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Chapitre 1 : Revue Bibliographique

1.3. Élicitation des métabolites secondaires

1.3.2. Élicitation chimique

1.3.2.1. Le stress oxydatif chez les bactéries

Le stress peut-être défini comme l’ensemble des conditions qui induisent des changements physiologiques chez les organismes vivants affectant ainsi leur croissance et générant des dommages cellulaires. Dans ces conditions hostiles le fonctionnement optimal des organismes est altéré. En conséquence, les organismes s’adaptent au stress en développant des mécanismes divers de résistance qui ont pour but une acclimatation dans ces nouvelles conditions de vie (Mittler, 2017 ; Booth, 2002).

Il existe deux types de stress environnementaux : biotique et abiotique. Le stress biotique est une forme de concurrence entre les organismes vivants telle que la prédation. Le stress abiotique est un changement physico-chimique des facteurs environnementaux tels que la salinité, la température, les rayons UV, l’oxygène, le pH, la présence de métaux, etc. Chez les bactéries, les réponses aux différents types de stress peuvent-être classifiées en deux catégories : une réponse générale et une réponse spécifique.

La réponse générale au stress est indépendante de la nature du stress et joue un rôle essentiel dans la survie des bactéries dans l’environnement. Elle peut se traduire par la conservation de l’intégrité de l’enveloppe cellulaire, la biogenèse de transporteurs contrôlés par des facteurs cytoplasmiques ou extra-cytoplasmiques ou la modification de la morphologie bactérienne (sporulation, formation de biofilm, acquisition de structures de motilité) (Lushchak, 2011).

La réponse spécifique au stress dépend de la nature du stress. Le stress oxydatif médié par les espèces réactives d’oxygènes (ROS) constitue un exemple de stress qui génère des réponses spécifiques chez les bactéries aérobies. Ces dernières possèdent des systèmes tels que la thiorédoxine, la catalase et d’autres enzymes anti-oxydantes qui permettent de neutraliser les ROS et minimiser leurs dommages cellulaires (Mittler, 2017 ; D’Autréaux et al., 2007).

Les principaux ROS générés par l’oxygène chez les bactéries sont l’anion superoxyde (O2.-), le peroxyde d’hydrogène (H2O2) et le radical hydroxyle (HO.). Ces espèces réactives d’oxygène attaquent tous les constituants cellulaires tels que les lipides, les protéines et les acides nucléiques et provoquent la mort cellulaire (Figure 1.11) (Møller & Sweetlove, 2010).

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Figure 1.11: Les origines et les cibles des espèces réactives d'oxygène (extrait de l'article D'Autréaux et al., 2007). Les expéces réactives d’oxygène sont le radical hydroxyle, le peroxyde d’hydrogène et l’anion superoxyde. Ils ont des cibles différentes : le radical hydroxyle attaque les lipides, les acides nucléique et les acides aminés ; le peroxyde d’hydrogène oxyde les métalloenzymes et les résidus cystéines et méthionines et libère le fer des clusters fer-soufre Fe-S ; l’anion superoxyde forme des radicaux toxiques tels que le monoxyde d’azote. L’ensemble de ces modifications physiologiques engendrent des réponses de SOSchez les bactéries. La réponse SOS est un mécanisme de régulation qui permet l’adaptation et l’évolution de la bactérie quand les conditions environnementales l’exigent.

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L’anion superoxyde (O2.-) est produit par des processus enzymatiques impliquant des enzymes, telles que NADPH oxydases ou des oxygénases cytochrome P450 dépendantes (Babior, 2001), ou des processus non enzymatiques médiés par des coenzymes, des flavines ou des groupements Fe-S (Babior, 2000).

Le peroxyde d’hydrogène (H2O2) peut être formé au cours des différentes réactions comme, par exemple, pendant la réaction de dismutation spontanée du superoxyde ou lors de l’oxydation des protéines à fer, des flavoprotéines et d’autres composés cellulaires réduits (Touati, 2000). De plus, l’auto-oxydation, causée par des rayons UV, des thiols, des catéchols, des flavines, des déshydrogénases, des oxydases et des cytochromes engendre la formation du peroxyde d’hydrogène ainsi que de l’anion superoxyde.

Les radicaux hydroxyles peuvent êtres produits par la réaction de Fenton entre le peroxyde d’hydrogène et des ions ferreux ou d’autres métaux de transition (D’Autréaux et al., 2007). 1.3.2.1.1. Les mécanismes de défenses contre le stress oxydatif

Les mécanismes de défense des bactéries contre les ROS se traduisent par l’élimination des espèces réactives et le déclenchement des mécanismes généraux de réponse aux stress.

