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1. LA THÉORIE SOCIALE COGNITIVE

1.2 Le sentiment d’efficacité personnelle

1.2.3 Sources du sentiment d’efficacité personnelle

Quatre sources sont reconnues pour façonner le développement du SEP. Ainsi, l’individu développe son SEP à partir de ses expériences actives de maitrise, de ses expériences vicariantes, de la persuasion verbale et de ses indicateurs physiologiques et émotionnels (Bandura, 2007).

D’abord, les expériences de maitrise renvoient aux moments dans lesquels l’individu démontre ce qu’il est capable d’accomplir pour une activité. Il s’agit de la façon la plus influente pour un individu d’évaluer sa compétence, puisque ses performances sont des indicateurs tangibles de ses capacités. Toutefois, c’est le traitement cognitif de l’information dégagée de la performance, et non la performance elle-même, qui peut modifier le SEP. De fait, de nombreux facteurs qui ne sont pas liés aux aptitudes d’un individu (p.ex. la difficulté perçue de l’activité ou la quantité d’aide reçue) peuvent affecter la performance. L’analyse de ces facteurs et de leurs contributions relatives pourra accroître, diminuer ou laisser identique le SEP.

L’expérience vicariante, qui peut se définir comme l’observation d’une autre personne exécutant une action donnée, constitue un autre moyen efficace par lequel l’individu peut moduler son SEP. L’analyse de la performance des autres peut fournir un indice des capacités d’un individu sur une tâche semblable. Ainsi, le succès des personnes de l’entourage peut augmenter le SEP lorsque l’individu estime qu’il leur est semblable, alors qu’à l’inverse, un échec des personnes prises comme modèles peut le diminuer. L’effet sur le SEP serait faible lorsque les modèles sont perçus comme différents de l’individu (Bandura, 2007). De ceci découle que l’évaluation du SEP varie en fonction des talents de ceux qui sont choisis à titre de comparaison. Enfin, par leurs paroles et leurs actions, les modèles peuvent transmettre les connaissances requises et les stratégies efficaces pour résoudre une situation. Ils influencent aussi les attitudes qu’aura l’individu face à une tâche, par exemple une attitude confiante du modèle pourra renforcer le SEP de l’apprenant.

La persuasion verbale est une troisième source d’influence du développement du SEP. Celui-ci peut être bonifié lorsque des personnes significatives persuadent, par leurs

encouragements, un individu qu’il est capable de réussir une tâche. Cependant, un individu doit avoir une croyance minimale qu’il en a les capacités. Les individus ont plus de chances de persévérer si on les persuade en cours d’action qu’ils ont les capacités. Toutefois, générer des attentes irréalistes chez l’individu peut mener à l’échec, ce qui conduirait à une diminution du SEP.

Enfin, pour évaluer ses capacités, un individu réfère en partie aux informations somatiques issues de son état physiologique et émotionnel. En effet, des indicateurs physiologiques comme le stress peuvent moduler le SEP en étant perçus comme des signaux indiquant une incapacité. Lorsqu’un individu éprouve de la difficulté à gérer ses pensées, ses capacités mentales seront mobilisées vers celles-ci, minimisant les ressources disponibles pour affronter la situation d’apprentissage; il aura alors tendance à réagir passivement aux situations au lieu d’être efficace et en contrôle. Le jugement de l’efficacité est également affecté par les états d’humeur.

Les sources d’influence du SEP présentées précédemment corroborent l’idée que les interactions en classe peuvent avoir un effet sur le développement de celui-ci chez l’élève. Par exemple, les activités d’apprentissage et d’évaluation choisies par l’enseignant contribuent au regard que l’élève porte sur son SEP en fonction du succès ou des échecs vécus dans celles-ci. Les pairs peuvent également influencer le SEP par leur propre succès ou échec. Aussi, par son discours sur les capacités de l’élève, l’enseignant peut le persuader ou non de s’engager dans une activité. Toutes ces interactions concourent à moduler l’évaluation que fera l’élève de son SEP. Dans ces circonstances, il semble donc important de définir les interactions en classe puisqu’elles peuvent influencer le SEP.

