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Les stratégies thérapeutiques dans le cadre d’une douleur par excès de nociception

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À ce jour, aucune recommandation officielle n’est disponible. Seules quelques études dans la littérature ont proposé des stratégies thérapeutiques de prise en charge de la douleur aiguë et chronique par excès de nociception (195,207–212) chez les patients dépendants aux opioïdes et traités par MSO.

PARTIE III : prise en charge de la douleur chez les patients dépendants aux opioïdes traités par un MSO

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1. Première étape

Qu’il s’agisse de la douleur aiguë ou de la douleur chronique, il convient de suivre quelques recommandations générales. Mais avant toute chose, il existe un prérequis indispensable qui est de croire le patient lors d’une plainte douloureuse et d’instaurer un climat

de confiance. En effet, rassurer le patient et l’informer de toutes les possibilités thérapeutiques

permettra de réduire son anxiété et de renforcer la relation patient-médecin, ce qui contribuera à une meilleure prise en charge. Ensuite, la stratégie thérapeutique à adopter sera conditionnée par plusieurs paramètres cliniques décrits dans le tableau 17 (211).

Tableau 17 : recommandations générales dans la prise en charge de la douleur par excès de nociception chez les patients dépendants aux opioïdes traités par MSO (211).

2. Deuxième étape

Plusieurs stratégies thérapeutiques ont été proposées en fonction de la durée de la douleur (aiguë ou chronique), de son intensité (légère, modérée ou sévère) et du type de traitement de substitution (MTD ou BHD) (figure 24 et tableau 18) (195,207,208,210,211).

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Figure 24 : algorithme de prise en charge globale de la douleur aiguë chez les patients dépendants aux opioïdes traités par MSO, d’après Manguzzi et al, 2018 (207).

Tableau 18 : stratégies thérapeutiques de prise en charge de la douleur du patient dépendant aux opioïdes traités par MSO, selon Courty et al, 2012 (195).

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Prenant en compte le phénomène de tolérance, les patients dépendants aux opioïdes et douloureux nécessitent des posologies plus élevées et des administrations plus fréquentes d’antalgiques opioïdes.

Au-delà de la sévérité de la douleur, les stratégies thérapeutiques doivent également prendre en compte le type de traitement de substitution utilisé (BHD ou MTD) :

o Patients traités par MTD : rappelons que la MTD est un agoniste pur des récepteurs

opioïdes mu. Plusieurs stratégies antalgiques sont proposées (195,207,208,210,211) : - Douleurs légères

1/ maintien de la MTD + antalgiques non opioïdes (paracétamol et AINS), - Douleurs modérées

1/ maintien de la MTD + antalgiques non opioïdes (paracétamol et AINS) ± néfopam,

2/ fractionnement de la MTD ± augmentation des doses,

3/ fractionnement de la MTD + antalgiques non opioïdes ou néfopam, - Douleurs sévères

1/ fractionnement de la MTD + augmentation des doses + morphine à libération immédiate puis à libération prolongée ou fentanyl patch (rotation des opioïdes si tolérance à la morphine).

o Patients traités par BHD : rappelons que la BHD est un agoniste partiel des récepteurs

opioïdes mu et un antagoniste des récepteurs kappa et qu’elle possède une affinité particulièrement élevée pour les récepteurs mu. Compte tenu de cette grande affinité, la BHD sera difficilement déplaçable de son récepteur et l’administration concomitante d’antalgiques opioïdes ne sera que très partiellement voire pas du tout efficace. Plusieurs stratégies antalgiques sont proposées (195,207,208,210,211) :

- Douleurs légères

1/ maintien de la BHD + antalgiques non opioïdes (paracétamol et AINS), - Douleurs modérées

1/ maintien de la BHD + antalgiques non opioïdes (paracétamol et AINS) ± néfopam,

2/ fractionnement de la BHD ± augmentation des doses (207),

3/ fractionnement de la BHD + antalgiques non opioïdes ou néfopam, - Douleurs sévères

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1/ arrêt de la BHD + morphine à libération immédiate puis à libération prolongée ou fentanyl patch. Cette stratégie est à réaliser de préférence en milieu hospitalier,

2/ remplacement de la BHD par la MTD, celle-ci étant plus facile à manipuler en cas de douleur très sévère ou de chirurgie douloureuse programmée (207). Globalement, la prise en charge de la douleur chez les patients dépendants aux opioïdes reste, aujourd’hui encore, un défi de taille. Il est important que les médecins généralistes ou spécialistes puissent être formés aux particularités de la douleur et à la prescription des

antalgiques opioïdes chez les patients dépendants, afin de déconstruire cette « opiophobie »

dans le but précis d’améliorer la prise en charge individuelle de ces patients. Il reste cependant fondamental de mettre en place une prise en charge multidisciplinaire comprenant à la fois un

addictologue, un algologue, un psychiatre et le médecin traitant du patient. Quelques

recommandations générales sont synthétisées dans la figure 25 ci-dessous.

Figure 25 : règles complémentaires dans le cadre de la prise en charge de la douleur par excès de nociception chez les patients dépendants aux opioïdes traités par MSO (195).

Règles complémentaires :

• Éviter les opioïdes faibles (codéine, tramadol, dihydrocodéine, poudre d’opium) de plus faible affinité pour le récepteur opiacé mu donc moins efficace en cas de substitution ;

• Ne pas prescrire d’agonistes partiels (buprénorphine) ni d’agonistes/antagonistes (nalbuphine) pouvant provoquer un syndrome de sevrage physique ;

• Ne pas prescrire de formes injectables (sauf néfopam) ;

• Penser aux co-analgésiques (douleur chronique) : antidépresseurs (amitriptyline, duloxétine), antiépileptiques (gabapentine, prégabaline), corticoïdes, myorelaxants, antispasmodiques ; • Réaliser une hospitalisation de courte durée pour équilibrer un traitement ;

• Penser aux approches non-pharmacologiques : neurostimulation transcutanée (TENS), relaxation/sophrologie, kinésithérapie/massage, hypnose, acupuncture ;

• Se limiter à un seul prescripteur avec un seul pharmacien ;

• Prévoir des consultations plus fréquentes pour évaluer l’efficacité et la tolérance de la stratégie antalgique mise en œuvre.

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