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Chapitre II Topologies d’onduleur à tolérance de panne

II.8 Onduleur double

II.8.1 Association série et différentielle de cellules de commutation

II.8.1.1 Structures multi-niveaux

Pour exploiter la modularité des éléments de conversion génériques afin d’atteindre une puissance d’alimentation plus élevée tout en permettant une tolérance de panne, il a été proposé auparavant d’associer des cellules de commutation en parallèle (cf. II.5). Une autre configuration consiste à les associer en série, ce qui préfigure d’autre part des niveaux de tension continue plus élevés (cf. I.1.2.8). Les topologies multi-niveaux qui en résultent possèdent certains avantages par rapport à un onduleur 2 niveaux conventionnel. L’accroissement du nombre d’états de tension permet d’étager la tension de sortie et dans certains cas d’augmenter la fréquence de découpage apparente. De plus, une diminution de l’amplitude des fronts de commutation génère une réduction des courants de mode commun. Pour une qualité spectrale donnée des ondes en sortie, les pertes par commutation sont réduites par rapport à un onduleur 2 niveaux. Par contre, l’augmentation du nombre de composants occasionne une majoration des pertes par conduction.

Une topologie classique d’onduleur NPC 3 niveaux [MEY92] [KIM93] est représentée à la figure II.62, où les pointillés délimitent le module de conversion générique. Dans le contexte de cette étude, elle présente un manque de compatibilité avec l’approche modulaire envisagée, en particulier à cause des diodes additionnelles. D’autre part, l’équilibrage du point milieu du bus continu par un diviseur capacitif présente une difficulté supplémentaire qui nécessite une solution appropriée telle qu’une commande spécifique [LEE96] [LIU91]. Il est aussi envisageable d’associer les cellules en cascade pour obtenir un onduleur 3 niveaux, comme dans [SOM03], mais le dimensionnement de cette topologie n’est pas avantageux.

Ce type de structure requiert deux sources de tension continue isolées. En l’absence d’une architecture de réseau de bord adaptée (réseaux de distribution continue haute tension), il faut recourir par exemple à un transformateur redresseur à deux enroulements secondaires, ce qui peut pénaliser la compacité du convertisseur. Une topologie de type "flying capacitor" (figure II.63) ne requiert qu’une source de tension continue, au prix de condensateurs supplémentaires [MEY06] [BAU00].

figure II.62 : topologie classique d’onduleur 3 niveaux figure II.63 : onduleur 3 niveaux "flying capacitor"

Aux niveaux de tension continue imaginés (270V-800V), le calibre en tension des interrupteurs n’est pas un critère de dimensionnement critique. Aussi, le partitionnement des

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interrupteurs offert par ces structures multi-niveaux ne constitue pas un avantage majeur. Par contre, il est plus intéressant d’associer les cellules de commutation de manière à appliquer des niveaux de tension de sortie supérieurs, à tension continue imposée, et à faciliter ainsi la couverture de plages de vitesse plus élevées.

II.8.1.2 Onduleur double

La topologie de la figure II.64, que nous nommerons onduleur double, constitue un moyen d’association différentielle des cellules de commutation en redondance active pour augmenter la tension et donc la puissance d’alimentation de la machine, dont les six bornes statoriques doivent être accessibles. Cette structure présente un degré de redondance élevé à plusieurs niveaux (cellules de commutation, enroulements de la machine, bus continus), ce qui peut être exploité pour accroître la disponibilité fonctionnelle de l’onduleur.

figure II.64 : onduleur double à sources de tension continue isolées

Pour VDC1=VDC2, les états de tension de sortie sont ceux d’un onduleur 3 niveaux. Pour les raisons évoquées précédemment, cette topologie est surtout intéressante si les deux sources de tension continue isolées sont naturellement mises à disposition par l’architecture du réseau. En ce cas, cette structure permettrait d’envisager de nombreuses possibilités de reconfiguration, et éventuellement de secourir les charges d’un réseau continu défaillant en transférant une composante continue de courant via l’alimentation de la machine (figure II.65) [BAU05]. Cela préfigure des architectures de distribution par réseaux continus à disponibilité élevée. Toutefois, comme les études présentées dans ce mémoire sont basées sur des architectures de réseau classiques, ces aspects ne sont pas développés davantage.

figure II.65 : alimentation d’un réseau continu en défaut par transfert de puissance à travers un ensemble convertisseur-machine

