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Principe

Les apatites contiennent naturellement des éléments radioactifs. La méthode de

thermochro-nologie (U-Th)/He sur apatite se base sur la production d’4He par les réactions de désintégration

radioactive de 238U,235U, 232Th,147Sm et sur la diffusion de l’4He au sein du crystal. La tempé-rature de fermeture du système est de 75±15◦C (Wolf et al. 1996,Farley 2000). Différents facteurs peuvent faire varier les âges (U-Th)/He sur apatite et doivent être corrigés ou pris en compte lors de l’interprétation. La présence de micro-inclusions, avec des concentrations d’U, Th et Sm différentes du grain, invisibles lors de la sélection des grains et qui ne dégazent pas une quantité importante d’hélium lors de la seconde extraction peuvent vieillir un échantillon. Pour essayer de minimiser cette erreur, plusieurs grains sont dégazés pour chaque échantillon. Les particules α produites lors de la désintégration radioactive de l’U, du Th et du Sm ont une énergie cinétique importante, elles

sont éjectées de leur position de production jusqu’à une distance d’arrêt moyenne de 20 µm (Farley

et al. 1996). Les particules α produites peuvent donc transiter d’un grain à un autre entrainant une

perte d’4He pour un grain d’apatite donné et un éventuellement un gain pour un grain d’apatite

voisin. Le cristal d’apatite doit donc être suffisamment gros (> 60 µm) pour que la perte d’4Hepar éjection α puisse être corrigée par le facteur de correction FT (Farley et al. 1999). Ce facteur fait

l’hypothèse d’une répartition uniforme des éléments pères dans l’apatite (Farley 2000) et prend en

compte la géométrie du grain. L’assimilation d’4He depuis un minéral voisin comme un zircon, une

monazite ou une apatite est plus difficilement quantifiable (Spiegel et al. 2009). La quantité d’He est donnée par l’équation :

32 Chapitre 2. Méthodes 4He=8238U(eλ238t −1) +7 238U 137.88(e λ235t −1) +6232Th(eλ232t −1) +147Sm(eλ147t −1) (2.3)

avec4He,238U,232Th,147Smles abondance mesurées dans le grain, t l’âge thermochronologique

de l’échantillon et λ la constante de désintégration radioactive des éléments pères 238U, 232Th et

147Sm.

Cette méthode se base sur trois hypothèses, l’absence d’4He dans le cristal à l’état initial, l’absence d’4He issus d’une implémentation α et l’4He peut diffuser hors du cristal, la pression partielle d’4He à l’extérieur n’influence pas la diffusion dans le cristal.

Détermination d’un âge AHe

Les âges (U-Th)/He sont le résultat de la production, de l’éjection et de la diffusion de l’hé-lium au sein d’un cristal d’apatite pour une histoire thermique donnée. Pour déterminer un âge

(U-Th)/He sur apatite il faut mesurer les quantités d’4He et d’U-Th contenues dans le grain. Au

dessus de la température de fermeture du système (75◦C) les atomes d’hélium produits diffusent

rapidement hors du grain d’apatite. En dessous de 75◦C la diffusion est moins importante, l’hélium

produit reste dans le grain. La température de fermeture du système (U-Th)/He dépend de la vi-tesse de refroidissement, et de la taille du grain. La température de fermeture très basse pour le système (U-Th)/He sur apatite implique qu’il est particulièrement sensible à l’histoire thermique

lors de l’exhumation récente des roches (Fig. 2.1) mais aussi à tout les réchauffements potentiels

