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CHAPITRE 2 REVUE DE LITTÉRATURE

2.4 Méthodes de guidage magnétique

2.4.3 Systèmes à actionnement électromagnétique

Pour réaliser le contrôle plus rapide et précis de dispositifs magnétiques, des systèmes à base de bobines électromagnétiques ont été proposés. Ces systèmes, dits à actionnement électromagnétique (AEM), permettent d’induire des variations rapides du champ et des gradients dans un certain volume de travail en faisant fluctuer le courant électrique circulant dans chacune des bobines. Comme les systèmes à aimants permanents robotisés, ils permettent de contrôler en général jusqu’à cinq degrés de liberté (3 translations et 2 rotations), selon le nombre de bobines employées [55]. Le contrôle des six degrés de liberté peut être réalisé, mais requiert une magnétisation non uniforme de l’agent [56, 57]. Parce que la flexibilité et les fréquences de contrôle sont potentiellement beaucoup plus élevées que les systèmes à aimants permanents, les systèmes à AEM sont mieux adaptés aux tâches de guidage complexes. De nombreuses variantes de systèmes à AEM, composés de différents arrangements de bobines, ont été proposées pour diverses applications. Le système Octomag [58], par exemple, est une plateforme à huit bobines positionnées autour de la tête du patient qui a été proposée pour contrôler, selon cinq degrés de liberté, un petit dispositif injecté dans l’œil afin de réaliser des chirurgies intraoculaires minimalement invasives. L’efficacité de ce système a été validée in vivo en contrôlant un petit outil chirurgical cylindrique de 0.3×1.8 mm inséré dans l’œil de lapins [59]. Les gradients magnétiques générés par les bobines atteignent jusqu’à 1 T/m dans un volume de travail d’environ 20 mm de diamètre, mais avec un champ faible de 40 mT [59]. Une photographie du système est présentée à la Fig. 2.7. Similaire, le Minimag est une version miniaturisée du Octomag qui a été proposée pour la micromanipulation de particules ou de cellules biologiques [60] et qui peut dans son cas atteindre des amplitudes de champ et de gradient allant jusqu’à 50 mT et 5 T/m dans une zone de travail de 10 mm de diamètre. Des systèmes électromagnétiques ont également été proposés pour le guidage de capsules endoscopiques [17, 61–63]. En particulier, le Magnetically Guided Capsule Endoscope (MGCE) [61], développé conjointement par Siemens et Olympus, a été évalué positivement dans une étude clinique. Dans [62], l’utilisation de bobines mobiles (plutôt que fixes) est proposée pour augmenter la flexibilité de contrôle et réduire le nombre de bobines requises.

Figure 2.7 Le système Octomag, composé de huit bobines électromagnétiques, permet le contrôle avec cinq degrés de liberté d’un petit dispositif pour accomplir des microchirurgies oculaires. Image tirée de [58].

D’autres plateformes basées sur l’actionnement électromagnétique ont été développées pour le guidage de dispositifs à l’intérieur des vaisseaux sanguins [64–67]. En particulier, des résultats intéressants ont été obtenus récemment pour le traitement in vivo d’une thromboembolie artificielle dans une artère de cochon à l’aide d’un outil magnétique en forme de projectile de 2 mm de diamètre par 15 mm de longueur [68]. Le système utilisé, illustré à la Fig. 2.8, est composé de deux paires de bobines fixes et de deux paires de bobines rotatives pouvant tourner autour du patient. Ces dernières permettent d’augmenter à cinq le nombre de degrés de liberté (par rapport à trois si elles étaient fixes), mais en sacrifiant toutefois de la rapidité pour induire des variations de forces et de couples dans certaines directions. Les systèmes commerciaux de guidage de cathéter Aeon Phocus de Aeon Scientific [69] et CGCI de Magnetecs [70] exploitent également la propulsion par AEM. Le système Aeon Phocus, composé de huit bobines (cinq degrés de liberté), est illustré à la Fig. 2.9. Avec une approche différente, une configuration orthogonale de six bobines entourant un corps ferromagnétique a été proposée sous le nom de Omnimagnet [71]. Ce dernier permet de générer un dipôle magnétique dont la direction et l’amplitude peuvent être variées en contrôlant le courant dans les bobines. L’Omnimagnet permet de guider selon trois degrés de liberté un dispositif situé à l’extérieur de cet assemblage de bobines. La combinaison de plusieurs Omnimagnets, dont la configuration

(a) (b) (c)

Figure 2.8 Système à actionnement électromagnétique développé par Jeong et al. pour diriger un dispositif dans les artères [68]. a) Photo du prototype ; b) Schéma de la configuration des bobines fixes (oranges et vertes) et rotatives (bleues et rouges). Des sources et détecteurs de rayons X (en gris) permettent le suivi du dispositif ; c) Dispositif, usiné dans un aimant permanent, dirigé avec succès dans une artère de cochon. Images tirées de [68] avec permission.

(a) (b)

Figure 2.9 Deux points de vue de la plateforme commerciale de guidage de cathéter Aeon Phocus de Aeon Scientific [69]. Le système est composé de huit bobines électromagnétiques et permet de guider un embout de cathéter avec cinq degrés de liberté. Images tirées de [69].

spatiale peut être optimisée selon l’application visée, a ensuite été proposée pour atteindre cinq degrés de liberté de guidage et réduire les singularités de contrôle [72]. Des travaux récents suggèrent par ailleurs l’actionnement électromagnétique en utilisant le principe de fonctionnement d’une nouvelle modalité d’imagerie de nanoparticules connue sous le nom de Magnetic Particle Imaging (MPI) [73]. Les systèmes de MPI génèrent, à l’aide de bobines, des champs magnétiques opposés s’annulant à un point appelé field free point. L’actionnement par MPI est réalisé en déplaçant la position de ce point afin de placer les particules dans une zone de fort gradient. Cette stratégie a permis de guider et de localiser en alternance

un agrégat de nanoparticules dans un tube avec des gradients magnétiques de 3.5-8.75 T/m, mais dans un petit volume de travail d’environ 4 cm de diamètre et avec une fréquence de rétroaction de contrôle de 2 Hz seulement.

À l’instar des méthodes utilisant des aimants permanents, la limitation majeure des systèmes à AEM pour le guidage de micro-agents dans les tissus profonds est reliée aux valeurs de champs et de gradients devenant insuffisantes lorsque ceux-ci sont mis à l’échelle avec des volumes de travail assez grands pour accueillir un humain. En effet, bien que les forces de contrôle puissent atteindre des amplitudes élevées dans des volumes restreints, comme c’est le cas du Octomag par exemple, les systèmes à AEM dimensionnés à l’échelle humaine sont actuellement limités à des champs de ~0.1 T et des gradients <400 mT/m dans les tissus profonds [74]. La plateforme Aeon Phocus mentionnée plus haut, par exemple, génère des gradients de 350 mT/m, mais un champ faible (<0.1 T), insuffisant pour atteindre la saturation magnétique des agents. En règle générale, pour des interventions dans les tissus et organes profonds, les systèmes à AEM sont par conséquent mieux adaptés à la navigation de dispositifs relativement gros, ayant des dimensions de quelques millimètres ou plus. Dans plusieurs cas, les dispositifs sont aussi constitués d’un aimant permanent afin de garantir une magnétisation élevée et des forces de guidage suffisantes.

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