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PARTIE I - REVUE DE LITTERATURE

CHAPITRE 1 Transformation digitale de l’entreprise et business model

La digitalisation est assimilable à un processus historique marqué par de multiples évolutions invisibles. De lentes évolutions ont bouleversé les usages du quotidien jusqu’à engendrer des révolutions majeures dans la pratique des affaires. Une révolution industrielle silencieuse a contraint les entreprises à de profondes transformations organisationnelles.

La digitalisation est caractérisée par la combinaison de trois facteurs : tout d’abord, l’automatisation et l’industrialisation des processus artisanaux, ensuite la dématérialisation des données et enfin l’exploitation des données. Ces phénomènes contraignent l’entreprise à se réorganiser afin d’adapter son modèle d’affaires traditionnel. Ce dernier évolue vers une logique de plateforme communautaire qui contribue à désintermédier les différents acteurs initialement liés au modèle d’affaires traditionnel.

La digitalisation est donc une transformation en profondeur des organisations. Elle est initiée par l’implémentation des technologies numériques qui sont arrivées aujourd’hui à maturité. La transformation digitale des entreprises se déploie à travers des changements opérationnels vécus au quotidien par les opérateurs. Les changements se matérialisent par l’industrialisation et l’automatisation des processus humains à faible valeur ajoutée. Des changements entrepreneuriaux d’ordre plus stratégique sont également identifiés par la vision entrepreneuriale. Ces changements imposent la réécriture du modèle d’affaires de l’entreprise. L’entrepreneur est alors identifié comme l’agent qui initie le changement.

Les différents changements organisationnels et technologiques contribuent à transformer l’entreprise et à mettre en œuvre un business model digital.

Le chapitre 1 traite de la digitalisation des organisations et de l’émergence d’un business model digital.

La section 1 explique pourquoi la digitalisation est assimilable à un processus historique en faisant un parallèle avec les crises et les révolutions industrielles passées. Ensuite, nous cherchons à définir et à caractériser le phénomène de la digitalisation. Il est caractérisé par d’invisibles évolutions qui conduisent à une nouvelle révolution industrielle. Cette révolution 4.0 impacte les entreprises en leur imposant une transformation organisationnelle profonde.

Finalement, la digitalisation se caractérise par quatre phénomènes identifiés par la non-localisation des activités, par une masse de données valorisées au sein d’une plateforme logicielle communautaire (Charrié et Janin, 2015, p. 67). De la transformation, il apparaît un effet réseau contingent de l’économie de plateforme qui conduit à une ré-intermédiation digitale débouchant sur un nouveau modèle d’affaires.

La section 2 décrit comment la transformation digitale conduit à un changement organisationnel affectant le modèle d’affaires traditionnel. Le changement organisationnel sera détaillé et démontre qu’il agit à deux niveaux. Le premier niveau est attaché aux processus opérationnels. Il doit être conduit par des changements dans le quotidien, permettant l’apprentissage et l’assimilation de la transformation par les différents acteurs. Le deuxième niveau est, quant à lui, plus stratégique car il est conduit par l’entrepreneur lui-même dans une perspective de réorganisation ou de transformation du modèle d’affaires historique.

La digitalisation de l’entreprise vise donc à déployer un business model intégrant une dynamique entrepreneuriale permettant d’affronter la complexité et l’incertitude des environnements économiques actuels.

Selon Peña-Vinces et ses co-auteurs (2010), le développement rapide des technologies de l'information et leur capacité à capitaliser les opportunités d’affaires, sont devenus cruciaux pour la survie à long terme des entreprises. Par exemple, l’éditeur d'impression traditionnel Pearson a subi une transformation digitale réussie grâce aux technologies informatiques. « La

société Pearson capte plus de la moitié de ses revenus des produits et services numériques »

(Kyung, Hwang, Gregor, 2016, p. 3 et Booker, 2013, p. 1). D’autres entreprises n'ont cependant pas réussi à s'adapter aux différentes évolutions numériques et ont ainsi disparu du monde des affaires. L’expérience de Kodak dans le secteur de la photographie en est un exemple marquant. Selon Goldsborough (2013) « Certaines entreprises ont tenté de combler leur retard digital en

luttant d’une manière traditionnelle, avec des bénéfices s’amenuisant d’année en année pour finalement disparaître » (pp. 12-13). Ces dernières décennies ont mis en évidence le concept

de transformation organisationnelle informatique. Ce phénomène a attiré considérablement