(réenfouissement, incendies ; e.g.,Mitchell & Reiners 2003). Protocole

Le protocole de préparation des échantillons est similaire au protocole suivi pour les traces de fission jusqu’à l’obtention des cristaux d’apatite. Une fois les cristaux obtenus, j’ai sélectionné les apatites pour la thermochronologie (U-Th)/He sous une loupe binoculaire suivant leur morpholo-gie, leur taille (>60 µm) et leur pureté. L’absence d’inclusion est essentielle, en effet une inclusion peut contenir de l’hélium et majorer la quantité d’4He mesurée. J’ai aussi écarté les grains présentant des fractures, les fractures pouvant faciliter l’éjection de l’hélium. J’ai mesuré les cristaux d’apatites sélectionnés pour calculer leur facteur d’éjection suivant la technique de simulation Monte Carlo développée parGautheron & Tassan-Got(2010). Pour finir, j’ai mis chaque cristal dans une capsule millimétrique en platine. J’ai réalisé l’extraction de l’hélium à Orsay, en collaboration avec Cécile Gautheron, la chimie pour connaitre la quantité d’U-Th a été réalisée par la suite (R. Pinna-James). L’hélium contenu dans l’échantillon est dégazé sous vide par chauffage laser de la capsule platine

qui contient le grain d’apatite (T = 1050±50◦C, 2 minutes). Une solution entraineur de

concen-tration connue en3He est ajoutée à l’4He. Le rapport4He/3He est mesuré par un spectromètre de

masse quadrupole. L’étape d’extraction est répétée sur le même échantillon pour s’assurer qu’il n’y

2.1. Thermochronologie basse température 33

extraite lors de la première chauffe, l’4He peut provenir d’inclusions, il faut donc être prudent vis à vis de l’âge obtenu. Après l’extraction de l’hélium les tubes de platines sont placés dans des flacons en polypropylène et les cristaux d’apatites sont dissous pendant 1 h dans 50 µl de solution de HNO3

à 90◦C et de concentration connue en235U,230Th et149Sm que nous avons ensuite rempli avec 1 ml

d’eau pure. Les mesures de l’U du Th et du Sm ont été réalisées suivant le protocole de Evans

et al.(2005) grâce à un spectromètre de masse quadrupole (ICP-QMS ; série CCT Thermo-Electron au LSCE, Gif-sur-Yvette, France). Les analyses ont été calibrées avec des standards comprenant le

tuff de Limberg et les apatites de Durango qui donnent respectivement des âges de 16.5±1.6 Ma

et 31.4 ± 2.3 Ma. Ces valeurs sont en accord avec les valeurs données dans la littérature, 16.8 ±

1.1 Ma pour le tuff de Limberg (Kraml et al. 2006) et 31.02± 0.22 pour Durango (McDowell et al.

2004). J’ai corrigé les âges en utilisant le facteur d’éjection FT que j’ai déterminé par une simulation

Monte Carlo (Ketcham et al. 2011), j’ai calculé le rayon de la sphère équivalente du cristal en

sui-vant la procédure décrite par (Gautheron & Tassan-Got 2010). J’ai quantifié l’incertitude analytique par l’analyse de standards, elle est en moyenne de 10%. Elle reflète la somme des erreurs de cor-rection du facteur d’éjection et la dispersion des âges des standards. A cette incertitude s’ajoute la reproductibilité de l’âge obtenu pour les différents grains d’un même échantillon.

2.1.3 Thermochronologie OSL

Dans le cadre de ma thèse j’ai également appliqué la thermochronologie par Optically Stimula-ted Luminescence (OSL) sur des échantillons localisés sur le plan de faille de la Cordillera Blanca. La thermochronologie par Optically stimulated luminescence (OSL) est une méthode novatrice

dé-veloppée par F. Herman (IDYST, Lausanne), de température de fermeture de 30-35◦C, qui permet

l’accès aux processus d’exhumation des roches les plus récents jusqu’alors non décrits par les mé-thodes traditionnelles (herman et al. 2010). L’application de cette technique permettrait de faire le lien entre l’histoire de l’exhumation obtenue grâce aux méthodes de thermochronologie classiques

(traces de fission sur apatite et (U-Th)/He sur apatite) (échelle 106-107 ans) et la néotectonique

(échelle 103-105ans). Principe

La thermochronologie OSL permet de déterminer le temps à partir duquel les grains de quartz commencent à piéger la charge dans les pièges à électrons appropriés en réponse à une exposition aux radiations ionisantes de l’environnement (radioactivité, émission de radiations ...), lorsqu’ils

refroidissent en dessous de la température de fermeture du système (herman et al. 2010). En effet,

le signal OSL dépend du nombre d’électrons piégés, il augmente avec la dose d’irradiation reçue. Lorsque les roches ont reçu une trop forte dose le signal sature.

