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Après avoir découvert les enjeux de l’UX, intéressons-nous aux moyens qui peuvent être mis en œuvre pour améliorer l’expérience utilisateur dans les interfaces hommes-machine.

1. T

ECHNOLOGIES PERSUASIVES

Les technologies persuasives sont « des technologies d’interaction conçues pour modifier l’attitude ou le comportement de leurs utilisateurs. Elles s’appuient sur les résultats obtenus en psychologie sociale et en psychologie cognitive au sujet du comportement humain et de l’acte de persuasion. »36 On a commencé à s’intéresser aux technologies persuasives au début des années 2000 sous le nom de captologie (captology), un acronyme pour Computer As Persuasive TechnOLOGY, grâce aux travaux du docteur B.J Fogg37, directeur du laboratoire de technologies persuasives de l’université de Stanford. À l’aide de ces technologies, Fogg pense pouvoir influencer le comportement humain positivement et lui permettre d’adopter un comportement plus adapté à l’outil qu’il utilise, pour sa santé, pour l’environnement, etc. Un exemple concret d’application des principes de Frogg a été la douche « Show-me » pour « SHOwer Water MEter ». Pour pousser la personne qui prend sa douche à économiser de l’eau, la douche propose une dizaine de LEDs qui s’allument au fil de la consommation d’eau, chaque LED correspondant à une consommation d’eau de 5 litres. Ainsi l’utilisateur prend conscience de sa propre consommation et la réduira consciemment ou non. L’expérience utilisateur peut également se saisir de

36 FOULONNEAU Anthony, CALVARY Gaëlle, VILLAIN Éric, État de l’art en conception de systèmes

persuasifs in Journal de l’Association Francophone d’Interaction Homme-Machine, Vol. 4, N°1, Article 2, Juin 2015, pages 19 à 47, consultable en ligne : http://iihm.imag.fr/publs/2015/2-Foulonneau&co-19-47.pdf [dernière

consultation novembre 2017]

37 FOGG B. J., Persuasive Technology: Using Computers to Change What We Think and Do, Morgan Kaufmann,

ces principes notamment sur le web. Marianne Lykke38, professeur à la Royal School of Library and Information Science du Danemark énonce 7 principes qui ont déjà trouvé leur application sur le web.

Tableau 3 - Principes de persuasion de Marianne Lykke (que nous traduisons de l’anglais)

1. Raccourcissement – Rendre l’action ou l’information aussi simple que possible

2. Direction – Inciter les utilisateurs à utiliser une séquence, ou des actions ou prendre part à des événements prédéterminés

3. Personnalisation – Personnaliser les fonctionnalités et l’information selon les besoins de l’utilisateurs et ses caractéristiques

4. Suggestion – Suggérer un certain comportement au moment le plus opportun 5. Auto-surveillance – Surveiller le comportement dans le but de modifier des

actions ou un comportement pour atteindre un but ou résultat prédéterminé.

6. Surveillance – Surveiller le comportement de quelqu’un d’autre pour modifier son comportement d’une manière spécifique

7. Conditionnement – Façonner le comportement en récompensant l’adoption d’un certain comportement

Les 7 principes retenus par Marianne Lykke trouvent leur application sur les sites web de plusieurs manières. Nous proposons ici un tableau non exhaustif d’exemples.

Tableau 4 – Exemples d'applications des principes de Marianne Lykke sur le web

1. Raccourcissement Les contenus sortis de l’arborescence pour être mis en « une », les icônes qui commandent des fonctionnalités, sont des exemples de raccourcissement, 2. Direction Renvoie aux contenus mis en avant dans

les sites web, que l’on peut trouver via les menus mais qui sont rendus ainsi

accessibles plus rapidement. On influence clairement l’internaute en l’invitant à consulter un contenu plutôt qu’un autre.

Renvoie également aux techniques de SEO* qui optimisent la recherche via les moteurs de recherche et mettent les contenus du site web en avant sur les pages de résultats de recherche.

