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Cette transformation implique une redéfinition radicale du jeu des acteurs

Dans la course que représente la transformation numérique, celui qui fait la course en tête c’est l’individu, c’est la personne. Les mots « numérique » ou « digital » viennent d’ailleurs de l’univers grand public. On ne parle plus des Technologies d’Information ou des NTIC dont l’acteur dominant était l’entreprise, mais du numérique dont l’acteur dominant est la personne.

LE RÔLE DÉTERMINANT DU GRAND PUBLIC DANS LES APPLICATIONS NUMÉRIQUES

Le rôle déterminant du grand public dans les applications numériques peut être notamment illustré par cet extrait de l’ouvrage de N. Colin

& H. Verdier* :

« Une application numérique est inachevée. Elle doit être inachevée : parce qu’elle s’inscrit dans un processus d’innovation jamais abouti. Dans l’économie numérique, l’innovation ne fait pas que s’accélérer :

elle n’aboutit jamais. L’innovation permanente est devenue l’état normal des entreprises dans l’économie numérique.

parce que sa principale qualité, si elle prétend créer de la valeur, consiste justement à ménager une place à la sensibilité et à la créativité de son utilisateur, à ne faire qu’une partie du chemin pour le laisser parcourir l’autre partie. Une application au design réussi parvient à s’immiscer dans l’intimité de ses utilisateurs précisément parce qu’inachevée ou incomplète, elle ménage une place pour leur singularité et leur sensibilité.

pour pouvoir évoluer dans le temps, changer de jour en jour. Un site Web, une application mobile ou un terminal peuvent faire une forte impression le jour de leur lancement. S’ils restent les mêmes, sans évolution notable, ils lasseront leurs utilisateurs, habitués aux hautes fréquences d’évolution des grandes applications du Web […] »

* Extrait de L’Âge de la multitude, Colin & Verdier, 2013 (empl. Kindle 1869 sur 5130).

En se mettant à plusieurs, les personnes courent encore plus vite. Les start-ups, leurs équipes souvent très jeunes, leurs entrepreneurs imaginatifs et créatifs tiennent un rôle détermi-nant, en initiant un certain nombre d’usages, de possibles et de nouveaux services. Même si la France n’a pas toujours été à la pointe de la création de start-ups innovantes, il s’est produit depuis les cinq dernières années, avec le Web 2.0 et le mobile notamment, un changement culturel – une révolution ? – principalement chez une partie de nos conci-toyens de moins de 40 ans. Il a été accompagné par un écosystème d’acteurs associatifs ou privés, eux aussi émergents, et bien sûr innovants (comme Silicon Sentier/NUMA ou les « hackerspaces ») – qui se sont développés hors du domaine politique ou institutionnel.

Toutes les organisations, toutes les institutions courent derrière. Plus ou moins vite. Ceux qui ont le plus de mal à s’adapter sont les anciennes puissances : les grandes entreprises traditionnelles qui, même si elles maîtrisent l’outil technologique parfaitement, peinent à s’ouvrir à l’intelligence collective et à créer effectivement de la valeur à partir des données ; par ailleurs, les administrations qui ont non seulement du mal à faire évoluer leur organisation mais qui éprouvent une difficulté croissante à faire reconnaître un intérêt général légitime.

LES ENTREPRISES NE SAISISSENT PAS TOUTES L’OPPORTUNITÉ DU NUMÉRIQUE À BRAS LE CORPS

Un programme de recherche mené par le MIT, et soutenu par Capgemini Consulting*, a décrypté les règles du succès des entreprises qui ont fait du numérique un axe prioritaire de leur transformation. Deux dimensions sont retenues pour mesurer la maturité numérique des organisations : L’intensité numérique, « le quoi » qui caractérise les investissements pour améliorer l’expérience client, les fonctions de production et les modèles d’affaires ; L’intensité de transformation numérique, « le comment », qui caractérise les moyens humains, managériaux et organisationnels qui accompagnent le changement.