PARTIE I - REVUE DE LITTERATURE

CHAPITRE 1 – TRANSFORMATION DIGITALE DE L’ENTREPRISE ET BUSINESS MODEL

SECTION 1 – LA DIGITALISATION DES ORGANISATIONS

• 1.1. Processus historique

• 1.2. Digitalisation des organisations : définition et caractérisation

SECTION 2 – LA TRANSFORMATION DIGITALE : MODELES DE CHANGEMENT ET MODELES D’AFFAIRES

• 2.1. Avec quel modèle conduire la transformation digitale • 2.2. La notion de Business Model

l'attention des chercheurs en système d'information (Lucas et al., 2013 pp. 371-382 ; Ranganathan et al., 2004, pp 151-160). Pour Scott Morton (1991) « les organisations devraient

accepter des transformations fondamentales pour une implémentation informatique réussie, ce que nous nommons aujourd'hui digitalisation » (pp. 245-277).

Comme le précise Godé-Sanchez (2008), les enjeux associés aux systèmes d’information « ne représentent plus seulement des moyens de coordonner les activités mais

deviennent des leviers importants du changement organisationnel » (p. 8). Les technologies

informatiques ne sont actuellement plus attendues comme des solutions miracles (Markus et Benjamin, 1997) qui permettraient à elles seules de répondre aux objectifs de performance par leur déploiement. Pour réussir « IT-enabled OT », les organisations doivent tenir compte d'une variété d'éléments non techniques tels que la structure, le leadership et la culture (Markus, 2004), impliquant une dynamique de transformation. Besson et Rowe (2012) ont effectué une analyse approfondie de la littérature sur la transformation organisationnelle (OT), et démontrent qu’un manque de clarté théorique et d'orientation dans ce domaine de recherche subsiste. Une partie des réponses pourrait donc se trouver dans l’articulation d’un business model digitalisé pour l’organisation.

Selon Dudézert (2018) « La transformation digitale est donc vécue comme un processus

global de transformation de l’entreprise qui la conduit à revoir ses modalités de collaboration avec les clients, ses processus de travail internes et parfois même son business model. Ces transformations sont présentées comme nécessaires pour s’adapter à des évolutions externes de l’entreprise » (p. 16). Babinet (2017) précise « Il ne s’agit rien de moins que d’une révolution anthropologique, d’un changement de civilisation » (p. 1). Par analogie avec les

précédentes révolutions industrielles, la digitalisation semble suivre le même processus historique, matérialisé par le phénomène de « main invisible » décrit par Smith (1776). Ces propos historiques sont confirmés par Reclus (1898) selon lequel une succession d’évolutions quasi invisibles conduit à des révolutions clairement identifiables dans la société. Ces révolutions technologiques notables s’assimilent à un phénomène produisant des changements dans le quotidien des organisations, qu’il est nécessaire d’accompagner pour permettre leur adaptation et réorganisation. Zuboff (2010) les caractérise comme « des mutations de la

deuxième vague du changement technologique et des changements socio-économiques connexes » (p. 8).

Une succession d’évolutions et de révolutions s’achève par un processus de transformation en complète rupture avec les phénomènes économiques connus. L’accompagnement ne vise alors plus une simple adaptation mais une remise à plat du modèle

d’affaires traditionnel, c’est une profonde transformation digitale. Dans une digitalisation, il est nécessaire de lever les différentes formes d’inertie afin d’accepter de nouveaux usages, de nouveaux modèles d’affaires, de nouvelles formes d’organisations qui évoluent dans de nouveaux écosystèmes.

SECTION 1 – La digitalisation des organisations

Selon Herrendorf, Rogerson, Valentinyi (2013), « la transformation économique

structurelle, reflétée dans l'importance relative croissante de la fabrication, est un fait stylisé de développement économique bien connu » (p. 5) (voir également Greenan, L’Horty, Rallet, 2000). Initialement, les économies sont dominées par le secteur agricole (traditionnel), cohabitant avec un petit secteur manufacturier (industriel). W. Arthur Lewis a fourni un modèle de cette dualité (Lewis, 1954). Selon Kirkpatrick et Barrientos (2004), ce modèle est actuellement « considéré comme l'une des contributions les plus importantes dans

l'établissement de l'économie du développement » (p. 2).

