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SUR LES HABITATS

Dans le document SITES RAMSAR ET TORTUES MARINES (Page 36-40)

Il est important de souligner que les activités humaines menacent les tortues marines et leurs habitats à terre mais aussi en mer (Coston-Clements & Hoss, 1983).

Les plages propices à la nidification sont menacées dans leur intégrité naturelle et leur tranquillité dans tous les océans. La concentration des populations humaines sur les côtes avec une urbanisation sur la partie terrestre de la ligne des hautes marées (domaine public maritime), l’industrialisation, la construction de ports marchands, la destruction du couvert végétal naturel ou au contraire des plantations de végétaux non indigènes, l’extraction de sable marin, les infrastructures touristiques, le trafic de véhicules, l’érosion due à la construction de ports marchands ou minéraliers, des activités militaires, l’élévation du niveau de la mer entrainée par le réchauffement climatique réduisent à terre l’espace disponible de l’habitat terrestre pour les pontes, constituent un dérangement des femelles par une présence humaine permanente et des lumières artificielles, ainsi que des dangers en approche des côtes par les bateaux et les engins sportifs motorisés.

L’aménagement de plages et d’arrière-plages en zones touristiques fait augmenter l’importance du piétinement par les humains, entraînant un compactage du sable, conduit à une modification de l’habitat avec constitution d’obstacles avec des matériels récréatifs et de restauration, ainsi que l’accumulation de déchets attirant les prédateurs.

Des plages continentales proches de villages ou en milieu insulaire sont envahies par des espèces domestiques (chiens, chats, porcs…) ou sauvages (rats, souris, fourmis, coléoptères, pagures, ratons laveurs…) introduites ou proliférant en raison d’ordures non gérées. Ces animaux invasifs se révèlent être d’importants prédateurs pour les œufs et les tortues nouveau-nées, conduisant l’habitat terrestre de reproduction à offrir très peu de chance de réussite aux nids.

La destruction de la végétation indigène rampante et arbustive des arrières-plages, stabilisatrice des dunes, peut favoriser une érosion néfaste à la nidification des tortues. Les plantations artificielles de plantes arbustives décoratives sur les plages peuvent apporter un ombrage inhabituel en ces lieux et modifier le sexe-ratio normal (Mrosovsky et al., 1995).

Les pollutions par les hydrocarbures, divers contaminants (PCBs, PAHs, cadmium, cuivre, plomb, mercure, zinc…), les plastiques et autres débris flottants, les filets fantômes sont devenues des causes essentielles de détérioration des habitats marins, d’apparition de nouvelles pathologies et de pièges mortels pour les tortues.

Les zones humides de mangrove, les herbiers marins et les récifs coralliens dominent la marge terre-mer des régions tropicales et sont des habitats vitaux pour les tortus marines.

Ces milieux sont étroitement liés. Les mangroves sont exploitées pour le bois d’œuvre, le charbon de bois, l’agriculture, l’aquaculture ou sont détruites pour des constructions côtières. La déforestation des mangroves entraîne une augmentation du ruissellement et la sédimentation, l’augmentation des nutriments provenant des eaux usées. Les herbiers marins sont arrachés par les ancres des voiliers, dragués pour les ports. Les récifs coralliens ont un cycle interne qui nécessite des nutriments en raison d’une association symbiotique entre zooxanthelles et coraux. Leur développement nécessite de l’eau claire, et ils sont fortement impactés par les sédiments et le ruissellement terrestre. Un rejet fluvial contenant une lourde charge sédimentaire, peut détruire ou restreindre sévèrement le développement communautaire des récifs coralliens (Kjerfve et al., 1998).

Stressés, les coraux blanchissent et meurent.

