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PARTIE II : LES MECANISMES DE CONTROLE

Section 2 : Le contrôle judiciaire

B) Tentatives d’illustration comparées

A l’étude de la définition allemande de la performance on a remarqué la référence à la rentabilité de l’entreprise. Il semble donc que la performance du dirigeant soit appréciée par rapport aux résultats de l’entreprise dans les deux pays.

Quel type de rémunération peut être fixé en conformité avec ce critère ? Une rémunération fixe, une rémunération variable, un mélange entre les deux ? Une rémunération purement fixe, compatible avec le but de la VorstAG à propos de l’interdiction des investissements à court terme et donc autorisée, peut être envisagée. Elle ne paraît cependant pas appropriée s’agissant de la rémunération d’une prestation future. En effet, comment évaluer la performance du dirigeant surtout si celui-ci entre en fonction pour la première fois ? L’insécurité est latente. Dans la pratique pourtant, il existe en Allemagne une tendance générale à augmenter la part de fixe et diminuer celle de variable123. La recommandation du DCGK de mélanger le fixe et le variable est généralement suivie et les entreprises mettent en place en plus de la rémunération fixe, un système de bonus et d’incitation à long terme (LTIP : Long Term Incentive Programm).

Pour préciser le critère de performance, il peut aussi être utilement fait référence à la soft

law française. L’art. 20. 2. 2 Code de gouvernance AFEP/MEDEF prévoit par exemple que la part

variable de rémunération récompense la performance à court terme (comme en Allemagne) ; il recommande que les critères de performance retenus correspondent aux objectifs de la société et soient exigeants, explicables et autant que possible pérennes. Il serait souhaitable que les critères qualitatifs soient simples, peu nombreux, objectifs, mesurables et adaptés à la stratégie de l’entreprise. On retrouve ici le lien performance-stratégie de l’entreprise qui ne pose pas de

122 VIANDIER A., « Les engagements d’indemnisation des dirigeants sociaux après la loi n°2007-1223 du 21 août

2007 », préc. «Tout se passe comme si le législateur tenait pour plus important le respect des règles relatives au versement, règles de constatation et de publicité, plus que le respect de celles gouvernant la conclusion de l'arrangement. Les uns diront que cela s'explique par le fait que c'est le versement qui choque le public plus que la conclusion de l'accord, et que cette nullité de plein droit est le prix de l'émotion. Les autres considéreront que s'agissant de règles formelles - un constat, une publicité - dont l'exécution ne soulève pas, en principe, de difficultés majeures, une sanction aussi radicale que la nullité de plein droit est admissible, alors qu'elle ne l'est pas s'agissant de dispositions pour lesquelles existe un risque d'erreur d'interprétation, comme celles relatives à l'exigence de condition de performance. Les travaux parlementaires ne permettent pas de choisir entre ces deux explications. »

47 problème particulier dans le modèle moniste puisque c’est de toute façon, le conseil d’administration qui détermine les orientations stratégiques de l’entreprise. L’AMF recommande que les sociétés définissent de manière précise et explicite les critères qualitatifs utilisés pour la détermination de la partie variable de la rémunération, sauf dans les cas particuliers où les sociétés indiquent que, pour des raisons de confidentialité, certains critères qualitatifs non publics ont été établis et définis de manière précise (rapport AMF sur les rémunérations des dirigeants des sociétés cotées et sur la mise en œuvre des recommandations AFEP-MEDEF du 9 juillet 2009)124.

Une fois établi que les indices de performance doivent être objectifs pour éviter une marge d’appréciation discrétionnaire du Conseil d’administration, il est nécessaire d’en donner des illustrations pratiques.

Le cours de bourse est le premier critère venant à l’esprit s’agissant de sociétés cotées. Néanmoins, son évolution dépend de bien d’autres facteurs que la performance du dirigeant. Pour filtrer ces facteurs, on peut recourir au benchmarking (comparaison avec des entreprises de la même branche) mais la technique n’est pas sans faille125. Faudrait-il prendre en compte une tendance générale ou uniquement s’attacher au montant du jour de la cessation des fonctions ?

Les juges semblent donc en France s’orienter vers une méthode multicritères126, laquelle permet de donner de l’importance à un critère plutôt qu’un autre en fonction des circonstances. Au niveau financier, on peut citer à titre d’exemple divers ratios : résultat et marge d’exploitation, taux d’autofinancement et d’endettement, coût moyen pondéré du capital, retour sur investissement. De façon plus générale, la croissance du périmètre de consolidation, l’augmentation du chiffre d’affaires, de la valeur de la société, l’amélioration des bénéfices, la réduction des coûts, une réalisation particulière par rapport à la mise en œuvre du projet d’entreprise127 peuvent être utilisés pour évaluer la performance d’un dirigeant.

En Allemagne, la pratique des tantièmes (autorisée bien que soumise aux exigences de long terme) illustre le choix d’indicateurs de performance. Ces derniers sont ainsi liés en pratique au

Cashflow, à l’excédent annuel, à des données de référence tels l’EBIT, EBITD, EBITDA, ROCE (Return on capital employed) ou au rendement global ou propre du capital128. La pratique des tantièmes sur

124

Lefebvre, Mémento pratique Sociétés commerciales, 2011, n°40574

125

MERTENS H.-J., CAHN A., op. préc., § 87 Rn. 55

126LE CANNU P., « L’encadrement des rémunérations des dirigeants de sociétés cotées : l’apport de la loi

n°2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat », préc.

127

PACLOT Y. et MALECKI C., «Le nouveau régime des rémunérations, indemnités et avantages des dirigeants des sociétés cotées », D., 2007, 2481

48 les dividendes versés n’est plus très répandue129. Les tantièmes peuvent également dépendre d’objectifs fixés au niveau financier ou bien des objectifs tels la hauteur des investissements dans l’entreprise, des restructurations, la réalisation d’innovation, la satisfaction des clients. Ici les paramètres sont directement liés au domaine de responsabilité particulier du dirigeant et il faudra faire attention que la part de rémunération y afférente ne porte pas atteinte à la liberté de direction du membre du directoire130. La fixation d’objectifs est également courante en matière de stock-

options : ces objectifs se rapportent souvent au profit dégagé ou à la valeur économique ajoutée (EVA, c’est-à-dire le résultat brut de l’entreprise moins le coût des capitaux propres et étrangers).

Si les critères d’évaluation de la performance sont dans l’ensemble très similaires, on s’aperçoit vite que les rémunérations concernées par le critère de performance ne se recoupent pas d’un pays à l’autre.

II) Le champ d’application du critère