• Aucun résultat trouvé

STABILITÈ ET PROPRIÉTÉS DES HÉTÉROPOLYANIONS 1 Stabilité thermodynamique des hétéropolyanions en solution

LES HÉTÉROPOLYANIONS

I.6. STABILITÈ ET PROPRIÉTÉS DES HÉTÉROPOLYANIONS 1 Stabilité thermodynamique des hétéropolyanions en solution

La nature des hétéropolyanions présents en solution aqueuse dépend du pH, de la nature et de la concentration des différents constituants.

Les hétéropolyacides et leurs sels formés avec de petits cations (Li+, Na+, Cu2+…) sont très solubles dans les solvants polaires. Les hétéropolyacides présentent, entre autres une grande affinité pour les solvants oxygénés et en particulier pour l’éther, ce qui a permis d’extraire un grand nombre de composés. En revanche, les gros cations (NH4+, Cs+, Rb+…)

donnent des sels peu solubles ou insolubles dans l’eau.

La stabilité des hétéropolyanions dépend également de la nature de l’atome central et de la nature des atomes métalliques constitutifs. Il est à noter que la forme la plus stable des hétéropolyanions non réduits, en solution aqueuse, est la forme α. L’isomérisation de la forme β en forme α est souvent très rapide en particulier pour les composés molybdiques.

En revanche, en milieu hydro-organique, il est souvent possible de stabiliser la forme isomère β, la vitesse d’isomérisation dans un tel milieu étant lente [54]. Ce n’est pas le cas de l’anion 12-molybdophosphate, dont le seul isomère utilisable reste la forme α.

I.6.2. Stabilité thermique des hétéropolyanions

La température de décomposition des hétéropolyanions est une des caractéristiques les plus importantes en réactivité. En effet, un catalyseur actif et sélectif ne peut être développé dans un procédé catalytique industriel que si ses performances sont stables dans le temps. C’est la difficulté à laquelle sont confrontés industriels et chercheurs universitaires. Cependant, la température de décomposition des catalyseurs de type H3+xPMo12-xVxO40 et de

14

leurs dérivés est de 340 °C. C’est pourquoi les propriétés thermiques et en particulier les évolutions texturales du solide sont des facteurs essentiels à prendre en compte.

Les hétéropolyacides sont des composés fortement hydratés dont les protons sont reliés aux molécules d’eau par les liaisons hydrogène pour former les ions dioxonium (H2O)2H+.

Deux types d’eau peuvent ainsi être éliminés par élévation de température : - L’eau de cristallisation qui est de l’eau d’hydratation, assez peu liée ;

- L’eau de constitution qui résulte de la combinaison des atomes d’oxygène du polyanion avec les protons dans le composé anhydre.

Les composés perdent leur eau de cristallisation dans un domaine de température étendu de 30 °C à 150 °C selon les hydrates [55]. Le composé obtenu est alors anhydre.

Le second type de perte de masse correspond à la perte de l’eau de constitution. Les protons se combinent avec des atomes d’oxygène de l’hétéropolyanion pour former des molécules d’eau. Cette perte est observée au-dessus de 270 °C pour les composés molybdiques. Le composé intermédiairement formé, parfois considéré comme un anhydride, n’est pas réellement identifié.

Les facteurs cinétiques apparaissent importants puisque les mesures thermiques sont généralement faites par analyse thermogravimétriques (ATG) donc en montée de température. Il faudra alors distinguer la stabilité thermodynamique de la stabilité cinétique des composés. En effet, les résultats dépendent du processus employé : statique (stabilité thermodynamique) ou dynamique (stabilité cinétique) ainsi que des conditions expérimentales [56].

I.6.3. Stabilité structurale des hétéropolyanions

La décomposition structurale est un problème majeur de la catalyse par hétéropolycomposés. Dans certains cas, elle a empêché la commercialisation de procédés basés sur ces catalyseurs en raison de leur courte durée de vie. C’est le cas exemple de l’oxydéshydrogénation de l’acide isobutyrique en acide méthacrylique : les excellentes performances initiales du catalyseur se détériorent progressivement au cours du temps. Le catalyseur type Keggin Cu0,5H3PMo11VO40 a fait l’exception en conservant ses performances

catalytiques pendant près d’un an [57].

