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Le quatuor à cordes Sonate du Soleil a été écrit pour le stage de création d’Orford pendant l’été 2014. J’ai pu travailler directement avec le quatuor sur place, permettant ainsi de modifier considérablement la partition afin de rendre l’écriture plus idiomatique pour ces instruments.

3.1 — Inspiration de la peinture

À l’instar de la forme des Trois miniatures pour orchestre, qui est inspirée par la poésie japonaise, Sonate du soleil est une interprétation musicale de la série de quatre tableaux du peintre Mikalojus Konstantinas Ciurlionis (1875-1911)9, portant le même nom. Celui-ci a nommé ses tableaux en correspondance avec la division en mouvements de la sonate classique : Allegro, Andante, Scherzo et Finale, inspirant ainsi la forme et le caractère de ses tableaux. Mon but n’était pas de reprendre les tempos et les structures de la sonate classique, mais plutôt de trouver des liens entre les détails de ces peintures et des figures musicales. Certains éléments particuliers ont retenu mon attention et c’est ceux-ci qui ont été traduits en musique et non pas l’entièreté des œuvres.

Fig. 19 — Peinture Allegro

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Si l’on observe la première peinture Allegro (figure 19), on peut y voir plusieurs soleils de différentes grosseurs. Pour les illustrer, j’ai créé une suite d’accords qui est répétée en ostinato tout au long du premier mouvement de cette pièce. Ces accords sont généralement répétés à deux reprises et représentent chacun un soleil différent. Voici avec la figure 20, les première et deuxième mesures du mouvement Allegro :

Fig. 20 — Premier accord d’Allegro

Cette réitération n’est pas sans rappeler l’idée d’écho présenté dans la première miniature pour orchestre (voir point 2.1). Plusieurs analogies semblables sont présentes entre ces deux œuvres.

Fig. 21 — Peinture Andante

Ce qui a retenu mon attention dans Andante est un grand objet rond qui se trouve au centre de la peinture. Dans le deuxième mouvement de ma sonate, j’ai représenté cet objet par

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une mélodie jouée à l’unisson par tout le quatuor qui gravite autour de son centre — la note

sol — en variant constamment le contour mélodique, en plus d’y ajouter des trilles et des

appoggiatures, symbolisant les petits arbres noirs apparaissant sur cet objet rond. Ce traitement mélodique est très similaire à celui utilisé dans la seconde miniature pour orchestre.

Fig. 22 — Peinture Scherzo

J’ai remarqué dans la peinture Scherzo des objets similaires qui sont répétés : quatre fleurs rouges au centre de la peinture, deux grands arbres verts à l’arrière-gauche, douze petits arbres à l’arrière-droit et des petites poutres du pont en bas. Ces objets sont également disposés de façon parallèle, m’inspirant alors à écrire une musique où des figures musicales seront répétées.

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L’élément le plus prégnant de cette dernière peinture (figure 23) réside en la toile d’araignée qui occupe la majeure partie de l’espace. Pour mettre cet élément en musique, j’ai écrit une texture sonore linéaire et continue. Chaque ligne instrumentale apparait silencieusement et tous les changements de notes s’opèrent de façon continue, c’est-à-dire par des glissés, un peu comme si la toile se tissait progressivement.

À l’instar des autres mouvements de cette sonate, je me suis inspirée des petits points lumineux de cette peinture pour écrire la conclusion de la pièce. On retrouve à la mesure 68 un accord staccato distribué à tout l’ensemble, reprenant la première harmonie de ce quatuor. Cette petite allusion au premier mouvement est également représentée par l’unique soleil subtil dans le haut de la peinture.

3.2 — Forme

Comme précisé précédemment, plusieurs éléments de ces tableaux ont influencé la composition de cette œuvre. La forme n’y échappe pas. Je me suis laissé inspirer par le contour du soleil, présent dans le titre et dans les tableaux, pour concevoir la forme. En effet, l’idée de circularité est présente tout au long de l’œuvre, soit dans la structure de chaque mouvement ou bien dans la forme macroscopique de la pièce. Si l’on regarde la conclusion de l’œuvre, on peut remarquer qu’elle reprend exactement les mêmes accords qui ont introduit la pièce. Également, le deuxième mouvement présente une forme circulaire. Le mouvement pourrait ainsi se poursuivre en s’enchaînant sur lui-même.