Dans le modèle de Lewis (1954), il existe une main-d'œuvre excédentaire dans le secteur traditionnel, ce qui fait qu'elle n'est pas rémunérée en fonction de sa productivité marginale. En raison de l'accumulation de capital, du progrès technologique et de la productivité dans le secteur moderne, on constate des mouvements de main-d'œuvre excédentaire du secteur traditionnel vers le secteur moderne, avec cette fois-ci une rémunération en fonction de la productivité marginale. Dans le secteur moderne, les entreprises peuvent avoir des excédents qu’elles réinvestissent dans une productivité accrue, améliorant ainsi le capital. Ce processus se poursuivra jusqu'à ce que le surplus de main-d'œuvre ait été transféré au secteur moderne. Les processus de digitalisation de l’économie peuvent être rapprochés de ceux connus antérieurement sous la révolution industrielle. La littérature scientifique permet de considérer les différentes révolutions : agraires, industrielles et aujourd’hui numériques comme des révolutions industrielles en lien avec les techniques. Elles produisent visiblement les mêmes effets. Des pans entiers des anciennes économies sont détruits pour ensuite requalifier les emplois perdus en une nouvelle opportunité de main d’œuvre. Le nouvel environnement entrepreneurial réintègre les emplois obsolètes sous des formes différentes. Les emplois traditionnels sont détruits, les entrepreneurs imaginent des modèles d’affaires nouveaux.

L’émergence et le déploiement d’internet à partir des années 1990 a marqué le démarrage d’une nouvelle ère de transformation du système de production communément appelé « numérisation de l’économie ». Les anglo-saxons préfèrent utiliser le terme « digitalisation ». Qu’est ce qui a contribué à de telles transformations ? Pour Gordon (2012), ce sont les percées technologiques du XXème siècle, telles que l'électrification, l'invention de l'automobile et la croissance rapide créées par des semi-conducteurs ainsi que de vastes possibilités d'emplois dans des métiers et des industries entièrement nouvelles. Lemoine (2014) le confirme avec la citation suivante « Un économiste comme Robert Gordon affirme que la

du XXème siècle et que les économies développées sont condamnées à revenir à des taux de croissance tendanciels de 0,2% par an » (p. 12). Que la révolution numérique soit aujourd’hui capable de répéter ces événements fait aujourd’hui l'objet d'un intense débat.

Les systèmes d’information et Internet constituent donc le point de départ de la révolution digitale. Des outils technologiques mobiles et interconnectés à notre quotidien sont apparus dans les années 2000. Ces artefacts numériques ont transformé les usages des consommateurs et contribué à la vulgarisation des pratiques digitales. Un artefact numérique est défini ici comme un composant numérique, une application ou un contenu multimédia faisant partie d'un nouveau produit (ou service) et offrant une fonctionnalité ou une valeur spécifique à l’utilisateur final (Ekbia, 2009 ; Kallinikos et al., 2013). Selon Lusch et Nambisan (2015) « Le

découplage des informations de la forme physique ou du dispositif connexe a conduit à la prolifération progressive d’artefacts digitaux ou des composants dans une large gamme de produits et de services » (p. 157). Ces artefacts digitaux peuvent être soit des logiciels, soit des

matériels autonomes composant d’un dispositif physique ou, comme il est de plus en plus courant, une partie d'un écosystème plus large des offres en lien avec une plate-forme numérique.

Différents périphériques numériques et mobiles (tablettes, smartphones, outils connectés) ont favorisé la circulation instantanée d’informations. Les plateformes numériques initialement utilisées en interne dans les entreprises – les « Intranets » des années 90 – se sont ouvertes aujourd’hui aux différents partenaires commerciaux afin d’accélérer les traitements et de proposer aux clients de nouveaux modèles d’affaires. Selon Pénard et Rallet (2014) « Ce

changement radical a déplacé le focus des infrastructures vers les services d’une part et d’une organisation sectorielle des activités vers des écosystèmes chevauchant les secteurs et structurés autour de plates-formes, d’autre part » (p. 73). Si initialement l’impact des

technologies informatiques était limité à certains secteurs et métiers, la fin des années 2000 a favorisé la diffusion de ces technologies à l’ensemble des activités productives des entreprises et plus globalement à l’ensemble de la société en modifiant les comportements et les usages.

« Le thème de la convergence, fort en vogue au tournant du siècle, a été une manière transitoire de désigner cette évolution. Par convergence, on entendait l’entrelacement de plus en plus étroit de trois secteurs (informatique, télécoms, audiovisuel) sous l’effet de la numérisation (…) C’est bien d’une « révolution numérique » au sens de révolution industrielle qu’il s’agit »

(Rallet et Pénard, 2014, p. 74 ; voir également Greenan, l’Horty, 2000).

