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Le tabou du sang et du sang féminin

Dans le document Le corps écorché, dépecé, recomposé (Page 151-159)

A. La Femme taboue

1. Le tabou du sang et du sang féminin

Vous ne mangerez du sang d’aucune chair, car l’âme de toute chair est son sang ; chacun de ceux qui en mangeront sera retranché.676

Lévitique XVII, 10-14.

Ils t’interrogeront sur les menstrues. Dis : c’est une impureté.677

Coran, II, 222.

Si nous devons soulever ne serait-ce qu’un exemple illustrant la présence indéniable d’un tabou fondamental des sociétés primitives qui œuvre aujourd’hui dans notre société contemporaine, nous choisirons la censure subie en 2012 par l’artiste Joana Vasconcelos pour son œuvre La Fiancée, A Noiva en portugais. Elle est l’œuvre la plus célèbre de cette artiste d’origine portugaise, née en 1971 à Paris ; l’artiste la qualifie comme : « sans doute ma création la plus importante et emblématique, c’est elle qui m’a fait connaître sur la scène internationale de l’art contemporain, avec une première présentation lors de la Biennale de Venise, en 2005 ».678 Selon le critique d’art Philippe Dagen, ce travail est l’une des réussites de la Biennale.679 Première artiste femme invitée à exposer au château de Versailles, Joana Vasconcelos considérait La Fiancée comme une œuvre clé de cette exposition. Sculpture monumentale de six mètres de hauteur, elle représente un lustre qui est composé de 25 000 tampons hygiéniques.680 Son choix de la marque OB n’est pas anodin, car ceux-ci sont peut-être les seuls à être présentés ainsi sur le marché : ils sont entourés simplement d’un film transparent qui rend plastiquement évident l’objet et sa couleur blanche. « J’ai fait le lustre en blanc avec les tampons qui sont encore empaquetés sur le film plastique, c'est-à-dire qu’ils sont encore vierges, ils ne sont pas utilisés. »681

676

Jean-Paul Roux, Le Sang, mythes, symboles et réalités, Paris, éditions Fayard, 1988, p. 55.

677

Ibid., p. 57.

678

Christelle Granja, « Censurée à Versailles, Vasconcelos étale son lustre à Paris », Site de myeurop.info, <http://fr.myeurop.info/2012/07/30/censuree-a-versailles-vasconcelos-etale-son-lustre-a-paris-5734>

679

Philippe Dagen, « Joana Vasconcelos, une femme un peu trop libre pour la cour du Roi-Soleil », Le

Monde, 26 février 2012, <http://www.lemonde.fr/culture/article/2012/06/20/joana-vasconcelos-une-femme-

un-peu-trop-libre-pour-la-cour-du-roi-soleil_1721774_3246.html>

680

Entrée « Joana Vasconcelos », Wikipédia, <http://fr.wikipedia.org/wiki/Joana_Vasconcelos>

681

Joana Vasconcelos enregistrée sur le blog de Christine Siméone, « La Fiancée de Vasconcelos au 104 : et toc ! », Le Blog de Christine Siméone, 1:40 à 1:50, < http://www.franceinter.fr/blog-le-blog-de-christine- simeone-la-fiancee-de-vasconcelos-au-104-et-toc>

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Joana Vasconcelos, à gauche : détail, A Noiva (La Fiancée), 2001-2005, 6 m x 3,5 m x 3,5 m, acier inoxydable, 25 000 tampons hygiéniques OB, fil de coton et câbles en acier ; à droite : avec La Fiancée au 104, Paris, 2012.

Dans un court entretien radiophonique, Vasconcelos parle des différents symbolismes qui opèrent dans son œuvre : la liberté de la femme contemporaine s’exprime par l’objet du tampon, la couleur blanche exprime la pureté.682

