associé à une incorporation des résidus de cultures, donc à une redistribution du C et du N organique dans le profil de sol. Il induit également un réchauffement plus rapide et une meilleure aération du sol en surface. Cet effet, peut d’une part relocaliser la biomasse microbienne dans le profil du sol mais également augmenter son activité, ce qui peut augmenter le potentiel de minéralisation de la matière organique, causant une augmentation de N sous forme disponible et qui peut se traduire par un meilleur prélèvement de l’azote à court terme. Cependant, en laissant les sols à nu, le labour peut augmenter les risques d’érosion du sol et le taux de minéralisation de la matière organique du sol et conséquemment, réduire les stocks de C et de N du sol. Les pratiques de conservation du sol comme le semis direct ou le travail réduit par chisel présentent des conditions moins propices à la minéralisation de la matière organique et sont souvent perçues comme étant favorables à l’augmentation du C et du N organique du sol, de la biomasse microbienne, bénéfique pour la structure et la qualité du sol en général (Karlen et al. 1994). Le type de travail de sol et sa fréquence peuvent donc avoir un effet considérable sur la fertilité du sol et sur sa qualité à long terme.

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2.4.1 Influences des conditions pédoclimatiques sur le travail du sol

L’effet du travail du sol sur la décomposition de la matière organique du sol et son impact sur les stocks de C et de N du sol diverge beaucoup dans la littérature scientifique et est fortement relié aux conditions pédoclimatiques spécifiques à chaque étude et à la profondeur du sol considérée. Plusieurs études rapportent des bénéfices d’un travail du sol réduit sur les stocks de C de sol en surface (Diekow et al. 2005a, b, Alvaró-Fuentes et al. 2012; Nath et Lal. 2017). Ceci peut être expliqué par une accumulation préférentielle des résidus de cultures en surface combinés à une absence de perturbation mécanique des sols. Ces conditions sont propices à de hauts niveaux de protection physique de la matière organique dans les agrégats du sol et à une augmentation du carbone organique des sols (Poirier et al. 2009).

En Iowa, Kaisi et al. (2005a) ont rapporté qu’à court terme le semis direct n’avait pas de bénéfice sur l’accumulation de C et N du sol comparé au travail réduit par chisel, pour cinq différents types de sols. Cependant, sur une période plus longue (sept ans), les teneurs moyennes en carbone organique et en azote organique de ces sols étaient de 13,6 % (5,2 t ha-1) et de 9,1 % (0,3 t ha-1) plus élevés sous semis direct que sous chisel pour la couche de surface 0-15 cm. Les auteurs ont ajouté que pour la couche 15-30 cm, il n’y avait aucune différence significative entre les traitements. Des effets similaires ont été observés en France et ont montré que le travail du sol avait un impact significatif sur les stocks de N du sol seulement pour la couche de surface 0-5 cm; des stocks de N de 0,90 t N ha-1, 0,98 t N ha-1 et de 1,08 t N ha-1 ont été rapportés pour un travail de sol conventionnel, un semis direct et un travail de sol réduit respectivement (Viaud et al. 2011). De plus, ils ont rapporté que suite à huit années de différents travaux du sol, les résultats montraient une redistribution de la matière organique dans le profil du sol selon le travail, mais ne présentaient pas d’impacts significatifs sur les stocks de matière organique du sol pour le profil entier (0-40 cm). Plusieurs études rapportent également que sous des conditions fraîches et humides, le travail du sol conventionnel entraine une relocalisation de la matière organique en profondeur (Angers et al. 1997; Poirier et al. 2009; Maillard et al. 2016). Des études réalisées au Québec ont montré que le semis direct et le travail réduit augmentaient les stocks de carbone du sol en surface alors que le labour causait une plus grande accumulation de carbone en profondeur. Par conséquent, lorsque le profil du sol en entier était considéré (0-60 et 0-50 cm), les différents types de travail du sol n’avaient pas d’impact significatif sur les stocks de carbone du sol (Poirier et al. 2009; Maillard et al. 2016).

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Dans une étude comparant le semis direct au travail du sol conventionnel sur le taux de minéralisation du N organique en Alberta, Soon et Clayton (2003) ont montré que le travail du sol entraîne une plus forte accumulation de nitrates que le semis direct, suggérant une minéralisation du N plus élevée dans les sols travaillés. Au contraire dans l’est du pays, Fuller et al. (2010) ont présenté des résultats qui montraient que le type de travail du sol, semis direct, travail réduit ou travail conventionnel, combiné à une rotation de cultures annuelles (maïs-soya-blé) n’avait pas d’effet significatif sur le lessivage des nitrates. Une étude récente comparant un semis direct au travail conventionnel combiné à une culture du maïs en Ohio rapporte des stocks de N totaux supérieurs pour le semis direct que pour le travail conventionnel de 46 % en surface (0-10 cm) et de 38 % supérieurs pour la couche de sol 10-20 cm (Nath et Lal. 2017). Cependant, les auteurs soulignent que l’apport de N sous forme d’effluents d’élevage pour le semis direct comparé à une fertilisation minérale pour le travail conventionnel a pu causer cette augmentation de N plus importante pour le semis direct.

2.4.2 Interactions entre les pratiques agricoles

Seulement quelques études se sont attardées aux interactions (effets combinés) de diverses pratiques agricoles. Certaines ont montré qu’il n’y avait pas d’interaction entre la source de nutriments (organique ou minérale) et les différents travaux du sol primaires (Viaud et al. 2011; Alvaró-Fuentes et al. 2012). Cependant, d’autres études ont souligné un lien important entre le type de cultures et les différents travaux de sol sur les stocks de C et de N du sol ainsi que sur la structure des sols (Bissonnette et al. 2001; Kaisi et al. 2005a; Munkholm et al. 2013; Sainju et al. 2017b). Maillard et al. (2016) ont rapporté un effet significatif de la rotation de cultures combiné au travail du sol sur la couche 0-10 cm du sol avec des stocks de carbone plus élevés sous un travail réduit (chisel) comparé à un travail du sol conventionnel (labour) combiné à une rotation de culture d’orge- prairies alors que le système de céréales continues ne présentait pas de différence significative entre les deux travaux de sol. Les auteurs soulignent que le travail du sol réduit effectué annuellement dans le système de céréales continues comparativement à tous les trois ans pour le système orge- prairies n’a pas eu d’impact positif sur les stocks de C en surface. Des effets similaires ont été observés en Iowa avec une plus grande accumulation de C et de N du sol pour un semis direct combiné à une prairie de graminées pérennes que pour un semis direct sous une rotation maïs-soya

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(Kaisi et al. 2005a). Ces interactions, susceptibles de survenir dans n’importe quel système de culture, doivent être documentées davantage.

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