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Chapitre 1 Revue des travaux antérieurs

1.4 Rendement et qualité de la carcasse

1.5.1 Changement du muscle en viande

1.5.1.3 Tendreté

Une mesure objective de la texture de la viande est généralement réalisée à l’aide du dispositif de Warner-Bratzler. La force de cisaillement est en fait une mesure de la force maximale nécessaire pour sectionner un bâtonnet de viande de 1 cm2 de surface. Cette force

peut varier selon la lame qu’on utilise et la forme géométrique de l’échantillon de viande, soit un cylindre ou un prisme rectangulaire, sur lequel on prend la mesure. Il semble que la mesure prise avec la lame en V sur un prisme rectangulaire soit celle qui est la mieux corrélée avec la tendreté mesurée subjectivement par un jury de dégustation (Tornberg, 1996). Contrairement aux valeurs de force de cisaillement, il est par contre difficile d’avoir des valeurs de références dans le cas d’études de dégustation puisque l’échelle de classement peut varier selon les équipes de recherche (Torrico et al., 2018). Toutefois, ces dégustations nous donnent accès à des informations importantes. Ainsi, la viande de chèvre a été identifiée comme étant moins tendre que la viande de bœuf, de porc, d’agneau et de mouton par plusieurs jurys de dégustation (Smith et al., 1974). Par contre, une étude semblable avec des mesures objectives n’est pas disponible à notre connaissance. Tout de

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même, lorsque Schönfeldt et al. (1993) ont comparé la viande de mouton avec la viande de chèvre de race Boer et de race Angora, ils ont noté que le LD de mouton avait une force de cisaillement de 32 Newton (N), significativement plus faible que celle de la chèvre Angora, qui était de l’ordre de 46 N, elle aussi plus faible que celle de la chèvre Boer avec 63 N. Le même phénomène a été observé avec le semimembraneux. Le même exercice de comparaison, cette fois avec des valeurs subjectives obtenues par un jury de dégustation, a mené au même classement. Les auteurs attribuent cette différence, entre autres, à la teneur moins élevée en collagène et plus élevée en collagène soluble de la viande chez les moutons comparés aux chèvres. La teneur en collagène insoluble est un facteur important à considérer en lien avec la tendreté de la viande (Lepetit, 2008). Les différents types de liens, soit divalents ou trivalents, entre les chaînes de collagène ont aussi leur importance. De fait, plus le nombre de ces liens est élevé et plus ces liens sont des liens trivalents, que l’on nomme pyridinoline et Ehrlich chromogen, moins la viande sera tendre, même après vieillissement. En effet, les liens trivalents sont thermostables (Lepetit, 2008). Chez la chèvre, la concentration en pyridinoline augmente avec l’âge alors que Ehrlich chromogen atteint un pic de concentration à 1 an puis diminue avec les années dans le LD, le semimembraneux, le ST, le BF, et le psoas major (Horgan et al., 1990). Sachant que le diamètre de la fibre musculaire de chèvre est plus grand que celui du mouton dans le LD, biceps brachii et le ST (Gaili and Ali, 1985), ce facteur pourrait aussi s’avérer comme faisant partie de l’explication. En effet, il a été démontré que plus le diamètre de la fibre augmente plus la tendreté du muscle diminue (Herring et al., 1965).

Dans une étude réalisée par Dhanda et al. (2003), les forces de cisaillement de la viande de différents génotypes de chèvres, notamment des croisées Boer et des croisées Saanen, ont été différentes. Par ailleurs, le jury de dégustation de la viande n’a pas permis d’établir un classement similaire à celui obtenu grâce aux forces de cisaillement sauf pour la viande la plus tendre. Le génotype, l’âge à l’abattage ainsi que le poids d’abattage sont reconnus pour influencer la tendreté de la viande (Magoub et al., 2012). Ainsi, selon Smith et al. (1978), les chevreaux âgés de 20 mois et moins, ont eu une viande jugée plus tendre par un jury de dégustation que celle de chevreaux de 2 à 6 ans. Dans le même sens, une étude réalisée sur des chevreaux entre 6 mois et un an a révélé que la viande de chevreaux

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de 175 jours était plus tendre que celles des chevreaux de 310 jours (Madruga et al., 2000). Similairement, la viande de chevreaux abattus entre 14 et 22 kg a été plus tendre que celle des chevreaux abattus entre 30 et 35 kg (Dhanda et al., 2003). Toutefois, il serait possible aussi de voir la viande de chevreaux plus légers obtenir une force de cisaillement supérieure à celle de chevreaux plus lourds (Kadim et Mahgoub, 2012b). En effet, les chevreaux plus lourds ont, en plus du muscle déposé, du gras qui protège la carcasse contre un phénomène appelé cold-shortening. Un minimum de gras sous-cutané de 5 mm chez le bœuf et de 14 mm chez le porc, ce qui est plutôt difficile à envisager chez la chèvre, serait nécessaire pour l’obtention d’une viande tendre lors d’une réfrigération rapide de la carcasse (Dikeman, 1996). En effet, lors du refroidissement de la carcasse, une réfrigération trop rapide de la carcasse avant que la rigidité cadavérique ne soit installée mènera à la contraction au froid (Dikeman, 1996). Chez le bœuf et le mouton, une viande ayant subi une contraction au froid est une viande avec une température inférieure à 10 °C alors que son pH est supérieur à 6.0, et ce, 6 heures post-mortem (Savell et al., 2005). Quand la température chute trop vite avant l’atteinte de ce pH, le réticulum sarcoplasmique rejette le calcium en masse dans le sarcoplasme de la cellule. Comme l’ATP est encore disponible, l’actine et la myosine peuvent se lier pour contracter le muscle (Savell et al., 2005). Dans une étude de Smith et al. (1976), le LD des moutons ayant une épaisseur de gras de 1,1 mm (mince) avaient des sarcomères plus courts, un pHu plus élevé, une température interne plus basse jusqu’à 4 heures après l’abattage et un indice de tendreté plus bas que ceux ayant une épaisseur de gras de plus de 3,3 mm (intermédiaire) et de 7,1 mm (épais). Lorsque ce phénomène a lieu sur des carcasses de chèvres, les sarcomères ont été plus courts, soit entre 1,64 et 1,73 μm (Kannan et al., 2006) alors que ces valeurs peuvent atteindre 1,90 μm normalement (Kadim et al., 2006).

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