3.2.1 — Allegro

Une suite de quatre accords bissés introduit le premier mouvement. Cette répétition périodique des accords permet à la forme d’être plus stable et prévisible. Chaque accord dure une mesure.

Grâce à la mémorisation de la première section A, qui s’étend du début de la pièce jusqu’à la mesure 18, on arrive à une seconde section (m.19 à 26) avec une sensation de « déjà vu ». Cette section A1 nous amène à la déconstruction des motifs de A qui s’effectue à la mesure 33, en continuant jusqu’à la dernière mesure d’Allegro. En somme, les sections A et

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A1 sont une seule et même variation d’une idée de figuration des différents soleils de la peinture Allegro.

3.2.2 — Andante

Tout comme dans le premier mouvement, les motifs musicaux de Andante se désagrègent progressivement pendant l’œuvre. Cependant, une nouvelle idée de reconstruction du motif principal fait son apparition brusquement à la fin du mouvement, soit dans les quatre dernières mesures. La forme d’Andante comprend trois sections (A, B et C).

Mesures 1-30 31-47 48-68

Sections A B C (déconstruction+ reconstruction)

Tableau 5 — Forme Andante

La section A consiste en la répétition variée d’une courte phrase, séparée par un unisson tenu qui dure une mesure. À titre d’exemple, les sept premières mesures comprennent trois de ces phrases à longueur variable, regroupant les mesures par groupe de deux ou de trois. Dans ce cas-ci (figure 24), ces mesures sont divisées de la façon suivante : 2+3+2.

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La section B reprend un des motifs de A en le développant de façon horizontale. Par la suite, la mélodie initiale de la section A retourne à la mesure 40, qui diffère uniquement par un changement de transposition.

3.2.3 — Scherzo

Scherzo présente également une idée musicale qui sera déconstruite progressivement

pour se reformer à la fin du mouvement, reprenant le concept des mouvements précédents. Puisque ce mouvement est construit uniquement autour du paramètre rythmique, le détail formel de ce mouvement sera plutôt abordé au point 3.5.2.

3.2.4 — Finale

Le quatrième mouvement reprend les idées musicales et les motifs des mouvements précédents. Finale se divise en quatre sections comprenant chacune plusieurs phrases bien définies.

Section Phrase Mesure

A 1 1-13 2 14-20 3 21-28 B 4 29-35 5 36-45 C 6 46-53 7 54-59 D 8 60-68 9 68-73

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3.3 – Harmonie

3.3.1 — Allegro

Comme nous le présente la figure 25, Allegro est introduit par une suite d’accords de trois ou quatre sons :

Fig. 25 — Suite d’accords d’Allegro

Chaque accord de cette progression contient au moins un intervalle de seconde entre une paire de voix. Cette seconde monte conjointement d’un accord à l’autre : sol - lab; si - do;

do - ré. La note lab. est présente dans chacun de ces accords. Le premier accord reprend de

façon verticale la cellule de trois notes présentée au chapitre 1, soit les sons sol, lab et si. Le second accord reprend de façon inversée la structure intervallique du premier. L’intervalle lab - si qui se retrouvait dans les voix supérieures se trouve maintenant au bas de ce deuxième accord et on y ajoute la note do au-dessus (note manquante à la cellule). On peut entendre dans la ligne supérieure de ces accords la suite de notes si - do - ré, que l’on retrouvera à plusieurs reprises tout au long de la pièce.

Il y a deux accords distincts qui sont très importants dans Allegro. Ils commencent à prendre forme dès les premières mesures et à la mesure 7, ces accords deviennent très clairs. Le premier accord est une triade de mi majeur au deuxième renversement (si - mi - sol#) (accord A) alors que le deuxième est constitué des notes lab - do - fa - sol (accord B). Les mesures suivantes (figure 26) illustrent ce propos :

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Fig. 26 — Illustration des deux accords (m. 7 à 12)

Après la suite d’accords de trois sons du début, l’arrivée de l’accord A change complètement la couleur harmonique de la pièce grâce à l’intervalle de quarte juste si - mi ainsi que la tierce majeure mi - sol# (deux intervalles tout de même présents dans la cellule10).

