• Aucun résultat trouvé

2.5.1

Mesures de la porosité accessible à l’eau

Des mesures de porosité accessible à l’eau φE sont réalisées sur nos matériaux, avant et

après carbonatation. Le protocole expérimental utilisé est celui préconisé par l’A.F.P.C.- A.F.R.E.M. [A.F.P.C.-A.F.R.E.M., 1997a]. Les éprouvettes de bétons ont pour dimensions h = 5 cm et φint= 11 cm et celles de pâte de ciment h = 4 cm et φint = 3, 2 cm.

En premier lieu, la porosité accessible à l’eau est mesurée sur les éprouvettes à la sortie de la cure humide et donc dans un état non carbonaté (pour les bétons, les résultats sont donnés dans le tableau 2.5). En second lieu, la porosité est évaluée sur des éprouvettes totalement carbonatées de même dimension. Pour obtenir une carbonatation complète de nos éprouvettes, elles sont placées, non emballées d’aluminium, dans l’enceinte de carbonatation accélérée, tant que leur masse continue de croître et tant que la profondeur de carbonatation XC, mesurée par projection de phénolphtaléine, est inférieure ou égale

à h/2 = 2, 5 cm.

Porosité M 25 M 40 M 50

φE (%) 14, 8± 0, 5 14, 4 ± 0, 4 13, 6 ± 0, 3

Tab. 2.5— Porosité des bétons de l’étude. Valeurs moyennes obtenues systématiquement sur 3 éprouvettes après une cure humide de 90 jours.

2.5.2

Porosimétrie par intrusion de mercure

On fait appel à la porosimétrie par intrusion de mercure pour caractériser l’évolution de la structure mésoporeuse et macroporeuse de nos matériaux au cours de la carbonatation. Le dispositif expérimental utilisé ici est celui du L.C.P.C.. Il s’agit d’un porosimètre équipé de deux postes basse et haute pression : « Pascal 140 » (0, 01 kPa ≤ pHg ≤ 100 kPa) et

« Pascal 440 » (0, 1 MPa ≤ pHg ≤ 400 MPa) permettant d’accéder aux pores de rayon

tel que 1, 8 nm ≤ rp ≤ 60 µm. Cette technique simple est plus complète que la mesure

de la porosité accessible à l’eau, puisqu’elle permet la détermination de caractéristiques texturales des milieux poreux telles la distribution porale et la surface spécifique. En revanche, contrairement à la mesure de porosité accessible à l’eau, elle ne donne pas accès à la microporosité correspondant aux pores de rayon inférieur à 2 nm (porosité des C-S-H) et aux macropores de rayon supérieur à 60 µm (porosité capillaire créée lors du malaxage par exemple).

L’eau liquide ou la vapeur contenue dans les pores du matériau doit être enlevée par un séchage préalable des échantillons, afin que l’ensemble du réseau poreux soit ac- cessible au mercure. Le prétraitement est réalisé pour les bétons à partir d’un étuvage à 45◦ C sous vide en présence de gel de silice pendant 14 jours. Pour les pâtes de ci- ment, on procède à une cryosublimation de 48 heures avec immersion dans l’azote liquide. Pour plus de détails sur ces prétraitements, on se reportera au recueil des méthodes [Baroghel-Bouny et al., 2000a].

La porosimétrie par intrusion de mercure repose sur le caractère non mouillant du mercure. Pour le faire pénétrer dans un milieu poreux vide d’air, il faut lui appliquer une pression d’autant plus forte que la porosité est fine. La manipulation consiste à immerger sous vide dans un bain de mercure un échantillon sec. On lui applique une pression de mercure pHg que l’on augmente de manière incrémentale. On mesure alors le volume

cumulé de mercure V entrant dans les pores à chaque incrément et on en tire la relation V = V(pHg). Le rayon moyen rp de la classe de pores envahis (supposés cylindriques) est

calculé par l’équation de Washburn en fonction de la pression moyenne appliquée pHg :

rp =−

2σHgcos θHg

pHg

(2.2)

σHg = 0, 474 N.m-1 est la tension superficielle du mercure et θHg ≈ 141◦ l’angle de

contact entre la surface solide et le mercure.

