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2. Cadre théorique

2.2. Modèles théoriques du traitement de l’information

2.2.3 Théorie de la charge cognitive

La théorie de la charge cognitive a été élaborée par Sweller et Chandler (1991) et elle met un fort accent sur la mémoire de travail, dont les contraintes déterminent l’efficacité de la conception de la leçon. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une théorie de l’apprentissage multimédia, mais plutôt d’une théorie d’instructional design, très souvent utilisée dans les études multimédia.

Structures cognitives impliquées

Mémoire de travail

Le traitement actif et conscient des informations a lieu dans la mémoire de travail, dont la capacité de traitement est limitée, ce dont il faudrait constamment tenir compte lors de la conception des instructions d’apprentissage. Toutes les activités cognitives conscientes des apprenants ont lieu dans la mémoire de travail, dans laquelle ont lieu tous les processus de base. Tout ce qui va au-delà de ces activités cognitives de base surcharge la mémoire de travail. Cette structure joue donc un rôle primordial dans la théorie de la charge cognitive.

Mémoire à long terme

Sweller s’appuie sur la comparaison des experts et des novices aux échecs pour souligner le rôle de la mémoire à long terme : ce qui distingue les joueurs experts des novices est le nombre très important de configurations de jeu dont ils disposent dans leur

mémoire à long terme, leur permettant de rapidement résoudre les problèmes de stratégie.

Ainsi, l’apprentissage est défini comme une « altération de la mémoire à long terme » (Sweller, 2005, p. 20). Les changements qui s’opèrent dans la mémoire à long terme reposent sur la construction de schémas. Les schémas sont des « concepts cognitifs qui permettent la catégorisation de plusieurs éléments d’information en éléments simples » (p. 21) ; ils sont acquis sur une longue période de temps et stockés dans la mémoire à long terme. Toutes les performances qualifiées dans des domaines complexes reposent sur l’acquisition d’un nombre important de schémas contenus dans la mémoire à long terme.

Liens entre ces structures et conséquences

Pour Sweller, le but principal des instructions d’apprentissage est la construction et l’automatisation des schémas utiles à la résolution de problèmes. Bien que les schémas soient stockés dans la mémoire à long terme, l’information permettant leur construction doit être traitée dans la mémoire de travail. Les parties de l’information qui sont pertinentes doivent être extraites et manipulées dans la mémoire de travail avant d’être stockées schématiquement dans la mémoire à long terme. La facilité avec laquelle l’information est traitée dans la mémoire de travail est au cœur de la théorie de la charge cognitive.

La charge de la mémoire de travail peut être affectée soit par la nature intrinsèque du matériel (charge cognitive intrinsèque), à savoir la façon dont le matériel est présenté, soit par les activités que l’apprenant doit réaliser (charge cognitive externe). Tandis que la charge cognitive intrinsèque ne peut pas être modifiée, la charge cognitive externe est une charge cognitive non nécessaire et elle est déterminée par la conception des instructions d’apprentissage.

Une dernière distinction est effectuée entre la charge externe et la charge utile. Bien que les deux puissent être modifiées, « la charge externe reflète l’effort produit pour traiter une leçon mal conçue, alors que la charge utile reflète l’effort qui contribue à la construction de schémas » (Sweller, van Merrienboer & Paas, 1998, p. 259).

Les charges intrinsèque, externe et utile s’additionnent : le but des consignes

Principaux effets observés

Plusieurs effets de la charge cognitive ont été décrits ; nous allons en décrire les principaux. Nous aborderons de façon plus approfondie l’effet de l’attention partagée, qui nous intéresse particulièrement dans le cadre de ce travail.

Effet de l’exemple déjà résolu

L’effet de l’exemple résolu est démontré quand les apprenants qui doivent résoudre un problème basé sur un exemple déjà résolu apprennent plus rapidement que les apprenants qui doivent résoudre eux-mêmes ce même problème. Un exemple déjà résolu, en réduisant les recherches à effectuer, réduit la charge cognitive externe et améliore l’apprentissage (Sweller, 2005).

Effet de l’attention partagée

L’effet de l’attention partagée a lieu lorsque l’attention doit être partagée entre plusieurs sources d’informations visuelles essentielles à la compréhension. L’apprenant doit intégrer mentalement les sources multiples avant de pouvoir apprendre le matériel, ce qui surcharge la charge cognitive externe.

Pour illustrer cet effet, prenons l’exemple donné par Sweller (1998) et considérons un problème de géométrie déjà résolu, constitué d’un diagramme et de la solution associée (voir figure 5). Le diagramme seul n’indique rien quant à la solution ; l’exposé de la solution seul n’a pas de sens sans le diagramme. Pour comprendre les deux sources d’information (le diagramme et la solution), l’apprenant doit les intégrer mentalement : par exemple, pour comprendre le sens de l’énoncé de la solution, il doit lire un bout de la proposition, la garder en mémoire de travail, et ensuite chercher son référent dans le diagramme. Ce processus peut être extrêmement coûteux sur le plan cognitif : l’exigence imposée par ces formats qui partagent l’attention constitue une charge cognitive externe qui se produit à cause d’un format particulier.

Une alternative au format de partage de l’attention de la Figure 5 est un format intégré (Figure 6). Ce format rend inutile la recherche de relations entre le diagramme et les propositions associées. Plutôt que d’utiliser des ressources de la mémoire de travail pour intégrer mentalement les deux sources d’informations, une intégration physique des informations est utilisée.

L’information donnée dans la figure 5 et la figure 6 est la même : seul le design graphique diffère, la figure 6 permettant de réduire la charge cognitive externe en intégrant

physiquement les différentes sources d’informations et en réduisant ainsi le besoin d’intégration mentale.

Figure 5. Exemple démontrant l’attention partagée, traduit de Sweller et al, 1998.

Figure 6. Exemple intégré sans attention partagée, traduit de Sweller et al, 1998.

Effet de modalité

L’effet de l’attention partagée se produit lorsque deux (ou plus) sources d’informations doivent être traitées simultanément pour trouver la signification du matériel. La charge de la mémoire de travail imposée par l’intégration des différentes sources d’informations interfère avec l’apprentissage. Nous avons vu que ce problème peut être réduit en intégrant physiquement les différentes sources d’information.

L’effet de modalité découle de l’effet de l’attention partagée. Il se produit dans des conditions d’attention partagée lorsqu’une source d’informations écrites, qui doit être intégrée avec une autre source d’informations présentées visuellement, est présentée oralement. Il est donc préférable de présenter le matériel verbal de façon parlée plutôt que de façon écrite (Sweller, 2005; Sweller et al., 1998).

Effet de redondance

L’effet de redondance se distingue des deux effets précédents par le fait qu’une seule des différentes sources d’informations est suffisante en elle-même pour permettre la compréhension et l’apprentissage alors que les autres sources répètent la même information, de façon différente. Lorsqu’on présente un texte et un diagramme ensemble alors que chacun est intelligible même en étant isolé, et que chacun donne toutes les informations nécessaires à la compréhension, l’un des deux sources est redondante, ce qui peut avoir un effet néfaste sur l’apprentissage (Sweller et al., 1998).

D’autres effets ont été mis en avant, dont nous n’allons pas donner le détail ici. Citons par exemple de l’effet d’expertise (Sweller, 2005), l’effet de variabilité, l’effet d’absence de but, ou encore l’effet du problème complété (Sweller et al., 1998).