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Chapitre 2 : Méthodologie : comment étudier la rétention des immigrants en région?

2. Territoire couvert par l’étude

Le choix du terrain d’étude s’est arrêté sur la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean notamment pour deux raisons. La première est due à la représentation que nous avions de la population du Saguenay-Lac-Saint-Jean, soit homogène sur le plan culturel, c’est-à-dire à très forte majorité blanche et d’origine catholique et peu habituée à côtoyer des personnes d’origines diverses. La deuxième raison se situe dans les recherches antérieures qui ont porté sur l’intégration des immigrants dans la région. Bien qu’elles soient peu nombreuses, elles dégagent

des constats positifs quant à l’intégration des personnes immigrantes dans ce milieu (Allen et Troestler, 2007; Vatz-Laaroussi, 2010; Klein et Boisclair, 1993). Selon une recherche longitudinale sur la mobilité de 133 familles installées en région (catégorie économique et réfugiée) menée par Vatz-Laaroussi entre 2006 et 2009, la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean arrive en troisième place après Montréal et Québec pour le nombre de familles demeurées dans leur première région d’installation. L’étude comptait un petit échantillon de six familles d’origine d’Amérique latine, d’Asie et d’Europe centrale qui sont demeurées à Chicoutimi ou à Jonquière, tout en intégrant « le tissu local » (Vatz-Laaroussi et al., 2010, 91). Ce résultat des plus intéressants pour cette région éloignée des grands centres urbains se révèle être une caractéristique importante dans notre choix de la région. Nous voulions étudier de près le cas du Saguenay-Lac-Saint-Jean avec notamment un échantillon plus nombreux que celui de Vatz- Laaroussi et al., afin de mieux comprendre les processus qui ont favorisé cette rétention.

2.1 Histoire de la région en bref

Entourée des régions du Nord-du-Québec, de la Côte-Nord, de la Mauricie et de la Capitale-Nationale, la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean couvre une superficie de 106 508 kilomètres carrés. Premièrement habitée par les populations autochtones, la région attira par la suite les colonisateurs grâce aux fourrures. Dans les années 1840, le commerce des fourrures fut remplacé par l’exploitation forestière et l’agriculture, ce qui mena à l’intensification de la colonisation et, par le fait même, à l’ouverture de plusieurs paroisses par le clergé (Ouellet, 2009, 49). En effet, comme d’autres régions à la même époque, l’Église catholique a joué un rôle important dans le développement du Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui a connu une croissance démographique marquée entre 1844 et 1901; selon les recensements fédéraux, la population est passée de 2 017 habitants en 1844 à 37 220 habitants en 1901. L’activité économique de la région s’accéléra à la toute fin du 19e siècle et au début du 20e siècle avec l’implantation d’industries de pâtes et papiers aux abords des rivières de la région, dont la rivière Chicoutimi (Ouellet, 2009, 103). Plusieurs municipalités ont alors vu le jour grâce à ces industries (Jonquière, Chicoutimi, Kénogami, Port-Alfred, Arvida, Alma, l’Isle-Maligne, Dolbeau) et ont atteint plus de 5 000 habitants chacune entre 1930 et 1950 (Ouellet, 2009 : 116). Au milieu du 20e siècle, les villes de Chicoutimi, Jonquière et La Baie formaient les trois principaux pôles urbains de la région, notamment en lien avec les industries de pâtes et papiers et de l’aluminium. Dès les années 1950, on observe une tendance à la baisse : certains villages de la région obtenaient un bilan migratoire négatif. Comme plusieurs milieux ruraux québécois, ces

villages voyaient de nombreux jeunes quitter pour les centres urbains, notamment pour des raisons d’études et d’emploi. Cette émigration engendrait dès lors des effets sur le bilan démographique total de la région dans la deuxième partie du 20e siècle, soit à partir de 1978 (Ouellet, 2009, 168). Cette tendance s’est poursuivie jusqu’en 2011: la population passa de 301 233 habitants en 1981 à 273 760 habitants en 2006 et à 273 009 en 20114.

2.2 Limites géographiques de la recherche

Notre recherche couvre la région administrative du Saguenay-Lac-Saint-Jean tel que définie par l’Institut de la statistique du Québec (2005). Le plan d’action gouvernemental du MICC (2005) vise l’établissement d’immigrants dans toute la région et, par conséquent, des partenariats ont été créés avec des organismes et des institutions d’enseignement (commissions scolaires, cégeps, Université du Québec à Chicoutimi [UQAC], etc.) se situant dans les cinq MRC constitutives de la région administrative (Saguenay, Lac-Saint-Jean est, Le domaine-du-Roy, Maria-Chapdelaine, le Fjord-du-Saguenay).

Il existe deux sous-régions ou secteurs au sein du territoire administratif. En effet, aux yeux de la population, la région se divise en deux parties : le Lac-Saint-Jean à l’est et le Saguenay à l’ouest, le second étant plus urbain que le premier.

2.3 Objectifs du MICC pour la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean

Des actions politiques ont été entreprises dans plusieurs régions québécoises. En particulier, les plans d’action ont été élaborés entre 2004 et 2007 dans les Laurentides, en Outaouais, au Centre-du-Québec et ses cinq MRC, dans l’est de la Montérégie, dans l’agglomération de Longueuil, dans la Mauricie, à Laval, au Saguenay-Lac-Saint-Jean, en Estrie et dans la Capitale nationale. Dans le cas du Saguenay-Lac-Saint-Jean, le document fait notamment état de quatre résultats attendus pour la région. Ces résultats sont représentés par une série d’objectifs, qui s’appuient sur de nombreux responsables et partenaires, tels que la Conférence régionale des élus (CRÉ) et la Table de concertation en immigration. Chacun des résultats reflète un des enjeux généraux (démographique, économique, linguistique et culturel)

4 Dernières données disponibles à l’Institut de la statistique du Québec : http://www.stat.gouv.qc.ca/regions/

de la politique de régionalisation identifiés précédemment par Simard (1996). Mais ce plan d’action porte une attention particulière sur l’enjeu économique.

Le premier résultat prévu par le plan consiste en l’établissement de 250 immigrants issus de la catégorie des travailleurs qualifiés et des gens d’affaires. Ce résultat attendu fait référence à lui seul aux enjeux économique, démographique et territorial des régions voulant contrer le déclin démographique et accélérer, par ricochet, même l’activité économique régionale. Le deuxième résultat attendu, soit les « conditions d’accueil et d’intégration améliorées des nouveaux arrivants et l’accroissement significatif de l’insertion en emploi », semble viser les conditions générales de l’intégration des immigrants, tout en portant une attention particulière aux mesures qui y sont reliées ainsi qu’aux acteurs locaux impliqués (Gouvernement du Québec, 2004). Le troisième résultat planifié renvoie à l’apprentissage du français accéléré et vise une intégration facilitée. Ce troisième aspect du plan renvoie à l’enjeu politique qui préconise une intégration des immigrants à la majorité francophone québécoise. Le quatrième et dernier résultat fait appel à l’enjeu culturel, où les acteurs locaux sont sollicités directement dans le processus d’intégration sociale et culturelle des immigrants.

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