• Aucun résultat trouvé

Chapitre I : Etude bibliographique

5.1 Taux de rétention des solutés et couche de polarisation de concentration

5 Grandeurs caractéristiques des membranes d’ultra/nanofiltration

La rétention d’un soluté ionique ou neutre est une donnée essentielle pour caractériser la sélectivité d’une membrane. En ultra/nanofiltration, cette sélectivité s’opère dans la couche active de la membrane et est contrôlée par trois effets principaux : les effets stériques, électriques et diélectriques. Dans un premier temps, nous définirons le taux de rétention et nous décrirons en détail les 3 phénomènes d’exclusion qui régissent la sélectivité des membranes d’ultra/nanofiltration.

5.1 Taux de rétention des solutés et couche de polarisation de concentration

5.1.1 Taux de rétention des solutés

En filtration membranaire, le taux de rétention d’une espèce donnée en solution représente l’aptitude d’une membrane à retenir cette espèce. On distingue deux taux de rétention : les taux de rétention intrinsèque et observé.

5.1.1.1 Taux de rétention intrinsèque

Le taux de rétention intrinsèque d’un soluté i en solution est une grandeur qui permet d’évaluer la sélectivité effective ou réelle de la couche active d’une membrane vis-à-vis du soluté concerné. C’est-à-dire qu’il est fonction uniquement des propriétés de la couche active de la membrane. Sa valeur est donc déterminée par l’expression suivante :

𝑅𝑅𝑖𝑖,𝑖𝑖𝑛𝑛𝑖𝑖 = 1 − 𝐶𝐶𝑖𝑖,𝑝𝑝

𝐶𝐶𝑖𝑖,𝑚𝑚 (18) où 𝐶𝐶𝑖𝑖,𝑝𝑝et 𝐶𝐶𝑖𝑖,𝑚𝑚 (mol.m-3) sont les concentrations du soluté i respectivement dans le perméat et à la paroi de la membrane.

Le taux de rétention intrinsèque traduit la sélectivité de la membrane sans être influencé par les conditions hydrodynamiques des solutions en amont et en aval de la membrane. Le taux de rétention intrinsèque n’est pas directement mesurable expérimentalement.

5.1.1.2 Le taux de rétention observé

C’est le taux de rétention d’un soluté i directement observable expérimentalement et déterminé par la formule suivante :

𝑅𝑅𝑜𝑜𝑜𝑜𝑜𝑜 = 1 −𝐶𝐶𝑖𝑖,𝑝𝑝

58 où 𝐶𝐶𝑖𝑖,𝑝𝑝et 𝐶𝐶𝑖𝑖,𝑟𝑟 (mol.m ) sont les concentrations du soluté i respectivement dans le perméat et dans le rétentat.

Ce taux de rétention peut être facilement accessible expérimentalement lors des essais de filtration. Cependant cette valeur est par définition fonction des conditions hydrodynamiques des solutions à filtrer.

Ce taux de rétention rend compte du transfert du soluté à la fois dans la couche de

polarisation et dans la membrane. Tandis que le taux de rétention intrinsèque rend compte

uniquement du transfert du soluté à travers la membrane.

5.1.2 Polarisation de la concentration

Le phénomène de polarisation de concentration se produit au voisinage de l’interface entre la solution à filtrer (rétentat) et la surface membranaire. Ce phénomène résulte de l’accumulation de soluté dans cette région formant ainsi une couche de polarisation (figure 15). De nombreux auteurs ont étudié l’influence de ce phénomène sur la rétention des solutés à travers des membranes organiques au moyen de la modélisation de cette couche de polarisation [91] [92] [93].

La réalisation de ce modèle [94] a été faite en établissant un bilan de matière au sein de la couche de polarisation. On suppose dans ce cas que le flux convectif vers la membrane s’équilibre avec le flux de perméation à travers l’équation suivant :

Figure 15 : Polarisation de la concentration à la surface de la membrane y U(x) δCLH Ci,r Ci,p Ci,m δCLP x C(x)

ME

MBRA

N

E

Perméation Convection - diffusion

59 𝑉𝑉𝐶𝐶𝑖𝑖(𝑥𝑥) − 𝐷𝐷𝑖𝑖,𝑚𝑚 𝑑𝑑𝑥𝑥 = 𝑉𝑉𝐶𝐶𝑖𝑖,𝑝𝑝 (20) où 𝑉𝑉, est la composante radiale de la vitesse dans l’écoulement et 𝐷𝐷𝑖𝑖,𝑚𝑚 est coefficient de diffusion moléculaire de l’espèce i dans la couche de polarisation.