La pollution océanique des habitats des tortues marines par les débris marins en plastique devient rapidement l’une des préoccupations majeures pour la conservation de ces espèces. Parmi une variété de problèmes posés par les quelque 12 millions de tonnes de ces débris rejetés dans les océans chaque année, leur ingestion par les tortues et l’enchevêtrement des tortues dans ces déchets sont devenus pour elles des menaces mortelles. Il ressort clairement de la modélisation effectuée par Schuyler et al. (2015) que les côtes du sud de la Chine, de l’Asie du sud-est, de l’est de l’Australie, des États-Unis d’Amérique, du gyre de l’océan Pacifique sont des zones critiques pour ce qui concerne ces dangers.

Photo 9. Porcs, grands prédateurs de nids, fouillant le sable sur un habitat de nidification africain (©J. Fretey)

Les aires alimentaires comme les herbiers et les estuaires riches en Crustacés, contaminés par des pesticides organochlorés (OC) issus de l’agriculture, se retrouvent dans toute la chaîne alimentaire des Tortues vertes, des Caouannes et des Lépidochélydes.

Les habitats côtiers de croissance et d’alimentation, en particulier les herbiers et les récifs coralliens, subissent des dégâts majeurs depuis plusieurs décennies par les activités humaines de façon physique, mécanique et chimique, réduisant ainsi la disponibilité en nourriture.

Les habitats de nidification sont confrontés à une pression anthropique croissante du fait de l’urbanisation et du développement touristique mondial. Principalement dans la Caraïbe et en Méditerranée, l’aménagement des plages, les activités récréatives et les sports nautiques pour des millions de touristes ont un grave impact sur les habitats de reproduction et les tortues femelles s’approchant des côtes.

Quelque 28 % des côtes mondiales sont déjà altérées par les activités humaines (Martinez et al., 2007) et l’augmentation de la population humaine estimée à 9,3 milliards d’ici 2050 amplifiera encore dramatiquement la pression côtière.

En raison de la fonte de la calotte glaciaire, l’élévation du niveau des mers au cours du prochain siècle pourrait dépasser 2 m (Bamber et al., 2019). Les zones littorales très

Photo 10. Tentative de dégagement d’une Luth femelle d’une barrière de rochers contre l’érosion visant à protéger les villas en arrière-plage (construites sur le domaine public maritime), sur la plage de

Rémire-Montjoly, en Guyane française (© Kwata)

anthropisées vont vraisemblablement investir dans des murs et des blindages côtiers qui entraineront une nette réduction de la superficie des plages (“coastal squeeze”). Ces menaces réduiront inexorablement les habitats de nidification, obligeant les femelles à creuser leurs nids dans des secteurs à risques élevés (Witherington et al., 2011). Le microclimat de la chambre d’incubation est lié à l’emplacement du nid vis-à-vis de sa distance au rivage et à la végétation (Swiggs et al., 2018).

Beaucoup d’hypothèses ont été formulées concernant le choix de l’emplacement du nid par une femelle, les caractéristiques selon les espèces et les populations. Les femelles risquent à l’avenir de se concentrer sur des zones sableuses très restreintes, augmentant les risques de déterrage de nids préexistants et de transmission de maladies (Tiwari et al., 2006 ; Girondot et al., 2006 ; Leighton et al., 2010).

L’augmentation généralisée de la température modifiera la phénologie des saisons de ponte et pourra conduire à une féminisation des populations (Jensen et al., 2018).

Les habitats des différentes classes d’âges étant souvent disséminés, la conservation des tortues marines exige la collaboration des gouvernements de plusieurs nations sur de grandes régions océaniques, ce qui implique la mise en œuvre de législations de façon parfois compliquée et contradictoire (Mortimer et al., 2007 ; Whiting et al., 2008). Le Plan d’action pour Caretta caretta dans le Pacifique Sud adopté par la Conférence des Parties à la CMS à Quito en novembre 2014 et l'élaboration du Plan d'action pour la conservation de la Tortue imbriquée (conformément à la Décision 12.17 de la COP12 de la CMS) sont des exemples de plans régionaux océaniques à multiplier pour assurer la conservation d’une multitude d’habitats vitaux.

Dans le document SITES RAMSAR ET TORTUES MARINES (Page 36-40)

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