Nous venons de présenter un état de l’art des méthodes numériques permettant de traiter les relations de saut et le suivi d’interface. Nous présentons ici de façon très brève les stratégies numériques adoptées dans YALES2, code de résolution des équations de Navier-Stokes à faible Figure 2.10 – Simulation de la configuration expérimentale de Marmottant [86] par Kim et Moin [64] à l’aide d’une méthode Refined Grid Level-Set (RGLS), couplée à un suivi lagrangien des gouttes issues de l’atomisation. nombre de Mach, développé au CORIA par Vincent Moureau et ses collaborateurs. Le lecteur est invité à se référer aux thèses de Malandain [82] ou encore celle de Enjalbert [35] pour plus de précisions sur les méthodes numériques disponibles dans ce solveur. Discrétisation spatio-temporelle La méthode classiquement adoptée pour la simulation numérique d’un écoulement est la méthode dite des "Volumes Finis". Nous avons vu que les équations générales régissant les écoulements que nous souhaitons simuler sont des lois de bilan. Cette méthode des volumes finis évalue les bilans de masse et de quantité de mouvement (plus éventuellement d’énergie) sur des volumes se définissant à l’aide d’une discrétisation spatiale du domaine de calcul. Pour évaluer ces bilans, la méthode consiste à évaluer les flux traversant les interfaces des volumes définis par la discrétisation spatiale, et à se ramener à des bilans volumiques à l’aide du théorème de Green-Ostrogradski. Les volumes de contrôle utilisés dans YALES2 permettant le calcul des flux ne sont pas direc-tement constitués de l’élément du maillage. Ils sont construits autour d’un noeud du maillage (où sont stockées les variables), à partir du milieu des arêtes menant à ce noeud et des barycentres des éléments contenant le noeud en question. Une illustration en dimension 2 de la construction de ce volume de contrôle dit "dual" est présentée sur la figure 2.11. Une telle formulation dite "centrée sur les nœuds" présente un certains nombres d’avantages par rapport à une formulation dite "centrée sur les cellules" utilisant les cellules de base du maillage. Nous ne détaillons pas ici ces avantages, et renvoyons le lecteur intéressé à [82]. Le schéma de discrétisation spatiale pour le calcul des flux est un schéma centré d’ordre 4. Le schéma de discrétisation temporelle, dénommé TFV4A, également d’ordre 4 en temps, est une modification du schéma classique RK4 proposée par Kraushaar [65]. Le lecteur pourra trouver dans la thèse de Vantieghem [128] des détails sur les méthodes numériques utilisées. Equation de Poisson La pression et la vitesse sont couplées par une équation de Poisson, que l’on établit en appliquant l’opérateur divergence à l’équation de conservation de la quantité de mouvement (eq. 2.7), et en tenant compte de la condition d’incompressibilité (eq. 2.3). Ce Figure2.11 – Illustration en dimension 2 d’un volume de contrôle dual défini autour d’un noeud, utilisant le milieu des arêtes menant à ce noeud et le barycentre des cellules contenant ce noeud. D’après Enjalbert [35] couplage pression-vitesse s’écrit en formulation continue : ∇2p=ρ∇ ·(g+ν∇2u−u· ∇u) (2.26) La résolution de cette équation de Poisson est l’un des problèmes majeurs de la simulation numérique d’un écoulement incompressible, car chaque point de l’espace est alors dépendant de tous les autres (problème de nature elliptique). De très nombreuses communications entre les processeurs sont alors nécessaires, représentant de façon classique plus de 50% du coût numérique du calcul. La résolution de cette équation se base généralement sur une méthode de projection, comme celle développée par Chorin [15], où la vitesseu est décomposée en un champ irrotation-nelui vérifiant∇ ⊗ui = 0et un champ solénoïdal us vérifiant ∇ ·us= 0. Les étapes principales de la méthode de résolution à pas fractionnaire de l’équation de Poisson adoptée dans YALES2 sont les suivantes : • Estimation d’un champ de vitesseu∗intermédiaire ne respectant pas la condition d’incom-pressibilité (eq. 2.3) à partir du champ de vitesseun. • Obtention du terme de pressionPn+1 par la résolution d’une équation de Poisson utilisant le champ de vitesse intermédiaireu∗. • Ce champ de pressionPn+1est celui utilisé pour le calcul du champ de vitesseun+1vérifiant la condition d’incompressibilité. La résolution de cette équation de Poisson est détaillée dans Malandain etal. [83]. Specificités au solveur "SPRAY" de YALES2 Le solveur SPRAY de YALES2 résout dans chacune des phases le système composé de l’équation dite de "continuité" (eq. 2.9) et de la quantité de mouvement (eq. 2.11), ainsi que les relations de saut (eq. 2.12) à l’interface. Le suivi d’interface est réalisé à l’aide d’une méthode Level-Set conservative proposée par est assuré par une méthode de type "Ghost-Fluid", dont la philosophie a été présentée dans la sous-section 2.2.1. Desjardins et Moureau [25] proposent, en reprenant les travaux de Rudman [111], une mé-thode permettant d’améliorer le couplage entre le terme convectif ∇ ·(u⊗u) de l’équation de quantité de mouvement (eq. 2.11) et le transport de la Level-Set. Ce terme convectif est modifié de façon à inclure un terme de masse volumique, estimée à partir de la Level-Set. Cette pro-position permet d’améliorer la simulation d’écoulements diphasiques à forts rapports de masses volumiques. YALES2 laisse le choix à l’utilisateur de définir un "nombre de Courant" convectif Cu , le pas de temps convectif de l’itérationdtu s’adapte alors en fonction de la norme de la vitessekuk et la taille de la discrétisation spatiale dx : Cu = kukdtu dx (2.27) Dans le cas spécifique du solveur "SPRAY" de YALES2, l’utilisateur définit un "nombre de Courant capillaire", le pas de temps capillaire dtσ de l’itération s’adapte alors en fonction de la tension de surface σ, de plus petite densitéρmin, du carré de la discrétisation spatialedx, et de la courbure κ de l’interface. Cσ = r σκ kdxk2ρmin ·dtσ (2.28) Cette condition peut s’avérer extrêmement contraignante, comme nous le verrons en parti-culier au chapitre 5. Dans le document Simulation numérique de jets liquides cisaillés par une phase rapide : dynamique de battement à grande échelle et intéraction avec les structures tourbillonnaires (Page 72-75)