Pour l’exposition « Joana Vasconcelos Versailles », l’artiste et le commissaire de l’époque, Jean-Jacques Aillagon, cherchaient une mise en scène pour La Fiancée avec sa « sœur », Carmen (2001), autre lustre noir et agrémenté de dizaines de boucles d’oreilles colorées.683 On la cite : « J’avais un rêve : obtenir que deux lustres de la galerie des Glaces soient détachés et suspendre à leur place La Fiancée à une extrémité, Carmen à l’autre, la blanche et la noire, la pure et la pute. »684 Hélas, lors des dernières préparations et sans même que l’artiste soit prévenue685, la présidente du château, Catherine Pégard, refuse l’exposition de La Fiancée : elle « n’était pas "en résonance" avec la demeure royale. "Censure !" crie l’artiste Joana Vasconcelos. »686 L’article sur le net de Christelle Granja « Censurée à Versailles Vasconcelos étale son lustre à Paris », raconte comment l’artiste

682

« J’ai utilisé le tampon en tant que symbole de la liberté de la femme contemporaine. Ca veut dire que c’est une pièce qui parle aussi de l’objet, de la femme en tant qu’objet, parce que la fiancée dans le jour de son mariage elle est l’objet de la famille qui symbolise la richesse, la beauté, la perfection… ; - Il faut que ça saigne dans les traditions ancestrales. – Oui, mais le jour du mariage il faut qu’elle soit pure, l’image de la pureté. Le blanc symbolise la pureté […] », Entretien de Christine Siméone avec Joana Vasconcelos, op. cit., 0:01 à 1:05.

683

Philippe Dagen, op. cit.

684

Ibid.

685

« Alors que l’œuvre était inscrite dans le premier projet d’exposition, elle en a été retirée au dernier moment, sans qu’il me soit donné d’explication », Joana Vasconcelos citée par Christelle Granja, op. cit.

686

152 s’est tournée ensuite vers le centre culturel du 104 à Paris, « qui dit "oui" à cette prétendante, pour une exposition juilletiste au pied levé. »687

La Fiancée est une œuvre d’art contemporain hantée par le tabou fondamental primitif du sang menstruel. Curieusement, l’expression du tabou exprimée si fortement et si évidemment par l’œuvre n’est mentionnée nulle part comme ayant été la raison de sa censure ! Aucun des articles de la presse écrite que nous avons consultés à ce sujet, ni sur l’internet ni dans les magazines d’art, ne fait part du lien spécifique entre la censure subie par l’œuvre et le tabou du sang menstruel. La présence du tabou indéniable à nos yeux explique aussi bien la controverse et la censure causées par La Fiancée que la frayeur et la répulsion extrême que sa matière première (les tampons hygiéniques) ne cesse de susciter. Christine Siméone rapporte sur son blog de France Inter que les personnes chargées d’accrocher le lustre ont refusé de le toucher688 ; Christelle Granja sur le sien rapporte un fait similaire: la « levée de boucliers de la part des techniciens chargés de son montage » lors d’une autre exposition à Budapest.689 Joana Vasconcelos note la nature « féminine » de la censure qui frappe son œuvre : « C’est quand même étrange : inviter ici pour la première fois une femme artiste, et faire obstacle à des œuvres qui ont un rapport avec la féminité. »690

Nous voulons rappeler brièvement les caractéristiques et l’ampleur du tabou du sang en général, avant de regarder de plus près sa spécificité féminine : le sang menstruel. Nous sonderons ensuite son implication dans la représentation du féminin, ainsi que son rôle dans l’instauration de la différence homme/femme.

Dans la première partie de cette thèse, nous avons évoqué succinctement le tabou du sang en rapport avec les actes liés à la viande, notamment la chasse. La chasse impliquait un affrontement entre les hommes et les bêtes par lequel les hommes voulaient dominer leur peur et se prémunir des dangers potentiels de blessures et de mort.691 Les propos de Jean-Paul Roux nous rappellent la base de cette crainte :

Il [le sang] évoque celui que l’homme verse à la chasse ou à la guerre et que, à tout instant, victime guettée par son gibier ou son ennemi, il est menacé de perdre lui- même. On dirait qu’il n’a pas d’autre fonction que de lui rappeler sa vulnérabilité et la mort inexorable qui le guette.692

687

Christelle Granja, op. cit.

688

Christine Siméone, op. cit.

689

Christelle Granja, op. cit.

690

Joana Vasconcelos cité par Philippe Dagen, op. cit.

691

Cf. p. 102 de cette thèse.

