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Quelle stratégie pour la réforme fiscale en France ?

En 2015, quatre stratégies sont envisageables :

— Une stratégie axée sur la hausse des impôts des plus riches et des firmes multinationales. Ce fut celle de la France de la mi- 2012 à la mi-2014. Cette stratégie demandait de prendre en parallèle des mesures fortes contre l’exil fiscal, puisque la France est déjà l’un des pays qui taxe le plus les plus riches. Il aurait fallu aussi lutter contre tous les dispositifs permettant l’évasion fiscale (ce qui est difficile pour un pays isolément). — Une stratégie axée sur la réduction des impôts frappant les

entreprises afin d’améliorer la compétitivité et l’attractivité de la France. Les entreprises, moins taxées, investiraient plus en France et créeraient des emplois, ce qui compenserait la baisse initiale d’impôt. Au départ, il faudrait augmenter les impôts payés par les salariés et les ménages, donc accepter une certaine baisse de niveau de vie pour être plus compé- titif. Se pose la question du choc initial sur la demande et de l’acceptation sociale d’une telle stratégie. C’est, de plus, une stratégie peu coopérative à l’échelle européenne. C’est celle que le gouvernement Valls a choisie.

— Une stratégie de rationalisation visant à supprimer les niches fiscales et sociales, ce qui imposerait de renoncer à l’inter- ventionnisme fiscal, ce qui est satisfaisant dans certains cas (la fiscalité de l’épargne), moins dans d’autres. Ses gains sont sans doute surestimés.

— Une stratégie écologique faisant monter en puissance la fiscalité écologique. Mais son impact sur la compétitivité

risque d’être lourd si cette stratégie ne se place pas dans un cadre européen.

Il ne faut donc pas se faire trop d’illusions sur les gains à attendre de la réforme fiscale. Cinq axes nous semblent cependant prioritaires :

— réaffirmer le principe selon lequel tous les revenus des ménages doivent être soumis à l’impôt sur le revenu ; celui-ci doit appliquer strictement le principe : « chacun doit contri- buer aux dépenses publiques selon ses capacités contributives » ; ces capacités doivent être évaluées sur une base familiale ;

— réaffirmer le principe selon lequel tous les revenus du travail doivent être soumis à des cotisations sociales, tous les revenus du capital aux prélèvements sociaux ;

— partager les dépenses fiscales en trois catégories : celles qui ne font que déterminer la capacité contributive des ménages (qui doivent être maintenue et ne plus être considérée comme des dépenses fiscales) ; celles qui sont des subven- tions sociales ou économiques (qui doivent être transformées en subventions explicites) ; les autres qui doivent être supprimées ;

— faire monter en puissance la fiscalité écologique et la fiscalité sur les activités financières, maintenir la fiscalité sur le capital, réduire la fiscalité portant sur le travail ;

— lutter contre l’optimisation et le tourisme fiscaux des entre- prises et des ménages les plus riches. Ceci passe par l’harmonisation fiscale mondiale ou européenne, mais, dans ce domaine, la France doit être à l’initiative et prendre, seule si nécessaire, des mesures indispensables.

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