• Aucun résultat trouvé

Structure de la thèse

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 27-32)

Afin de répondre aux différents objectifs énoncés, cette thèse s’articule en trois chapitres distincts. Le propos du chapitre premier est de livrer une analyse de l’influence de la concurrence bancaire sur le risque à caractère systémique. Cette analyse entre en résonance avec la crise financière de 2007-2008, ayant conduit à un renouveau de la réflexion sur la notion de risque de système ainsi que sur le rôle des structures concurrentielles dans son développement. Face à l’abondance de contributions sur le sujet, il est d’abord, dans ce chapitre, dressé une revue des

12. L’Europe des quinze comprend : l’Autriche, la Belgique, le Danemark, la Finlande, la France, l’Allemagne, la Grèce, l’Irlande, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal, la Suède, l’Espagne, le Royaume-Uni.

13. Les trois économies de l’Europe des quinze hors zone euro sont le Danemark, la Suède et le Royaume-Uni.

focalisé son attention sur des mesures de risque et de fragilité individuels, ignorant de fait très largement les risques à l’échelle du système. Alors que l’idée selon laquelle une approchebottom-up, seule, permettait de jauger la stabilité du système a pu faire illusion pendant deux décennies, l’expérience de la crise a enjoint de compléter l’examen des risques par une approchetop-down. Dans cet esprit, et dans le sillage notamment des débats et travaux questionnant sur l’opportunité de la mise en place de politiques macroprudentielles, nous proposons deux études, dans le chapitre 1, afin d’étudier les effets de la concurrence sur les deux dimensions du risque systémique : (i) la stabilité du système en coupe, c’est-à-dire la distribution du risque entre les différents acteurs du système ; (ii) la stabilité du système à travers le temps, qui renvoie à la procyclicité de nos systèmes financiers et l’apparition de bulles financières.

Notre première contribution étudie ainsi la répartition du risque systémique, mesurée par la SRISK (Acharyaet al., 2012a ; Brownlees et Engle, 2015), au sein du système bancaire européen et met en évidence le rôle prépondérant du pouvoir de marché dans la distribution de ce dernier. Il s’avère, en particulier, que le pouvoir de marché tend à accentuer la contribution des banques au risque systémique. Le signe de la relation trouvée accrédite la thèse d’une concurrence aux effets stabilisateurs, réfutant alors l’existence d’un quelconque arbitrage entre stabilité et concurrence.

Sachant que la majorité des études considèrent encore aujourd’hui des mesures de risque individuel, nous avons, par ailleurs, testé l’influence du pouvoir de marché sur la fragilité individuelle. Dans ce cadre, nous parvenons à des résultats strictement opposés. Davantage de pouvoir de marché conduit les banques à prendre moins de risques. On pourrait alors, sous couvert de ces résultats, convenir de l’existence d’un arbitrage entre concurrence et stabilité. La contradiction des résultats pose, dès lors, la question du bien-fondé des études considérant des mesures de risque individuel et nous a conduit à nous interroger sur les causes sous-jacentes à ces divergences de résultats.

Puisque le risque systémique admet une double dimension, nous étudions, dans un second temps, toujours dans le chapitre 1, l’influence de la concurrence bancaire sur la procyclicité des systèmes financiers. La démarche contraste avec celle entreprise pour étudier la distribution du risque entre acteurs (dimension transversale). L’analyse microéconomique fait effectivement place à une analyse conduite à l’échelle macroéconomique pour l’ensemble des pays européens. Dans cette perspective, notre attention se porte sur la procyclicité du système financier.

Faisant appel à la théorie de l’accélérateur financier (Bernanke et Gertler, 1989 ; Kiyotaki et Moore, 1997 ; Bernanke et al., 1999), mais aussi aux travaux sur les cycles financiers de Minsky notamment, notre propos est dans ce cadre, au regard du cycle précédent la crise de 2007-2008, de tester l’implication des structures concurrentielles dans la propagation d’un choc réel à la sphère financière, à l’origine

des développements cycliques du crédit. Après avoir caractérisé l’hétérogénéité de la procyclicité du crédit en Europe, nos recherches mettent en évidence un effet tangible de la concurrence bancaire sur la procyclicité des systèmes bancaires. Il apparaît effectivement que la concurrence concourt à renforcer la stabilité et la rési-lience du crédit suite à un choc. La limitation des effets de propagation à la sphère financière induirait, par conséquent, un mécanisme d’accélérateur financier de plus faible ampleur. Nous faisons l’hypothèse que ces résultats empiriques tiennent à la plus grande efficience des systèmes concurrentiels. Au final, la conjonction des deux angles d’analyse du risque systémique dans ce chapitre conduit à rejeter l’hypothèse d’existence d’un arbitrage entre concurrence et stabilité dans l’industrie bancaire européenne.