L’accord B, qui se trouve à la neuvième mesure, rappelle l’atmosphère et la couleur plus sombre de l’introduction. Les accords A et B s’alternent aux mesures 7 à 19. À partir de la mesure 15, les deux accords se superposent, mélangeant ainsi leurs couleurs individuelles.

Une nouvelle section commence à la mesure 19 et présente un nouvel accord de quatre sons (sol - lab - si - ré), qui se déploie en plusieurs configurations dans les mesures qui suivent. Cette nouvelle série de notes comprend les mêmes intervalles que dans la cellule initiale, mais dans un nouvel ordre. On retrouve de nouveau la ligne si - do - ré (note ajoutée) au premier violon. Le lab de l’introduction s’ajoute également à cet accord dès la mesure 22. Il est intéressant de noter que cet accord comprend à la fois le premier accord du mouvement (sol, lab, si) ainsi que la superposition des accords A et B (figure 27) :

Fig. 27 — Harmonie aux mesures 19 à 26

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À la mesure 27, on revient à la disposition des notes que l’on avait à la mesure 15. Cependant, le changement d’accords s’effectue maintenant beaucoup plus rapidement. À la mesure 33, une nouvelle configuration de la superposition de A et B apparaît, en plus des cordes à vide présentant de nouvelles hauteurs pour le premier violon. On retrouve également à l’occasion des accords à trois sons issus de l’introduction, comme à la mesure 35. La figure

28 nous montre de quelle manière s’enchainent ces accords :

Fig. 28 — Déploiement des accords aux mesures 33 et 34.

Les accords A et B découlent du premier accord de la première mesure. En effet, l’intervalle de seconde mineure sol - lab est le fondement de l’accord B alors que la tierce mineure sol# - si appartient plutôt à l’accord A. On retrouve donc la note commune sol#/lab, note omniprésente dans ce mouvement. L’orthographe de cette note vient alors indiquer à quel accord il appartient.

3.3.2 — Andante

Le deuxième mouvement débute également par la cellule mélodique A (sol, lab, si), mais cette fois-ci de façon horizontale, joué à l’unisson par tout le quatuor. Cette ligne est variée constamment par un rythme diversifié accentuant différentes hauteurs comme nous pouvons le voir à la figure 29 :

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Fig. 29 — Quatre premières mesures d’Andante

Tout comme pour la deuxième miniature pour orchestre, cette ligne se voit adjoindre différentes hauteurs supplémentaires par l’utilisation de trilles et de notes voisines (la et sib). Ce mouvement alterne régulièrement entre une ligne à l’unisson et des lignes distinctes. Ces deux idées viennent brouiller la cellule mélodique du départ, rendant la sonorité plus opaque (figure 30) :

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Cette cellule mélodique est transposée et variée à plusieurs reprises dans cette pièce.

Cellules C0 C1 C2 C3 C4

Transposition 0 +4 +8 +3 +5

Inversion X X X

Mesures 1-22 22-24 24-25 25 29

Tableau 7 — Cellule mélodique transposé d’Andante

On retrouve de la mesure 31 à 40 une courte section où le matériau harmonique n’est plus basé sur une cellule mélodique, mais plutôt sur un étroit cluster de cinq notes, allant de

sol à si (première cellule ainsi que les notes ajoutées). La section suivante présente une

superposition de ces différentes cellules, poursuivant la sonorité étroitement tissée de la section précédente.

Instrument Notes Transformation Cellules

Violon 1 sol#, la, do T1

Violon 2 si, do, ré# T3 C1

Alto sol, la bémol, si T0 C0

Violoncelle mi, sol, sol# TI9

Tableau 8 — Matériau harmonique d’Andante aux mesures 31 à 40

Toutes ces superpositions se regroupent progressivement jusqu’à la mesure 60 où ils reviennent sur un unisson avec la tierce mineure sol - sib. Cet intervalle rétrécit au fur et à mesure pour aboutir sur le demi-ton de la cellule initiale soit sol - lab, sous forme de trille. La dernière mesure réitère la mélodie du début du mouvement, également à l’unisson. La figure

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Fig. 31 — Reconstruction de la mélodie d’Andante aux mesures 65 à la fin

3.3.3 — Scherzo

Le troisième mouvement de ce quatuor à cordes ne présente pas de hauteurs définies. Chaque musicien doit jouer une figure rythmique en pizzicato dans le registre très aigu de chaque instrument. Il y a alors une perception du registre (haut contre bas), mais il n’y a pas d’harmonie ou de mélodie définie dans ce mouvement. Ici l’harmonie et la mélodie ne sont pas utilisées, seulement le rythme à l’inverse du second mouvement Andante afin de créer une rupture entre les deux sections.

