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Chapitre I - Introduction

1.2. Apport de la télédétection spatiale pour le suivi des eaux de surface

1.2.4. Surfaces en eau

Les surfaces en eau peuvent être détectées à partir de capteurs optiques, par exploitation des bandes spectrales situées dans le visible (VIS) et le proche infrarouge (PIR), ou par des capteurs radars à Synthèse d’Ouverture (RSO ou SAR, pour « Synthetic Aperture Radar »). Dans le cadre de mon travail, j’ai exploité uniquement les données issues des missions optiques. Je vais donc présenter ici la première méthode, qui est la plus communément utilisée dans la communauté scientifique.

L’imagerie optique multi-spectrale permet d’identifier différents types de surfaces continentales comme les couverts végétaux, les sols nus, ou encore les surfaces en eau. La distinction est possible en exploitant les caractéristiques spectrales de chaque élément, appelée signature spectrale (Colwell, 1974 ; Jacquemoud et al., 1992 ; Knipling, 1970 ; Lyzenga, 1978 ; Price, 1990). Elle correspond à la forme du spectre du signal radiatif mesuré par un capteur, proportionnelle à l’intensité radiative émise

Page | 37 ou réfléchie dans chaque bande spectrale par la surface cible (Figure 1.9). En général, le spectre est associé à une mesure de réflectance qui est définie comme le rapport entre le flux radiatif réfléchi et le flux radiatif incident. Ainsi, chaque élément dispose de sa propre signature spectrale, qui est liée à la nature et aux caractéristiques intrinsèques de ce dernier.

Prenons l’exemple de la végétation et de l’eau (Figure 1.9). Dans le cas de la végétation, la présence de chlorophylle va absorber dans le bleu et le vert, et donc impacter sa signature spectrale dans le VIS (400-700 nm). Dans le PIR (700-1 300 nm) et l’infrarouge court (IRC, 1 300-2 500 nm), la structure du feuillage de la végétation et la présence d’eau vont modifier la signature, respectivement.

La signature spectrale peut varier en fonction de la structure des cellules et de la présence d’eau (Jones et Vaughan, 2010). Une même espèce peut présenter des spectres différents dus à l’âge de la plante, son niveau de croissance, et la présence ou non de maladies (Monteith et Unsworth, 2013). L’eau a une signature spectrale très différente de la végétation, notamment dans le PIR en raison de la très forte absorbance au-delà du rouge (Jones et Vaughan, 2010). En outre, la signature spectrale de l’eau sera modulée par différents facteurs comme la turbidité, la profondeur d’eau et la chlorophylle (Lyzenga, 1978 ; Ma et al., 2019).

Page | 38 Figure 1.9. Signatures spectrales des différents éléments naturels dans le domaine du visible (VIS),

du proche infrarouge (PIR) et de l’infrarouge court (IRC) (source : Huete, 2004)

Depuis le lancement du satellite Landsat-1 en 1972, l’utilisation de l’imagerie optique pour détecter les surfaces en eau n’a cessé de croître jusqu’à aujourd’hui. En effet, selon l’étude de Huang et al. (2018), le nombre d’études concernant cette thématique a très fortement augmenté depuis 2000 (Figure 1.10). Ceci témoigne de l’importance d’étudier cette thématique et de l’intérêt porté de plus en plus important par les scientifiques au regard de celle-ci.

Figure 1.10. Nombre d’articles publiés sur la période 2000-2017 sur la détection des surfaces en eau à partir de télédétection spatiale (source : Huang et al., 2018)

Page | 39 Une valeur de réflectance quasi nulle dans le PIR pour les surfaces en eau a permis de développer différents types de méthodes pour détecter ce type de surface. Il existe plusieurs manières d’extraire les surfaces en eau à partir d’imagerie multi-spectrale.

La première méthode consiste à détecter les surfaces en eau en prenant uniquement une bande spectrale (Frazier et Page, 2000). Des classifications supervisées et non supervisées peuvent être appliquées sur les images. Plusieurs classes sont obtenues et il suffit d’identifier celles correspondant aux surfaces en eau. Certains auteurs ont également créé des arbres de décision (Acharya et al., 2016 ; Olthof, 2017). Cependant ces approches, développées sur certaines zones, ne sont pas assez robustes pour être généralisées à d’autres sites (Huang et al., 2018).

La méthode la plus employée dans cette thématique est l’utilisation d’indices spectraux, correspondant à un rapport entre plusieurs bandes (simple rapport, rapport entre deux bandes, rapport entre trois bandes et plus) (Huang et al., 2012 ; Chen et al., 2013 ; Acharya et al., 2016). De nombreux indices ont été développés pour étudier les surfaces en eau, et l’étude de Ma et al. (2019) en fait un résumé. L’indice le plus connu, et créé en premier, est le Normalized Difference Water Index (NDWI) qui utilise les bandes dans le vert et rouge (Gao,1996 ; McFeeters, 1996). Il a été utilisé pendant de nombreuses années mais depuis une décennie, une nouvelle génération d’indices est apparue, utilisant cette fois-ci la bande dans l’IRC (ou SWIR pour « Short Wave Infrared »). L’indice NDWI a ainsi été amélioré, en prenant la bande dans l’IRC à la place du PIR, donnant naissance à l’indice mNDWI (Xu, 2006). Par la suite, les indices se sont succédés (Xiao et al., 2005 ; Jiang et al., 2014 ; Feyisa et al., 2014 ; Fisher et al., 2016 ; Zou et al., 2017 ; Ma et al., 2019).

Cette méthode combine plusieurs bandes spectrales, ce qui permet de normaliser les données et diminuer les effets environnementaux et d’illumination (Chen et al., 2013). Elle est donc plus robuste. Cependant, l’étape critique dans l’utilisation d’indices spectraux est la définition du seuil (Huang et al., 2018). Généralement, la valeur 0 pour le NDWI et mNDWI est sélectionnée pour détecter les surfaces en eau, mais elle peut être ajustée selon les zones dans le but d’obtenir de meilleurs résultats (Ji et al., 2009).

Enfin, une autre approche consiste à combiner plusieurs indices (indices de végétation et d’eau, par exemple) pour délimiter les surfaces en eau (Sakamoto et al., 2007 ; Lu et al., 2011 ; Guerschman et al., 2011 ; Crétaux et al., 2011).

Page | 40 La résolution spatiale et temporelle de l’imagerie permet d’étudier les variations spatio-temporelles des surfaces en eau sur de longues archives. Pour pouvoir étudier les variations des volumes d’eau de surface, il est nécessaire de combiner les surfaces en eau avec les hauteurs d’eau altimétriques obtenues par altimétrie radar.

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