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Chapitre 2 – Synthèse des activités de recherche

4.1.3 Structure des communautés bactériennes des sols Articles [4-5], [9-10], [14]

Dans cette partie, je me focalise sur les variations de structure des communautés bactériennes des sols (diversité β). Les résultats présentés s’appuient sur la caractérisation des communautés bactériennes du sol par une technique d’empreinte moléculaire (ARISA, Ranjard et al., 2001), les résultats s’appuyant sur les techniques de séquençage haut débit étant en cours de publication. L’IGS bactérien présente un polymorphisme taille qui permet de caractériser la structure des communautés bactériennes du sol au travers de l’abondance relative de chaque taille de bande à raison de 100 bandes par échantillon ([14]).

Figure 9. Cartographie de la structure des communautés bactériennes des sols à l'échelle du territoire national

La représentation des variations de structure des communautés bactériennes des sols est réalisée en interpolant les scores normalisés des sites sur les trois premiers axes d’une analyse NMDS. Les trois cartes sont ensuite superposées et un mélange de couleurs est réalisé selon la codification RVB. Le triangle de mélange des couleurs est proposé à gauche de la carte. Dans cette représentation, deux sites présentant des couleurs différentes ont des structures de communautés différentes. Cette carte a servi de base dans la rédaction de l’article [14] mais n’a pas été publiée.

La Figure 9 présente les variations de structure des communautés bactériennes des sols sur la base d’une ACP permettant d’avoir une représentation des différences relatives entre chaque site. Ainsi, sur la carte de la Figure 9, deux sites présentant des couleurs différentes ont des communautés bactériennes différentes. A l’échelle du territoire national, on observe des variations de structure de communautés entre régions : e.g. Landes, Languedoc-Roussillon, Massif Central, Bretagne et Nord-Est de la France. Ces variations sont structurées spatialement à grande échelle puisque le rayon des unités spatiales est d’au minimum 140 km de rayon [14]. La structure des communautés bactériennes est donc structurée spatialement à l’échelle du territoire national, conclusion qui est en accord avec la littérature tant à des échelles continentales ou de pays (Green & Bohannan, 2006; Martiny et al., 2006; Fierer et al., 2007; Powell et al., 2015; Delgado‐Baquerizo et al., 2017; Thompson et al., 2017; Delgado-Baquerizo et al., 2018). Néanmoins, la variabilité locale de la structure des communautés bactériennes des sols est sans doute très forte au regard de l’effet pépite des variogrammes qui est d’au moins 57%. L’analyse des variations de structure des communautés bactériennes a été réalisée à partir des données de fingerprint moléculaire et de séquençage haut débit sur la base de leur composition (présence/absence des différentes bandes/OTU)

0 AXE 3 1

1

AX

E 3 0

dans quatre régions contrastées : Landes, Bretagne, Bourgogne, Sud-Est de la France ([9-10]). Cette analyse de la variance de la structure des communautés bactériennfies des sols a été réalisée par une analyse canonique des redondances sur matrice de distance (db-RDA, Legendre & Anderson, 1999; Legendre et al., 2009) en utilisant l’indice de Jaccard comme mesure de dissimilarité entre sites. Cette analyse a mis en œuvre trois groupes de variables explicatives : les caractéristiques physico-chimiques du sol, l’utilisation du sol et un groupe de descripteurs géographiques. Ces descripteurs géographiques correspondent à des PCNMs (Principle Coordinates of Neighbourg Matrix ; Dray et al., 2006) et ont la particularité d’être tous indépendants et de représenter une échelle spatiale pouvant être estimée au travers de leur semi-variogramme. La prise en compte de ces trois groupes de variables dans l’analyse a permis de tester l’importance relative des processus de sélection et de dispersion dans la structuration spatiale des communautés bactériennes des sols ; et d’identifier et de hiérarchiser les filtres environnementaux impliqués dans le processus de sélection environnementale.

Figure 10. Partition de la variance de la structure des communautés bactériennes des sols

La structure des communautés bactériennes des sols a été caractérisées par une technique de fingerprint moléculaire (ARISA) et par une technique de séquençage haut débit (Pyroséquençage 454, Roche, notée NGS). Les groupes de variables sont représentés comme suit : caractéristiques physico-chimiques du sol (gris clair), utilisation du sol (gris foncé), descripteurs géographiques (noir), interactions entre caractéristiques physico-chimiques des sols et utilisation du sol (blanc). Les seuils de significativité sont les suivants : ns : P>0.05 ; * : P<0.05 ; ** : P<0.01 ; *** : P<0.001.