38 LYKKE Marianne, Persuasive design principles: means to improve the use of information organisation and search features in Web site information architecture? article consultable en ligne :

http://pure.iva.dk/files/30769221/MLN_SIGCR2009.pdf [dernière consultation novembre 2017]

3. Personnalisation S’enregistrer sur un site, renseigner des informations telles que ses centres d’intérêts, préférences, sexe, âge, etc.

puis obtenir un espace personnel,

« liker » des contenus et retrouver des contenus similaires proposés dans son espace ou dès sa reconnexion + Interfaces personnalisables ou/et personnalisées selon le profil de l’utilisateur.

4. Suggestion On peut citer ici les moteurs de

recommandation et les pratiques telles que « vous avez lus cela, vous aimerez ceci » mais également les aides à la frappe ou l’auto complétion*.

5. Auto-surveillance Les applications de développement personnel, les applications sportives, bancaires, etc. adoptent ce principe selon lequel l’utilisateur choisit un but (ou un but fortement conseillé) en enregistrant des données et actions le concernant, lui permettant d’atteindre ses objectifs.

6. Surveillance Renvoie aux pratiques telles que

« articles les plus lus », « nos hits du moments », « nos meilleurs succès » qui se basent sur la surveillance des clics, c’est-à-dire des comportements, lectures, achats, etc. des utilisateurs.

Renvoie également à l’utilisation des cartes de chaleur qui surveille le parcours des internautes sur un site web.

7. Conditionnement Il s’agit ici de récompenser un certain type de comportement comme par exemple un achat dans un temps donné, le visionnage d’une publicité, etc.

Logiciels intégrant des « auto déclencheurs », qui permettent par exemple de récompenser un utilisateur Facebook avec un « like » instantané dès qu’il publie une photographie. Cette

« gratification » l’incite alors à revenir régulièrement sur le site.

2. UX

ET

S

CIENCES COGNITIVES

Pour améliorer leurs interfaces les concepteurs de sites web cherchent à mesurer l’expérience utilisateur, c’est-à-dire à qualifier de manière précise le ressenti des utilisateurs face à leurs interfaces. Il existe plusieurs manières de « mesurer » ces réactions et ressentis mais c’est bien sur ce point que les neurosciences peuvent apporter leur pierre. En effet, comment capter ou mesurer une émotion ? Comment savoir si l’utilisateur vit une expérience agréable ou non face à son site web ? Pour analyser les réactions des utilisateurs face à leurs interfaces les concepteurs peuvent recourir à des questionnaires ou entretiens mais ceux-ci laissent toujours indéniablement une marge (même très courte) aux utilisateurs leur permettant de prendre de la distance, de réévaluer leur ressenti ou de mesurer leur propos. Les sciences cognitives peuvent aider à obtenir des résultats francs et immédiats. Dans leur article, Le défi de l’expérience utilisateur39 , Pierre-Majorique Léger et Sylvain Sénécal citent le Tech3Lab de HEC Montréal, le plus grand laboratoire UX en Amérique du Nord, au sein duquel on teste différents outils provenant des neurosciences pour mieux comprendre l'expérience utilisateur. Ainsi, on mesure les expressions faciales pour consiste à capturer grâce à un appareil posé sous l’écran les mouvements des yeux et les zones où ils s’attardent ; le résultat donne une heatmap ou carte de chaleur. La carte de chaleur la plus connue est « le triangle d’or de Google » où l’on observe que 60% des clics sur les moteurs de recherches sont sur les trois premiers résultats de la recherche. Ce

39 LÉGER Pierre-Majorique, SÉNÉCAL Sylvain, « Le défi de l’expérience utilisateur », Gestion 2015/2 (Vol. 40), p.

50-57.

Figure 12. Sciences cognitives et expérience utilisateur – Source : LÉGER Pierre-Majorique, SÉNÉCAL Sylvain

résultat a évidemment eu un impact sur la page de résultats du moteur de recherche qui depuis propose à cet endroit stratégique des résultats venant de sites web ayant payé leur bon référencement à Google (Adword) que l’on peut distinguer des résultats issus du référencement naturel. Néanmoins, ces données sont intéressantes et peuvent permettre d’optimiser la navigation d’un site web et de trouver les marges de progression de l’expérience utilisateur.