692

153 Dans l’introduction de son ouvrage Le Sang : mythes, symboles, réalité, Jean-Paul Roux parle de la qualité essentiellement ambiguë et ambivalente du sang. « Intimement lié aux images de la mort et plus encore à celles de la vie […]. »693, il est simultanément dangereux et bienfaisant, néfaste et faste, impur et pur.694 D’une manière générale, tous les écoulements du corps, troublent et effraient, mais c’est celui du sang qui est considéré comme le plus terrifiant, car il est lié à la mort.695 Son ampleur et son intensité dans les sociétés primitives sont incomparables par rapport à d’autres interdits ; et la peur d’enfreindre le tabou représente une angoisse à caractère obsessionnel pour ces peuples.696 L’étendue du tabou est illustrée par la description qu’en offre Laura Lévi Makarius dans son ouvrage Le Sacré et la violation des interdits :

Le sang qui s’écoule apparaît à la fois comme cause, signalement et présage des dangers et des maux que subissent les humains, ou desquels ils sont menacés. Dominante, elle absorbe les autres craintes et s’étend de son objet, le sang, à ce qui lui est proche ou peut lui être de quelque manière associé. Le sang devient le symbole de tous les maux et de la mort elle-même, et ce qui est évocateur du sang s’investit à son tour de la force émotive dont le sang est chargé.697

De tous les « types » de sang, le sang féminin est celui que l’on craint le plus. De toutes les hémorragies, écrit Jean-Paul Roux, on considère que les menstrues résonnent le plus puissamment sur le psychisme.698 Pour lui, on ne peut parler en termes d’angoisse tant le mot est faible : « Devant le sang menstruel, l’homme quitte tout état descriptible. On a raison de prétendre que rien dans la vie, même la torture, même le trépas de l’être le plus cher, du moins dans des sociétés archaïques, n’a pu autant l’effrayer. »699 Georges Bataille écrit dans L’Histoire de l’érotisme : « Les primitifs ont du sang menstruel une terreur si grande que nous avons peine à nous en représenter l’intensité » ; il caractérise ce tabou de « premier », de « phobie ».700 Les interdits posés et les sanctions infligées ont été les plus extrêmes en ce qui concerne le sang féminin. Georges Bataille explique que ces interdits avaient pour objectif de préserver la collectivité du moindre contact – dans certaines sociétés les femmes qui apportaient la nourriture aux femmes et aux jeunes filles réglées sont sanctionnées par une mise à mort.701 Enfin, on considère le tabou du sang

693

Jean-Paul Roux, op. cit., p. 11.

694

Ibid.

695

Ibid., p. 57.

696

Cf. Laura Lévi Makarius, op. cit., pp. 22-23 ; et Georges Bataille, L’Histoire de l’érotisme, in Georges Bataille, op. cit., p. 54.

697

Laura Lévi Makarius, op. cit., p. 22.

698

Jean-Paul Roux, op. cit., p. 58.

699

Il poursuit, « Si quelque accident met l’homme en rapport avec ce sang, l’émotion est si forte qu’elle peut faire perdre la raison. On a cité des gens qui en ont été tués sur le coup. », Ibid., p. 59.

700

Georges Bataille, L’Histoire de l’érotisme, in Georges Bataille, op. cit., pp. 53-54.

701

154 féminin comme le plus répandu ; selon la spécialiste Laura Lévi Makarius, il est présent sans exception dans toutes les sociétés archaïques, primitives.702

Evoquons maintenant les notions de contamination, de souillure, et d’impureté. Laura Lévi Makarius explique que les textes ethnographiques ont démontré que dans les sociétés primitives, ces notions se trouvent toujours étroitement et fondamentalement liées avec le « danger du sang ». Nous portons un intérêt particulier à ces notions car elles nous permettent d’agrandir l’étendue du tabou pour comprendre tout ce qui « s’associe à » et tout ce qui « suggère » le sang.

Le terme impureté ne désigne pas un des aspects ou des attributs du sang, mais la présence de l’élément dangereux qu’est le sang lui-même. Il faut retenir que pour la pensée ici étudiée l’impureté n’existe pas en soi : elle n’est que le danger du sang (et par extension ce qui est associé au sang, ou le suggère).703

On ne peut que soutenir et prouver combien les tampons hygiéniques mis en scène dans La Fiancée expriment ce tabou du sang : par leur association, par leur suggestion, et par leur évocation du sang. De surcroît et de toute évidence, ils n’expriment pas n’importe quel sang, mais le sang menstruel, dont le tabou est considéré comme le plus redoutable et le plus terrifiant que l’homme ait jamais connu.

