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6.3 Gestion des incohérences

6.3.4 Stratégies en cas d’incohérence

Nous distinguons le comportement local d’un pair de son comportement social. Son comportement local comprend la manière dont il vérifie l’inco- hérence, la manière dont il modifie les correspondances qu’il stocke (dû au fait qu’il utilise une stratégie de réparation), et le choix des correspon- dances qu’il utilise pour traduire les requêtes qu’il reçoit. Son comporte- ment social définit la manière dont il transmet les correspondances. Il est indépendant de son comportement local. Nous proposons trois stratégies possibles.

6.3.4.1 Stratégie “insouciante”

Un pair peut considérer que l’incohérence de Ax(o) ∪ SC n’est pas véritablement un problème parce queAx(o)demeure cohérent (c’est l’une de nos hypothèses). Un pair utilise une stratégie “insouciante” si :

– il ne vérifie même pas siAx(o) ∪ SC est cohérent ;

– il ne retire aucune correspondance deSC et continue de traduire les requêtes qu’il reçoit en utilisant toutes les correspondances de SC; – il transmet toutes les correspondances deSC.

Intuitivement, pour disséminer les correspondances, les pairs étant égaux, aucun d’entre eux ne fait prévaloir son point de vue. L’avantage de cette approche est que les pairs économisent des ressources de calcul car ils n’ont pas à vérifier la cohérence à chaque fois qu’une correspondance est reçue (dans le pire cas). Bien sûr, elle a le désavantage de disséminer des correspondances douteuses dans le système entier si un pair en émet (vo- lontairement ou involontairement).

6.3.4.2 Stratégie “prudente”

Une autre stratégie consiste à essayer d’utiliser uniquement les corres- pondances qui semblent n’être impliquées dans aucune incohérence. Nous utilisons la notion d’ensemble minimal incohérent d’axiomes pour décrire cette stratégie [HS08].

Définition 6.7 Un ensemble minimal incohérent MIS de Ax(o) ∪ SC est un ensemble d’axiomes MIS ⊆ Ax(o) ∪ SC tel que MIS est incohérent et que tout autre ensembleMIS′ ⊂ MIS est cohérent.

Notons qu’un ensemble d’axiomes incohérent peut avoir plusieurs sous-ensembles minimaux incohérents. Nous utilisons la notation SMIS pour décrire l’ensemble des sous-ensembles minimaux incohérents

de Ax(o) ∪ SC. En utilisant les travaux de Reiter [Rei87], il est pos- sible de définir des algorithmes permettant de calculer un diagnostique, c’est-à-dire le plus petit ensemble d’axiomes qui doivent être supprimés ou modifiés pour rendre l’ensemble initial cohérent. Dans notre cas, l’ensemble des candidats à éliminer est limité à un sous-ensemble de SC.

Définition 6.8 Une correspondance douteuse est une correspondance de SC qui appar- tient à au moins un ensembleMIS ∈SMIS.

Étant données ces définitions, un pair met en œuvre une stratégie “prudente” si :

– il vérifie la cohérence et calcule régulièrement SMIS;

– il n’utilise pas de correspondance douteuse pour traduire les re- quêtes qu’il reçoit, et utilise une stratégie de réparation qui conduit à l’élimination d’une ou plusieurs correspondances de SC;

– il ne transmet aucune correspondance douteuse.

Il y a en réalité de nombreuses variantes à cette stratégie car nous pourrions ajouter la notion de degré de doute, en considérant par exemple le nombre d’ensembles minimaux incohérents dans lesquels apparaît une correspondance.

Le pair doit alors choisir entre différentes stratégies de réparation, ou choisir de ne pas en effectuer. S’il choisit de réparer l’ensemble, il peut alors considérer que toutes les correspondances restantes sont sûres.

L’avantage de cette stratégie est que les pairs utilisent seulement les correspondances qui sont cohérentes avec ses connaissances lors de la tra- duction de requêtes. Le comportement social est davantage discutable si nous considérons qu’un pair n’ayant pas de droits particuliers par rapport aux autres pairs, n’est pas autorisé à empêcher la dissémination de cer- taines correspondances. Néanmoins s’il n’y a pas de pairs malveillants et si leurs points de vue sont compatibles cela semble être le meilleur moyen de ne pas propager des erreurs “honnêtes”.