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considérer de surmodulation). En effet, la pleine tension du bus continu peut être appliquée aux enroulements de la machine. Par contre, la tension homopolaire doit être contrôlée pour minimiser le courant homopolaire. Or une commande pleine onde produit des tensions qui contiennent des harmoniques à fréquence triple du fondamental et ces harmoniques introduisent des composantes de courant homopolaires indésirables qui se rebouclent à travers le bus continu. La zone de surmodulation est donc restreinte : la tension de sortie est limitée à 1,1VDC [WEL03-2].

figure II.66 : onduleur double à source de tension continue unique avec interrupteurs d’isolement (représentés par les rectangles vides)

figure II.67 : représentation des états de tension dans le plan ( )

Comme les courants de phase peuvent présenter une composante homopolaire, le système d’équation (II-18) est couplé. Il doit donc être découplé par un changement de base adapté, par exemple en utilisant la transformation de Concordia [MEI04]. En négligeant la résistance statorique :   +   + =   0 0 0 e e e i i i dt d M L 0 0 0 M L 0 0 0 2M L v v v (II-28)

Il apparaît dans cette équation que le courant homopolaire n’est limité que par l’inductance de fuite Lf de la machine (figure II.68).

± ± ± = + + + + = ,0 3 V , 3 2V , V 3 v v v 3 v v v v0 A B C A' B' C' DC DC DC (II-29) 2M L Lf = + (II-30)

Ainsi, si l’inductance de fuite du moteur est faible, l’ondulation des courants est importante. Comme la composante homopolaire de courant ne participe pas à la génération du couple, cette ondulation ne se reporte pas sur le couple mais cela implique une valeur efficace de courant majorée et des pertes supplémentaires. Pour minimiser cette composante, la commande ne devrait utiliser que les 7 états parmi 27 pour lesquels la tension homopolaire est théoriquement nulle (figure II.67) ; cela devrait également améliorer les aspects CEM.

Toutefois, comme la commutation des bras ne peut être contrôlée parfaitement (disparités de caractéristiques des interrupteurs, temps mort), la machine doit être dimensionnée pour avoir une inductance de fuite suffisante. Pour le modèle de simulation, la machine a une inductance de fuite qui vaut 20% de l’inductance de phase. En passant à 40%, l’ondulation de courant est réduite (figure II.69).

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figure II.68 : courant homopolaire dans l’onduleur double

figure II.69 : ondulation de courant homopolaire pour Lf=20%L et Lf=40%L

La commande de l’onduleur est semblable à celle d’un onduleur monophasé en pont en mode unipolaire. Comme la somme des courants de phase n’est plus nulle, il est nécessaire d’alimenter séparément les trois phases de la machine et donc de réguler le courant dans chacune des phases. Dans les simulations, les trois cellules de l’un des onduleurs triphasés sont commandées en courant par MLI intersective. Chacune des cellules du second onduleur est commandée en tension, en lui appliquant une modulante inverse de celle de la cellule en vis-à-vis. L’effet est identique à celui d’un déphasage de 180° des porteuses entre les deux onduleurs puisque les butées de modulante sont égales en valeur absolue. Cette commande diagonale permet de doubler la fréquence de découpage apparente vue par le courant de phase, comme le représente la simulation de la figure II.70, sur laquelle F1 et F2 sont les fonctions de modulation appliquées aux transistors supérieurs de deux cellules en vis-à-vis. F1-F2 est donc représentative de la tension différentielle 3 niveaux appliquée à l’enroulement de la machine. Ainsi, pour un même niveau d’ondulation de courant, la fréquence de découpage peut être réduite de moitié, ce qui occasionne une diminution des pertes par commutation et des contraintes de CEM.

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II.8.2 Procédures d’isolement sur défaut

Les modes de défaut de l’onduleur double ont des conséquences semblables à celles de l’onduleur triphasé, mais le niveau de redondance élevé procure des degrés de liberté supplémentaires. Ainsi, une défaillance de transistor de type haute impédance occasionne une distorsion des courants générant une ondulation de couple, mais la dégradation du fonctionnement peut être limitée par une adaptation de la commande.

Par contre, dans le cas d’une défaillance d’un transistor de type basse impédance, l’ouverture des autres transistors connectés à l’enroulement concerné ne permet pas d’isoler le défaut puisqu’il subsiste un chemin de court-circuit avec la diode antiparallèle de la cellule en vis-à-vis du transistor défaillant. Même si la contrôlabilité de l’actionneur n’est pas totalement perdue, le courant de court-circuit présente des amplitudes élevées et le couple subit en conséquence de fortes ondulations (figure II.72). Pour assurer l’isolement, cette topologie doit donc comporter un dispositif d’isolement par enroulement machine, soit trois dispositifs (figure II.66).