3.3.4 — Finale

La cellule mélodique initiale (figure 20) introduit de nouveau ce mouvement. On la retrouve cette fois-ci sous forme de longues tenues qui se superposent une note à la fois. Chaque instrument glisse de leur note de départ vers des notes situées à un demi-ton de distance, permettant ainsi de remplir la cellule harmonique et de rappeler la sonorité présentée dans le milieu du deuxième mouvement.

Cette première section se conclut par un decrescendo de tout l’ensemble : chaque instrument disparait peu à peu ne laissant plus qu’entendre au second violon le la bémol. Le

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troisième accord présenté au début d’Allegro (lab - do - ré) est à nouveau présent à la mesure 14, toujours en notes soutenues. Il est intéressant de noter que ce la bémol était également une note commune dans le premier mouvement.

Deux nouveaux éléments font leur apparition à compter de la mesure 29. Il y a des double-cordes (deux à quatre notes) chez certains instruments, ajoutant de nouvelles hauteurs et une nouvelle sonorité à l’ensemble. Les autres instruments font entendre de longs glissandos de triton (intervalle jusqu’à maintenant absent du vocabulaire harmonique de cette pièce). Ce deuxième élément est d’ailleurs beaucoup plus présent que le premier comme nous le voyons à la figure 32 :

Fig. 32 — Matériau harmonique de Finale aux mesures 32 à 37

Ces glissandos se rapetissent graduellement pour revenir à la cellule initiale (tierce et demi-ton), le tout accompagné par le violoncelle qui continue de jouer des double-cordes. À la mesure 62, le sommet de la pièce est constitué d’accords à trois sons à toutes les cordes. Afin qu’ils soient plus résonnants, ces accords utilisent des cordes à vide et des intervalles de quintes justes qui se résolvent sur la cellule initiale.

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3.4 — Rythme

Cette pièce est construite principalement sur des ostinatos rythmiques qui seront développés de plusieurs façons différentes. Le premier et le troisième mouvement seront analysés, car ils illustrent très bien les différents principes rythmiques utilisés dans ce quatuor.

3.4.1 — Allegro

Le mouvement Allegro est construit sur un motif rythmique (A) d’une mesure en ostinato (figure 33) :

Fig. 33 — Allegro — Motif en ostinato

Ce motif est parfois légèrement modifié par l’ajout d’une courte note en fin de mesure (motif A1). Le schéma suivant illustre la succession de ces motifs rythmiques :

1 2 3 4 5 6 7

A A1 A A A A1 A

Tableau 9 — Succession des motifs rythmiques dans l’introduction d’Allegro

À noter que cette succession de motifs est symétrique par rapport à un axe situé à la quatrième mesure.

Aux mesures 8 à 16, après s’être habitué à la répétition du motif A, j’introduis un élément imprévisible et déstabilisant (un « virus ») qui vient modifier le rythme de chaque mesure, raccourcissant A par moment et créant ainsi la variation A2, qui reprend A sans les silences à la fin.

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8 9 10 11 12 13 14 15 16

A2 A A2 A2 A A A2 A2 A2

Tableau 10 — Succession des motifs rythmiques aux mesures 8 à 16 d’Allegro

La répétition de la variation rythmique (A2) aux mesures 14 à 17 vient inscrire dans notre mémoire ce nouveau motif, enlevant son effet de surprise. Après cela, une nouvelle variation rythmique basée sur le décalage (A3) vient se superposer au motif (A2). On le retrouve à la mesure 17 à l’alto et au violoncelle.

Fig. 34 — Variation rythmique d’Allegro aux mesures 14 à 17

La nouvelle section (19 à la fin) est construite en juxtaposant ces trois variations du motif A, ce qui permet d’apporter de la stabilité et en rappelant le rythme du début de ce mouvement.