La section 1 décrit en quoi la digitalisation est assimilable à un processus historique. Nous verrons ensuite pourquoi Rifkin qualifie de 3ème révolution industrielle le phénomène de

digitalisation. Pour Kohler et Weisz (2016) « L’industrie 4.0 est la réponse allemande à la menace que fait peser l’irruption du numérique sur les chaînes de valeur industrielles. Il s’agit d’une ambition technologique consistant à produire des séries de taille 1 à des coûts équivalents à ceux de la production de masse en introduisant des systèmes de production cyber-physiques » (p. 51). Préalablement identifiée dans l’économie Allemande, l’industrie 4.0 impacte les entreprises, leur imposant une transformation organisationnelle profonde.

1.1. Processus historique

La digitalisation est un processus de transformation multiple : « Depuis toujours inscrite

dans les évolutions de la technicité humaine, la machine matérialise une activité, exécute une consigne. Nous nous trouvons d'abord dans le domaine de l'extériorisation et du détachement de la motricité puis dans celui de la force et de la mémoire. N'oublions pas de préciser tout de suite que la machine n’est pas un simple instrument, mais un automate (un instrument automatisé). Elle relève non seulement de l’adhérence économique entre forme et fonction, mais elle est également programmée pour accomplir une série de conduites, c’est-à-dire pour avoir des comportements ». (Marchetti, Quinz, 2013, source consultée le 15/02/2018).

Jusque dans les années 1970, le terme automatisation se confondait avec celui de mécanisation : il renvoyait à des technologies permettant l’exécution mécanique de certaines tâches par des machines liées essentiellement à la fabrication de produits industriels. Aujourd'hui, l’automatisation ne se limite pas à l’opération (opérationnalisation des différents processus), mais s’étend, pour les machines les plus sophistiquées, à la surveillance, c’est-à-dire au contrôle sur l’opération. L’approche de Norbert Wiener (1948) est à ce propos visionnaire pour l’époque, expliquant dans l’ouvrage Cybernetic « qu’à la différence des

automates mécaniques traditionnels, les nouvelles machines informatiques, c’est-à-dire les ordinateurs, ont des organes sensoriels » : ils ne sont plus des systèmes clos, mais sont au contraire dotés de membranes sensibles qui leur permettent de recevoir des informations de l’extérieur et d’instaurer ainsi un dialogue avec le sujet humain et l’environnement. Ces membranes, que l'on peut considérer comme des organes de sens ouverts sur l’extérieur, sont appelées interfaces » (p. 52)

Si le développement et le déploiement de ces interfaces semblent rapides, il est en fait le fruit d’un long processus d’évolution des techniques et des infrastructures informatiques. La technique industrielle a progressé en capacité et en compétence grâce à une convergence numérique qui a transformé la technique en technologie. L’industrie mécanique s’est transformée alors en industrie robotique. La robotique et la télématique ont contribué à cette

époque à des avancées majeures dans les entreprises. « En permettant l’intégration de l’informatique à l’ensemble des moyens et procédés de production, l’apparition de la micro‐ électronique dans les années 1970 associée depuis à une croissance exponentielle des capacités de calcul est à l’origine d’un bond technique très important en matière d’automatisation de la fabrication de produit. Cette technologie a en effet permis l’émergence des machines à commande numérique qui permettent le pilotage d’une machine‐outil à partir d’un ordinateur. La convergence entre les technologies de la mécanique et les technologies informatiques a par ailleurs permis le développement à partir du milieu des années 1980 de robots industriels munis de capteurs et d’actionneurs, et contrôlés par des programmes exécutés par des ordinateurs »

(Audition de Raja Chatila, directeur de recherche au CNRS, directeur de l’Institut des systèmes intelligents et de robotique (ISIR), devant le COE le 13 septembre 2016).