figure II.71 : blocage de l’onduleur double – chemin du courant de court-circuit

La procédure d’isolement consiste à bloquer l’ensemble des transistors sains de l’onduleur (figure II.71), ce qui provoque l’annulation des courants des deux phases non impactées par le défaut. Ainsi, l’évolution du courant de défaut ne dépend plus que de la force électromotrice servant de source d’excitation ; il est de type courant redressé mono-alternance et son amplitude est limitée principalement par l’inductance propre de la machine. Par conséquent, l’annulation de ce courant ne peut être attendue pendant une trop longue durée. La simulation confirme ce comportement (figure II.73) : l’isolement peut être effectué en moins d’une période électrique.

figure II.72 : défaut basse impédance avec blocage des autres transistors de l’enroulement concerné

figure II.73 : défaut basse impédance avec blocage de tous les transistors sains

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Enfin, un avantage supplémentaire de l’onduleur double est de pouvoir isoler un défaut de court-circuit entre phases du moteur, ce que ne permet aucune des autres topologies proposées. Il est en effet possible de supprimer le chemin de court-circuit en ouvrant symétriquement les bras des deux phases concernées. L’actionneur peut alors être mis à l’arrêt de manière sécurisée.

II.8.3 Fonctionnement secours de l’onduleur

Suite à l’isolement d’une cellule de commutation et au blocage de la cellule opposée, le fonctionnement est maintenu sur les deux phases restantes (figure II.74).

figure II.74 : reconfiguration de l’onduleur double pour un fonctionnement secours en mode diphasé

Pour les mêmes raisons qui ont été exposées dans le cas de l’onduleur 4 bras (cf. II.7.3.1), le fonctionnement en mode diphasé sans reconfiguration de la commande se traduit par une ondulation de couple importante. Les consignes de courant sont donc décalées de la même manière que pour le mode diphasé 60° de l’onduleur 4 bras (figure II.75). Le couple maximal produit est alors réduit d’un facteur 0,67 par rapport au fonctionnement normal de l’onduleur : 3 C p 2 3 Cem60°= ⋅Φm ph = em3ϕ (II-31)

En laissant de côté les différentes surmodulations envisageables, la plage de vitesse couverte reste identique en mode secours.

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En ce qui concerne la commande, l’onduleur double requiert, comme l’onduleur 4 bras, un découplage des courants pour un fonctionnement optimum en mode diphasé (cf. II.7.3.4). De plus, l’ondulation de courant homopolaire est limitée par le terme (L+M) en mode diphasé (cf. II.7.3.3), et non plus uniquement par l’inductance de fuite de la machine comme en fonctionnement normal.

Enfin, la simulation de la figure II.76 représente les pertes de l’onduleur double en fonctionnement normal et secours, dans les mêmes conditions que l’onduleur triphasé : même profil de mission et paramètres identiques pour la machine et les interrupteurs. Cependant, pour un même niveau d’ondulation du courant, la fréquence de découpage de l’onduleur double est réduite de moitié (Fd=5kHz). Le détail des pertes dans un interrupteur est donné par la figure II.77 pour chacune des topologies.

• En fonctionnement normal, l’onduleur double présente des pertes moyennes majorées de 56% par rapport à l’onduleur triphasé. Si les pertes par commutation par composant sont réduites d’environ 50% pour l’onduleur double, l’augmentation du nombre de composants est logiquement à l’origine de la dissipation de puissance globalement plus élevée puisqu’aux "faibles" fréquences de découpage considérées, les pertes par commutation ne sont pas prépondérantes. D’autre part, les pertes des interrupteurs d’isolement ne sont pas représentées ici, mais elles sont identiques pour les 2 topologies en mode triphasé puisqu’autant d’interrupteurs conduisent les mêmes courants.

• A l’inverse, pour le fonctionnement secours en mode diphasé 60°, la puissance dissipée par l’onduleur double est réduite de 18% par rapport à l’onduleur 4 bras puisque les pertes par conduction sont davantage équilibrées entre les deux topologies, en particulier à cause du courant plus important qui passe dans le bras secours de l’onduleur 4 bras. La contribution des pertes par commutation est donc plus significative. De plus, si l’on prend en compte les pertes des interrupteurs d’isolement, qui ne sont pas représentées ici, la puissance dissipée en mode secours par l’onduleur double est encore réduite par rapport à l’onduleur 4 bras puisqu’il n’y a que deux interrupteurs qui conduisent le courant pour la première topologie contre trois pour la seconde.

figure II.76 : pertes dans l’onduleur double en mode normal et en mode secours

figure II.77 : comparaison des pertes entre l’onduleur double et l’onduleur 4 bras avec neutre relié

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