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Chapitre 2. Les serres et leur fonctionnement écophysiologique

2.4 Processus spécifiques associés au végétal

2.4.1 Transfert de masse sol-plante

L’appréhension des transferts sol-plante passe par la quantification d’un certain

nombre de grandeurs permettant de caractériser le substrat: potentiel hydrique, courbe de

rétention d’eau (lien entre potentiel hydrique et teneur en eau), conductivité hydraulique

qui sont présentées dans ce paragraphe. L’impact spécifique de la présence du végétal

(des racines en particulier) sur les propriétés du substrat est également analysé.

2.4.1.1 Potentiel hydrique

D’un point du vue thermodynamique le potentiel hydrique est défini comme le

travail qu’il faudrait fournir à une unité de masse d’eau située en un point du système

pour la faire passer de l’état de l’eau liée à un état de référence, correspondant à celui de

l’eau libre à la même température et pression atmosphérique. Le potentiel hydrique est

toujours donné par une valeur négative, car il faut fournir de l’énergie au système pour

extraire de l’eau. Le travail qu’il faut fournir s’exprime en J.m-3 i.e. N.m-2 ce qui

équivaut à une pression exprimée en Pa ou d’autres unités de pression (Guyot, 1999). Le

potentiel hydrique est utilisé comme variable pour quantifier l’état hydrique du sol (i.e.

potentiel hydrique du sol) ou pour définir l’état hydrique de feuille (i.e. potentiel

hydrique de la feuille). Les potentiels hydriques du sol et des feuilles sont les deux

grandeurs les plus utilisées pour donner une idée générale sur l’état hydrique du sol ou

des plantes. Il est aussi possible de définir l’état hydrique des racines ou de la plante avec

le potentiel hydrique des racines ou de la plante, respectivement.

2.4.1.2 Potentiel hydrique du sol

Le potentiel hydrique du sol exprime l’état énergétique de l’eau dans les pores du

sol. Il était utilisé initialement pour définir le déplacement de l’eau entre différents points

du sol ou bien pour estimer le flux d’eau (i.e. le flux d’eau qui est dû au gradient de

potentiel hydrique entre deux points différents du sol). Le potentiel hydrique dans les

pores du sol varie énormément, pouvant avoir des valeurs positives dans le cas d’un sol

saturé en eau ou des valeurs très négatives selon le degré de restriction hydrique dans le

sol sec (Livingston and Topp, 1993). Le potentiel du sol non saturé est la somme de deux

potentiels : le potentiel matriciel et le potentiel osmotique (Eamus, 2006). Le potentiel

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matriciel représente les forces exercées par le sol et peut être estimé soit directement par

la mesure de la pression de l’eau dans le sol (e.g. via un tensiomètre), soit indirectement

via la mesure d’une propriété liée au potentiel matriciel du sol (e.g. humidité du sol). Le

potentiel osmotique indique la quantité de solutés dissous dans le sol, il peut être évalué

indirectement à partir de la mesure d’une propriété liée au potentiel osmotique du sol

(e.g. conductivité électrique).

2.4.1.3 Potentiel hydrique des feuilles

Cette grandeur définit l’état de l’eau dans la feuille, en effet lorsque le potentiel

devient de plus en plus négatif, la teneur en eau de la feuille diminue. Une mesure de

cette grandeur est souvent utilisée afin d’avoir une valeur de référence en confort

hydrique et ainsi de prévoir l’apparition de la contrainte hydrique chez la plante. À

l’aube, quand la transpiration est presque négligeable, il n’y a pas de circulation de l’eau.

Le potentiel de feuille est alors à sa valeur maximale et est en équilibre avec le potentiel

du sol, ce potentiel est connu sous le nom du potentiel de base (Keane, 2000). Il est

considéré comme étant un bon indicateur de l’équilibre d’eau dans le continuum

sol-plante. Le potentiel total de feuille est la somme du potentiel osmotique, du potentiel de

turgescence et du potentiel de gravité (Eamus, 2006). Le potentiel osmotique est dû aux

solutés dissous dans les tissus de la feuille. Notamment, une augmentation de la

concentration des sels dans les cellules de la feuille provoque une diminution de potentiel

osmotique (Eamus, 2006; Keane, 2000). Le potentiel de turgescence est engendré par les

pressions de turgescences exercées par les cellules de la feuille. Le potentiel de gravité

est provoqué par les forces de gravité.

