• Aucun résultat trouvé

I.1 Étude de la Transition de Spin

I.2.2 Transition de phase à l’échelle nanométrique

La stabilité des phases des matériaux dépend fortement de leur taille : c’est une ten- dance universelle et inéluctable. En effet, nous avons vu que la diminution de la taille jusqu’à l’échelle du nanomètre a un impact direct sur les propriétés physiques et chi- miques des matériaux. Afin de mieux comprendre le comportement de la transition de spin des nano–objets, il est intéressant d’observer les études déjà réalisées sur d’autres transitions de phases à l’échelle nanométrique.

I.2.2.1 Transition Solide–Liquide : La Fusion

Figure I.13 – Point de fusion de nanoparticules d’or, mesuré par Buffat et Borel [116]. Les points noirs représentent la température de fusion des nanoparticules en fonction de leur taille, la ligne noire a été calculée par un modèle utilisant la loi de Young–Laplace.

La fusion des solides a déjà largement été étudiée dans le passé. Le processus de fusion s’initie à la surface des matériaux. Ceci est dû à l’augmentation du degrés de liberté des atomes de surface qui diminue la température de fusion de la surface [117]. La prédo- minance des surfaces à l’échelle nanométrique conduit logiquement à une modification

Chapitre I : Introduction à la Transition de spin et à la Nanothermodynamique 31

de la température de fusion des nanoparticules en fonction de leurs tailles. L’augmen- tation du rapport surface-sur-volume induit une chute de la température de fusion de la nanoparticule [116], un exemple est donné en figure I.13. Dans ce même exemple les auteurs modélisent cette chute en utilisant la loi de Young–Laplace, qui est proportion- nelle à l’inverse du rayon de la particule (1/R). Une approche plus générale faite avec les énergies d’interfaces à été réalisée par Couchman et Jesser [118]. D’autres modèles ont été développés afin d’améliorer la simulation du processus de fusion à l’échelle nanomé- trique. Letellier et al. ont construit une nouvelle thermodynamique axiomatique prenant en compte la non-extensivité des grandeurs macroscopiques [119], due par exemple, à un facteur de forme de la particule conduisant à un degré de non-extensivité m variable. Ainsi, la variation de la température de fusion ∆T entre la température de fusion du matériau massif Tm et de la phase non-extensive Tx vaut :

∆T = M

0mτ k

∆Hm

Mm−1 (I.41)

avec, M0 la masse molaire, M la masse du solide, ∆H

m l’enthalpie molaire du solide pur, τ associé aux énergies de surfaces, et k une constante caractérisant la non-extensivité du

système.

Dans le cas d’une nanoparticule sphérique ou cubique le modèle permet de retrouver la chute de la température de fusion en 1/R ou 1/a, avec R et a respectivement le rayon ou le côté de la particule. Le paramètre de non-extensivité m vaut dans ce cas 2/3 Par exemple la variation de la température de fusion d’une nanoparticule vaut :

∆T = TmV(Tx)

∆Hm

2γSL

R (I.42)

avec, V(Tx) le volume molaire d’un solide pur à la température Tx, et γ

SL l’énergie d’in-

terface entre une phase solide et une phase liquide.

I.2.2.2 Transition Solide–Solide a) Métal–isolant

Un large nombre d’oxydes de métaux de transition montre une transition de phase métal–isolant [121]. Parmi ces nombreux matériaux, l’oxyde de vanadium (VO2) possède

le plus grand nombre d’études sur l’effet de la réduction de taille sur sa transition de phase du premier ordre avec cycle d’hystérèse. À basse température le VO2 est un isolant

possédant une phase monoclinique, tandis qu’à haute température il possède une structure tétragonale et se comporte comme un métal. Lopes et al [120] ont utilisé la technique d’implantation ionique pour la réalisation de petites particules de VO2 dans une matrice

