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Chapitre 4. Performance des adaptations et analyse de stabilisation thermique

4.1.4. Stabilisation thermique

Le bilan thermique est utilisé pour quantifier le budget thermique à travers l’interface remblai/sol naturel en une période de temps. Il est égal à la somme de l'indice d'extraction et de l'indice d'induction de chaleur (M-Lepage et al., 2012b). Pour qu’un système soit stable, la température moyenne annuelle à l’interface remblai/sol naturel doit être égale ou inférieure à la température du pergélisol, ce qui permet d’obtenir un gradient thermique nul ou négatif, et par conséquent, un flux de chaleur également nul ou négatif. Un flux de chaleur négatif se traduit par une extraction de chaleur plus importante qu’un apport de chaleur dans le sol naturel, entrainant ainsi le refroidissement du pergélisol (Richard, 2018). La température du pergélisol est définie comme la température enregistrée à la profondeur d’amplitude annuelle zéro. Dans le cas de Tasiujaq elle est de -2,07 °C à 13,5 m de profondeur, mesure provenant du forage HT – 181.

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4.1.4.1. Évolution des températures à l’interface remblai/sol naturel par rapport à la température du pergélisol

Les Figure 46 et 43 permettent de faire une analyse de la stabilité thermique du sol. La Figure 46 montre l'évolution des températures moyennes annuelles à l’interface remblai/sol naturel par rapport à la température du pergélisol à une profondeur de 13,5 m et la Figure 47 montre la différence entre ces deux températures (ΔT). En tenant compte du fait qu'il n'y a pas de thermistances à l’interface remblai/sol naturel, une interpolation a été faite avec les températures au-dessus et en dessous de l’interface pour obtenir la valeur correspondant à la température à l’interface.

Dans le cas des sections de référence (Figure 46(r) et Figure 47(r)), du remblai à convection (Figure 46(c) et 48(c)) et du drain thermique (Figure 46(c) et 48(c)), tout au long du suivi, la température à l’interface remblai/sol naturel est plus élevée que celle du pergélisol; il s'agit donc d'un système instable. La section du remblai à convection ne montre pas d'évolution significative des températures à l’interface, la température enregistrée en 2014 est très similaire à celle de la période 2009 et entre la première et la dernière année il y a eu seulement une diminution de 0,33 ºC et cela peut être dû à la variation de la température de l'air. Malgré des gradients positifs la section du drain thermique montre une diminution du gradient au fil du temps, sauf pour les années 2010 et 2011, peut-être en raison de la diminution de l'indice de gel et de l'augmentation de l'indice de dégel. Entre 2008 et 2014, il y a eu une diminution de la température à l’interface de près de 1°C. Enfin, la section de la pente douce est celle qui présente la meilleure stabilité thermique (Figure 46(b) et 48(b)), les trois dernières années de suivi montrent des gradients thermiques négatifs, ce qui peut être le début de la stabilisation thermique du système.

Les Figures 45 et 46 montrent non seulement la réponse du système à la mise en œuvre d'une adaptation, mais aussi l'influence de la tendance climatique tout au long de la période de suivi, ce qui est évident puisqu'il y a des augmentations des indices de gel qui favorisent un effet de refroidissement de la surface. Les systèmes ont tendance à donner une réponse thermique qui suit la tendance climatique. Il est intéressant de noter que les remblais adaptés semblent être beaucoup plus sensibles à cette variation que la section témoin. Les systèmes de protection mis en place ont clairement eu un impact favorable qui s’est manifesté au cours des premières années par une remontée importante du

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pergélisol. On constate cependant que le fonctionnement est également affecté par les conditions climatiques.

Figure 46. Évolution des températures à l’interface remblai/sol naturel par rapport la température du pergélisol pour la section (r) Référence, (a) Pente douce, (b) ACE et (c) Drain thermique.

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Figure 47. Différence entre la température à l’interface remblai/sol naturel et la température du pergélisol (ΔT) en fonction du temps de suivi. Sections (r) Référence, (a) Pente douce, (b) ACE et (c)

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4.1.4.2. Analyse de stabilisation thermique avec les abaques de conception

Dans cette section, une analyse a été effectuée à l'aide des abaques développés par Kong et Doré (2019), Kong et al. (2019a) et Kong et al. (2019b), qui ont été créés à partir de modèles thermiques calibrés en utilisant des données de température prises dans divers sites d'étude. Des analyses de sensibilité ont été effectuées pour quantifier la capacité d'extraction de chaleur à travers l'interface remblai/sol naturel sous le centre de la pente latérale, pour chacune des techniques d’adaptation et pour différentes épaisseurs de remblai et conditions du site (Kong et al., 2019). La méthode de conception est valable pour le bilan thermique à mi- pente mais elle considère l’épaisseur totale du remblai comme paramètre de design.

L'approche proposée par Kong and Doré, 2019 pour évaluer la performance de la section remblai à pente douce, appelée méthode de "correction de la température d'interface (ITC)", consiste à calculer le décalage thermique nécessaire pour obtenir un gradient de température de zéro dans le sol en diminuant la température du sol à l'interface. L’ITC minimum requis est défini comme suit :

ITC = T%&'()*+,(− T.()/é1%231+ SM (Équation 1)

Où T%&'()*+,( est la température moyenne annuelle du sol (MAGT) à l'interface remblai/sol naturel,

T.()/é1%231 est la température du pergélisol à la profondeur de variation de température nulle et SM

est une marge de sécurité pour tenir compte du réchauffement climatique pendant la vie utile de la structure, qui ne sera pas prise en compte puisqu'elle sert à faire des projections, ce qui n'est pas l'objet de la présente analyse. Tous les paramètres sont en °C.

Une ITC = 4,43 °C a été calculée à partir des données de température de la section de référence, où T%&'()*+,( est la température moyenne de toutes les années suivies, et est égale à 2,36 °C et -2,07 °C est la température du pergélisol au site de Tasiujaq. L'abaque de la Figure 48 est ensuite utilisé, obtenant ainsi une pente de 6H:1V afin de maintenir le système en équilibre. La pente appliquée à Tasiujaq est de 8H:1V, ce qui est donc suffisant. D'ailleurs, les données de température reflètent l'effet positif que cette adaptation a eu sur le site de Tasiujaq.

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Figure 48. Diagramme de conception pour la sélection de la pente du remblai pour la stabilisation thermique sous le centre de la pente à l'aide de la méthode ITC (Kong et Doré, 2019)

Les deux étapes suivantes expliquent les considérations qui doivent être prises en compte lors de l'application des abaques de conception pour effectuer l'analyse de stabilité thermique pour une section ACE et avec drain thermique dans un site avec des conditions différentes de celui qui a servi à développer les abaques.

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