2.4.1.4 Courbe de rétention en eau

Les fonctions physiques les plus importantes d’un substrat sont, outre la capacité

d’ancrage racinaire, les capacités à fournir suffisamment d'eau et d'oxygène à la plante,

dans des proportions compatibles (risque d’effet d’anoxie ou d’hypoxie en cas d’excès

d’eau ou risque de flétrissement en cas de manque d’eau). L’établissement de courbes de

rétention en eau se base sur la mesure de la distribution des volumes d’eau et d’air dans

les porosités du substrat pour différents niveaux de potentiels hydriques matriciels.

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À partir de ces courbes de rétention en eau (Fig. 13), il est possible de définir les

caractéristiques physiques du matériau:

Figure 13 : Clé de lecture d’une courbe de rétention en eau d’un substrat horticole

(source : https://wiki.aurea.eu/index.php/Propri%C3%A9t%C3%A9s_physiques_des_substrats).

La porosité totale (0 kPa) correspond au volume de l’ensemble des vides

disponibles pour l’eau ou pour l’air par rapport au volume total du substrat.

L’aération du substrat (-1 kPa) ou la capacité en air, fait référence à la porosité la

plus grossière où l’eau est très peu ou pas retenue, ce volume est donc rapidement occupé

par de l’air.

La capacité en bac (équivalente à la notion de capacité au champ pour un sol)

représente la teneur en eau moyenne maximale que peut retenir un substrat contenu dans

un « bac de culture » après saturation complète et ressuyage libre (White, 1964; Rivière,

1980; Lemaire, 2003). Bien que la répartition de l’eau et donc la valeur du potentiel de

l’eau ne soient pas homogènes en tout point dans le pot, on considère généralement que

la capacité en bac correspond à une teneur en eau pour un potentiel de l’eau égal à -1

kPa. Cette valeur de potentiel correspond aux conditions optimales de culture en culture

hors-sol en termes de quantité et de flux hydriques depuis le substrat vers la plante

(Rivière et al., 1991).

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La disponibilité en eau correspond à l’eau disponible dans la porosité du substrat

pour des forces de rétention compatibles avec les capacités d’absorption racinaire,

c'est-à-dire pour une gamme de potentiels hydriques comprise entre -1 et -10 kPa.

Le pouvoir tampon du potentiel hydrique représente l’aptitude du substrat à libérer

de l’eau à un potentiel de -5 à -10 kPa. C’est dans cet intervalle que la plante s’adapte

physiologiquement à la diminution progressive du potentiel hydrique lors d’un processus

de dessiccation.

L’aération du substrat est une caractéristique primordiale dans un support de culture

(Anstett et Pasquier, 1980). Cette phase gazeuse permet l’apport d’oxygène au niveau du

système racinaire et l’évacuation du gaz carbonique produit par la respiration des racines

et des microorganismes. Il convient néanmoins d’ajouter que l’état de l’aération des

racines dépend aussi à un instant donné de l’équilibre entre les besoins en oxygène au

niveau de la rhizosphère qui dépendent notamment du stade de végétation concerné

(Gras, 1987). De plus, il faut tenir compte du dioxyde de carbone produit par la

respiration des racines, et la décomposition de la matière organique par les

microorganismes qui, mal évacué, va diminuer la quantité réelle d’oxygène disponible

(Morard, 1995).

La quantité d’eau considérée comme utilisable pour les plantes est appelée

disponibilité en eau (De Boodt et Verdonck, 1971; Rivière, 1980). Ce concept est

analogue à celui de réserve facilement utilisable employé pour les sols, mais avec des

références de potentiel sensiblement différentes. L’objectif de l’irrigation est en effet de

maintenir l’humidité du substrat entre deux limites. La disponibilité en eau correspond à

la différence de teneur en eau à deux potentiels extrêmes: la teneur en eau à -1 kPa, limite

d’humidité maximale et la teneur en eau à -10 kPa, limite d’humidité minimale de

confort hydrique de la plante où il est nécessaire de déclencher l’irrigation au risque

sinon de provoquer une initiation du stress hydrique de la plante (même s’il n’y a pas de

signe évident de flétrissement).

