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Chapitre I Introduction générale et problématique

B.3 Stockage de carbone et flux de GES en agroforesterie

L’agroforesterie est définie comme un système d’usage du sol qui associe maintien délibéré ou introduction d’arbres et agriculture, pâturage et/ou bétail; en vue d’exploiter les interactions écologiques et économiques des différents composants (Albrecht et Kandji, 2003). Il existe donc trois catégories de systèmes agroforestiers : sylvoagricoles, sylvopastoraux et agrosylvopastoraux. Les arbres peuvent être associés à des cultures annuelles ou pérennes selon quatre types de structure générale (Albrecht et Kandji, 2003) :

- structure complexe (par exemple café ou cacao ombragé par diverses espèces), - haies en bordure du système de culture (barrières dites vivantes contre le vent, les

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- haies intercalées entre les rangs de culture, - jachère améliorée.

L’agroforesterie a été de tout temps amplement pratiquée afin de ralentir les effets négatifs de l’agriculture telles la dégradation des sols et la désertification (Albrecht et Kandji, 2003). Par l’introduction d’arbres dans des systèmes de production agricole, l’agroforesterie peut potentiellement fournir de l’énergie à partir de la biomasse et donc contribuer à l’atténuation des émissions de CO2 par substitution d’énergie fossile et protection des forêts existantes

(Verchot et al., 2005). Par ailleurs, de nombreuses études ont montré que l’agroforesterie peut notablement accroître les stocks de C (Tableau I.10) des terres vouées à l’agriculture tout en permettant la croissance de cultures alimentaires (Montagnini et Nair, 2004). Il mérite également d’être dit que les coûts financiers de la séquestration de C via l’agroforesterie sont bien moindres (approximativement 1-69$ Mg-1C, médiane de 13$ Mg-1C) que via

d’autres options de réduction du CO2 atmosphérique (Verchot et al., 2005).

La quantité de C stocké dépend de la structure et de la fonction du système, qui, elles, sont déterminées par des facteurs environnementaux et socio-économiques (Albrecht et Kandji, 2003). Elle dépend également des espèces arborées utilisées et des pratiques culturales employées (Albrecht et Kandji, 2003). La Figure I.12 compare les stocks de C au-dessus du sol pour différents usages de la terre sous les Tropiques humides. Les systèmes agroforestiers peuvent stocker de 50 à 75 Mg C ha-1 au-dessus du sol c’est-à-dire en

moyenne 5 fois plus que les monocultures et pâturages.

Tableau I.10 : Potentiels de stocks de carbone au-dessus du sol des systèmes agroforestiers pour différentes écorégions du monde (Albrecht et Kandji, 2003) adapté par Verchot et al. (2005)

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Figure I.12 : Stocks de carbone au-dessus du sol pour différents écosystèmes des Tropiques humides. Les données proviennent des sites de référence du programme ASB (Alternative to Slash and Burn) du CGIAR (Consultative Group for International Agricultural Research) (Verchot et al., 2005)

La conversion des monocultures en systèmes agroforestiers sous les Tropiques humides permettrait un stockage de carbone additionnel de 10 à 70 Mg C ha-1 dans la végétation et

de 5 à 15 Mg ha-1 dans la couche supérieure du sol, sur une période de 25 ans (Mutuo et al.,

2005). Néanmoins, la plupart des études sur l’évolution des stocks de C ne prennent pas en compte la biomasse des racines des systèmes agroforestiers, en raison de la difficulté de la mesure (Mutuo et al., 2005). Les données de Hairiah et al. (2001a) et de Palm et al. (2000) indiquent qu’en tenant compte du temps de rotation du système, les systèmes agroforestiers cultivés sur brûlis présentent un potentiel de stockage de C dans la végétation de 3,5 Mg C ha-1 an-1 (Figure I.13) (Mutuo et al., 2005). Pour leur part, Woomer et al. (2000) montrent que

le taux d’accumulation de C (dans la végétation, le sol et la litière) dépend plus du type de système que de son temps de rotation (Figure I.14) et calculent un taux de stockage de C pour une conversion d’une monoculture en système agroforestier similaire au potentiel de stockage de C obtenu par Mutuo et al. (2005). van Noordwijk et al. (2002) estiment que la conversion de toutes les monocultures de café de Sumber-Jaya (Lampung, Indonésie) en systèmes agroforestiers, tout en conservant la forêt restante, pourrait augmenter les stocks moyens de C du sol et de la végétation de 10 Mg C ha-1 en 20 ans, c’est-à-dire de 0,5 Mg C

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Figure I.13 : Stocks de carbone moyens au-dessus du sol de systèmes agroforestiers (rotations, agroforêts de cacao et de caoutchouc, jachères) en relation avec leur temps de rotation. Cas de cultures sur brûlis au Pérou et en Indonésie d’après Mutuo et al. (2005). Les triangles sont des données de Hairiah et al. (2001a), les carrés de Palm et al. (2000)

Figure I.14 : Stocks de carbone (au-dessus et dans le sol) dans quelques chronoséquences de cultures sur brûlis (Mutuo et al., 2005) d’après Woomer et al. (2000)

Si les flux de C dans les systèmes agroforestiers sont bien documentés, peu d’études ont simultanément mesuré les flux de GES autres que le CO2 afin d’évaluer le bilan des GES

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contribuer à l’augmentation des émissions de CH4 (Verchot et al., 2005). Par ailleurs,

plusieurs études montrent que les sols des systèmes sylvoagricoles consomment du CH4 en

quantité moindre que des sols forestiers mais en plus large quantité que des sols sous monoculture ou sous pâturage (Mutuo et al., 2005). La diminution de la consommation de CH4 dans les sols sous système agroforestier et sous monoculture comparativement à des

sols forestiers est probablement associée à la diminution des taux de diffusion due à l’augmentation de la densité apparente (Mutuo et al., 2005).

Même si des efforts doivent être réalisés pour minimiser l’émission de N2O et CH4, ce qui

compte finalement en terme d’atténuation du changement climatique est de savoir comment ces émissions se comparent au stockage de C dans les systèmes agroforestiers (Verchot et al., 2005). Malgré la probabilité d’augmentation des émissions de N2O et CH4 pour certains

cas, la plupart des systèmes agroforestiers sont vraisemblablement des puits net de GES du fait de la quantité importante de C qu’ils stockent dans la biomasse vivante, dans le sol et dans les produits en bois durables (Verchot et al., 2005).

B.4 Contribution des Andosols au stockage de carbone et aux flux