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Partie I : La maladie de Crohn : Généralités

8. Thérapies expérimentales

A l'heure actuelle, les traitements classiques peuvent encore se solder par un échec à plus ou moins long terme entrainant une aggravation rapide de la maladie. Dans certains cas d'échappement thérapeutique et pour des formes évoluées et graves de MC, des thérapies plus innovantes mais qui relèvent encore du domaine de la recherche clinique peuvent être tentées.

8.1. Neurostimulation du nerf vague

Certains articles publiés récemment tendent à démontrer que le nerf vague exerce une activité anti-inflammatoire sur le tube digestif [72, 73]. Cette activité repose sur la libération de glucocorticoïdes par les glandes surrénales suite à un stimulus nerveux des fibres afférentes. De plus, une stimulation des fibres efférentes permet la libération de neuromédiateurs en fin de terminaison nerveuse, neuromédiateurs qui iront agir sur les

récepteurs membranaires des macrophages pour inhiber la production de TNF-. C'est cette dernière propriété qui est mise en jeu lors de ce procédé dans le traitement de la MC.

Une électrode, implantée par chirurgie autour du nerf vague gauche chez les patients sélectionnés, est reliée à un neurostimulateur qui envoie un influx nerveux lorsqu'une

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baisse du tonus électrique est détectée. De cette manière, le nerf vague peut toujours exercer son action anti-inflammatoire [74].

Cette technique est toujours en cours d'essai clinique au CHU de Grenoble. Il n'y a encore qu'un petit nombre de patients inclus dans cet essai, mais les résultats semblent déjà prometteurs. Le premier patient à avoir bénéficié de ce nouveau protocole est en rémission avec cicatrisation de ses lésions intestinales.

8.2. Transplantation fécale

Bien qu'existant depuis très longtemps, on en retrouve des traces sous l'ère Jin des chinois du 4ème siècle sous le nom de "soupe dorée" et en 1697 dans le manuel "Heilsame

Dreck-Apotheke" du médecin allemand Christian Franz Paullini, ce traitement n'a jamais

vraiment été utilisé ni envisagé jusqu'à nos jours. C'est avec l'émergence d'un nombre croissant d'infection à Clostridium difficile que cette possibilité thérapeutique a été remise au gout du jour, y compris dans le cas du traitement de la MC [75].

En effet, le but au cours de la MC est de rétablir l'équilibre de la flore bactérienne commensale en "ensemençant" l'appareil digestif avec les espèces bactériennes déficitaires afin de rétablir une flore fonctionnelle et opérante, ce qui rééquilibre l'immunité intestinale et diminue les mécanismes inflammatoires locaux. Toutefois, cette pratique souffre d'un certain nombre de contraintes qui expliquent pourquoi elle n'est pour l'instant que très peu employée [76].

En premier lieu, le manque de recul concernant son champ d'application, le peu d'études réalisées, le fait qu'on ne connaisse pas les conséquences sur le long terme d'une telle technique, ont pour l'instant cantonné celle-ci au seul domaine des essais cliniques. Ainsi il

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a été préconisé de ne l'autoriser qu'aux seuls patients échappant aux traitements et qui auront été pleinement mis au courant du caractère encore expérimental de cette procédure.

La deuxième difficulté est relative à l'établissement du futur "greffon". Il convient en effet de prendre toutes les précautions pour ne pas contaminer celui-ci par la présence de microorganismes pathogènes. Le donneur devra ainsi répondre à un certain nombre d'exigences pour sécuriser au maximum le don.

Figure 9 : Schéma chronologique d'un don de selles [76]

En plus du questionnaire classiquement réalisé pour les dons du sang [77], une enquête complémentaire plus spécifique est réalisée afin de présélectionner l'échantillon avant de prélever le greffon (Annexe 6). Dans un délai d'une semaine, un deuxième questionnaire

(Annexe 7) assorti d'un entretien médical obligatoire et d'examens spécifiques (Annexe 8

et 9) des selles prélevées sont réalisés pour savoir s'il a souffert pendant ce délai d'un quelconque problème. A l'issu de ces investigations, le prélèvement est ou non définitivement sélectionné pour le don. En plus de ces examens, chaque grande étape sera complétée par la constitution d'une fécothèque, celle-ci permettant d'avoir une banque de fèces dans laquelle aller chercher pour des analyses complémentaires en cas de questions qui se poseraient a posteriori.

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Figure 10 : Profil de donneur idéal [76]

D'une manière plus pratique, deux questions peuvent se poser concernant le don. Le don doit-il être anonyme ou dirigé ? Le donneur doit-il être unique ou doit-on plutôt privilégier un pool ? [77]

En ce qui concerne la première question, aucun consensus n'a pour l'instant été établi. A l'heure actuelle, c'est le don anonyme qui reste préconisé eu égard aux principes généraux afférents aux dons et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain. Par ailleurs, même s'il parait plus facile d'accepter un don de cette nature venant d'un proche, il ne faut pas oublier deux points essentiels :

- la véracité des réponses fournies aux différentes enquêtes peut être volontairement faussée par crainte de ne pas être sélectionné. Or dans ce cas, c'est la santé du receveur qui peut être impactée.

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- l'annonce de l'exclusion d'un proche en tant que donneur peut être mal reçue par le patient et le donneur lui-même. Là aussi c'est potentiellement la santé du patient qui peut être impactée s'il refuse un don anonyme par la suite.

Concernant le choix d'un donneur unique ou d'un pool, là non plus aucun consensus n'a encore été définitivement fixé. En effet, il reste difficile de définir quelles espèces peuvent être utiles à une restauration de la flore intestinale, d'autant que ceci pourrait varier d'un patient à l'autre.

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