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1. Présentation du système de contention

Le système de contention utilisé dans notre étude a été développé au sein du laboratoire par Laurent Darracq, en collaboration avec l’équipe du Dr Guy Chouvet et une entreprise de micro-mécanique (GFG Pierre-Bénite). Il s’inspire du dispositif développé par Marie-Hélène Bassant (1990) et a été modifié afin d’augmenter la stabilité des enregistrements électrophysiologiques (Figure 19).

Plus spécifiquement, le système se compose de deux parties :

- Une pièce en forme de « U », fixée sur la tête de l’animal lors de l’implantation qui nous permet ensuite de fixer l’animal dans l’appareil de contention.

- Un chariot mobile, monté sur glissières, qui s’insère dans un appareil stéréotaxique classique.

Figure 19. Schéma de notre dispositif de contention. Le chariot mobile (1) peut coulisser d’avant en arrière sur deux glissières horizontales (2). Des vis de blocage (3) maintiennent dans une position donnée. Chacune des glissières comporte deux tiges (4) engagées dans un support (5) fixé à l’appareil stéréotaxique. Lors de l’implantation, les barres d’oreilles sont insérées dans ce support (6). La pièce en « U » (7) fixée sur le crâne du rat est maintenue par quatre vis (8).

La pièce en U s’insère dans la partie centrale du cadre de contention où elle est fixée à l’aide de quatre écrous. L’ensemble assure une contention stéréotaxique stable dans un cadre présentant un faible jeu mécanique et ne requiert pas l’utilisation de barres d’oreilles. Le chariot est mobile selon l’axe antéro-postérieur grâce au système de glissières et peut être orienté dans n’importe quel sens afin de positionner l’ouverture du « U » dans l’axe rostro-caudal ou médio-latéral, permettant ainsi de multiples configurations d’implantation de cette platine et à l’accès à presque toutes les structures cérébrales du rat.

Ce dispositif a fait l’objet de plusieurs articles (Darracq et al. 1996; Gervasoni et al. 1998; 2000; Boissard et al. 2002; Goutagny et al. 2008). Ces études montrent son efficacité pour l’enregistrement des neurones durant le cycle veille-sommeil et leur étude pharmacologique.

2. Pertinence du modèle pour l’étude du cycle veille-sommeil

L’étude électrophysiologique des réseaux neuronaux du cycle veille-sommeil doit s’effectuer chez un animal non-anesthésié présentant une alternance normale des états de vigilance. Or, la majorité des études portant, par exemple, sur les interactions thalamo-corticales mises en jeu durant le SL ont été, et sont toujours, effectuées sur l’animal anesthésié à la kétamine-xylazine, anesthésique interagissant avec les systèmes cholinergiques, opiacés et monoaminergiques et provoquant un effet dissociatif : le système thalamo-cortical est ainsi déprimé pendant que le système limbique est activé (Steriade et al. 1991 ; 2000). Bien que ces animaux présentent un EEG caractérisé par des oscillations lentes (dans la gamme Delta : 0.5-4.5Hz) très proches des oscillations observées lors du SL chez l’animal vigile, il semble délicat de considérer que l’état induit par les anesthésiques est en tout point semblable à du SL naturel.

Le développement des techniques électrophysiologiques a permis, ces vingt dernières années de déterminer l’activité électrophysiologique de neurones chez l’animal libre de ses mouvements. Cependant, ces études utilisent le plus souvent des électrodes en tungstène et implantées à demeure présentant des désavantages certain : une sélectivité limitée lors des enregistrements électrophysiologiques (la fréquence de décharge d’un neurone donné ne peut ainsi être appréciée qu’après traitement du signal obtenu et par la sélection des potentiels d’action sur la base de leur forme) et surtout une liberté de mouvements limités.

L’utilisation du modèle du rat vigile en contention permet de s’affranchir des anesthésiques généraux, d’enregistrer l’activité des neurones avec une très bonne sélectivité grâce aux pipettes de verre et autorise des déplacements très importants (il est possible de déplacer la pipette d’enregistrement de plusieurs millimètres selon l’axe antéro-postérieur et l’axe médio-latéral) au cours d’une même séance d’enregistrement.

De plus, ce modèle permet la réalisation d’études pharmacologiques fines de part l’utilisation de l’iontophorèse. A notre connaissance, l’iontophorèse est la méthode de choix pour apprécier l’effet d’une substance pharmacologique sur la décharge unitaire d’un neurone, ou encore pour effectuer des stimulations pharmacologiques d’une zone très restreinte du cerveau. Il a en effet été montré un rapport de diffusion de 2 entre la microdialyse et l’iontophorèse (7250µm vs 350µm de diamètre de diffusion pour l’éjection d’un antagoniste GABAergique (Goutagny et al. 2005). Enfin, il a été possible de combiner ces études électrophysiologiques et pharmacologiques avec des études de neuroanatomie fonctionnelle.

La question se pose de savoir si la contention engendre un stress chez l’animal. En effet, il a été montré que la répétition d’un stress modéré diminue drastiquement le SL et provoque un fractionnement du SP (Cheeta et al. 1997). Or, après habituation, il n’a pas été rapporté de modifications de l’architecture du cycle veille-sommeil chez le rat en contention (Gervasoni et al. 2000). De plus, l’analyse spectrale révèle que le spectre de fréquence de l’EEG, d’une part, et les puissances de l’EEG dans les différentes bandes de fréquences, d’autre part, ne sont pas significativement modifiées chez le rat en contention comparativement à un rat libre de se mouvoir (Gervasoni et al. 2000). En outre, lors d’un stress chronique, il a été rapporté une augmentation du poids des glandes surrénales (Bassett et Cairncross 1975). Dans nos conditions expérimentales et après trois semaines d’expérimentation, les glandes surrénales ne présentent pas d’hypertrophie (Soulière et al. 2000). Ainsi, nous pouvons considérer que dans nos conditions expérimentales, le niveau de stress est très faible, sinon inexistant, et que le sommeil des rats en contention n’est pas modifié, tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif.

Ainsi, le rat vigile en contention, de par la possibilité de combiner électrophysiologie, pharmacologie locale et neuroanatomie fonctionnelle, est un modèle adéquat pour l’étude des réseaux neuronaux du cycle veille-sommeil.