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Syndrome d’alimentation nocturne : épisodes récurrents d’alimentation nocturne, se manifestant par une alimentation après un réveil nocturne ou par une

A) Les catégories diagnostiques

5. Syndrome d’alimentation nocturne : épisodes récurrents d’alimentation nocturne, se manifestant par une alimentation après un réveil nocturne ou par une

37 5) Pronostic et évolution des TCA

Il est important de noter que les taux de mortalités chez les patients TCA sont élevés. Une méta-analyse de 2011 a montré que les ratios standardisés de mortalités étaient de 5.86, 1.93 et 1.92 respectivement pour l’AN, la BN et les TCA-NS (Arcelus et al., 2011). Ces taux de mortalités élevés s’expliquent notamment par les complications somatiques qu’impliquent ces pathologies (désordres hydro-électrolytiques, bradycardie) mais aussi par les comorbidités psychiatriques de ces maladies (troubles de l’humeur) pouvant aller jusqu’au suicide. En ce qui concerne l’AN, la revue de la littérature de Steinhausen et al de 2002 (Steinhausen, 2002) reste aujourd’hui la plus complète en ce qui concerne le devenir des patients anorexiques. Celle-ci regroupe 119 études de suivi, rassemblant 5590 sujets suivis au minimum durant 4 ans. Dans cette étude, la mortalité moyenne est de 5%, la guérison complète est obtenu chez moins de la moitié des patients, environ 1/3 connaissent une amélioration et plus de 20% évoluent vers la chronicité. Concernant la BN, la revue de la littérature de Steinhausen et Weber de 2009 (Steinhausen and Weber, 2009) reste aussi, à ce jour, la plus complète. Elle regroupe au total 5653 sujets et les évolutions observées sont assez similaires de celles de l’AN, 45% des patients ont une guérison totale, 27% une rémission partielle et 23% évoluent vers la chronicité. Enfin, il existe quelques études concernant les facteurs de pronostics négatifs de ces pathologies. Les principaux éléments prédictifs d’une rechute sont : une longue évolution de la maladie avant l’accès aux soins, de faibles scores à l’EDI (Eating Disorder Inventory), soins dispensés dans un établissement non spécialisé dans les TCA et un poids désiré faible (Keel and Brown, 2010). Les principaux facteurs prédictifs d’augmentation du risque de mortalité sont : IMC (Indice de Masse Corporel) le plus bas, au cours de la vie, très bas, antécédents d’hospitalisations pour des comorbidités psychiatriques, trouble des conduites suicidaires, troubles de l’humeur et abus d’alcool (Button et al., 2010). Il apparaît à travers ces différents éléments que les taux de rémissions sont faibles concernant les TCA, qui

38 plus est, la chronicité fréquente de ces maladies impacte fortement les patients ainsi que leur entourage. L’un des facteurs prédictif de rechute est le délai entre le début de la pathologie et la prise en charge au sein d’un établissement spécialisé, ceci peut s’expliquer notamment par la difficulté diagnostique de ces troubles.

6) Les limites d’un diagnostic clinique et catégoriel

La taxonomie en médecine est indispensable. C’est une science dynamique qui permet de regrouper des symptômes et des syndromes en différentes catégories diagnostiques afin d’assurer une bonne prise en charge des patients. Néanmoins, ce système catégoriel possède certains inconvénients aussi bien pour la pratique clinique que dans le cadre de la recherche. Concernant les TCA, cette approche manque à la fois de sensibilité et de spécificité. En effet, en pratique clinique nombres de patients ne remplissent pas tous les critères d’AN ou de BN et sont donc classés comme TCA-NS (Fairburn and Harrison, 2003). Avec l’arrivée du DSM-5 beaucoup de patients classés TCA-NS ont pu être classé dans l’AN grâce à la disparition du critère « Aménorrhées » et nous avons vu la création d’une nouvelle catégorie diagnostique pour les accès hyperphagiques, qui sont donc sortis des TCA-NS. Même si ces modifications ont permis une amélioration diagnostique et donc une meilleure prise en charge des patients ceci reste insuffisant. Effectivement, l’AN et la BN sont vues comme deux pathologies bien distinctes avec des prises en charges différentes alors que les études longitudinales montrent un switch fréquent d’une pathologie à l’autre chez plus de 50% des patients (Keel and Mitchell, 1997). De plus, sur les 4 études taxonomiques réalisées sur les TCA, 3 d’entre elles montrent que les individus souffrant de BN ne sont pas qualitativement différents des individus souffrant d’AN de type accès hyperphagiques/purgatifs (David H. Gleaves et al., 2000; D. H. Gleaves et al., 2000; Williamson et al., 2002). Suite à ces études, Williamson, Gleaves et Stewart ont proposé une approche dimensionnelle des TCA (Williamson et al., 2005). Il s’agit d’un modèle tridimensionnel comprenant l’hyperphagie boulimique

39 (dimension taxonomique), la recherche de minceur/peur de prise de poids et comportements de maîtrise de poids (approches purement dimensionnelles). Ce modèle regrouperait donc l’AN de type accès hyperphagiques/purgatifs avec la BN tandis que l’AN de type restrictif serait considéré comme qualitativement à part. C’est dans cet esprit que le NIMH (National Institute of Mental Health) a initié la création du projet RDoC (Research Domain Criteria) en 2008. Le but de ce projet est de réussir à classifier les troubles mentaux selon les dimensions de comportements observables et les mesures neurobiologiques (Akram and Giordano, 2017; Demazeux and Pidoux, 2015) et donc de sortir de cette classification uniquement clinique et catégorielle. De plus, cette nouvelle classification pourrait permettre d’expliquer la variabilité intra-groupe dans une même catégorie diagnostique. Pour ce faire, le NIMH a mis en place une matrice (cf. figure 3) permettant une approche intégrative centrée sur les interactions gènes/symptômes. Ce type d’approche peut se schématiser comme ci-dessous :

Figure 2 : Schéma d’approche intégrative des interactions gènes/symptômes selon (Zhao and Castellanos, 2016)

Il est possible de résumer ce schéma ainsi : l’expression génique (mutations, SNP, modifications épigénétiques…) modifie la synthèse des molécules provoquant un fonctionnement différent des cellules. Ceci a pour conséquence de modifier la structure, la

40 physiologie ou les circuits cérébraux, provoquant ainsi l’apparition des symptômes cliniques. C’est donc sur ce type de schéma que s’est basé le NIMH afin de construire sa matrice.

Figure 3 : Matrice du projet RDoC

Le but est de concentrer les recherches sur des dimensions plutôt que sur une catégorie précise. Avec ces approches intégratives et dimensionnelles et ces nouvelles conceptualisations de la psychopathologie indépendamment des troubles du DSM, ce projet permettrait de mieux comprendre la genèse des pathologies psychiatriques et ainsi améliorer la prise en charge des patients (Vaidyanathan and Pacheco, 2017).