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2.1.3) Structure et fonction des protéines STIM et ORAI

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Suite à la découverte des protéines STIM et ORAI, des modèles de souris déficientes pour ces protéines ont été mis au point pour étudier plus précisément la mécanistique de cette voie. Il est apparu rapidement que la plupart des souris déficientes pour les gènes Stim1 ou

Orai1 meurent au stade périnatal. Les souris survivantes présentent un phénotype

rachitique, des myopathies, et un défaut d'activation plaquettaire. De plus, les souris déficientes pour Orai1 arborent également une perte du pelage. Il est admis que c'est le défaut fonctionnel au niveau du muscle strié, reflétant les myopathies de certains patients SCID, qui est responsable de la forte mortalité. Sur le plan immunologique, les souris déficientes pour Stim1 ou Orai1 présentent un défaut de la réponse calcique dans les mastocytes et les lymphocytes T et B, et par conséquence un défaut fonctionnel de ces cellules. Ces modèles murins ont permis de mettre en évidence l'implication de la voie STIM/ORAI dans une grande variabilité de types cellulaires. Par la suite, des modèles de KO conditionnels (notamment via le système de recombinaison Cre-Lox) ont été mis au point

afin de cibler ces gènes dans des types cellulaires particuliers, notamment dans les lymphocytes T CD4+, et s’affranchir du problème de mortalité des souris déficientes totales (Feske, 2009).

Suite à la mise en évidence du rôle des protéines STIM et ORAI, des expériences de cristallographie et de mutagenèse dirigée ont permis de déterminer les domaines fonctionnels de ces protéines et de concevoir un modèle d’activation des canaux ORAI par les protéines STIM.

Les protéines STIM1 sont exprimées au niveau de la membrane du RE et organisées au repos en dimères (fig. 15). La partie N- terminale est située dans la lumière du RE et contient plusieurs domaines : un domaine SAM (sterile α motif) qui contient une hélice alpha et deux domaines EF-hand dont le plus distal (cEF) a la capacité de lier le calcium. En présence de calcium dans la lumière du RE, le domaine EF-hand distal est replié au contact du domaine SAM. La partie C-terminale de STIM1 quant à elle est située dans le cytoplasme. Elle contient trois domaines

coiled-coil successifs formés d’hélice α. Le

premier domaine (CC1) possède trois hélices (Cα1 à 3) et les deux suivants (CC2 et CC3) en possèdent quatre (Sα1 à 4). Ces quatre hélices forment le SOAR (pour STIM ORAI

activating region), ou CAD (pour CRAC activation domain). Au repos, les domaines CC1 et

SOAR assurent par des liaisons hydrophobes l’interaction et la stabilité du dimère de protéines STIM. De plus, l’hélice Cα3 qui possède des résidus acides est en contact avec le domaine SOAR qui lui possède des résidus basiques, ce qui maintient le canal dans un état d’auto-inhibition. Enfin, les derniers acides-aminés de l’extrémité C-terminale forment un domaine riche en résidus lysines (Soboloff et al., 2012).

Lors de la déplétion des stocks, le calcium se détache du domaine EF-hand qui se sépare du domaine SAM et entraîne un changement de conformation de la protéine et une exposition

Figure 15 : Représentation d’un dimère de protéines STIM1 et de ses domaines fonctionnels au repos. cEF : domaine EF-hand canonique, hEF: domaine EF-hand non fonctionnel, SAM : sterile α motif, TMD : domaine transmembranaire, Cα : domaines

coiled-coil, Sα : hélices α du domaine

SOAR, SOAR : STIM ORAI activating

region.

Soboloff, J. et al. 2012. STIM proteins: dynamic calcium signal transducers. Nature reviews. Molecular cell biology.

de résidus hydrophobes au niveau de ces deux domaines. Les domaines EF-hand et SAM deviennent ainsi capables d'entrer en interaction avec ces mêmes domaines d'autres protéines STIM qui vont s'oligomériser. Le changement de conformation engendré depuis la partie N-terminale entraine une élongation de la molécule dans sa partie cytosolique et la dissociation de l’hélice inhibitrice Cα3 du domaine SOAR. Les résidus libérés des trois domaines coiled-coil entrainent l’oligomérisation de plusieurs protéines STIM. Ces oligomères vont également migrer par diffusion dans la membrane du RE de façon à se rapprocher de la membrane plasmique (fig. 16) (Soboloff et al., 2012). Le rapprochement de STIM et ORAI est rendu possible par la protéine TMEM110. Cette protéine est exprimée à la membrane du RE et permet la réorganisation des jonctions membrane plasmique/membrane du RE qui sont critiques à l’établissement de complexes STIM/ORAI (Quintana et al., 2015). Cette interaction est aussi facilitée par un recrutement des résidus lysines distaux de l’extrémité C-terminale de STIM par des phospholipides chargés de la membrane plasmique. Le domaine SOAR est capital pour l’oligomérisation des protéines STIM mais est en plus responsable par ses résidus basiques de l’interaction avec les résidus acides des régions cytosoliques des canaux ORAI (Soboloff et al., 2012).

