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Chapitre 1 – Bibliographie

4. Matériaux d’électrodes et conception d’une électrode bifonctionnelle à oxygène

4.2 Les supports de catalyseur

L'importance du support de catalyseur n’est plus à démontrer. Typiquement, un support fournit une surface physique pour la dispersion de petites particules métalliques, ce qui est nécessaire pour obtenir une grande surface spécifique. Un bon support de catalyseur respecte les propriétés suivantes :

- Surface spécifique élevée pour assurer la dispersion du catalyseur

- Conductivité électronique élevée pour assurer le transport des électrons entre le catalyseur et la couche de diffusion

- Stabilité électrochimique, notamment résistance à l’oxydation - Stabilité chimique, notamment en milieu acide

- Stabilité thermique

Dans les PEMFC, le carbone est généralement utilisé comme support conducteur car il est neutre vis-à-vis des réactions d’oxydo-réduction intervenant dans la cellule et il présente peu d’interactions avec les particules métalliques supportées [45, 46]. Le carbone en tant que support a été introduit principalement afin de réduire les charges en métaux nobles à l'intérieur des cellules. Les charges ont effectivement été réduites d’environ 7 mg.cm-2 à 0.1-0.2 mg cm-2 dans les piles à combustible hydrogène / oxygène de type PEM [47]. Différentes formes de matériaux carbonés sont utilisables [48], la plus commune est le carbone Vulcan XC72 qui se présente sous la forme de nanosphères d’environ 50 nm de diamètre et possède une surface spécifique de l’ordre de 250 m².g-1. Cependant, l'oxydation

39 du carbone (Eq 26) à la cathode de la pile à combustible limite la durée de vie pratique du catalyseur supporté : les particules métalliques supportées se détachent et s’agglomèrent, réduisant la surface de catalyseur. Des potentiels élevés à l'électrode à oxygène des URFCs fonctionnant en mode électrolyseur conduisent à une corrosion d’autant plus rapide du carbone.

Des travaux ont été rapportés sur l'utilisation de supports non carbonés dans les PEMFC afin d’améliorer la durabilité du catalyseur [49]. Les alternatives proposées sont généralement des céramiques de type oxyde, carbure ou nitrure. Les dérivés du titane ont été extensivement étudiés, et notamment le dioxyde de titane, TiO2, qui est peu coûteux et présente une excellent résistance à la corrosion. Cependant l’oxyde stœchiométrique n’est pas conducteur, la présence de Ti3+ est nécessaire pour observer une conductivité de type métallique. Pour cela, il faut créer des lacunes en oxygène ou procéder au dopage de l’oxyde par d’autres éléments.

L’oxyde sous-stœchiométrique est métastable et forme des phases dites de Magnéli [50] qui peuvent s’écrire sous la forme TinO2n-1 avec n entier strictement supérieur à 3. La phase d’ordre 4, Ti4O7, est réputée pour présenter la plus grande conductivité électronique. Ces phases étaient commercialisées sous la forme d’un mélange des phases d’ordre 4 à 10 sous le nom Ebonex. Les propriétés de support de catalyseur de ces matériaux ont été évaluées à de nombreuses reprises [51-62], principalement comme support de platine pour l’ORR. Plusieurs difficultés ont été rencontrées avec ces matériaux.

Premièrement, ils sont généralement élaborés par traitement réducteur de TiO2 à haute température et leur surface spécifique est par conséquent très réduite : de l’ordre de 10 m².g-1 [56]. Deuxièmement, leur stabilité électrochimique est réduite en milieu fortement oxydant et à potentiel élevé : dans les conditions de dégagement de l’oxygène au-dessus de 1,6 V vs ERH dans une solution H2SO4 0,5 M, une perte progressive de courant est observée [61]. Cela s’explique par l’oxydation en surface du composé sous-stœchiométrique jusqu’à sa forme stœchiométrique TiO2 qui est non conductrice et empêche le transfert d’électrons entre le catalyseur et le reste de l’électrode.

L’autre approche pour rendre conducteur l’oxyde de titane consiste à le doper avec d’autres éléments.

Le plus couramment étudié est le niobium [61, 63-71], quelques études ont également été réalisées avec un dopage au tantale [63, 72]. Ces matériaux peuvent être préparés avec des procédés qui ne requièrent pas de traitement thermique important. Des surfaces spécifiques intéressantes pour la dispersion de catalyseur ont été relevées : de l’ordre de 90 m².g-1 [71] voire même 175 m².g-1 [72]. Le taux de dopage varie de 10 à 25% molaire. La conductivité a été mesurée à 1,11 S.cm-1 pour Ti0,75Nb0,25O2 [70]. De la même façon que pour les oxydes sous stœchiométriques, la durabilité semble meilleure que celle des supports carbonés, mais une perte de conductivité progressive est observée.

