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Des études démontrent aussi que les enseignants favorables à l’inclusion scolaire, et qui la pratiquent, s’exposent à plus de risques d’épuisement professionnel que ceux qui ne la pratiquent pas ou la pratiquent peu (Doudin, Curchod-Ruedi et Baumberger, 2009). De même, l’opposition à l’inclusion manifestée par certains enseignants peut être entendue comme une mesure de protection face à un monde professionnel plus exigeant (Ramel, 2009).

ANA ALCAIDE ET SANDRA VIEIRA 39 Doudin et Curchod-Ruedi (2008) citent l’existence de facteurs de protection qui peuvent jouer un rôle important dans la prévention de situations de burn-out. Ils nomment, entre autres, le soutien social, les caractéristiques de l’organisation du travail, de la culture et de l’identité collective, du leadership ou encore de l’organisation de l’institution.

Le soutien social peut être défini comme « le réseau d’aide qu’une personne peut solliciter lorsqu’elle est confrontée à des situations professionnelles problématiques » (Doudin, Curchod-Ruedi et Baumberger, 2009, p. 16). « L’identification des personnes-ressources (soutien instrumental) et une bonne connaissance de la culture professionnelle des partenaires (psychologues, logopédistes, infirmières, assistants sociaux, etc.) » (Doudin, Curchod-Ruedi et Baumberger, 2009, p. 27, cités dans Noël, 2016) sont des aspects essentiels au développement de compétences nécessaires à l’accueil de la diversité.

D’autres enseignants ne se plaignent pas du manque de formation et de compétences, mais plutôt du manque de ressources (humaines et matérielles) pour mieux répondre à la diversité de leurs élèves (Bélanger et Rousseau, 2003).

Selon Ramel et Lonchampt (2009), « les enseignant-e-s seraient alors prêt-e-s à intégrer des élèves ayant des besoins spéciaux – pour autant qu’on leur en donne les moyens, le temps et la formation – tout en redoutant fortement l’impact de cette intégration sur les autres élèves et sur l’environnement scolaire. Cette double crainte – ne pas avoir des moyens suffisants et devoir gérer l’impact négatif de l’intégration – augmenterait avec les années de pratique et pourrait alors expliquer le recours important à la différenciation structurale tel qu’il est constaté par exemple dans le canton de Vaud » (p. 54).

Doudin et Churchod-Ruedi (2008, p. 7) soulignent pourtant qu’il faut faire la distinction entre le soutien social et le travail collaboratif. Le travail coopératif est une ressource qui fait partie des compétences attendues chez l’enseignant et il n’est pas toujours synonyme de soutien social, il peut même être interprété comme un facteur qui exige des efforts supplémentaires.

La collaboration

Selon Marcel et al. (2007), cités dans Noël (2016), ce sont surtout les pratiques collaboratives qui préparent les enseignants à travailler avec la diversité en leur assurant un enseignement de qualité. Ces pratiques répondent aux besoins des élèves avec des besoins

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éducatifs particuliers « sans morceler leur prise en charge ni les exclure à l’intérieur du système scolaire » (Allenbach et al., 2016, p. 73).

Allenbach (2012) renforce aussi la nécessité d’une bonne communication entre les différents intervenants du processus pédagogique en indiquant que la qualité de la prise en charge des élèves dépend de la qualité de l’articulation des ressources des divers professionnels autour des mêmes projets. Avec une bonne articulation, les professionnels s’enrichissent mutuellement et réussissent à créer des réponses adaptées aux défis rencontrés.

De ce fait, afin de mieux répondre aux défis qui se présentent, il faut construire des relations de travail partagé entre les partisans du changement où la reconnaissance des compétences de chacun soit valorisée et réciproque et où les relations d’interdépendance constructives soient acceptées et développées (Sage, 1999).

Selon Friend et Cook (2013) et Dupriez et Bagnoud (2007), cités dans Benoit et Angelucci (2011), il existe trois modalités de travail partagé : la coopération, la collaboration et la coordination. Ces auteurs différencient ces trois types de pratiques selon le degré d’intensité de partage du travail. La coordination est une modalité de travail de nature plutôt organisationnelle et administrative. C’est celle qui a une intensité de travail partagé plus faible et consiste en l’articulation des actions des enseignants aux décisions d’autorité. La collaboration et la coopération exigent une intensité de travail partagé plus grande, car elles requièrent l’implication partenariale des enseignants. Elles dépassent la simple « cohabitation » entre enseignants (Dupriez et Bagnoud, 2007, cités dans Benoit et Angelucci, 2011, p. 108).

La collaboration est une modalité de partage qui est caractérisée par la manière dont les personnes interagissent plutôt que par la forme quand les actions sont mises en place. Elle est volontaire et demande de l’égalité entre les professionnels ainsi que le partage de décisions et de responsabilité (Friend et Cook, 2003, cités dans Benoit et Angelucci 2011, p. 108). La collaboration existe lorsque « plusieurs enseignants travaillent ensemble à la poursuite d’un objectif commun et d’un projet commun, même s’ils assumeront individuellement leurs tâches face aux élèves » (Dupriez et Bagnoud, 2007, cités dans Benoit et Angelucci 2011, p. 108).

Comme l’indiquent Cook et Friend (1995), la collaboration ou le co-enseignement implique en même temps l’usage de pratiques de coordination et de collaboration. Plus précisément, Friend (2008), cité dans Benoit et Angelucci (2011, p. 108), définit le

co-ANA ALCAIDE ET SANDRA VIEIRA 41 enseignement comme un partenariat entre un enseignant régulier et un enseignant spécialisé, ou un autre spécialiste, dans le but d’enseigner conjointement, dans une classe de l’enseignement régulier, à un groupe hétérogène d’élèves – incluant ceux en situation de handicap ou avec d’autres besoins particuliers – afin de répondre à leurs besoins d’apprentissage de manière flexible et délibérée.

Wood, cité par Trépanier (2010, p. 260), a énuméré neuf éléments indispensables pour construire des pratiques de co-enseignement : un moment de planification commun ; la flexibilité des enseignants et des administrations scolaires ; la capacité à prendre des risques ; la clarté des rôles et des responsabilités ; la compatibilité ; les habiletés de communication effective ; le soutien de la direction ; répondre aux besoins de la diversité et l’évaluation des effets du co-enseignement.

En ce qui concerne l’évaluation des effets du co-enseignement, Benoit et Angelucci (2011) soulignent que les résultats scolaires des élèves et les compétences personnelles et sociales s’améliorent généralement en situation de co-enseignement, tant pour les élèves avec des besoins particuliers que pour ceux qui n’en présentent aucun. Quant aux professionnels, cette modalité d’enseignement leur permet de diversifier et différencier leurs pratiques en fonction des besoins de la classe et des élèves. La collaboration entre l’enseignant régulier et l’enseignant spécialisé les rend plus performants.

Le co-enseignement rend les enseignants plus performants, car il promeut la formation mutuelle in situ, il augmente les interactions entre enseignants et élèves, permet de donner une attention supplémentaire et un enseignement plus spécifique et, par conséquent, de meilleurs résultats scolaires. Cette pratique permet de diminuer le temps de transactions (donc moins de stigmatisation et plus de temps pour la tâche), le suivi de tous les enseignements dispensés en classe, l’adéquation des soutiens à travers des options variées (modalités différentes, approches et styles d’enseignement différenciés, stratégies diversifiées) et incite à la coopération entre pairs.

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