La spécificité féminine du tabou, le sang féminin, comprend non seulement tous les critères déjà cités : la présence, le contact, la vue, l’association, la suggestion, et l’évocation du sang, mais qu’il s’étend à sa source : à la femme, en tant que personne qui en est souillée et qui saigne :

les hommes croient se prémunir contre les dangers et les maux qu’ils appréhendent en évitant le contact et la vue du sang, en bannissant ce qui peut en évoquer l’idée et en éloignant les personnes qui en sont souillées ou qui saignent. Celles-ci devront observer des interdits visant à protéger les autres du danger émanant d’elles, et des interdits seront observés à leur égard par les membres de la collectivité pour évider d’être mis en danger et de devenir à leur tour porteurs de danger.704

Certains spécialistes tels Georges Bataille et Jean-Paul Roux attribuent le « décuplement féminin » du tabou à la partie du corps responsable de son écoulement : le

sexe féminin. « Nous sommes portés à croire que cet écoulement est impur : c’est qu’en effet l’organe d’où il provient est tenu pour tel »705 a écrit Georges Bataille, tout en notant

702

« Alors qu’on ne connaît pas de société primitive ou archaïque où le sang menstruel ne soit considéré comme une matière dangereuse, devant être soustrait au contact et interdite, […] », Laura Lévi Makarius, op. cit., p. 20.

703

Ibid., p. 23.

704

Ibid., p. 22.

705

155 l’irrationalité d’une telle terreur et d’une telle répugnance de la part des primitifs. Jean- Paul Roux ouvre le chapitre « Les Menstrues » de son ouvrage par l’idée qu’il existe chez les primitifs, « l’abondance du sang menstruel » : « Le sang des femmes est partout, et l’on pourrait se heurter à lui constamment si l’on ne prenait grand soin de l’éviter. »706 Il cite en exemple la tribu des Baruyas, peuple de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, qui regarde avec méfiance le sexe féminin comme

une fente incapable de retenir quoi que ce soit, ni la semence que l’homme y loge, ni le sang, et ils se détraquent avec une extrême facilité, […]. Aussi n’est-on jamais assez prudent. […] si elle se trouve en présence d’un homme, elle ne doit pas rester debout, mais assise puisque dans cette position elle est mieux fermée et ne peut rien perdre comme elle pourrait le faire si elle se promenait.707

La terreur et l’angoisse du sang qui sort de cette « fente » qu’est le sexe féminin, cette « ouverture » qui ne peut être « fermée », se lient à la sexualité. Laura Lévi Makarius cite les travaux d’Emile Durkheim : « Le sang menstruel jaillit soudainement, de manière inexplicable, il ne peut être retenu, ni caché et […] il provient d’un organe qui est au centre de l’intérêt masculin et avec lequel le contact est le plus intime. »708 Et Jean-Paul Roux : « Qui plus est, il [le sang] sort du sexe de la femme, de ce sexe qui l’attire irrésistiblement dès la puberté, auquel, pour être homme et père, il doit aller, avec lequel il entre en contact de la plus étroite façon. »709 Pour ce dernier, le décuplement de la terreur du sang est dû à ses liens avec la sexualité et la violence : « Ce sang de la violence et du sexe a comme image le sang menstruel. »710 Foncièrement ambivalent, le sang féminin est vu comme nécessaire, à la féminité, à la procréation, et même il a été utilisé à des fins bénéfiques, ce qui confirme, pour Jean-Paul Roux, la terreur qu’il provoque : « Car c’est une loi générale que ce qui est le pire peut servir au meilleur. Plus un tabou est redoutable, plus passer outre est efficace – si on réussit. »711 Enfin, Georges Bataille explique que la perception

706

Jean-Paul Roux, op. cit., p. 58.

707

Ibid., pp. 81-82.

708

Laura Lévi Makarius fait référence à Durkheim (1898, p. 50) ; elle poursuit : « Les hommes qui doivent affronter les périls de la chasse, où ils risquent de voir couler leur propre sang, saisis d’angoisse à la vue des écoulements sanglants de leurs compagnes, déploient toutes les virtualités du tabou pour écarter le danger qui leur semble émaner d’elles », Laura Lévi Makarius, op. cit., p. 23.

