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C HAPITRE II : L’ ENGAGEMENT OU LA VOLONTÉ DE POURSUIVRE UNE RELATION

II. 2 : Structure de l’engagement

L’absence de consensus sur la définition de l’engagement se traduit logiquement par des approches divergentes lorsque l’on aborde sa structure. Les auteurs se divisent notamment sur le nombre de dimensions que comporte l’engagement.

Certaines recherches font état d’une attitude unidimensionnelle, d’autres auteurs mentionnent deux, voire trois dimensions.

La plupart des chercheurs ont pourtant privilégié une structure unidimensionnelle de l’engagement, plus facile à mesurer (Morgan et Hunt, 1994 ; Anderson et Weitz, 1992). D’autres chercheurs (Geyskens et al. 1995 ; Kim et Frazier, 1997) insistent au contraire sur la nécessité de décomposer l’engagement pour tenir compte de ses différentes dimensions. Cette approche permet selon eux une meilleure compréhension du construit et des relations qu’il entretient avec les autres attitudes.

Dans leur article de synthèse, Geyskens et al. (1995) indiquent que plusieurs motivations expliquent l’intention de poursuivre la relation. Cela les conduit logiquement à identifier plusieurs types d’engagements. Parmi ceux-ci, l’engagement affectif et l’engagement calculé14 sont les plus fréquemment mentionnés (Allen et Meyer, 1991).

Le même clivage se retrouve en marketing où de nombreux chercheurs envisagent l’existence de deux engagements, affectif et calculatoire. Quelle que soit la formulation qui sera ensuite proposée, cette vision oppose un engagement calculé, de nature instrumentale et utilitaire, à l’engagement affectif.

• Engagement affectif

Que la relation implique un partenaire ou une marque, la volonté de poursuivre la relation s’explique par une évaluation générale positive et un attachement (Geyskens et al. 1995). La personne engagée affectivement désire continuer la relation parce qu’elle aime le partenaire et qu’elle tire plaisir de cette relation.

Les autres définitions sont conformes à cette approche. L’engagement affectif exprime une réelle volonté issue d’un attachement aux objectifs et valeurs du partenaire, totalement indépendante de la nécessité matérielle de rester lié à celui-ci (Lacœuilhe, 2000).

• Engagement calculatoire ou calculé

L’engagement calculé (calculative commitment) semble une attitude de nature beaucoup plus cognitive. Elle résulte d’une appréciation neutre par le consommateur des coûts et des bénéfices de continuer la relation (Allen et Meyer, 1990, 1991).

Samuelsen et Sandvik (1997) vont encore plus loin dans leur proposition en considérant qu’avec l’engagement calculé, le consommateur maintient la relation car il y est contraint, même s’il ne souhaitait pas la poursuite de cette relation.

Lacœuilhe (2000) observe que l’engagement calculé traduit une disposition à adopter un comportement motivé par une décision économique rationnelle (Stevens et al. 1978). Ce

type d’engagement est arbitré par les coûts liés au changement. L’engagement calculé correspond à la prise en compte d’une contrainte. Cela explique qu’il ait parfois été qualifié de motivation négative, à l’inverse de l’engagement affectif (Geyskens et al. 1995).

Ce comportement calculateur peut aussi correspondre à une logique cognitive (Allen et Meyer, 1990 ; Gundlach et al. 1995). L’engagement résulte alors de la croyance de l’individu en la supériorité de la marque sur ses concurrentes ou de l’absence d’alternative.

I1.2.b) L’approche unidimensionnelle de l’engagement

Une autre possibilité est de considérer l’engagement comme un construit unidimensionnel, sans se poser la question de sa décomposition. C’est la perspective qu’adoptent de très nombreux auteurs (Beatty et Kahle, 1988 ; Martin et Goodell, 1991 ; Bloemer et Kasper, 1995 ; Mellens et al., 1996 ; Oliver, 1997 ; Simon, 2004…).

Tous ces auteurs considèrent uniquement la volonté de poursuivre la relation, sans prendre en compte les motivations de cette attitude. C’est également la vision que nous privilégierons car elle permet d’éviter les nombreux problèmes que pose la co-existence de deux engagements :

- aucun des auteurs n’est parvenu à démontrer l’indépendance de ces deux construits. Les définitions que nous avons mentionnées n’ont pas fait l’objet de validation empirique.

- considérer un seul type d’engagement permet de souligner le caractère conatif de cette attitude. Cela permet notamment de mieux différencier l’engagement d’autres construits comme l’attachement ou l’attitude envers la marque.

- du point de vue de la mesure, l’unidimensionnalité de l’engagement facilite la création d’une échelle. On se souviendra que la plupart des échelles que nous avons recensées mesurent l’engagement sur une seule dimension. Il existe bien sûr quelques exceptions à cette règle : Gounaris (2005) propose deux échelles

14 Le terme anglais utilisé est « calculative commitment » qui a été traduit de plusieurs manières en français.

pour l’engagement affectif et calculé mais ces mesures ne s’appliquent qu’au domaine du marketing industriel et la validité discriminante de ces deux échelles n’est pas précisée.

D’autres auteurs adoptant l’hypothèse de deux engagements ont, eux aussi, développé des outils de mesure séparés. Kumar et al. (1995) ne mesurent que l’engagement affectif ; Geyskens et al. (1995) mesurent les deux dimensions mais sans indiquer une éventuelle dépendance entre elles. On remarquera que ces mesures ont été conçues pour l’étude de la relation client-fournisseur et qu’elles sont difficilement transposables à l’engagement envers la marque. En France, Amine, qui supporte sans réserves la double nature de l’engagement, ne propose pas non plus de mesures séparées. L’échelle de l’engagement qui porte son nom est unidimensionnelle (Amine, 1994, 1998). C’est d’ailleurs cette échelle qui est utilisée par Lacœuilhe pour vérifier la validité discriminante de son échelle d’attachement à la marque.

Nous considérons que l’engagement est un construit unidimensionnel. Ses antécédents peuvent toutefois être de nature caculatoire et/ou affective. L’un des objectifs de cette recherche sera notamment de sélectionner parmi les antécédents potentiels de l’engagement, les attitudes dont l’influence est la plus forte. Ainsi, en fonction de la contribution relative des éléments affectifs ou rationnels, nous parlerons d’engagement d’origine affective ou d’engagement d’origine calculatoire.