Ce programme de recherche fait apparaitre que la majorité des entre-prises ne saisit pas à bras le corps la transformation numérique et se réfugie dans une certaine peur de l’inconnu : elles sont 53% à ne pas voir le numérique comme une priorité immédiate et 52% à déclarer ignorer ce que le numérique implique pour leur organisation et leur métier.

Sur ces deux axes, les entreprises sont classées en quatre catégories : LES BEGINNERS (65%)

Ces entreprises ont adopté l’usage des e-mails, ont un site internet et utilisent une variété importante de logiciels, mais elles sont lentes et sceptiques quant à une adoption plus avancée des outils numériques tels que les réseaux sociaux, les applications mobiles, ou les outils de Big Data.

On retrouve notamment dans cette catégorie l’industrie pharmaceutique, dont la culture du secret et le poids des réglementations freinent les innovations numériques, et aussi l’industrie lourde, traditionnellement

* « Embracing Digital Technology : a new strategic imperative » MIT et Capgemini Consulting, 2013

focalisée sur des enjeux d’efficacité opérationnelle et peu encline à considérer le numérique comme un levier d’amélioration de la relation avec les clients finaux.

LES CONSERVATIVES (14%) Ces entreprises ont délibérément choisi de ne pas faire du numérique une priorité stratégique, bien qu’elles aient souvent une gouvernance claire sur l’adoption et la diffusion des nouvelles technologies dans leur entreprise. Les secteurs de l’assurance, de l’énergie et des services à l'environnement se retrouvent dans

cette catégorie.

LES FASHIONISTAS (6%) Ces entreprises sont promptes à adopter les innovations numériques, mais manquent de coordination, de gouvernance et de cohérence d’ensemble pour transformer

globalement leur métier. On y retrouve les industries des télécommunications, du tourisme et du transport, dont les modèles de management et d’organisation, malgré les nombreuses initiatives numériques, tardent à se transformer et à se décloisonner.

LES DIGIRATI (15%)

Les dirigeants de ces entreprises partagent une vision très forte des opportunités du numérique, et investissent massivement sur le sujet. Ils croient profondément au numérique et le voient comme un levier de compétitivité, d’amélio-ration des conditions de travail, et d’innovation. On retrouve dans cette catégorie la banque, la grande distribution et les entreprises de haute technologie.

En croisant un indicateur de maturité numérique avec des indicateurs financiers, l’étude démontre que les digirati obtiennent des résultats financiers bien meilleurs que leurs concurrents : par rapport à la moyenne de leur secteur, ils génèrent 6% de chiffre d’affaire de plus, ont une rentabilité supérieure de 26%,

et une valorisation boursière supérieure de 12%. Les résultats sont sans appel : les entreprises fashionistas accroissent leur chiffre d’affaire mais n’augmentent pas leur rentabilité. Pour gagner en rentabilité, une entreprise doit investir sur le « quoi » (intensité numérique), et, surtout, sur le

« comment » (intensité de transformation numérique).

PERFORMANCE DES ENTREPRISES SELON LEUR MATURITÉ NUMÉRIQUE

Intensité numérique

BEGINNERS FASHIONISTAS

CONSERVATIVES DIGIRATI

+6%

+7%

+9%

-10%

-7%

Intensité de transformation du management

-11% -12% +9% +26% +12%

-4% -24%

Création de revenus Profitabilité Valorisation boursière

À des degrés divers, plusieurs acteurs courent vite, même s‘ils courent eux aussi moins vite que les personnes : les start-ups technologiques, bien sûr ; les PME industrielles et de services qui savent voir dans le numérique une source d’opportunités ; les organisations sans but lucratif, de type fondation, opérant dans les champs du libre et du coopératif (cf. Mozilla ou Wikipédia) ; et bien sûr les célèbres GAFA : Google, Apple, Facebook, Amazon.

Le paysage de cette course n’est pas spécifiquement français. La réalité de la disruption digitale est mondiale.

Source : Capgemini Consulting - MIT

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La transformation numérique des secteurs économiques traditionnels s’opère à travers