40 Elle peut être attribuée à la migration de l’élément dopant à la surface des particules, ce qui conduit à un retour au TiO2 non conducteur.

Toujours basé sur le titane, le nitrure de titane, TiN, est également le sujet de nombreuses études récentes [73-82]. En effet, il est résistant à la corrosion et sa conductivité électronique est élevée : 4,0 S.cm-1 contre 1,2 S.cm-1 pour du noir de carbone [49]. Ces propriétés en font un excellent candidat de support de catalyseur. Avasarala et al. [74] ont réalisé une étude détaillée de la durabilité de catalyseurs de type Pt/TiN avec des particules de TiN de 20 nm de diamètre présentant une surface spécifique de 50 m².g-1. Ils ont conclu que le catalyseur se dégradait uniquement par des mécanismes d’agglomération de particules de platine, tandis que les catalyseurs classiques de type Pt/C se dégradent également par corrosion du support. Yang et al. [81] ont étudié l’effet de la forte interaction métal-support causée par le nitrure de titane sur le platine. Ils ont montré que le support TiN provoque un changement dans la structure électronique du platine métallique et cela induit de meilleures activités catalytiques vis-à-vis de l’ORR. Ils ont cependant relevé de faibles conductivités pour leurs échantillons de TiN. En effet, la valeur de conductivité donnée plus haut (4,0 S.cm-1) est valable pour un échantillon massif, cette valeur doit être inférieure dans le cas d’un solide fortement divisé. Pour contourner ce problème, ils ont ajouté du noir de carbone à leur encre catalytique pour assurer la conductivité de la couche catalytique. Cet ajout de matériaux conducteurs pour palier à la conductivité insuffisante du support TiN peut être retrouvé dans l’étude de Shintani et al. [80]. Ils ont utilisé du noir d’acétylène comme particules conductrices pour assurer la conductivité dans l’ensemble de l’électrode par un phénomène de percolation électronique. Enfin, Zhang et al. [83] ont montré que les fonctions Ti-OH qui se forment à la surface du nitrure de titane aident à éliminer le monoxyde de carbone adsorbé sur le platine, ce qui limite grandement l’empoisonnement au CO auquel les catalyseurs à base de platine sont très sensibles.

Les carbures et carbonitrures de titane, TiC et TiCN, ont des propriétés proches de TiN et ont gagné de l’intérêt comme potentiels supports de catalyseurs [82, 84-89]. Leur conductivité électronique est souvent liée à la proportion de carbone libre dans leur structure. Ces types de support peuvent donc s’avérer bien plus sensibles à l’oxydation que le nitrure de titane.

Les supports à base de titane sont très fréquemment rencontrés dans la littérature. Quelques alternatives sont toutefois étudiées. Le carbure de tungstène, WC, est conducteur et présente une très grande résistance chimique [49, 90]. Mais il est sensible à l’oxydation. L’oxyde d’étain, SnO2, a souvent été envisagé comme support, mais il est peu stable et est souvent dopé. L’ATO (Antimony Tin Oxide) – l’oxyde d’étain dopé à l’antimoine – a donné des résultats encourageants comme support de catalyseur pour les applications PEMEC [91] et URFC [92].

41 Les oxydes de ruthénium et d’iridium font partie des rares oxydes présentant naturellement une conductivité de type métallique sans dopage. Comme il s’agit d’oxydes stœchiométriques, ils ne sont pas sensibles à l’oxydation. Ils apparaissent être d’excellents candidats comme support de catalyseurs.

Mais ils sont excessivement coûteux pour être envisagés uniquement dans cette optique. Comme nous le verrons dans la partie suivante (4.3), ce sont d’excellents catalyseurs pour l’OER. Leur utilisation comme support peut alors être envisagée s’ils jouent également le rôle de catalyseur. Pour réduire leur coût mais conserver leurs propriétés intéressantes, Patru et al. [93] ont utilisé un oxyde mixte d’iridium et de titane commercialisé par Umicore comme support de platine pour une application PEMFC. Cet oxyde mixte doit contenir suffisamment d’oxyde d’iridium pour assurer la conductivité électronique et l’oxyde de titane permet d’accroitre la surface de support à moindre coût. Cette approche est tout à fait envisageable pour une application URFC.

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