On obtient au total la courbe d’intrusion du mercure qui représente le volume cumulé de mercure introduit en fonction du rayon des pores accessibles. Par différentiation lo- garithmique, on construit également la distribution des volumes poreux en fonction des rayons de pores : ∆V /∆ log rp.

Chapitre II - Présentation de la campagne expérimentale 57 La porosimétrie au mercure est praticable sur des échantillons de quelques cm3. Elle est donc tout à fait adaptée à l’investigation de la microstructure des pâtes de ciment. Par contre, son utilisation pour les bétons est plus délicate, car le volume de matière analysé n’est pas représentatif du matériau. Pour limiter la dispersion des résultats de porosité totale, on réalise l’essai de porosimétrie mercure sur un prélèvement de la phase mortier du béton, en évitant les gravillons.

On procède, pour caractérisation, à une porosimétrie mercure sur tous les échantillons de pâte de ciment à la sortie de la cure (cure en piscine de 90 jours pour les bétons et cure endogène de plus d’un an et demi pour les pâtes de ciment). Les figures 2.10, 2.11 et 2.12 regroupent les résultats de distribution poreuse obtenus par intrusion de mercure à l’issue de la phase de cure humide. Les courbes affichées correspondent à une distribution moyenne obtenue sur trois échantillons.

La distribution poreuse des bétons est monomodale dans le domaine 10 nm ≤ rp ≤

60 µm (cf. figure 2.10). Le mode poreux principal est situé entre 10 nm et 100 nm. Il correspond à la porosité de l’architecture des amas d’hydrates (mode poreux inter- hydrates, cf. [Baroghel-Bouny, 1994]). Ce dernier est d’autant plus resserré et déplacé vers les petits pores que le rapport E/C est faible. Signalons que le développement des hydrates est suffisamment avancé pour que la classe de pores correspondant à l’espace poral situé initialement entre les grains de ciment anhydre (100 nm ≤ rp ≤ 1000 nm)

soit inexistante pour les trois bétons de l’étude. Dans le domaine des faibles tailles de pores (rp ≤ 5 nm), l’ébauche d’un mode poreux est détecté. Il est associé à la porosité

interne des C-S-H. Cependant, dans ce domaine, l’interprétation des résultats est délicate, car la pression appliquée par le mercure devient considérable, au point d’endommager la microstructure.

On qualifie également la distribution poreuse des pâtes de ciment de monomodale pour toutes les formulations de l’étude dans la gamme 10 nm ≤ rp ≤ 60 µm (cf. figures

2.11 et 2.12). Comme pour les bétons, le mode poreux inter-hydrates se déplace vers les plus petits pores lorsque le E/C diminue. Seul un reliquat de la porosité capillaire entre les grains de ciment anhydres subsiste pour les matériaux à fort E/C (0, 6 et 0, 5). Les valeurs de porosité accessible au mercure sont fournies dans le tableau 2.6.

Porosité C25 C35 C45 C50 C60

φHg (%) 10, 5± 0, 4 13, 1 ± 0, 5 20, 9 ± 0, 8 26, 9 ± 1, 1 29, 5 ± 1, 2

Tab. 2.6 — Valeurs de porosité accessible au mercure sur pâtes de ciment à l’issue d’une cure endogène de plus d’une année et demie.

Globalement, la microstructure des matériaux de l’étude est bien stabilisée. La géo- métrie du réseau poreux est simple, car relativement monomodale, ce qui facilitera l’in-

100 101 102 103 104 105 0 10 20 30 40 50 60 70 r p (nm) ∆ V / ∆ l o g (r p ) M25 E/C=0,84 M40 E/C=0,62 M50 E/C=0,48

Fig. 2.10 — Distributions des tailles de pores des bétons étudiés (après 90 jours de cure en piscine).

terprétation des résultats lorsqu’il s’agira d’étudier l’impact de la carbonatation sur la microstructure (cf. chapitre V, § 5.3).

