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Les super-complexes, pour quoi faire ?

I.2 L’organisation en super-complexes

I.2.2 Les super-complexes, pour quoi faire ?

La raison de l’organisation des CTE en super-complexes n’est pas connue à l’heure actuelle. Plusieurs hypothèses sont avancées, d’ordre structurales ou fonctionnelles.

Rôle fonctionnel : cinétique de transfert (Trouillard et al., 2011)

la cinétique de transfert d’électron in vivo chez la levure, qui peut être appelée "flash-induced respiration". Cette technique est basée sur l’inhibition réversible de la CcOx par le monoxyde de carbode (CO) : le CO se fixe sur l’hème haut spin réduit, en empêchant l’accès de l’oxygène à l’hème. Le CO peut être photodissocié par un flash laser, ce qui permet une refixation rapide de l’oxygène et une reprise du transfert d’électron au sein de la chaîne.

En se basant sur cette technique, les auteurs ont développé une méthode permet- tant de suivre le transfert des électrons non seulement au sein de l’oxydase terminale mais également tout au long de la CTE. Les études sur l’oxydation du cytochrome

c ont permis de montrer que la présence ou non d’un super-complexe n’impacte pas

la cinétique d’oxydation de cette molécule, et donc que le cytochrome c ne participe pas au super-complexe dans la levure. De plus, sa diffusion n’est pas limitée, ce qui pousse à s’interroger sur l’intérêt fonctionnel de la formation de super-complexes. Dans les levures, la CTE se comporte comme un système homogène, fonctionnant dans des échelles de temps de centaines de millisecondes. La déstabilisation que se soit de la structure des cristae de la mitochondrie ou de l’association en super- complexe n’impacte pas les résultats obtenus avec la méthode de "flash-induced respiration".

Rôle fonctionnel : modulation des chaînes de transfert (Lapuente-Brun

et al., 2013)

Des études de génétique sur des cellules de fibroblastes de souris ont mis en évi- dence l’existence de différentes populations de super-complexes respiratoires mito- chondriaux. La formation et la dissociation de ces complexes est un phénomène dynamique qui peut être contrôlé par la source de carbone apportée à la cellule. La formation de super-complexes est un mécanisme d’adaptation pour les cellules, afin de varier le type de source de carbone utilisée (dans le cas de la mitochondrie, les sources de carbones telles que le glutamate ou le malate entraînent une production de NADH, alors que le succinate induit la production de FAD).

Rôle structural : organisation des membranes (Davies et al., 2011).

La cryotomographie a été utilisée pour observer des mitochondries entières prove- nant de différents organismes (cellules mammifères, champignons, etc...), permet- tant l’étude de l’organisation des complexes au sein des membranes. De longues rangées de dimères d’ATP synthases ont été observées au niveau des crêtes des cristae. En revanche, le complexe I, identifiable grâce à sa forme de "L", a lui été re- trouvé au niveau des partie plates des cristae. L’organisation de ces deux complexes

I.2. L’organisation en super-complexes

est identique dans toutes les espèces observées, et semble structurer l’architecture des membranes mitochondriales. Les auteurs avancent l’hypothèse de l’implication des super-complexes dans la structuration des membranes mitochondriales, et par ce biais, l’établissement de la pmf, en provocant une augmentation du ∆pH local au niveau des cristae (cf. figure I.17).

Rôle structural : organisation des membranes (2)

Les membranes, notamment les membranes bioénergétiques, sont très densément chargées en protéines (Kirchhoff, 2014). Des phénomènes de ségrégation peuvent intervenir et un regroupement des protéines de même nature est alors observé au sein de la membrane. La formation de super-complexes peut être envisagée comme une stratégie mise en place par la cellule pour éviter cette ségrégation et maintenir les différents complexes participant au transfert d’électron dans une même zone de la membrane.

De récentes études de microscopie de fluorescence chez E. coli (Llorente-Garcia

et al., 2014) confirment cette hypothèse en montrant l’organisation des protéines

de la chaîne respiratoire sous forme de patchs dans la membrane. Ces patchs sont formés des mêmes protéines, et non de différents partenaires de la chaîne de trans- fert d’électrons, qui sont associées faiblement, ne formant pas d’associations supra- moléculaires précises et ne correspondant pas à ce qu’on pourrait définir comme un super-complexe. La diffusion des ubiquinones dans la membrane permet un trans- fert d’électron efficace et un bon fonctionnement de la chaîne respiratoire.

Cependant, la chaîne respiratoire de E. coli ne possède pas de complexe Rieske/b (complexe bc), entraînant une réaction à 2 partenaires enzymatiques : une déshy- drogénase et une oxydase, reliées par une molécule de quinone. Dans ce cas de figure, la diffusion de la quinone ne semble pas limitante et la cinétique de trans- fert des électrons entre le donneur d’électron et l’accepteur final n’est pas impactée. Cependant, dans un système comprenant un complexe Rieske/b (comme chez les mitochondries, et une très grande majorité de bactéries et d’archées), l’ajout d’un troisième partenaire à la chaîne de transfert peut compliquer la situation, et dans ce cas, la diffusion nécessaire de 2 molécules (une quinone et un cytochrome c) pourrait devenir cinétiquement limitante, et l’organisation en super-complexe se- rait alors nécessaire pour maintenir un transfert efficace.

L’organisation en super-complexe favorise la diffusion des petites molécules comme les quinones, car une membrane organisée en super-complexes peut présenter moins d’obstacle (mais de plus grande taille) que des complexes isolés (Kirchhoff, 2014).

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Figure I.17 – Organisation moléculaire des cristae mitochondriaux Les ATP synthases et les

complexes I sont localisés dans des régions différentes des cristae. Les ATP synthases forment des rangées de dimères (en jaune) sur les crêtes, alors que les complexes (en vert) de la CTE qui pompent les protons sont situés à proximité, au niveau des parties plates des cristae. Les protons (en rouge) transloqués à travers la membranes sont transportés vers la matrice par les ATP synthases, entraînant la production d’ATP. D’après Davies et al. (2011).

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