2.4.1.5 Conductivité hydraulique

Si les variations du potentiel de l’eau dans le sol sont les moteurs des écoulements,

leur intensité est aussi déterminée par la capacité du sol à se laisser traverser par l’eau,

c'est-à-dire par sa conductivité hydraulique. La conductivité hydraulique (vitesse

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d’infiltration) est une manifestation de l’effet de résistance à l’écoulement d’un liquide

dans un milieu poreux, selon la loi de Darcy (Darcy et al., 1856). Cette perte de vitesse

est due aux forces de frottements engendrées lors de l’écoulement. La texture et la

structure du substrat sont les principaux facteurs qui influencent le plus cette

perméabilité.

En milieu saturé, la conductivité hydraulique atteint une valeur maximale (pour un

milieu et une direction d’écoulement donnés): la conductivité hydraulique à saturation.

En conditions non saturées, la conductivité hydraulique et le potentiel hydrique

diminuent à mesure que l’on s’éloigne de la saturation. Lorsque le sol se dessèche, les

pores larges se vident en premier, si bien que la section totale d’écoulement diminue de

même que la vitesse moyenne, suite à la disparition des zones de vitesses relativement

élevées situées au centre des pores. L’eau se voit contrainte de circuler le long des films

d’hydratation qui épousent les contours des parois des pores vides ou, en plus grande

quantité, dans le réseau formé par les pores de diamètre plus faible et encore pleins. Dans

les deux cas, la longueur du cheminement parcouru et de ce fait la tortuosité est accrue.

Par l’augmentation de la tortuosité et la diminution des vitesses, la conductivité

hydraulique diminue alors également rapidement.

2.4.1.6 Impact du développement racinaire sur les propriétés physiques des

substrats

Dans le cas de cultures hors sol, le volume racinaire influence fortement le

comportement physique des supports de cultures en raison d’un volume limité de substrat

exploitable. Le système racinaire peut occuper 5.2 à 6.3% du volume du substrat chez le

rosier (Cannavo et Michel, 2013) et jusqu'à 10 % d’après Lemaire (2003) selon l’espèce

considérée. Le volume racinaire occupe une fraction importante des vides et provoque

une diminution du volume de porosité disponible pour l’eau et l’air (Lemaire, 2003). Les

racines jouent un rôle structurant en augmentant la stabilité physique du substrat, en

limitant l’effet de tassement grâce à l’exploitation des macroporosités du substrat

(Rivière, 1992).

Le système racinaire se développe d’abord dans les macroporosités du substrat, afin

de privilégier les apports d’oxygène et évacuer le CO2 issu de la respiration. Cette

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les résultats de Fonteno (1996) qui constate une augmentation du rapport

microporosité/macroporosité avec pour conséquence une diminution de la teneur en air

du substrat et une augmentation de la rétention en eau dans les microporosités. Cannavo

et al. (2011) confirment cette tendance avec une diminution de 7,1 % de la porosité

totale, une augmentation de 29% de la rétention en eau et une diminution de 40% de la

teneur en air à -1 kPa en fin d’un cycle de culture de 196 jours d’impatiens de Nouvelle

Guinée. La croissance racinaire provoque une diminution de la tortuosité, les racines

déplacent des particules lors de leur élongation et réorganisent l’espace poral. Ceci

facilite le passage des flux hydriques et gazeux dans le substrat (Nkongolo et Caron,

1999). Certains auteurs observent une diminution de la conductivité hydraulique au cours

du temps, comme Cannavo et al. (2011), d’autres observent une conductivité hydraulique

inchangée comme Allaire-Leung et al. (1999). Ces différences peuvent s’expliquer par le

régime d’irrigation appliqué et ses conséquences sur le substrat (mouillabilité, hystérèse,

phénomène de retrait…). Elles peuvent influer sur les propriétés dynamiques du substrat

et sur la croissance racinaire.

2.4.2 Interactions du végétal avec le milieu aérien

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