Le signal et le niveau de saturation diffèrent selon le matériel traité, ils sont caractéristiques des défauts des cristaux. En dessous du niveau de saturation, le signal augmente proportionnellement à

34 Chapitre 2. Méthodes

la dose reçue. En théorie, pour un signal OSL donné, une fois la dose environnementale mesurée, il est possible de calculer un âge. Toutefois certains cristaux perdent une partie des charges piégées au cours du temps, ce phénomène appelé "fading" induit une sous estimation de la dose d’irradiation reçue.

Cette technique est adaptée pour des âges jeunes soit à des régions à taux de soulèvement élevés (1-10 mm/an). En effet, à partir du moment où tous les pièges à électrons sont pleins, l’échantillon est saturé, la charge piégée n’augmente plus même si il est toujours exposé aux radiations envi-ronnementales et donc l’échantillon ne peut plus être daté par cette méthode. La limite supérieure des âges mesurables est en moyenne de 500 ka, elle est essentiellement contrôlée par la quantité de radiations ionisantes environnementales. Dans certains cas le niveau de saturation est atteint très rapidement ce qui rend cette méthode inapplicable mais parfois il est possible d’obtenir des âges supérieurs à 1000 ka, en particulier si la concentration d’isotopes radioactifs est faible dans l’environnement du cristal (Rhodes et al. 2006).

Protocole

J’ai scié les roches dans une chambre noire de façon à conserver le coeur, non exposé à la lumière, des blocs. J’ai ensuite broyé les roches manuellement et je les ai tamisées dans une chambre

noire (IDYST, lausanne ; Fig. 2.2A). J’ai traité les fractions de taille de grains 180-212 µm avec de

l’HCl et de l’H2O2pour dissoudre les carbonates et la matière organique. Les minéraux magnétiques

ont été retirés grâce à l’utilisation d’agitateurs magnétiques. J’ai isolé les fractions de quartz et de

feldspath grâce à des liqueurs denses (polytungstate de sodium, densité 2.7 et 2.58 g.cm−3) et

attaquées avec de l’HF à 40% durant 1 h.

J’ai réalisé toutes les mesures de luminescence grâce au détecteur TL/OSL Ris 1 (IDYST,

Lau-sanne ; Fig.2.2B) Pour déterminer la paléodose, j’ai mesuré le signal de luminescence naturel puis

je l’ai comparé au signal régénéré au moyen d’une dose artificielle délivrée par une source au labo-ratoire.

Applicabilité de cette méthode à la région étudiée et à la chaîne Andine

J’ai testé l’application de cette méthode sur quatre échantillons situés sur le plan de faille de la Cordillère Blanche, au nord du massif. Dans cette région les taux d’exhumation récents (1-0

Ma) prédits par Farber & Hancock (submit) sur la faille normale de la Cordillère Blanche sont

de 5 mm/an. Mes résultats indiquent pourtant que le thermochronomètre OSL est saturé et donc inutilisable pour quantifier l’exhumation récente de la Cordillère Blanche.

2.1. Thermochronologie basse température 35

Figure 2.2 – Photographies illustarnt les conditions de travail pour les analyse OSL. A) Salle de broyage des échantillons pour les datations OSL (IDYST, Lausanne). B) Détecteur TL/OSL Ris 1 où le signal OSL des échantillons de la Cordillère Blanche a été mesuré (IDYST, Lausanne).

