• Aucun résultat trouvé

2.6.1

Etat des lieux en milieu diphasique

Le terme de transport turbulent du scalaire c'LuLi' qui apparaît dans l’équation de transport de la concentration (2.36) nécessite une modélisation. Dans une turbulence avec couplage inverse fort dû aux bulles, il n’y a pas, à notre connaissance d’expériences physiques ou numériques, qui permettent d’élucider les mécanismes de transport. En fait, il n’existe que quelques travaux essentiellement dans une turbulence induite par l’ascension d’un nuage de bulles sans turbulence préalable à l’injection des bulles.

De rares expériences abordent les mécanismes de mélange dans des écoulements à bulles. On peut noter que dans un écoulement uniforme en présence de très faibles taux de vide

% 2 . 0 ≅ G

α , Mareuge & Lance (1995) démontrent une efficacité de mélange remarquable générée par les bulles, ainsi qu’une anisotropie marquée du processus de mélange avec ce faible taux de vide. En effet, les auteurs montrent que le rapport entre la diffusion transversale et la diffusion longitudinale est de l’ordre de 2. Au sein d’un nuage de bulles et à grand nombre de Schmidt, cette dispersion résulte de plusieurs mécanismes dont on peut donner une description qualitative en suivant la description de White & Nepf (2003) pour un écoulement au travers d’un réseau des cylindres fixes. Au cours de son transport à travers le nuage des bulles, une molécule du scalaire va traverser des zones d’écoulements différents : le scalaire peut être capturé par des zones de recirculations instationnaires proches des interfaces, avant d’être largué ultérieurement ; ensuite, il est également transporté dans le champs des vitesses aléatoires qui comporte à la fois des sillages moyens et des fluctuations interstitielles éloignées des bulles. Selon leurs parcours différentiés au travers d’une distribution spatiale de perturbations contrastées, les molécules du traceur vont ainsi être dispersées.

De nouvelles expériences qui étudient le mélange et le transfert de masse dans une turbulence homogène, avec un taux de vide modéré 0.3≤αG ≤12% ont été menées à l’IMFT (Abbas, 2004). Ces expériences ont été réalisées sur le dispositif expérimental que nous avons utilisé durant ma thèse. Et j’ai formé M. Abbas à l’utilisation des différentes techniques de mesures nécessaires à son étude. L’écoulement étudié est homogène du point de vue hydrodynamique, mais un gradient de concentration en oxygène dissous dans l’eau s’y développe, en raison d’une injection particulière de deux populations de bulles de gaz distincts : de l’air dans une première moitié de l’écoulement homogène et de l’oxygène pur dans l’autre moitié. Du point de vue hydrodynamique, ces deux populations de bulles sont identiques (diamètres et vitesses relatives identiques), ainsi une différence de flux d’oxygène vers la phase liquide entre les deux populations est engendrée par la différence de pression partielle d’oxygène dans la phase gazeuse. Dans ces expériences, une base de données complète a été obtenue pour des fractions

volumiques de gaz 0.3≤αG ≤12%. Les distributions transversales de la concentration moyenne en oxygène dissous C(x,y) sont comparées à la solution d’un modèle analytique développé qui prend en compte la convection, le terme source interfacial et la diffusion par les mouvements induits par les bulles selon une loi de diffusion de type loi de Fick. La comparaison entre la solution analytique de ce modèle et les mesures expérimentales a permis l’identification des paramètres physiques du modèles tels que le coefficient de transfert kLa et le terme de diffusion transversale dû aux bulles D . Bt Malgré la dispersion des résultats, l’ordre de grandeur de D est toujours largement Bt supérieure à la diffusivité moléculaire (Dm,O2 =2.1⋅10-9m2s−2), et les résultats montrent une évolution non monotone de DBtG) qui croît jusqu’à αG ≈0.3%, puis décroît. A des faibles taux de vide, ces résultats sont compatibles avec ceux de Mareuge & Lance (1995).