Aujourd’hui, la digitalisation transforme le modèle d’affaires traditionnel des industries. Selon Kohler et Weisz (2016), l’industrie 4.0 devra relever des défis bien plus importants que ceux de la simple production en série : « Au départ, l’industrie 4.0 peut être comprise comme une ambition purement technologique : produire des séries de taille unique à des coûts comparables à ceux de la production de masse en introduisant des systèmes de production cyber-physiques dans l’usine. (…) Depuis 2015, elle a réorienté cette révolution numérique vers le développement de nouveaux modèles d’affaires autour de l’Internet des services exploitant les données générées par les équipements et par les clients » (p. 51). Ces processus

sont gérés à l’aide d’interfaces hommes machines ou de plateformes collaboratives où les offres et les demandes se rencontrent et évoluent en fonction des demandes. Ici, le système est plus dynamique (Warnier, Lecoq, Demil, 2016, p. 68 ; voir aussi Curchod, 2008, p. 26) que dans les précédents modèles d’affaires dans lesquels des productions en séries étaient programmées puis écoulées au fur et à mesure des demandes. Le défi d’aujourd’hui est de produire un article unique à un prix de revient de série (Rifkin, 2014, pp. 110-111 ; voir aussi Kohler, Weisz, 2016, p. 51).

Les interfaces homme-machine communément dénommée WIMP (Windows, Icons, Menus and Pointers) ont été initialement développées par la société Xerox. Par la suite, elles ont été commercialisées avec succès par Apple puis par Microsoft. Des entreprises, telle que Microsoft fondée en 1975, ont perçu très tôt l’intérêt de la notion d’interface homme-machine qui consistait à rendre les ordinateurs utilisables par le plus grand nombre. Le business Model de Microsoft a été construit sur le modèle des WIMP. Mc Afee (2006, pp. 4-5) assimile l’interface à un paradigme technologique, qui est généralement articulé autour d’un ensemble de composants. Le rôle des interfaces est de traduire des commandes élémentaires en effets, en

ordres et en actions. L’apparition des interfaces hommes machines a considérablement simplifié ce dialogue pour l’adapter au plus proche du langage humain.

La notion de périphérique comme « la souris » et les écrans tactiles ont contribué à rendre l’ordinateur plus intuitif et utilisable par un plus grand nombre d’individus. Les langages se sont également adaptés et les clics ou les glissements ont remplacé la saisie de codes hermétiques rendant plus disponible et aisé l’utilisation de ces systèmes techniques. Avant cette époque, les ordinateurs étaient initialement réservés à des techniciens et à des ingénieurs qui, à l'aide de langages spécifiques, traduisaient des instructions en lignes de commandes. Ces tâches complexes demandent une formation et un apprentissage parfois laborieux. Les interfaces ont vulgarisé et facilité l’utilisation des ordinateurs car elles ont permis de transférer progressivement à des utilisateurs « bureautiques » (ne maîtrisant pas nécessairement un langage pour communiquer avec la machine) des processus initialement réservés à des techniciens.

Dans sa thèse, Gille (1978) propose d’étudier au fil des différentes révolutions industrielles la succession des systèmes techniques qu’il définit comme l’ensemble des cohérences qui se tissent à une époque donnée entre les différentes technologies et qui constituent un stade durable de l’évolution des techniques. A ce niveau, l'adoption d'un système technique entraîne donc nécessairement celle d'un système social correspondant afin que les cohérences soient maintenues (Freyssenet, 1991). Gille constate que l’entrepreneur à tendance à résister aux changements de systèmes et que toute époque a été caractérisée par une convergence entre des techniques fondamentales. Tout ceci contribue ainsi à faire émerger une économie spécifique à une époque donnée. Aujourd’hui (encore), la digitalisation de l’économie succède à celle de l’électronique-informatique. Les limites structurelles apparaissent généralement à la fin de la période d'évolution du système : ce moment s’identifie soit par l’incapacité d'accroître ou de traiter les volumes, soit par l’impossibilité de contraindre les coûts ou de diversifier les produits.

Au cours du XXème siècle, les entreprises vivent une suite d’évolutions organisationnelles considérables qui ont touché non seulement l’atelier, mais aussi le bureau. La bureaucratisation et la tertiarisation évoquent un phénomène moins connu que l’industrialisation, mais il a découlé directement de la révolution industrielle : certains historiens anglo-saxons utilisent le terme « d'administrative révolution » (Gardey, 2001). Breton (2006) affirme que les technologies de l’information ne sont pas un domaine comme les autres : « elles peuvent être regardées comme une spécialisation à l’intérieur du monde des techniques : elles sont la face des techniques qui est tournée vers le social, l’instance des

techniques chargées de prendre en compte une pensée du social, en prenant pour objet cette entité qu’est l’information, parfaite interface de ce point de vue, parce qu’entité d’un côté

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