Quelle que soit la méthode utilisée pour caractériser les communautés bactériennes des sols à l’échelle des quatre régions, l’ensemble physico-chimie du sol et utilisation du sol explique la part la plus importante des variations de structure des

communautés bactériennes, ceci indépendamment de leurs interactions (Figure 10). Ceci traduit le fait que la sélection environnementale est sans doute le premier processus structurant les communautés bactériennes des sols. Les descripteurs spatiaux expliquent une part plus faible mais significative des variations de structure des communautés bactériennes des sols dans toutes les régions excepté les Landes. Ces derniers peuvent traduire des gradients environnementaux non mesurés ou bien des relations spatiales entre sites, i.e. des migrations d’un site A vers un site B. Ici, vu le grand nombre de variables environnementales prises en compte dans l’analyse, il apparaît peu probable que les descripteurs spatiaux correspondent uniquement à des gradients environnementaux non mesurés. Ils traduisent donc probablement une limite à la dispersion des communautés bactériennes du sol. Les processus stochastiques comme la dispersion semblent jouer un rôle significatif mais plus faible que la sélection environnementale. Ces observations sont en accord avec la littérature puisque le processus de sélection environnementale est systématiquement identifié comme structurant pour les communautés microbiennes des sols (Horner-Devine et al., 2004; Drenovsky et al., 2010; Griffiths et al., 2011; Hanson et al., 2012; Powell et al., 2015). L’importance des limites à la dispersion est plus réduite et moins fréquemment observée (Hanson et al., 2012) mais a tout de même été démontrée pour certains genres (Cho & Tiedje, 2000) ou pour la communauté totale (Powell et al., 2016). Ici, les groupes de PCNMs représentant des structures spatiales a des échelles larges (80 à 120 km de rayon) et plus fines (40 à 65 km de rayon) expliquaient tous deux des parts significatives de la variance des communautés bactériennes des sols. Ceci suggère que la limite à la dispersion pour les microorganismes pourrait être effective à différentes échelles spatiales.

L’analyse fine des filtres environnementaux structurant les communautés bactériennes des sols a été réalisée sur les données d’empreinte moléculaire. Parmi les variables de physico-chimie des sols, chaque variable présente un effet marginal relativement faible étant donné le nombre important de variables explicatives sélectionnées. La hiérarchie des variables de physico-chimie des sols varie un peu entre les différentes régions. Néanmoins, en Bretagne, Bourgogne et dans le Sud-Est de la France, le pH est le premier filtre structurant les communautés bactériennes de sols. Il est suivi par des variables reliées à la quantité et à la qualité des ressources trophiques dans les sols (teneur en azote total : Ntot ; Corg, ratio C/N)

et par la texture du sol (teneur en argiles et en limons) ; puis par la teneur en nutriments tels que le potassium ou le magnésium. En dernier, et uniquement en Bretagne, les précipitations annuelles moyennes constituent un filtre structurant les communautés bactériennes des sols. Contrairement aux trois autres régions, les communautés bactériennes de la région des Landes ne semblent structurées que par la qualité de la ressource trophique puisque seul le ratio C/N est significatif. Ceci peut s’expliquer par le caractère particulier de cette région qui présente une variabilité très faible en termes de types de sols (principalement des podzosols) ou d’utilisation du sol (principalement des couverts forestiers). Le rôle majeur du pH identifié ici est aujourd’hui bien démontré dans la littérature (Fierer & Jackson, 2006; Griffiths et al., 2011, 2016; Hanson et al., 2012; Terrat et al., 2014, 2017). Le rôle prépondérant de l’utilisation du sol est aussi régulièrement identifié dans la littérature, en particulier lorsque des systèmes contrastés sont considérés (Drenovsky et al., 2010; Dumbrell et al., 2010). Il est moins prégnant lorsque les variations d’utilisation du sol sont plus graduelles (Delgado-Baquirezo et al., 2017). Ces différences peuvent être liées à un effet direct de la diversité végétale épigée qui a été identifiée comme pouvant structurer les communautés microbiennes (bactéries : Thompson et al., 2017 ; champignons : van der Heijden et al., 1998; Waldrop & Firestone, 2006). Elles peuvent aussi être liées aux interactions entre utilisation du sol et caractéristiques physico-chimiques des sols, en particulier le pH, la teneur en Corg et le ratio C/N. Ces dernières constituent elles aussi des variables environnementales déterminantes dans la structuration des communautés bactériennes des sols même si elles apparaissent moins fréquemment significatives, notamment du fait de leur forte corrélation avec l’utilisation du sol.

4.1.4 Étude de la TAR