709

Jean-Paul Roux, op. cit., p. 59.

710

Ibid., p. 61.

711

Il poursuit : « Et il s’agit évidemment ici de la violation d’un tabou. N’en exagérons pas la fréquence. […] Il semblerait d’ailleurs que l’utilisation du sang menstruel ait été la plus fréquente surtout chez des peuples déjà fort éloignés de la mentalité archaïque, notamment par des siècles de civilisation chrétienne », Ibid., p. 60. Nous nous référerons également à d’autres exemples qu’offre Laura Lévi Makarius de « l’emploi du sang dangereux à des fins favorables [qui] : elles répondent à l’idée d’éloigner, au moyen du caractère dangereux du sang, des êtres ou des influences nuisibles. […] Quand un Arapesh (Nouvelle-Guinée) craint d’avoir été ensorcelé, il se fait soigner par une femme en règles, qui lui masse la poitrine du poing ou lui fait boire une infusion de feuilles tachées de son sang. […] En même temps, l’homme tient la main droite, celle qui chasse et plante les ignames,

156 diffère entre le sang menstruel et le sang de l’accouchement : le premier étant vu comme une « infirmité », voire une « malédiction » pour les femmes, à la différence du second, qu’on ne regarde pas avec autant d’horreur.712

On comprend que la terreur du sang menstruel est générale et universelle et qu’elle ne se limite pas aux primitifs.713 Jean-Paul Roux soutient cette thèse par plusieurs citations qui expliquent, d’une part, cette universalité et d’autre part la qualité extrêmement impure de l’être féminin : « Il n’y a pas de sphère de la vie humaine dans laquelle on observe plus grande uniformité que dans le traitement de la femme en menstruation […] .»714 ; « Dans les sociétés primitives, à peu d’exceptions près, il n’est pas d’impureté […] plus redoutable que celle de la femme pendant son indisposition périodique. »715 Pour ces spécialistes, l’universalité et l’extrémisme de ce tabou l’ont fait persister jusque dans nos sociétés contemporaines où ses traits archaïques apparaissent encore.716

En règle générale, pendant ses menstrues, soit la femme est totalement exclue de la société, soit elle est victime de nombreux interdits.717 Elle représente un danger notamment pour le succès de la chasse ; dans certaines sociétés, l’interdit touche même l’homme ou le mari de la femme réglée qui se voit contraint de ne pas aller chasser.718 D’autres interdits empêchent la femme réglée : de toucher aux armes des hommes pour ne pas les « maudire », de fréquenter les lieux de chasse, de rencontrer son mari s’il va chasser, d’approcher les animaux ayant été tués.719 D’autres interdits similaires concernent la femme et la guerre, activité moins fréquente que la chasse. Jean-Paul Roux résume la base de cette crainte :

élevée au-dessus du corps de la femme, afin qu’elle reste indemne de ce contact (Mead, 1940, p. 422). L’exemple montre le caractère contradictoire du recours au sang menstruel, exigeant de se prémunir contre la nocivité d’un remède aussi dangereux que le mal », Laura Lévi Makarius, op. cit., pp. 48-49.

712

Georges Bataille, L’Histoire de l’érotisme, in Georges Bataille, op. cit., p. 54.

713

Jean-Paul Roux, op. cit., p. 59.

714

S. Thomson (p. 205) cité par R. & L. Makarius (1961, p. 56) cité par Jean-Paul Roux, Ibid.

715

L. Lévy-Bruhl (1931, p. 380) cité par Jean-Paul Roux, Ibid.

716

« Ces sortes de conduites à l’égard du sang vaginal furent si universellement déterminées qu’elles jouent encore dans nos sociétés occidentales », Georges Bataille, L’Histoire de l’érotisme, in Georges Bataille, op. cit., p. 54. Cf. aussi ses notes en bas de page, Ibid.

717

Ibid., p. 62. On se réfère aussi aux propos de Laura Lévi Makarius : « On connaît l’universalité de la hutte

Dans le document Le corps écorché, dépecé, recomposé (Page 151-159)

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