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CHAPITRE 4 : ANALYSE DES DONNÉES

4.5 Résultats relatifs à la perception des attentes parentales

4.5.1 Les différentes structures familiales

Dès la passation du questionnaire, un premier élément relatif à la dynamique familiale nous est apparu saillant : la diversité des structures familiales parmi nos participantes. C’est lors des entrevues que nous avons eu accès à une meilleure compréhension de la structure de la famille de chacune des filles.

• Dans un premier temps, il y a le cas de Maria, une jeune Colombienne de 16 ans, qui vit dans une dynamique familiale dont la socialisation est coordonnée sous le mode de la « grand- maternité » (Quéniart et Chapentier, 2015). Avant d’immigrer au Canada, elle habitait avec sa mère dans son pays d’origine où survenaient des conflits perpétuels entre ces deux femmes. Après une décision commune, elle est venue rejoindre son père, également d’origine colombienne, au Canada. Quelque temps après la migration, Maria ne se sentait toujours pas à sa place au domicile paternel, c’est pourquoi elle a emménagé avec sa grand-mère, son oncle et sa tante. Elle y réside désormais depuis quelques mois et elle s’y est bien intégrée. L’adolescente se voit y demeurer à l’avenir. Tout au long de son entrevue, cette participante a désigné sa grand-mère comme sa figure d’autorité, mais aussi comme sa confidente à qui elle dit absolument tout. Nous pouvons constater que malgré les nombreux changements que Maria a vécus, elle perçoit sa situation familiale actuelle positivement. Dans une recherche sur les dynamiques familiales en contexte migratoire, Quéniart et Charpentier (2015) soulignent que la transmission intergénérationnelle, à travers le rôle de mère et de grand-mère, est influencée par les péripéties migratoires, notamment des barrières qu’ont pu ériger les trajectoires migratoires

(éloignement, séparation des familles, décès et deuils). Ces constats décrivent bien la situation de Maria et de sa grand-mère qui vivent conjointement l’établissement de la jeune fille.

• Dans un second temps, nous avons observé que trois participantes avaient des structures familiales similaires. Aida et Yara ont immigré au Canada et y vivent avec leur mère et un frère cadet. De son côté, Nicole est avec sa mère et sa sœur depuis leur pays et jusqu’à maintenant. Yara et Nicole ont toutes les deux affirmé que leur père était décédé en Syrie quelques années avant le départ du pays en raison de problèmes de santé. Le père de Aida est également décédé lorsqu’elle était très jeune au Kirghizistan. Pour ces trois adolescentes, leur mère représente l’unique figure d’autorité parentale qui supervise leur parcours scolaire et leur socialisation, qui s’occupe du domicile familial et qui gère les ressources financières de leur famille. Tout compte fait, les mères font tout en leur possible pour s’assurer que leur famille ne manque de rien, malgré l’absence d’un père.

• Quant à la structure familiale de Zeina, elle contraste avec celles des autres : cette jeune fille d’origine afghane vit actuellement avec la première femme de son père, son frère et sa sœur ainés. Son autre grande sœur habite dans l’appartement adjacent avec son mari et leurs enfants. Les parents de cette adolescente sont décédés au Pakistan, pays où Zeina a grandi, il y a plusieurs années. À présent, cette jeune fille décrit plusieurs personnes comme figures parentales pour elle : la première femme de son père, son grand frère, ses sœurs et le mari de sa sœur. Quelques fois, Zeina utilisait le terme «mère» lorsqu’elle parlait de sa mère décédée, alors que parfois elle faisait allusion à la première femme de son père. Elle a décrit de façon positive sa relation avec cette dernière : «C’est bien. Elle ne me fait pas sentir le manque de ma vraie mère. Elle est ma mère!» Nous ressentons un lien affectif d’une grande importance entre cette jeune fille et cette femme qui l’a prise en charge depuis le décès de ses parents.

L’importante différence d’âge avec son grand frère a fait en sorte qu’il représente pour elle une figure paternelle. Par moments, il lui impose des restrictions quant à ses sorties et à ses heures de rentrée. La relation entre Zeina et son frère nous rappelle la notion de l’autorité du grand frère que relataient Lacoste-Dujardin et al., 1995, que nous avons mentionné dans notre problématique. Il la questionne fréquemment sur son école, s’assure qu’elle s’entoure de bonnes personnes et la conseille lorsqu’elle doit prendre des décisions. Il ne se gêne pas pour la recadrer lorsqu’il croit que la jeune fille rentre trop tard ou qu’elle n’a pas assez travaillé à l’école. Ses grandes sœurs suivent également les actions de la jeune fille au quotidien afin

qu’elle réussisse bien dans sa vie. Zeina affirme que dans son entourage, c’est son frère qui est le plus rigide en tant que figure d’autorité, mais elle expliquait cela par le fait qu’il veut qu’elle aille bien malgré les dures épreuves qu’elle a vécues durant son enfance.

Pour ce qui est des cinq autres participantes, elles vivent avec une famille de type plus nucléaire, soit un père, une mère et les frères et sœurs. Peu importe la structure familiale, les participantes étaient proches de leur famille et affirmaient être très ouvertes quant à leur vie scolaire et sociale avec leurs parents.