2.1.4 Méthodes d’inversion numériques des données de

thermo-chronologie

QTQt : inversion Température-temps

J’ai déterminé l’histoire thermique des échantillons grâce au logiciel QTQt (Gallagher et al.

2009, Gallagher 2012). Ce logiciel permet d’inverser le recuit des traces de fission ainsi que les paramètres de diffusion de l’hélium dans les apatites avec une méthode de Monte-Carlo par chaîne de Markov pour des profils verticaux complets. Ce code d’inversion intègre des modèles cinétiques de diffusion de l’hélium dans l’apatite (Flowers 2009,Gautheron et al. 2009) et de recuit des traces

de fission (Ketcham et al. 2007). Pour tous les modèles, la gamme de composition chimique du grain

peut être prise en considération suivantGautheron et al.(2013). La procédure de modélisation est

détaillée parGallagher(2012).

Les paramètres d’entrée utilisés pour modéliser chaque profil sont : les âges centraux AFT, la répartition des longueurs de traces, les valeurs de Dpar et les âges AHe (monograin) avec la taille des grains et leurs caractéristiques chimiques. Il est également possible d’apporter des contraintes données par la géologie, comme les âges et température de mise en place des roches (qu’elles soient intrusives ou sédimentaires) ou une période de mise à la surface, si elles sont connues.

Glide : inversion spatio-temporelle des taux d’exhumation

Pour obtenir les variations spatio-temporelles des taux d’érosion dans la région de la Cordillère

Blanche nous avons utilisé la méthode proposée par Fox et al. (2014) et modifiée par Herman &

Brandon(2015). Toutes les données de thermochronologie basse température disponibles dans cette

région (Montario 2001, Wipf 2006, Montario 2006, Giovanni 2007, Hodson 2012, Michalak 2013)

36 Chapitre 2. Méthodes

implique une inversion des moindres carrés faiblement non-linéaire et permet un traitement efficace d’un grand nombre de données réparties dans l’espace. Cette méthode exploite les informations contenues dans les profils âge-altitude et dans les différents systèmes thermochronologiques. Dans cette approche, plusieurs paramètres doivent être testés pour s’assurer que les taux d’exhumation

présumés sont robustes. Pour une discussion détaillée de chacun de ces paramètres se référer àFox

et al. (2014). I) La profondeur de la température de fermeture est exprimée par l’intégrale du taux d’érosion à partir de l’âge de thermochronologique actuel. L’intégrale est discrétisée en une série de pas de temps fixes (∆t), qui doivent être choisis. II) La profondeur des isothermes de fermeture est calculée en utilisant un modèle thermique 1-D qui comprend une correction pour les effets de la topographie et de son domaine thermique sous-jacent. L’impact du modèle thermique est testé en modifiant les conditions aux limites inférieures (T). III) La méthode suppose que les échantillons sont corrélés dans l’espace par une fonction de corrélation qui comprend un écart (σ). IV) Les taux

d’exhumation calculés représentent un écart par rapport à une exhumation a priori ( ˙epr) qui est

mise à jour à des taux d’exhumation postérieurs. Dans la figure2.3, je montre l’effet des variations

de ∆t, T, σ et ˙eprpour évaluer leur impact sur les histoires d’exhumation. La solution est représentée en deux points situés de chaque côté de la faille normale de la Cordillère Blanche.

Figure 2.3 – Sensibilité des taux d’exhumation prédits en fonction de différents paramètres. A) Localisation des points de chaque côté de la faille normale. B-E) Variance normalisée pour chaque histoire d’exhumation, plus la variance est faible, plus l’exhumation est bien contrainte. F-I) Varia-tion des taux d’exhumaVaria-tion pour différentes valeurs de ∆t, T, σ, ˙epr et σp2.

2.2. Analyse de la fracturation : inversion de populations de plans striés 37

2.2 Analyse de la fracturation : inversion de

popula-tions de plans striés