Si la théorie élaborée par Bandura (1986) permet d’examiner les liens entre l’élève, son comportement et sa classe, elle ne permet pas de décrire en profondeur les interactions qui surviennent au sein de celle-ci. Cette complexité exige un modèle exhaustif qui tient compte de la pluralité des dimensions dans lesquelles se situent ces interactions. Décrit à la section suivante, le modèle de Hamre et Pianta (2007) est l’un des plus utilisés dans les écrits scientifiques.

2. LES INTERACTIONS EN CLASSE

Divers termes s’apparent au concept d’interactions en classe dans les écrits scientifiques publiés ces quarante dernières années. D’abord, les travaux initiés par Trickett et Moos (1973) ont incité plusieurs chercheurs à s’intéresser au climat de classe. Si certains auteurs indiquent simplement qu’il s’agit de l’atmosphère ou l’ambiance dans un contexte particulier (Kokkinos et Hatzinikolaou, 2011), le climat de classe est défini par d’autres comme une réalité subjective composée des perceptions des acteurs impliqués concernant les caractéristiques du milieu et les interactions sociales qui s’y produisent (Bennacer, 2005). Le questionnaire développé par Trickett et Moos (1973), le Classroom Environment Scale a amené d’autres auteurs à utiliser les termes « environnement éducatif » ou « environnement de classe » (p.ex. Allen et Fraser, 2007; Doll et al., 2010; Tsewang et al., 2017).

Plus récemment, le terme interactions en classe se trouve dans les travaux comme ceux de Downer et al. (2010) et ceux d’Hamre et al. (2013) qui considèrent les interactions entre élèves et enseignant comme un mécanisme de première importance dans le développement des élèves. En effet, puisque les élèves passent une partie importante de leurs heures d'éveil dans leur école, le plus souvent dans une salle de classe, ce contexte est l’un des plus déterminants pour leur

développement et leurs apprentissages (Pianta et Hamre, 2009). Les interactions en classe constituent ainsi un facteur clé de leur réussite éducative (Bronfenbrenner, 2005). En plus, les élèves qui établissent des interactions satisfaisantes avec les autres acteurs de la classe cheminent habituellement sur une trajectoire développementale plus positive (Hamre et Pianta, 2001).

Le modèle TTI (Hamre et Pianta, 2007) porte sur l’ensemble des interactions qui surviennent en classe, autant celles entre l’enseignant et les élèves que celles qui prennent place entre les élèves. Prenant appui sur des modèles théoriques du développement humain reconnus, dont ceux de Bronfenbrenner (2005) et de Bowlby (1969), de même que sur des données empiriques, Hamre et Pianta (2007) ont défini les interactions en classe selon trois domaines, à savoir le soutien émotionnel, l’organisation de la classe et le soutien à l’apprentissage. Ces domaines sont précisés par dix dimensions : quatre dimensions pour le soutien émotionnel et trois pour chacun des deux autres domaines. Pour être adapté à la réalité développementale des élèves, le modèle comporte quelques différences entre la version du primaire et celle du secondaire, notamment en ce qui concerne les dimensions du soutien à l’apprentissage. Nous présentons la version adaptée au début du primaire. Le TTI a été traduit en un système d’observation en classe (CLASS; Pianta et al., 2008). Conservant la même structure, le CLASS ajoute des indicateurs observables aux dimensions du modèle TTI. C’est entre autres à partir de ceux-ci que les paragraphes suivants proposent les définitions des domaines et de leurs dimensions. Le tableau 4 propose une vue d’ensemble des domaines et dimensions des interactions dans les classes de niveau primaire.

Tableau 4. Domaines et dimensions des interactions en classe de niveau primaire (TTI; Hamre et Pianta, 2007)

Domaines Dimensions

Soutien émotionnel •Climat positif •Climat négatif

•Sensibilité de l’enseignant

•Respect du point de vue de l’élève Organisation de la classe •Gestion des comportements

•Productivité

•Approches pédagogiques Soutien à l’apprentissage •Développement de concept

•Qualité de la rétroaction •Modélisation du langage