L’élimination des espèces réactives est assurée par des enzymes telles que la superoxyde dismutase (SOD), les catalases (CAT) et les peroxydases. La SOD élimine le radical superoxyde en le transformant en peroxyde d’hydrogène. Le peroxyde d’hydrogène sera ensuite dismuté sous l’action de la catalase en eau et en oxygène. Les catalases assurent la dismutation du peroxyde d’hydrogène en eau et en oxygène. Les peroxydases décomposent également le peroxyde d’hydrogène (D’Autréaux et al., 2007 ; Mishra & Imlay, 2012).

La protection des résidus cystéines des biomolécules contre l’oxydation est assurée par les thiol-transférases telles que la thiorédoxine et la glutathion réductase qui assurent la réduction des ponts disulfures.

La thiorédoxine est une protéine qui permet le transfert d’atomes hydrogènes vers les résidus cystéines grâce à un système thiorédoxine qui implique deux enzymes : la thiorédoxine peroxydase et la thiorédoxine réductase. Le transfert d’électrons du NADPH grâce à l’action de la thiorédoxine réductase permet la ré-oxydation de la thiorédoxine et la réparation des dommages aux protéines (Arnér & Holmgren, 2000).

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1.3.2.1.2. Récepteurs des espèces réactives de l’oxygène chez les bactéries

Les bactéries possèdent des récepteurs spécifiques aux espèces réactives de l’oxygène parmi lesquels les facteurs transcriptionnels SoxR, OxyR et PerR.

SoxR est un facteur transcriptionnel spécifique des ions superoxydes (O2.-). L’oxydation du cluster SoxR [2Fe-2S]+ par l’anion superoxyde induit un changement conformationnel de SoxR ce qui affecte la liaison de ce dernier à l’opérateur de l’ADN et active la transcription du gène (Figure 1.12.a). La réduction SoxR est assurée par la ferredoxine-NADPH dépendante.

OxyR et PerR sont des facteurs transcriptionnels spécifiques du peroxyde d’hydrogène (H2O2) et des peroxydes organiques. OxyR et PerR sont des orthologues fonctionnels qui régulent des gènes communs responsables de la production des catalases, de la peroxyrédoxine et d’un régulateur transcriptionnel du métabolisme du fer. En outre, OxyR joue un rôle dans le contrôle de la thiorédoxine (Trx), de la glutathion réductase et de la glutarédoxine (Grx).

PerR agit comme un répresseur alors que OxyR comme un activateur.

L’oxydation d’OxyR par le peroxyde d’hydrogène permet sa fixation à l’ADN et l’activation de la transcription des gènes cibles. La réduction de ce facteur est assurée par la glutarédoxine (Grx) (Figure 1.12.b).

La PerR est aussi sensible au peroxyde d’hydrogène, qui oxyde le cluster [4Fe–4S]2+ de son centre actif en [3Fe–4S]+. Ce dernier étant instable, l’ion Fe2+ est libéré. Sous sa forme oxydée, le PerR se détache de l’opérateur, ce qui permet le déclenchement de la transcription (Figure 1.12.c).

Dans l’état de connaissance actuel, les chercheurs considèrent ce facteur comme un répresseur qui une fois oxydée, perd sa fonction, le mécanisme de ré-oxydation mis en jeu est inconnu.

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Figure 1.12: Récepteurs bactériens des espèces réactives d'oxygène (extrait de l'article D’Autréaux et al., 2007). (a) L’ion superoxyde active la transcription du facteur SoxR par liaison au site acif. La réduction de SoxR par l’action de la ferrédoxine NADPH-dépendante rend cet opérateur inactif ; (b) le facteur transcriptionnel OxyR est activé par le peroxyde d’hydrgène qui oxyde les fonctions thiols SH en formant un pont diulfure S-S ce qui permet la liaison d’OxR à l’ADN et l’activation de la transcription. Ce facteur est inactivé par réduction du pont disulfure par la glutarédoxine ; (c) PerR est un répresseur transcriptionnel sensible au peroxyde d’hydrogène. En présence du peroxyde d’hydrogène, le fer présent au niveau du site actif de PerR est libéré ce qui active la transcription. Le mécanisme de réoxydation de ce facteur transcriptionnel est inconnu.

À la lumière de ce qui a été présenté, nous retiendrons que la majorité des bactéries aérobies réagissent aux ROS en déclenchant des réponses spécifiques en fonction de la nature de l’espèce oxygénée. De plus, il a été rapporté que le stress oxydatif déclenche l’activation de certaines voies de biosynthèse de métabolites secondaires tels que les antimicrobiens chez les Actinobactéries (Zhou et al., 2012). L’effet des espèces réactives de l’oxygène serait alors similaire à des molécules signal qui régulent la transcription des clusters de métabolites secondaires. Un autre type de molécules signals existe chez les bactéries. Il s’agit des auto-inducteurs du Quorum Sensing auxquels nous consacrerons la partie suivante de ce chapitre.

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