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Torréfaction de la biomasse sous atmosphère non-inerte

Chapitre II Torréfaction de la biomasse

II.3 Torréfaction de la biomasse sous atmosphère non-inerte

La plupart des études portant sur la torréfaction de la biomasse ont été menées dans

atmosphères inertes, qui, selon Neves et al. [38], évitent l’oxydation de la biomasse et

l’interaction entre les gaz issus de la torréfaction et le gaz vecteur. Toutefois, Mei et al. [39]

soulignent que l'utilisation de gaz inertes en grandes quantités dans les futures unités

industrielles, même à l'échelle pilote, n’est pas réaliste du point de vue économique.

La torréfaction est un procédé globalement endothermique qui nécessite un apport

énergétique extérieur. En fournir à faible coût est un facteur important pour l’industrialisation

du procédé [40]. Uemura et al. [41] et Saadon et al. [42] signalent que l’utilisation des gaz de

combustion comme gaz vecteur et source de chaleur pourrait rendre le procédé plus viable

économiquement.

La composition normale des gaz de combustion de la biomasse comprend du N

2

, H

2

O,

CO

2

et O

2

[43]. La présence d'oxygène dans le gaz étant considérée comme un problème

potentiel [41] a motivé plusieurs travaux pour déterminer son effet sur la qualité du solide

torréfié [13,31,39,42,44,45].

Wang et al. [45] ont étudié la torréfaction de sciure de bois sous atmosphère oxydante

en ATG (0%, 3%, 6%, 10% et 21% d'O

2

) ainsi que dans un réacteur à lit fluidisé (0%, 3% et

6% d’O

2

) avec une perte de masse cible de 30% suivie d’une pelletisation. Ils ont observé une

forte influence de la concentration d'oxygène sur la perte de masse de la biomasse. Les

analyses ATG ont montré que le temps d’obtention d'une perte de masse de 30% est de 44,

28, 26, 21 et 14 min pour les atmosphères contenant respectivement 0%, 3%, 6%, 10% et 21%

d'O

2

. Pour la même perte de masse (30%, avec différents couples température/temps de

séjour), les teneurs en C, H, N et O et le pouvoir calorifique des échantillons torréfiés dans le

réacteur à lit fluidisé en présence de 3 et 6% d'O

2

sont très similaires à ceux obtenus sous

azote. Ils ont montré que les propriétés des pellets produits (densité, consommation d'énergie

pour la granulation, pouvoir calorifique) sont similaires à celles des pellets issus d’une

torréfaction sous atmosphère inerte. Ils ont postulé qu'à une température donnée, l'oxygène

dans l'atmosphère de torréfaction accélère la dégradation de la biomasse, probablement due à

l'oxydation des biopolymères (principalement les hémicelluloses), cette oxydation se

déroulant en parallèle de la pyrolyse. Enfin, ils ont conclu qu’il est possible d’utiliser des gaz

vecteurs ayant jusqu'à 6% d'O

2

(comme les gaz de combustion) pour la torréfaction de la

biomasse et ont considéré comme avantageuse la réduction du temps de torréfaction en

présence d'oxygène.

Rousset et al. [29] ont étudié la variation des propriétés d'eucalyptus (échantillons de

10 mm × 40 mm × 80 mm) lors de la torréfaction à 240 et 280°C en présence de 2, 6, 10 et

21% d'oxygène. Ils ont signalé que la concentration d'O

2

n'a pas affecté de manière

significative le rendement en solide et les propriétés de la biomasse torréfiée à 240°C.

L'influence de l'augmentation de la concentration d'O

2

sur la diminution du rendement en

solide à 280°C est plus marquée qu'à 240°C, mais elle n'était significative que pour la

concentration de 21% d'O

2

. Ils ont recommandé l'utilisation d'atmosphères inertes pour les

torréfactions menées à partir de 280°C.

Eseltine et al. [31] ont analysé l’effet de la présence de CO

2

lors de la torréfaction de

deux essences de bois à 200, 220, 240, 260, 280 et 300°C et ont observé une perte de masse

légèrement plus importante (entre 2 et 4%) par rapport au milieu inerte. La différence entre

les deux atmosphères s’accroît lorsque la température de torréfaction augmente : sans

différence significative pour les torréfactions menées à 200 et 220°C, entre 2-3% à 240°C et

d'environ 4% à partir de 260°C. Ils ont également remarqué que la broyabilité du solide issu

de la torréfaction sous CO

2

a augmenté par rapport à l’atmosphère inerte et ont observé une

légère diminution du pouvoir calorifique. Suite à ces observations, les auteurs considèrent le

CO

2

comme un gaz qui peut être utilisé lors de la torréfaction.

Mei et al. (2015) ont étudié la torréfaction du bois de cèdre dans un réacteur rotatif à

l'échelle pilote pour différentes températures (200, 230, 260 et 290°C) sous atmosphère inerte

et en présence d'un mélange simulant le gaz de combustion (6%O

2

, 10%CO

2

, 84%N

2

)

.

Ils ont

observé que la torréfaction en présence de gaz de combustion intensifie la désoxygénation du

solide par rapport au milieu inerte. La diminution plus importante du ratio O/C en présence de

gaz de combustion a été attribuée à l'augmentation de la température in situ grâce aux

réactions d'oxydation de la biomasse qui intensifient sa décomposition, résultant en un

dégagement plus important en CO

2

, CO et H

2

O. Ils ont également observé que le nombre de

particules plus petites après le broyage était plus important et la taille plus uniforme par

rapport à la torréfaction sous azote. Ils ont attribué cela à l'oxydation des hémicelluloses et de

la cellulose en plus de la réaction de décomposition ordinaire, ce qui intensifie la dégradation

de la structure de la biomasse. Toutefois, ils ont conclu que pour la torréfaction en présence

de gaz de combustion la température ne doit pas être supérieure à 260°C pour éviter des pertes

excessives en rendement massique et énergétique.

Chen et al. [44] ont torréfié deux biomasses fibreuses (fibre de palmier à l'huile et

fibre de noix de coco) et deux essences de bois (eucalyptus et Cryptomeria japonica) à 300°C

durant 1h sous azote et en présence de 5, 10, 15 et 21% d'O

2

v/v. Les résultats indiquent que la

biomasse fibreuse est plus sensible à la concentration en O

2

que la biomasse ligneuse et que

l'augmentation de la teneur en oxygène diminue le rendement en solide. Dans l'ensemble, la

biomasse ligneuse peut être torréfiée dans des environnements oxydants à des concentrations

d'O

2

modérées, alors que la biomasse fibreuse est plus adaptée à la torréfaction sous

atmosphère inerte en raison de faibles rendements massique et énergétique.

Ces études ont porté sur l’effet de l’atmosphère inerte ou oxydante sur la qualité du

produit solide de la torréfaction, sans que les gaz émis ne soient vraiment considérés. Cela

montre que des études sont encore nécessaires pour expliquer l’influence de l’atmosphère de

travail sur la production des gaz et d'espèces condensables durant la torréfaction.

II.4 Dégradation thermique de la biomasse lors de la torréfaction en atmosphère