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Selon Chertow, la symbiose industrielle se définit comme étant une optimisation collective de ressources basée sur l’échange et le partage de services entre différentes parties co-localisées (Brings Jacobsen, 2006). Ce modèle d’écologie industrielle et territoriale (EIT) est une réaction naturelle et instinctive aux enjeux de transition écologique actuelle. L’écologie industrielle se réfère à une interconnexion entre la société industrielle et la biosphère de par l’échange de matières, d’eau ou d’énergie (Auxilia, 2018). En revanche, l’écologie territoriale traite de l’écosystème social d’un territoire se définissant par les dimensions sociale, politique, économique et technique (Auxilia, 2018). Ainsi, il s’agit d’une multitude d’acteurs qui, par des besoins et des activités compatibles, se rassemblent pour optimiser leur utilisation des ressources territoriales. Théoriquement, il existe deux types de mise en place de synergies : les synergies autonomes et celles organisées par un tiers acteur (Ammoury, 2017).

En pratique, la gouvernance peut s’opérer de différentes façons et dépendra de plusieurs facteurs venant du contexte dans lequel elle s’introduit. Premièrement, les dispositifs informels ont leur importance. Ces derniers font référence aux relations interpersonnelles existantes et à la culture de coopération d’un territoire. Deuxièmement, il existe des dispositifs organisationnels. Ceux-ci permettent de mettre en réseau des acteurs par le biais de rencontres, et encouragent la prise de décision. Troisièmement, les dispositifs institutionnels sont ceux relatifs à l’encadrement et aux structures porteuses. Ces derniers dispositifs peuvent prendre la forme de comité de suivi, de conseil d’administration ou autres. (Auxilia, 2018)

De façon générale, la symbiose industrielle se rapproche énormément de l’économie circulaire qui se définit comme un

« système de production, d’échange et de consommation visant à optimiser l’utilisation des ressources à toutes les étapes du cycle de vie d’un bien ou d’un service, dans une logique circulaire, tout en réduisant l’empreinte environnementale et en contribuant au bien-être des individus et des collectivités ». (Institut de l’environnement, du développement durable et de l’économie circulaire, s. d.)

Cette approche a le potentiel d’augmenter la productivité des ressources qui circulent déjà dans le marché en réduisant l’extraction des matières non renouvelables en amont et en cessant d’en éliminer en aval. (Daniel Normandin, 2016, 13 octobre)

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2.1. Freins et leviers de la symbiose industrielle au Québec

Étant une nouvelle notion, il existe certains freins au développement de symbioses industrielles, dont le statu quo organisationnel, les comportements de consommation, le modèle compétitif, les frais associés aux partenariats, les limites spatiales et temporelles, et autres. En revanche, plusieurs leviers facilitent l’intégration de modèles d’économie circulaire : le progrès technologique, l’adaptation au changement, les nouveaux modèles d’affaires, la sensibilisation, les stratégies de gestion interorganisationnelle et autres. Même si cette approche gagne en intérêt auprès des acteurs territoriaux, un apport en recherche fondamentale et appliquée est encore nécessaire afin de pouvoir profiter de l’ensemble de ses bénéfices. (Conseil du patronat du Québec, 2018)

Notons que l’économie circulaire, à laquelle se rapproche la symbiose industrielle, s’approprie davantage à l’échelle des collectivités (Daniel Normandin, 2016, 13 octobre). Déjà au Québec, il existe plusieurs exemples appliqués de symbiose. Prenons l’entreprise LOOP qui actuellement valorise des fruits et légumes qui n’auraient pas trouvé preneur au sein des commerces d’alimentation. Ainsi, elle les utilise pour en faire du jus pressé à froid tout en récupérant la pulpe pour produire des biscuits pour chiens (Conseil du patronat du Québec, 2018). En plus de créer de la valeur avec des résidus alimentaires, l’entreprise québécoise participe à la lutte au gaspillage alimentaire au sein des grossistes (Conseil du patronat du Québec, 2018).

2.2. Retombés de la symbiose industrielle

La mise en place d’une symbiose industrielle permet d’avoir des impacts bénéfiques à différents niveaux. Tout d’abord, en optimisant l’utilisation des ressources, on peut s’attendre à une réduction de la demande globale. Cela a pour effet de limiter la production de gaz à effet de serre et de réduire les impacts sur l’environnement que peut entraîner, par exemple, la consommation d’eau, l’utilisation des sols ou le transport. Ensuite, d’un point de vue monétaire, le développement d’activités mutuelles peut devenir un moteur économique et créer des emplois. De plus, récupérer et valoriser des matières résiduelles permet de diminuer la sensibilité des entreprises par rapport aux variations du coût des matières premières. (Conseil du patronat du Québec, 2018)

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2.3. Comparaison avec une symbiose alimentaire

Malgré le fait que la symbiose industrielle soit issue du secteur manufacturier, son champ d’application demeure vaste. En effet, l’écologie industrielle s’appuie, entre autres, sur une approche territoriale intégrée considérant la diversité des interactions entre ses acteurs. Ainsi, dans le cas du gaspillage alimentaire, le défi s’avère être le manque de connaissance du terrain et la nécessité d’adopter une approche de coopération interorganisationnelle. Comme vu précédemment, la prémisse de cette problématique est qu’un flux de denrées comestibles se trouve à être sous-utilisé malgré la participation de plusieurs initiatives. Les commerces d’alimentation traditionnels représentent un gisement pour plusieurs organisations telles les banques alimentaires, les initiatives citoyennes et applications technologiques. En reprenant la définition de la symbiose industrielle, on peut observer comment la dynamique du gaspillage alimentaire peut s’inspirer du modèle synergique : « Une optimisation collective de ressources basée sur l’échange et le partage de services entre différentes parties co-localisées ». (Brings Jacobsen, 2006)

Ainsi, à l’échelle d’un territoire restreint comme celui d’une ville, une coordination des initiatives peut potentiellement se mettre en place pour combler les lacunes du système alimentaire qui génère des ressources valorisables. Il est donc intéressant d’analyser ce problème d’un point de vue technique pour mieux comprendre les différentes relations qui peuvent exister au sein de ce type d’écosystème. De plus, sachant l’unicité de chaque territoire, les dimensions sociale, politique et économique se doivent d’être prises en compte pour assurer l’intégration et la pérennité de cette potentielle gestion additionnelle.

Ce qui est intéressant est que le contexte dans lequel s’entretient le gaspillage alimentaire se rapproche majoritairement de l’économie sociale. Cette approche se base sur une finalité qui s’attarde au service apporté aux membres, plutôt qu’au profit pécuniaire (Loi sur l’économie sociale). En d’autres mots, l’économie sociale souhaite contribuer à améliorer le bien-être de la collectivité et à la création d’emplois durables et de qualité (Loi sur l’économie sociale). Ainsi, théoriquement cet aspect de mission commune peut devenir un atout et faciliter le développement de synergies interdémarches touchant le gaspillage alimentaire. En gardant à l’esprit la variété d’acteurs, le prochain chapitre se penche justement sur les différentes approches qui rassemblent ou du moins favorisent la symbiose alimentaire à l’échelle des commerces d’alimentation traditionnels.

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