6.3.4.3 Stratégie centrée sur les concepts clés

Cette stratégie est basée sur deux observations. Premièrement, certains concepts semblent plus importants que d’autres dans l’ontologie des pairs. Deuxièmement, il peut être coûteux de calculer tous les ensembles mini- maux incohérents, même si les pairs ne le font pas à chaque fois qu’ils re- çoivent une nouvelle correspondance. L’idée de cette stratégie est d’identi- fier les correspondances qui rendent insatisfiables les concepts importants et d’utiliser une stratégie de réparation qui assure qu’ils restent satisfai- sables. Pour définir la notion de concept important nous proposons de considérer les caractéristiques suivantes.

Concepts importants Comme les ontologies peuvent être volumi- neuses, il peut être utile de considérer ses concepts importants comme dans [PMd08]. Les auteurs proposent un algorithme pour calculer les concepts importants en se basant sur différents critères liés à des prin- cipes cognitifs, la structure de l’ontologie (couverture, densité, etc.) et à la popularité par rapport à certaines ressources (par exemple le moteur

de recherche Yahoo). Leur objectif est d’obtenir un genre de résumé de l’ontologie.

Concepts représentatifs Comme les ontologies sont utilisées pour anno- ter les ressources des pairs, certaines parties peuvent être plus représenta- tives que d’autres. Par exemple si le concept Phénotype est utilisé pour an- noter 50% des documents avec un poids supérieur à 0, 7, alors ce concept est plus représentatif que le concept Neige qui est seulement utilisé pour annoter 5% des documents avec un poids inférieur à 0, 3. La représenta- tivité des concepts par rapport aux documents peut être obtenue par une analyse des index.

Concepts populaires Un concept peut être défini comme populaire s’il est souvent utilisé dans les requêtes, directement ou après traduction. Cela nécessite que les pairs maintiennent une version plus riche de leurs his- toriques de requêtes (cf. section 6.2.1, page 92). Chaque pair doit compter le nombre de fois que chaque concept de son ontologie apparaît dans une requête traduite. La mesure devrait être normalisée en divisant par le nombre total d’occurrences de concepts dans les requêtes traduites. Ainsi un concept est populaire si le nombre de fois qu’il apparaît est supérieur à un certain seuil.

Chaque pair peut définir ses concepts importants, en considérant une combinaison des différents critères. Une fois identifiés, l’idée est d’empêcher les traductions problématiques de concepts importants. Dans [SHCVH07], les auteurs définissent la notion de plus petite sous- TBox préservant l’insatifiabilité d’un concept a d’une certaine TBox. Ils fournissent également un algorithme pour effectuer le calcul. Nous adaptons leur définition. Notons qu’elle est définie pour un concept atomique (comme dans le papier original).

Définition 6.9 Un plus petit sous-ensemble préservant l’insatisfiabilité d’un concept a par rapport à Ax(o) ∪ SC, noté MU S est un ensemble d’axiomes MU S ⊂ Ax(o) ∪ SC tel que le concept a est instatisfaisable dansMU S et est sa- tisfaisable pour tout ensembleMU S′ ⊂ MU S.

Une fois un ensemble MU S obtenu, il est possible de calculer un diagnostique, c’est-à-dire un plus petit ensemble d’axiomes qui doit être supprimé ou corrigé pour qu’un concept donné devienne satisfaisable. En d’autres termes, au lieu de calculer un diagnostique qui rend tous les concepts satisfaisables, nous proposons de limiter le calcul du diag- nostique aux concepts importants, et de réparer l’ensemble des corres- pondances en conséquence. Notons que pour des raisons de traçabilité pour de grosses ontologies, Schlobach et al. ont proposé une heuristique qui permet de guider l’algorithme vers l’ensemble approprié de diagnos- tiques [SHCVH07].

Finalement, un pair met en œuvre une stratégie centrée sur les concepts clés s’il maintient une liste de concepts clés de son ontologie et si :

– il calcule l’ensemble MU S pour chaque concept important de son ontologie et répare l’ensembleSC;

– il utilise les correspondances de SC pour traduire les requêtes en- trantes ;

– il transmet les correspondances deSC.

L’avantage de cette stratégie est qu’elle assure que les pairs sont cohérents lorsqu’ils traduisent les requêtes concernant les concepts clés. La discus- sion à propos du comportement social (c.-à-d. ce qui doit être transmis) est la même que précédemment.

Pour conclure nous pouvons dire qu’il n’existe pas de stratégie parfaite et que la meilleure stratégie à choisir dépend de l’application. En effet si le risque d’incohérence est limité, il n’est pas nécessaire que chaque pair utilise un raisonneur pour vérifier la cohérence, qu’il calcule les ensembles minimaux, et qu’il adopte une stratégie de réparation.