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syndicalistes: un phénomène social

Le discours a été prononcé à Santiago, au Chili, le 19 novembre 2011.

« La longue et forte influence du réformisme et de l’opportunisme dans le mouvement syndical demande au mouvement de classe d’avoir la capacité d’étudier et comprendre de façon précise les racines sociales de ce phénomène afin d’affronter de manière efficace les forces qui le cultivent.

Déjà au XIXe siècle, Karl Marx soulignait, dans sa critique des syndicats anglais, la possibilité offerte à la bourgeoisie anglaise par le monopole industriel du marché international de corrompre et d’incorporer de nombreuses couches de la classe ouvrière spécialement parmi les travailleurs qualifiés.

Dans les premières années du XXe siècle, avec la mise en forme complète du capitalisme monopoliste, Lénine note l’expansion de ce phénomène dans d’autres puissants états impérialistes aussi. Les capitalistes avaient la possibilité de corrompre des couches supérieures de la classe ouvrière, grâce aux super-profits énormes qu’ils arrivent à tirer de l’exportation de capitaux et en général de l’activité des grands groupes monopolistes. Il appelle cette aristocratie ouvrière «les agents de la bourgeoisie au sein

du mouvement ouvrier », véritables mandataires des capitalistes, conducteurs du réformisme et du chauvinisme ; Cela montre qu’il porte l’attention à la fois sur la position de classe et sur la conscience de classe de cette couche et qu’il met l’accent sur le fait que si les racines économiques du phénomène et aussi son importance politique ne sont pas perçues comme telles, le mouvement ouvrier ne peut pas avancer dans la solution de ses tâches pratiques.

Un exemple caractéristique est le gouvernement de l’Espagne, qui tous les ans tire des quantités massives d’argent de la taxation annuelle imposée aux travailleurs, et les « retourne»

aux dirigeants des CCOO (Commissions Ouvrières) et de l’UGT. En 2010, la très grande somme que ces organisations ont reçue du budget général d’état d’Espagne atteignait les 10 millions d’euros.

Une partie de cette somme a été transférée en Amérique Centrale et en Amérique Latine pour des

«investissements syndicaux »…

Ainsi, la réalité elle - même montre que l’expansion et l’approfondissement des rapports de production capitalistes à l’époque de l’impérialisme multiplient le phénomène de l’aristocratie ouvrière

d’un pays, de même qu’ils multiplient l’intrusion des perceptions et attitudes petites-bourgeoises dans le mouvement syndical et politique.

La reconnaissance au bon moment de l’importance de ce phénomène, a mis en évidence la nécessité d’une confrontation majeure avec les intérêts de ces couches, la façon dont ces intérêts s’expriment dans le mouvement syndical et la nécessité de la lutte pour l’unité de la classe ouvrière dans la ligne de classe.

Il est important de souligner que la tentative de corruption et d’incorporation des couches de la classe ouvrière ne se limite pas à la partie matérielle de la corruption (salaires extrêmement élevés, chèques payés « sous la table », etc.). La bourgeoisie a pris spécialement soin, et continue à le faire, de faire en sorte que les travailleurs réformistes « bien sages » trouveront des postes douillets et profitables dans des syndicats soumis à la bourgeoise, dans de diverses commissions ministérielles, dans les organismes internationaux, et même dans les parlements. C’est cette bureaucratie syndicale et politique, de source et d’origine travailleuses, qui joue le rôle d’un bélier pour le renforcement et la préservation

du corporatisme et du réformisme au sein du mouvement syndical du travail. L’histoire et le rôle des syndicats jaunes au cours des 100 dernières années prouvent leur utilité exceptionnelle pour le capital, surtout parce qu’ils peuvent se présenter en tant que représentants des travailleurs, en tant que faisant partie de la classe ouvrière.

L’existence de l’aristocratie du travail ne doit pas être comprise d’une manière statique comme un phénomène social qui affecte uniquement des économies capitalistes développées ou des secteurs spécifiques de l’économie ou certaines entreprises. Alors que le capitalisme se développe d’une façon élargie et approfondie dans le monde entier, l’aristocratie du travail a émergé et s’est consolidée dans des pays où auparavant elle n’existait pas. Par exemple, en Grèce, son développement était en lien avec le sale rôle de l’Institut de la corruption « Friedrich Ebert » et avec les projets de mécanismes de gestion et les fonds de l’U.E, au niveau des syndicats réformistes parmi d’autres. La désignation de syndicalistes à des postes rémunérés dans divers comités du « partenariat social », est une forme substantielle de

En Autriche, au cours de la période 1998-2000, le Syndicat central OGB a été condamnée par les tribunaux pour corruption à la Banque BAWAG parce qu’il avait présenté 1,5 milliard d’euros de dépenses pour des « Investissements syndicaux « dans les Caraïbes…

Aujourd’hui, ce rôle des Autrichiens est joué par les dirigeants des syndicats espagnols, belges, français, néerlandais. …

Il devient évident que les mécanismes de l’état bourgeois travaillent en complémentarité avec les mécanismes capitalistes afin de stabiliser et élargir ces couches corrompues de la classe ouvrière.