Figure 16 : Modèle d'activation des canaux ORAI1 par les protéines STIM1. Le code couleur des différents domaines de STIM1 correspond à celui de la figure 15. Au repos l’hélice Cα3 de STIM (cylindres jaunes) maintient le domaine SOAR (cylindres roses) replié sur lui même. En absence de calcium, les protéines STIM se déplient et s’oligomèrisent au niveau des hélices α des domines CC (cylindres bleus, jaunes et roses). Les régions riches en lysines (boules vertes) interagissent aves les lipides membranaires (boules rouges). L’encadré à droite montre les résidus basiques du domaine SOAR (+) entrent en interaction avec les acides (-) des canaux ORAI.

Soboloff, J. et al. 2012. STIM proteins: dynamic calcium signal transducers. Nature reviews.

STIM1 et STIM2 sont deux protéines structurellement très identiques, toutes deux impliquées dans la mise en place du courant CRAC. STIM1 est activé et relocalisé à la membrane uniquement lors de la déplétion des stocks (Zhang et al., 2005). STIM2, au contraire, a la capacité de se relocaliser pour de faibles déplétions de calcium et est de base partiellement activé (Brandman et al., 2007). Cela peut s'expliquer par le fait que les protéines STIM1 et STIM2 diffèrent essentiellement au niveau de leur domaine de liaison au calcium (Zheng et al., 2008). De plus, le knock-down de STIM2 n'est pas aussi efficace que celui de STIM1 pour réprimer le courant CRAC et la surexpression de STIM2 ne restaure pas complètement ce courant en absence de STIM1 (Oh-Hora et al., 2008). Ces éléments indiquent très clairement que c'est la protéine STIM1 qui est critique dans l'établissement du courant CRAC. Le rôle exact de STIM2 donc reste à déterminer, d'autant plus depuis qu'il a été révélé que cette protéine peut aussi bien agir comme activateur que comme inhibiteur des canaux ORAI selon son épissage (Rana et al., 2015).

ORAI1 est une protéine qui possède quatre segments transmembranaires, deux boucles extracellulaires, une boucle intracellulaire et deux extrémités N et C-terminale intracellulaires. Des résidus négativement chargés dans les hélices transmembranaires 1 et 3 sont à l'origine de la sélectivité du canal pour le calcium (Hogan et al., 2010). La sélectivité des canaux ORAI pour le calcium est très importante (PCa/PNa > 1000) mais leur conductance

est relativement faible (30-200 fS, soit 100 fois moins que les canaux Cav1 : 2-20 pS) (Robert

et al., 2011). Les protéines STIM interagissent avec la partie C-terminale d'ORAI mais la partie N-terminale est également essentielle pour l'activation du canal (Hogan et al., 2010). Il faut une association de quatre protéines ORAI1 pour former un canal fonctionnel, parfois appelé canal CRAC. On ignore la stœchiométrie exacte de l'interaction entre protéines STIM et ORAI. Il semblerait que chacune des quatre protéines ORAI1 d'un canal puisse lier un dimère de protéines STIM, huit au maximum par canal donc, mais que ces quatre dimères ne soient pas forcément nécessaires à l'activation d'ORAI. L'activation des canaux CRAC serait en fait proportionnelle au nombre de dimères de STIM liés aux canaux (Muik et al., 2012).

Comme STIM1, ORAI1 possède plusieurs protéines homologues dont l'implication exacte dans le courant CRAC n'est pas très bien établie. ORAI2 et ORAI3 sont structurellement très similaires à ORAI1. In vitro, aussi bien ORAI2 que ORAI3 surexprimés avec STIM1 induisent la génération de courants calciques. ORAI2 est exprimé dans les lymphocytes T et pourrait expliquer le courant CRAC résiduel dans les cellules déficientes pour ORAI1. Cependant la surexpression de cette protéine ne compense pas du tout ORAI1, remettant en doute le rôle d'ORAI2 dans le courant CRAC (Gwack et al., 2008). Enfin le rôle de ORAI3 dans le courant CRAC n'est pas encore très bien compris. Cette protéine serait avant tout une sous-unité

des canaux ARC (arachidonate-regulated Ca2+-selective), des canaux calciques activés par l'acide arachidonique (Mignen et al., 2008).

En plus de se pencher sur la description des protéines STIM1 et ORAI1 ainsi que sur leur mécanisme d’activation, d’autres études commencent à se pencher sur l’interractome de ces protéines. Il a été montré que diverses protéines comme ARAF, junctate, Surf4 ou l’adenylate cyclase AC8 peuvent interagir ou réguler STIM-ORAI. De plus, l’activité d’ORAI peut être modulée par des modifications post-traductionnelles comme la phosphorylation ou la glutathionylation (Muik et al., 2012). Enfin, il a été démontré que les protéines STIM peuvent inhiber l'activité des canaux calciques voltage-dépendants. La déplétion des stocks du RE permet de relocaliser les protéines STIM au niveau d'ORAI et de la membrane plasmique, et donc des canaux Cav (Park et al., 2010) (Wang et al., 2010).

Au vu du grand nombre de protéines et de canaux (TRP, Cav, ARC) interagissant avec les

protéines STIM ou ORAI, on peut s’interroger sur le fait que STIM et ORAI puissent être localisés au centre d’un vaste complexe de régulation multidirectionnel de l'influx calcique. Quoi qu'il en soit, on peut considérer que la voie du courant CRAC est centrale dans les mécanismes d'entrée de calcium et de régulation des flux calciques.

II.2.2) Les autres canaux ioniques exprimés dans les lymphocytes T

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