32 Chapitre I : Introduction à la Transition de spin et à la Nanothermodynamique

Figure I.14 – Images MET de particules de VO2, avec leurs courbes de transmission en

fonction de la température [120].

de ce matériau engendre une augmentation de l’hystérèse dans la courbe de transition thermique, comme le montre la figure I.14.

b) Transition de phase structurale

La transition de phase structurale est une des transitions de phase se rapprochant le plus du phénomène de transition de spin. En effet, le changement de volume associé à la transition engendre des déformations élastiques locales contribuant au phénomène d’hystérèse. Ces matériaux ont été très peu étudiés à très petite taille. Des études sous pression ont été réalisées sur des boîtes quantiques de CdSe [122]. Ce matériau passe d’une structure wurtzite à une structure wall avec l’augmentation de la pression. Comme le montrent respectivement les figures I.15 a) et b), la diminution de la taille a comme

a)

b)

Figure I.15 – a) Pression de transition en fonction de la taille des nanocristaux de CdSe. b) Cycle d’hystérèse en pression de la transition de phase structurale de CdSe.

Chapitre I : Introduction à la Transition de spin et à la Nanothermodynamique 33

impact une augmentation de la pression de transition accompagnée de l’augmentation du cycle d’hystérèse (nettement plus large que pour le matériau dans son état massif). Un plus large panel d’étude de transition de phase structurale est disponible dans la revue écrite par San-Miguel [123].

Lors de la diminution de la taille, les énergies de barrières de nucléation ont ten- dance à diminuer, et donc à diminuer le cycle d’hystérèse. Or dans le cas présent, une conservation importante des énergies de barrières semble perdurer. Une hypothèse serait le réarrangement des atomes et molécules de surfaces pendant la transition, donnant lieu à d’importantes énergies de surface, qui seraient à l’origine de l’augmentation des énergies de barrière du système.

I.2.2.3 Vers la transition de spin

Avant de développer un modèle pour la transition de spin d’une nanoparticule, il est indispensable de déterminer les effets possibles de réduction de taille qui pourraient avoir un impact sur cette transition de phase. Le mécanisme de cette transition dépend d’un couplage électrons–phonons fort. Le confinement de ces particules pourrait modifier le comportement de la transition de spin. Cependant, le nuage électronique est fortement localisé autour des molécules de transition de spin, et ne donne donc pas lieu à un confi- nement électronique. D’un autre côté le confinement des phonons pourrait lui être présent et venir modifier le comportement de la transition de spin des nano–objets. Un change- ment dans la densité phononique implique un changement dans l’entropie du système, qui rappelons-le est l’élément moteur d’une transition de spin thermo-induite. L’effet d’un rapport surface-sur-volume fort est aussi à prendre en compte dans la transition de spin à l’échelle nanométrique. La présence d’une surface apporte un coût énergétique au système. De plus, les différences entre les propriétés de surface et du matériau massif viennent am- plifier cet apport énergétique. Au delà de la stabilité des phases, la diminution de la taille peut avoir un impact sur la cinétique de la transition de spin. Les énergies de barrières, qui jouent un rôle non négligeable dans le phénomène de nucléation, possèdent une dé- pendance en taille du matériau. Par exemple, la surface, qui est un lieu favorable pour la nucléation, devient majoritaire à petite taille.

L’ensemble de ces comportements est difficile à prendre en compte en même temps. Une première idée simple pour modéliser la transition de spin d’une nanoparticule serait d’adapter le modèle thermodynamique de Slichter et Drickamer [33], et comme dans le cas de la fusion, de prendre en compte la présence d’une surface. En effet une telle approche permettrait de prendre en compte les variations de l’énergie interne et de l’entropie du système. Pour réaliser un tel modèle et comprendre l’impact sur la transition de spin, il est cependant nécessaire d’introduire la thermodynamique des nano–objets.

34 Chapitre I : Introduction à la Transition de spin et à la Nanothermodynamique