Il faut veiller de ne pas considérer d’une façon simpliste comme faisant partie de l’aristocratie du travail tous les travailleurs ayant des salaires élevés dans les industries à forte productivité du travail, ou tout travailleur qui exerce les principales fonctions de supervision dans le processus moderne de production capitaliste. Ces simplifications obscurcissent la question, elles divisent au lieu d’unir la classe ouvrière. Par exemple, un travailleur qualifié ayant un salaire élevé qui travaille dans de mauvaises conditions d’hygiène dans les mines de charbon ou dans la construction navale, ayant

un rôle de cadre et soumis une forte intensification de travail, ne peut pas être classé comme faisant partie de l’aristocratie ouvrière.

La possibilité donnée aux forces capitalistes, par le développement rapide du capitalisme dans beaucoup plus de pays qu’avant, de corrompre certaines couches de la classe ouvrière, ne doit pas donner au mouvement syndical de classe l’impression que ce phénomène social peut se développer indéfiniment. Et cela parce que le monde capitaliste dans son ensemble, particulièrement l’ancien monde capitaliste hautement développé, fonctionne de manière contradictoire. D’une part, chaque pays capitaliste a tendance à briser les barrières qui empêchent les mouvements de capitaux dans le marché mondial au profit de ses propres monopoles, en utilisant une partie des superprofits pour l’achat de membres de la classe ouvrière. D’autre part, cependant, l’intensification de la concurrence dans le marché mondial force chaque bourgeoisie à réduire le prix de la force de travail du pays pour améliorer sa position . C’est ainsi que la politique de gestion du système capitaliste est obligée aujourd’hui, de plus en plus

(flexibilisation des relations de travail, privatisation des entreprises et des services de l’état, réductions de salaire et licenciements de fonctionnaires, etc..) qui objectivement affectent également certains secteurs de l’aristocratie ouvrière.

Les événements de ces dernières années, avec la crise capitaliste internationale qui frappe la vie et les droits des millions et des millions de travailleurs dans le monde entier, mettent clairement en évidence le rôle de toujours des dirigeants des syndicats réformistes jaunes dans la promotion des intérêts capitalistes.

Pendant des années, avant le déclenchement du nouveau cycle de la crise économique capitaliste, ces syndicats ont joué un rôle insidieux en sapant et affaiblissant le caractère de masse du mouvement syndical, en cultivant les concepts de « partenariat social » entre la classe ouvrière et le capital, en refusant de participer à des initiatives militantes importantes (grèves, manifestations, etc.), en transformant des syndicats en des structures bureaucratiques et des « institutions » de médiation entre les travailleurs et l’état bourgeois, en suivant le même rythme que les patrons dans l’attaque contre les appels au combat de la base , dans les

usines, les entreprises et les lieux de travail.

Ils ont signé de nombreuses conventions collectives, non seulement en dessous des besoins contemporains de la classe ouvrière, mais aussi en dessous du niveau de l’inflation, contribuant ainsi à l’intensification de l’exploitation des travailleurs qu’ils sont supposés représenter. De toutes ces manières, ils ont cultivé un climat de fatalisme, et d’acceptation du « moindre mal », par exemple la réduction des salaires ou des heures de travail en échange de la perte d’emploi.

Ainsi c’est devenu si naturel qu’avec le déclenchement de la crise économique capitaliste, une partie importante des travailleurs qui suivaient par habitude, par peur ou même par superstition les dirigeants syndicaux vendus, se sont retrouvés impuissants, incapables de réagir devant l’attaque dévastatrice du capitale à l’encontre de leurs droits.

De leur côté de l’histoire, les syndicats jaunes ont suivi, comme il fallait s’y attendre, pendant les années de la crise, la même trajectoire de recul continu qu’avant. Ils ont adopté les interprétations des différents apologistes du système capitaliste sur les causes de la crise, disculpant le système

chacun de faire plus de « sacrifices » pourvu que

« ce soit réparti de manière juste », ils ont signé des conventions collectives dégradantes au nom de la nécessité d’éviter la « faillite de l’économie nationale ».

Il s’est démontré une fois de plus, et au vu de l’attitude des différentes forces face à la crise économique capitaliste, que la classe ouvrière au niveau international ne peut pas progresser, ne peut pas développer son propre chemin indépendant pour la satisfaction de ses besoins, sans la collision décisive et le refoulement des forces du compromis, du « partenariat social» et du défaitisme dans le mouvement syndical.

Il n’y a pas de place aujourd’hui pour l’illusion sur la possibilité qu’auraient les dirigeants des syndicats jaunes de changer leur parcours, qu’ils pourraient sous la pression des masses des travailleurs prendre une orientation correcte, qu’ils pourraient être mis à la tête de la lutte des classes.

Tous les travailleurs honnêtes qui les suivent encore doivent être convaincus de mettre de côté ces dirigeants, de les jeter hors des syndicats, et de rejoindre des syndicats de classe en un front unifié de la classe ouvrière.»