Dans une vision monodimensionnelle et simplifiée, l’intégration de cette équation suivant x permet d’obtenir la loi du film [94] :

𝑉𝑉 = 𝑘𝑘 𝑙𝑙𝑛𝑛 �𝐶𝐶𝑖𝑖,𝑚𝑚−𝐶𝐶𝑖𝑖,𝑝𝑝

𝐶𝐶𝑖𝑖,𝑟𝑟−𝐶𝐶𝑖𝑖,𝑝𝑝� (21) où 𝑘𝑘 = 𝐷𝐷𝑖𝑖,𝑚𝑚

𝛿𝛿𝐶𝐶𝐿𝐿𝑑𝑑 est le coefficient de transfert dans la couche de polarisation, Ci,r, la concentration dans le rétentat, Ci,p, la concentration dans le perméat et Ci,m, la concentration à la paroi de la membrane.

Ce coefficient dépend des caractéristiques hydrauliques (vitesse tangentielle d’écoulement U) et géométriques (diamètre hydraulique de la section d’écoulement). Sur la figure 15, 𝛿𝛿𝐶𝐶𝐿𝐿𝑑𝑑 représente l’épaisseur de la couche limite de polarisation et 𝛿𝛿𝐶𝐶𝐿𝐿𝐻𝐻 l’épaisseur de la couche limite hydrodynamique.

En introduisant dans la relation (21) les expressions des taux de rétention intrinsèque (18) et observé (19), il est possible d’écrire des relations entre ces deux taux de rétention :

𝑅𝑅𝑖𝑖𝑛𝑛𝑖𝑖 = 𝑅𝑅𝑜𝑜𝑜𝑜𝑜𝑜exp⁡(𝑑𝑑𝑒𝑒)

1−𝑅𝑅𝑜𝑜𝑜𝑜𝑜𝑜[1−exp ⁡(𝑑𝑑𝑒𝑒)] (22) avec 𝑑𝑑𝑒𝑒 = 𝐽𝐽𝑣𝑣𝛿𝛿𝐶𝐶𝐿𝐿𝑑𝑑

𝐷𝐷𝑖𝑖,𝑚𝑚 , le nombre de Peclet dans la couche de polarisation.

Le nombre de Peclet (𝑑𝑑𝑒𝑒) est un nombre adimensionnel introduit qui exprime le rapport entre le transport convectif et le transport diffusionnel d’un soluté dans la couche de polarisation.

- lorsque 𝑑𝑑𝑒𝑒 ≫ 1 : la convection est prédominante dans la couche limite, la polarisation de la concentration est importante et la rétention est faible.

- lorsque 𝑑𝑑𝑒𝑒 ≪ 1 : le transfert diffusif dans 𝛿𝛿 est prépondérant, la polarisation de la concentration devient négligeable.

60 De même si on évalue la limite du taux de rétention observé à l’aide de la relation (21), on peut distinguer deux cas particuliers :

- lorsque la couche de polarisation est très importante : 𝑅𝑅𝑜𝑜𝑜𝑜𝑜𝑜 << 𝑅𝑅𝑖𝑖𝑛𝑛𝑖𝑖 et peut conduire à des taux de rétention pratiquement nuls,

- lorsque l’effet de la couche de polarisation est très faible : 𝑙𝑙𝑖𝑖𝑚𝑚𝛿𝛿→0(𝑅𝑅𝑜𝑜𝑜𝑜𝑜𝑜) = 𝑅𝑅𝑖𝑖𝑛𝑛𝑖𝑖. De nombreux auteurs, dont Limousy et al. [8], ont fait l’hypothèse de la non influence de la couche de polarisation, pour la détermination expérimentale du taux de rétention lors de tests de filtration (solutions électrolytiques de faible concentration, faible taux de rétention, vitesses de circulation du rétentat élevées). Ces résultats ont été vérifiés expérimentalement.

La prise en compte de la couche de polarisation est réalisée suivant les auteurs par une approche 1D (modèle du film par exemple) ou par une approche 2D pour tenir compte de l’établissement de cette couche. Dans cette première approche, le taux de rétention intrinsèque est calculé en utilisant la méthode de la variation de la vitesse (VVM9) (méthode basée sur le modèle du film). Elle permet de s’affranchir de la couche de polarisation en calculant les taux de rétention intrinsèque à partir des taux de rétention observée à plusieurs vitesses débitantes.

D’autres auteurs ont utilisé des visions 1D ou 2D "numérique" permettant de calculer la concentration à la membrane. La différence principale entre les deux techniques réside dans la prise en compte de l’établissement de la couche limite.