On comprend aussi que la dispersion d’un scalaire dans un réseau de bulles dépende, non seulement du taux de vide mais aussi des nombres de Reynolds, de Weber et de Schmidt. Sato et al. (1981) avaient proposé, sur la base d’un raisonnement d’échelles, un coefficient de dispersion supposé isotrope et proportionnel au taux de vide :

B R t

B c U d

D = 1α , où c1 =0.6. Eames & Bush (1999) ont développé un modèle analytique en écoulement potentiel dilué qui prédit que le coefficient de dispersion longitudinale à travers un réseau aléatoire des bulles sphériques s’écrit : DBt =c2αCMURdB, avec

17 . 0

2 =

c et CM le coefficient de masse ajoutée. Mareuge & Lance (1995) ont proposé

aussi un modèle de dispersion longitudinale en écoulement potentiel. Ce modèle traduit la dispersion générée par le passage aléatoire de bulles qui sont supposées entraîner derrière elles une masse de fluide, équivalente à la masse ajoutée. Ce modèle est semblable au modèle de Eames & Bush (1999). Ces trois modèles ne permettent pas de retrouver les mesures expérimentales parce qu’ils ne prennent en compte que les effets potentiels. Pour les écoulements à bulles, on voit donc qu’une modélisation de la diffusion est certainement encore loin de portée. Mais on comprend aussi qu’interviendront dans la diffusion à la fois des échelles caractérisant la turbulence et des échelles caractéristiques du mouvement relatif des bulles. Ces échelles seront en compétition ou interagiront dans le mélange et le transfert de masse. Pour faire apparaître le poids relatif de ces échelles dans la modélisation du flux turbulent cL'u'Li, il faudrait adopter une démarche similaire à celle qui a permis à Chahed (1999) de modéliser la diffusion turbulente de k et ε (équations 2.104-2.106).

Dans ce travail, on a pris la diffusion du scalaire égale à la diffusion des grandeurs du modèle de turbulence qui s’écrit sous la forme :

(

t b S

)

sc

tc C k k

Une étape plus poussée consisterait à reprendre l’étude au second ordre des équations de transport des flux turbulents cL'u'Li et de la variance du scalaire cL'2 en écoulement diphasique. Mais il faut avouer qu’on a peu d’informations aujourd’hui sur les différents termes clefs des équations de c'Lu'Li et cL'2 pour mener une telle démarche à son terme. Cependant, pour commencer à réfléchir aux mécanismes de diffusion de façon plus poussée, et même si ce travail n’est pas dans l’axe principal de cette thèse, on a mené l’analyse en écoulement monophasique afin d’examiner comment à partir des équations d’ordre 2 on peut introduire les échelles naturelles de l’agitation turbulente dans la fermeture d’une diffusivité. On verra notamment qu’en écoulement monophasique, une telle démarche permet de voir en quoi la fermeture

c t t D σ ν

= n’est qu’une approximation, et de voir que des échelles issues des équations au second ordre peuvent apparaître de manière naturelle.

2.6.2

En milieu monophasique

Nous avons évoqué dans le paragraphe précèdent les difficultés de la modélisation de la diffusion turbulente de la concentration en écoulement diphasique. Cette difficulté réside dans le fait de l’apparition des nouvelles échelles de temps caractéristiques dans la modélisation des écoulements diphasiques. Ces échelles sont propres à ces écoulements diphasiques, ils dépendent des échelles de la turbulence en général mais dépendent également des échelles propres qui caractérisent la bulle et son mouvement relatif. Le but de ce paragraphe consiste à étudier le transport d’un scalaire passif en écoulement monophasique afin de comprendre comment apparaissent dans un modèle statistique les échelles du mouvement fluctuant qui contrôlent le transport. Cette étude peut permettre à terme l’extrapolation de la démarche aux écoulements diphasiques à bulles en intégrant les échelles de la turbulence spécifiques à ces écoulements.

Cette analyse qui a fait l’objet d’un travail personnel durant ma thèse, mais qui ne permet pas, à ce jour, d’amener des avancées sur la modélisation de la diffusion turbulente en écoulement à bulles est reportée en annexe.

Documents relatifs