Sous atmosphère oxydante, la température de décomposition est fonction de l’hétéroatome, de l’atome métallique du polyanion et de la nature du contre-cation[55]. Avec les acides, la décomposition survient pour des températures inférieures à 350 °C. Dans les conditions de réaction, la stabilité structurale peut être compromise soit par la température élevée nécessaire pour activer une molécule stable comme les alcanes, soit par l’atmosphère de la réaction, qui est généralement réductrice, particulièrement pour des rapports

15

hydrocarbure/oxygène élevé. La décomposition structurale du catalyseur peut être minimisée ou retardée par différents moyens.

I.6.4. Propriétés acido-basiques des hétéropolyanions

La plupart des HPAs sont solubles et se comportent comme des acides forts en solution aqueuse [58]. Cette solubilité favorise leur utilisation dans certaines réactions de catalyse homogène à la place des acides minéraux conventionnels tels que H2SO4, H3PO4, … etc. A

l’état solide, les propriétés acido-basiques des hétéropolyanions dépendent de plusieurs facteurs dont la nature de l’atome métallique, de l’hétéroatome et du contre-anion. Il existe également plusieurs études de l’acidité potentielle des HPAs à l’état solide ou sur supports.

Les protons peuvent être directement les contre-anions : c’est le cas des hétéropolyacides ou des sels acides mixtes. Ils peuvent également se former durant deux phénomènes :

- La dissociation de l’eau coordonnée

- La réduction des ions métalliques par le dihydrogène.

Les propriétés acides sont en fonction des éléments constituant le polyanion et sont liées à la charge totale de l’ion. Certains auteurs ont suggéré que la force de l’acide diminue selon l’ordre suivant : W4+

> Mo4+ > V5+ et P5+ > Si4+[1].

Les cations métalliques constituent potentiellement des sites acides de type Lewis. Il existe classiquement une relation entre le caractère acide et le pouvoir polarisant du cation. Plus le cation est électropositif, plus l’acide est fort et dur.

Dans les milieux organiques les HPAs sont généralement très peu solubles, mais leur solubilité dépend du solvant [59]. Cette solubilité peut être nettement améliorée en les transformant en sels d’ammoniums quaternaires.

I.6.5. La réduction des hétéropolyanions

La réduction de ces composés conduits à des espèces désignées par les termes d’HPA bleus ou marrons en fonction de la couleur que leur confère le degré de réduction. Les HPAs oxydés peuvent fixer plusieurs électrons sans que leur structure initiale soit modifiée. Ces formes réduites peuvent participer à des cycles électrocatalytiques. En effet, la réoxydation des formes réduites régénère les formes oxydées, excepté dans quelques cas rares où le HPA réduit n’est pas suffisamment stable en solution [44].

I.6.6. Les propriétés oxydo-réductrices (redox)

Les propriétés redox des HPAs peuvent être modulées et choisies à volonté en agissant sur certains paramètres, notamment la composition de l’HPA et celle du milieu. En solution,

16

de nombreux hétéropolyanions peuvent participer à des échanges d’électrons en plusieurs étapes réversibles, mono, bi où polyélectroniques. En général, les systèmes redox concernant ces molécules sont relativement rapides [60]. A l’aide des courbes d’intensité-potentiel, effectuées par polarographie ou par voltammétrie cyclique, il est possible de visualiser les différentes étapes de réduction ou d’oxydation.

Les propriétés redox des hétéropolyanions dépendent à la fois de la nature des atomes métalliques (Mo, W…) et de l’atome central (P, Si…). Ainsi, le potentiel redox est influencé par la charge de l’hétéropolyanion, qui varie en fonction de l’atome central. Plus l’ion est chargé négativement, plus les potentiels de demi-vague E1/2 sont faibles et moins l’ion est

réductible. Ainsi SiMo12O404- est moins réductible que PMo12O403-. D’autre part, Le potentiel

d’oxydo-réduction décroît dans l’ordre suivant : V > Mo > W. Des réductions par des espèces chimiques ont été étudiées avec le composé SiMo12O404- [61], le vanadium est donc le métal

le plus réductible. A l’état réduit, les hétéropolycomposés se colorent souvent en bleu foncé. Ile sont souvent désignés dans la littérature anglo-saxonne par le terme « heteropoly blues ».