Comme Diamond l’a souligné dans son article de synthèse [Diamond, 2000] (propos rapportés dans [Scrivener, 2004], on doit rester très prudent quant à l’interprétation des distributions poreuses obtenues par porosimétrie par intrusion de mercure et quant à leur utilisation, notamment en vue de la quantification des propriétés de transfert. L’auteur indique en effet qu’il y a une importante différence (au moins un ordre de grandeur) entre les tailles de modes poreux déduites de la porosimétrie par intrusion de mercure et de l’imagerie par électrons rétrodiffusés sur surfaces polies. Cet écart est principalement attribuable au fait que la porosimétrie au mercure mesure essentiellement le rayon des chemins d’accès aux pores. Ainsi, la porosité des régions les plus poreuses est comptabilisée pour le rayon des entrées.

2.5.3

Courbes de désorption

Les expériences de sorption de vapeur d’eau permettent de caractériser le matériau d’un point de vue textural [Baroghel-Bouny, 1994]. Cette technique est surtout utilisée, en ce qui nous concerne, pour déterminer les propriétés hydriques de nos matériaux via les isothermes de désorption de vapeur d’eau qui relient le taux de saturation S à l’humidité

Chapitre II - Présentation de la campagne expérimentale 59 100 101 102 103 104 105 0 50 100 150 200 250 300 r p (nm) ∆ V / ∆ l o g (r p ) E/C=0,60 E/C=0,50 E/C=0,45

Fig. 2.11— Distributions des tailles de pores des pâtes de ciment de E/C égal à 0, 60, 0, 50 et 0, 45 (après 1 an et demi de cure endogène).

100 101 102 103 104 105 0 50 100 150 200 250 300 r p (nm) ∆ V / ∆ l o g (r p ) E/C=0,45 E/C=0,35 E/C=0,25

Fig. 2.12— Distributions des tailles de pores des pâtes de ciment de E/C égal à 0, 25, 0, 35 et 0, 45 (après 1 an et demi de cure endogène).

relative HR des pores.

Les isothermes de désorption d’une gamme étendue de bétons et de pâtes de ciment sont étudiés au L.C.P.C. depuis plus d’une dizaine d’années par Baroghel-Bouny : citons par exemple les références [Baroghel-Bouny et Chaussadent, 1993] [Baroghel-Bouny, 1994] [Baroghel-Bouny et al., 1996] [Baroghel-Bouny et al., 1999] [Baroghel-Bouny et al., 2000b]. Ces données servent à alimenter les modèles. La désorption du béton M 25 a été étudiée au L.C.P.C. par Baroghel-Bouny. Pour le M 50, on utilise les résultats portant sur un béton légèrement différent : BO de E/C = 0, 47 et de ciment CEM I 52, 5 P M ES (usine du Teil). Faute de données, la courbe de sorption du M 40 est une courbe intermédiaire entre celle du M 25 et celle du M 50. Les points de sorption de la pâte C45 sont approximés par ceux obtenus sur une pâte de ciment CN de même E/C, mais de ciment différent CEM I 52, 5 P M ES (usine du Teil).

Paramètres M 25 M 40 M 50 ∼ BO BH C45∼ CN CO CH

α (-) 10, 32 8, 53 7, 27 2, 88 5, 72 3, 61 1, 41

β (-) 0, 437 0, 439 0, 440 0, 485 0, 444 0, 461 0, 513

Tab. 2.7— Paramètres α et β de la relation taux de saturation - hygrométrie 2.3.

Afin d’exprimer le taux de saturation comme une fonction continue et régulière de l’humidité relative, une courbe est calée à partir des résultats expérimentaux. La famille de fonctions utilisées est à deux paramètres α et β, et est définie par :

S =h1 + (−α ln HR)1−β1

i−β

(2.3) Cette famille de fonctions correspond à celle introduite par van Genutchen [van Genutchen, 1980]. La technique pour déterminer les paramètres optimums α et β est détaillée dans [Mainguy et al., 1999] : elle consiste à minimiser l’écart quadratique entre la fonction (2.3) et les points expérimentaux. Les valeurs des paramètres α et β sont résumées dans le tableau 2.7. Les courbes issues de cette calibration sont présentées sur les figures 2.13 et 2.14. L’optimisation est réalisée sans prendre en compte les points obtenus aux fortes humidités relatives (HR ≥ 80 %). En effet, aux très hautes humidités relatives, les échantillons sont dans un état hydrique très instable, car très sensible à de faibles variations thermohygrométriques. Ceci est d’autant plus marqué si le matériau a une faible porosité.