La matérialisation du risque systémique étant à l’origine de fluctuations, cela conduit, en conséquence, à se poser la question de l’efficience des politiques de stabilisation macroéconomique. L’objet du chapitre 2 est de faire apparaître que l’efficience de la politique monétaire est subordonnée, pour partie, à la concurrence dans l’industrie bancaire. Après avoir développé les arguments théoriques nous amenant à penser que la concurrence bancaire affecte l’efficacité de la transmission monétaire, nous distinguons deux canaux de transmission pour lesquels la concur-rence bancaire pourrait avoir une incidence : (i) le canal des taux d’intérêt et (ii) le canal du crédit bancaire.

Notre première analyse empirique, dans le chapitre 2, porte sur l’incidence de la concurrence bancaire sur la transmission des taux d’intérêt dans la zone euro.

L’étude s’appuie sur une littérature riche, ayant notamment mis en évidence le caractère extrêmement hétérogène, tant dans l’ampleur que dans la vitesse, de la transmission des taux d’intérêt au sein des pays membres de la zone euro. Alors que le développement de l’intégration financière et monétaire en Europe avait conduit à une réduction de l’hétérogénéité dans la transmission des taux et à une accentuation de la convergence des conditions financières, la crise de 2007-2008 a enraillé ce processus. Les conditions financières des ménages et des entreprises sont devenues extrêmement hétérogènes au sein de la zone. Cette fragmentation met en cause l’efficacité des politiques menées par la BCE. Cela constitue, par ailleurs, un élément de réflexion sur l’optimalité de la zone monétaire. La limitation de ces hétérogénéités constitue, en conséquence, une des priorités de l’institution moné-taire européenne afin d’assurer sa pérennité à long terme (ECB, 2012). Bien entendu, l’hétérogénéité des conditions financières ne peut pas avoir pour unique origine des facteurs structurels. Elle est en grande partie la résultante de facteurs de risque, par nature conjoncturels et qui appellent à des politiques d’ordre différent. Néanmoins, nos analyses préliminaires indiquent que l’hétérogénéité et l’inefficacité de la trans-mission monétaire ne sont pas des phénomènes spécifiques à la crise. En effet, la période antérieure à celle-ci révèle également de fortes disparités. Cela étaye ainsi le fait que des facteurs structurels affectent la transmission de la politique monétaire.

À partir d’un modèle à correction d’erreur adapté à des données de panel, nous

ob-aux tob-aux bancaires en zone euro. Il en résulte que la stabilisation macroéconomique gagnerait en efficacité dans les systèmes bancaires plus concurrentiels. Dans le contexte européen, où la politique monétaire est «one size fits all», ces résultats appellent, par ailleurs, à davantage de convergence des structures bancaires afin d’assurer une transmission plus homogène de la politique monétaire. Outre ces résultats principaux, la spécification empirique retenue nous permet également de mettre en évidence les effets bénéfiques de la concurrence sur le niveau des taux.

Parce que Bernanke et Blinder (1988) ont suggéré que la politique monétaire avait des effets additionnels au canal des taux d’intérêt, en mettant en évidence le fait qu’une modification de la politique de taux de la banque centrale affecterait le coût et la disponibilité du crédit dans une ampleur plus importante qu’une simple baisse du taux sans risque, nous explorons également dans ce chapitre 2 l’effet de la concurrence sur ce canal additionnel de transmission. Ce canal appelé « canal du crédit » est communément divisé en deux branches : le canal du bilan et le canal du crédit bancaire (Bernanke et Gertler, 1995). Le premier conçoit qu’une modification des taux directeurs affecte la valeur des actifs et des flux de trésorerie des agents emprunteurs et, par ce biais, leur solvabilité qui détermine elle-même la prime de risque payée. Le canal du crédit bancaire soutient, pour sa part, que la politique monétaire affecte directement l’offre de prêt proposée par les banques. Cela étant, le canal du crédit bancaire n’est pas indépendant des intermédiaires financiers. Il a d’ailleurs été mis en évidence, dans la littérature, que la taille, la capitalisation ainsi que la liquidité des intermédiaires financiers modifient les répercussions d’un choc de politique monétaire. À partir de micro-données bancaires, nous contribuons donc à ce champ de littérature en menant un examen de la portée du pouvoir de marché sur le canal du crédit bancaire. Nos résultats attestent que le pouvoir de marché, outre un effet direct sur l’offre de crédit, en étant associé avec une croissance des prêts en moyenne plus importante, a également des effets indirects sur l’offre de crédit via le canal du crédit bancaire. Parce que les banques ayant du pouvoir de marché seraient en mesure d’avoir une prime de financement externe moins sensible aux modifications des taux d’intérêt et une capacité plus grande à lisser de manière inter-temporelle les chocs, elles auraient une offre de prêts moins sensible aux chocs de politique monétaire.

