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Ses syndromes sont plus anecdotiques car pour la plupart il n’y a eu qu’un ou deux personnes intoxiquées. Ces syndromes n’ont pas été décrits en France et le champignon responsable de l’intoxication pousse à l’étranger.

1. Syndrome de Szechwan

En 1980 un cas de thrombopénie a été décrit aux Etats-Unis. Ce patient de 32 ans avait consommé une grande quantité d’Oreille de Judas (Auricularia polytricha ou Auricularia auricula-

judae) (Figure 64). Ce champignon est très consommé en Chine. Même si la présence de ce

champignon sur le sol français n’est pas déterminée, il se retrouve souvent dans nos assiettes dans des restaurants chinoises ou dans les supermarchés sous le nom de "champignon noirs". Le patient présentait des ecchymoses, un purpurea et des hémorragies. Lors d’un dosage sanguin une grande

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quantité d’adénosine a été retrouvée ainsi que la présence d’un inhibiteur de l’agrégation plaquettaire. Les médecins supposent qu’en plus de la consommation de ce champignon en grande quantité le patient avait aussi pris des antiagrégants plaquettaires (aspirine, aliments…) (129). C’est le seul cas répertorié dans la littérature (15).

Figure 64 : Auricularia auricula-judae.

2. Intoxication par Podostroma cornu-damae

Les premières intoxications par Podostroma cormu-damae (Figure 65) ont été répertoriées en 1999 au Japon dans la préfecture de Nigata. Cinq personnes ont consommé du saké en y trempant des champignons. Ils ont en moyenne ingéré 1g de champignon par personne. Sur les 5 personnes 1 personne perd la vie lors de cette intoxication. En 2000, 2 nouveaux cas apparaissent dont 1 décès avec cette fois-ci la consommation de champignons frits (130). En 2012, la Corée a connu ses deux premiers cas avec un décès par défaillance multiviscérale (131).

Certaines toxines potentiellement responsables de cette intoxication ont été isolées du champignon. Parmi elles on trouve des trichothécènes qui sont des composés hématotoxiques et immunotoxiques synthétisés le plus souvent par des micromycètes (130) (15). L’espèce responsable

Podostroma cormu-damae est un Ascomycète qui peut être confondu avec Ganodema lucidum ou Cordyceps au stade précoce (132).

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Cette intoxication se manifeste par l’apparition de troubles digestifs sévères et une déshydratation avec plus ou moins de choc hypovolémique. Ensuite le patient souffre de délire, de défaillance respiratoire, de leucopénie et thrombopénie, de signes cutanéomuqueux caractéristiques (desquamations des paumes des mains et de la plante des pieds, œdèmes du visage, perte des cheveux et des poils) atrophie du cervelet provoquant des troubles de la parole et des mouvements volontaires. Le décès survient avec une pancytopénie grave, une sepsis importante et une défaillance de plusieurs organes (insuffisance rénale, respiratoire, hépatique…) (132) (131) (133) (130). Le traitement est symptomatique avec, la plupart du temps, une prise en charge par antibiotiques et une transfusion de plaquettes en cas de thrombopénie.

3. Intoxication par Trogia venenata

Dans la province de Yunnan en Chine, depuis 1970 plus de 300 personnes sont mortes soudainement sans explication. La cause probable de ces décès subits serait l’ingestion d’un champignon appelé Trogia venenata (Figure 66). Après une mise en garde des habitants de cette province , le nombre de décès dans les années suivantes a diminué de 73% (134).

Figure 66 : Trogia venenata.

La toxine n’est pas encore véritablement connue. Cependant certaines études mettent en cause 2 acides aminés ; l’acide (2R,4S)-2-amino-4-hydroxy-5-hexynoïque et l’acide 2R-amino-5- hexynoïque) et une toxine l’acide  guanidinobutyrique. A l’heure actuelle seuls les deux acides aminés ont été retrouvés chez une des victimes de cette intoxication (135). Ces deux acides aminés provoquent chez la souris des hypoglycémies sévères induisant un coma puis la mort du rongeur de manière brutale (136). Une autre étude propose comme hypothèse une accumulation importante de baryum dans Trogia venenata induisant le syndrome observé. Cependant les résultats de cette étude ne sont pas concluants (135).

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Une partie des patients sont asymptomatiques dans les premiers jours après l’intoxication. Certains présentent tout de même quelques symptômes comme des vertiges, des signes digestifs, des palpitations. Ensuite au bout de 4-5 jours le patient tombe brutalement dans le coma avec la présence ou non de convulsions et il décède généralement dans les jours suivants. Au niveau de l’autopsie post-mortem les médecins ont remarqué une nécrose des fibres cardiaques et dans 75% des cas une sténose de l’artère du nœud auriculoventriculaire. Ces anomalies morphologiques sont parfois suivies de lésions additionnelles comme un œdème des alvéoles pulmonaires, des infiltrations lymphocytaires, une nécrose du rein… La cause réelle de la mort n’est pas encore véritablement démontrée (135). L’hypothèse avancée en 2012 selon laquelle les toxines du champignon induisent une hypoglycémie sévère induisant la mort du patient (à partir d’une étude sur des rongeurs) ne parait pas très plausible vu que peu de patients présentent une hypoglycémie (136) (134).

Il n’y a pas de traitement spécifique, il est uniquement symptomatique.

Pour conclure, nous avons vu qu’il est primordial de faire attention aux champignons que nous ramassons mais aussi que nous achetons car de nombreux types d’intoxications existent. Les champignons doivent d’être consommés en petite quantité et selon des procédés de préparation très stricts. Pour la plupart des intoxications il n’y a pas de traitement spécifique. Les erreurs sont faciles et les conséquences sont parfois dramatiques. Nous allons voir quels conseils sont à donner à un « accro » du ramassage ? Que faire en cas de suspicion d’une intoxication et qui sont les acteurs de la prise en charge ?

III. De la prévention à la prise en charge de ces syndromes

A. Le pharmacien d’officine : un acteur de la prévention

La majorité des intoxications dues aux champignons sont gérées par les hôpitaux. Cependant les pharmaciens d’officine ont un rôle dans la prévention en rappelant les règles à adopter pour éviter les intoxications. Le conseil minimal du pharmacien consiste à dire au patient de toujours faire vérifier sa récolte par un pharmacien compétent ou par des experts membres d’associations mycologiques.

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