Finalement, dans le chapitre 3 de cette recherche doctorale, il est question des effets de la concurrence bancaire sur la croissance économique. En effet, même si réfuter que la concurrence soit déstabilisatrice, comme nous conduisent à le faire les chapitres 1 et 2, est nécessaire, cela reste néanmoins insuffisant pour déterminer si l’Union Européenne gagnerait à ce que la concurrence dans l’industrie ban-caire soit accentuée. Afin d’analyser les effets de débordements de la concurrence bancaire sur l’économie réelle, le chapitre 3 procède en trois phases. La première consiste à formuler des hypothèses de recherche théoriques. L’objectif est, par ce

biais, de répondre aux ambiguïtés théoriques qui prévalent dans la littérature et qui ont donné lieu à l’émergence de deux hypothèses antinomiques : l’hypothèse du pouvoir de marché et l’hypothèse de l’information. Dans cette optique, nous étendons le modèle de croissance néo-schumpétérien d’Aghion et Howitt (1998), en modélisant explicitement la présence d’un secteur bancaire, défini par un niveau de concurrence exogène. La modélisation proposée permet alors de mettre en évidence le fait qu’une plus forte concurrence dans l’industrie bancaire réduit la disponibilité du crédit, à savoir, dans notre modèle, la probabilité qu’un entrepreneur-innovateur soit financé. Si la disponibilité du crédit est affectée, c’est en raison de l’existence de phénomènes de sélection adverse, qui obligent la banque à investir préalablement à la mise en œuvre d’un contrat dans une technologie de filtrageex-antedes agents.

Or, la capacité d’investissement dans la technologie de filtrage est dépendante de l’ampleur des flux futurs escomptés, qui dépend elle-même de la capacité des banques à tirer profit de la réussite du projet entrepreneurial. Toutefois, notre modèle met parallèlement en évidence le fait que le pouvoir de marché bancaire réduit les incitations des entrepreneurs-innovateurs à innover. En somme, nos résultats corroborent, par conséquent, en partie, ceux de Petersen et Rajan (1995) dans le cadre d’un modèle de croissance, sans acter pour autant que la concurrence bancaire est nécessairement néfaste.

Afin de tester, parmi l’effet disponibilité du crédit et incitation à l’innovation, lequel a davantage d’influence sur la croissance économique, nous procédons, dans la deuxième phase de ce chapitre, à un examen empirique des relations entre concurrence bancaire et croissance économique. Parce que ce champ de recherche a été peu étudié, nous procédons, à un examen graduel de cette relation en suivant la trajectoire prise par l’abondante littérature sur les liens entre développement financier et développement économique. Deux résultats ressortent de cette analyse.

En premier lieu, malgré des biais potentiels nous obligeant à être prudent vis-à-vis des résultats, le pouvoir de marché bancaire ne semble pas être à l’origine d’effets néfastes pour la croissance économique. En second lieu, il apparaît que c’est prin-cipalement via l’allocation du capital que la concurrence bancaire pourrait affecter négativement la croissance économique.

Tenant compte de ces deux résultats, nous révisons dans la troisième phase de ce chapitre, d’une part, notre stratégie empirique afin d’obtenir des résultats moins équivoques et nous nous intéressons, d’autre part, aux effets de la concurrence sur la croissance de la productivité globale des facteurs (PGF), à savoir l’évolution du progrès technique. À cet égard, nous appliquons l’approche en double différence de Rajan et Zingales (1998) et testons ainsi si les secteurs industriels les plus dépen-dants du financement externe, et donc davantage soumis à l’influence du secteur bancaire, sont caractérisés par une croissance plus importante de leur productivité globale des facteurs, dans les économies où la concurrence est moins importante. En fin de compte, les résultats de cette ultime analyse permettent d’affirmer l’influence significative du pouvoir de marché bancaire pour la croissance économique.

Concurrence et stabilité en Union

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 27-32)