À partir des mesures 26 et 27, le motif A1 revient comme dans l’introduction. Cette sonorité nous amène à la prochaine évolution rythmique où les deux plans précédents disparaissent pour faire place à quatre variations simultanées de A11.

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À la fin de cette courte phrase, les quatre instruments se rejoignent sur une seule double-croche accentuée au deuxième temps de la mesure 34. Cette alternance entre rythmes indépendants et homorythmie sera utilisée tout au long de cette deuxième section. La dernière répétition de cette idée musicale à la mesure 39 annonce la fin d’Allegro.

3.4.2 — Scherzo

Le Scherzo est construit sur un principe d’écriture rythmique similaire à Allegro. Ce mouvement emploie plusieurs ostinatos rythmiques, d’une durée allant d’une mesure et demie à deux mesures, qui s’enchaînent et se superposent de plusieurs façons.

Tableau 11 — Entrée des instruments aux mesures 1-19

Chaque instrument présente un motif rythmique distinct qui comporte plusieurs variations subtiles, permettant de garder l’intérêt de l’auditeur malgré la répétition d’une même cellule rythmique. S’en suivent à la figure 35 les quatre motifs rythmiques aux différents instruments : 0 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 Violon 1 Violon 2 Alto Violoncelle

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Fig. 35 — Motifs rythmiques répétitives de Scherzo

Les modifications apportées à ces ostinatos dans ce mouvement sont plus importantes que celles présentées dans le premier mouvement de cette pièce. Plusieurs procédés sont à l’œuvre ici : décalage temporel, ajout d’éléments, remplacement des silences, contractions, etc.

À titre d’exemple, le motif de l’alto subit plusieurs transformations au sein de ce mouvement. L’exemple suivant (figure 36) illustre le travail de variation par suppression de notes :

Fig. 36 — Transformation de l’ostinato de l’alto

Ces motifs sont modifiés constamment, ce qui crée des variations assez éloignées du motif original, ce qui les rend méconnaissables. Par exemple, aux mesures 55 et 56 (figure

37), les motifs du premier violon et du violoncelle subissent des modifications assez

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Fig. 37 — Modification des motifs initiaux de Scherzo

À partir des mesures 63 à 68, on retrouve une progression rythmique conduisant à une masse sonore où il n’y a plus de plans rythmiques distinctement perceptibles. Ce mouvement chaotique nous amène à une courte coda où chaque instrument présente les motifs rythmiques dans leur forme originale.

Ce que j’ai souhaité avec la Sonate du Soleil, c’est de faire quatre mouvements très contrastants. J’ai choisis comme démarche compositionnelle de traiter un paramètre en particulier pour chaque mouvement : pour le premier l’harmonie, le second la mélodie, le troisième le rythme. Enfin j’ai réuni tous les paramètres dans le quatrième mouvement. J’ai choisi d’unifier cette pièce en rappelant à la fin du dernier mouvement les premières mesures du début de l’œuvre. Ainsi chaque mouvement de cette pièce est à lui seul un tableau avec sa caractéristique propre.

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Chapitre IV : Ikstuarpok

4.1 — Description du projet

Ikstuarpok est un mot inuit qui n’a pas d’équivalent en français. Cependant, le terme

allemand « Erwartung » utilisé par Schöenberg dans sa pièce Nuit transfigurée pourrait rappeler ce terme. Il symbolise l’impatience que l’on ressent lorsque l’on n’arrête pas de regarder à l’extérieur afin de voir si une personne arrive. J’ai traduit cette attente musicalement par une atmosphère tendue, cherchant à se résoudre sans jamais y arriver complètement. Il s’agit d’une œuvre où alternent deux sections contrastantes : une section active où tous les paramètres sont utilisés en même temps et l’autre, plus passive, où l’on retrouve principalement de lents accords et quelques ponctuations en pizzicatos de cordes.

Cette pièce a été composée pour un orchestre de chambre, soit l’Atelier de musique contemporaine de l’Université de Montréal sous la direction de Lorraine Vaillancourt, dans le cadre d’une résidence offerte par la Faculté de musique. J’ai donc eu la chance de travailler étroitement avec cet ensemble en assistant à leurs répétitions chaque semaine.

4.2 — Forme

Cette pièce consiste en une alternance entre deux parties contrastantes (A et B) qui se développent et qui évoluent tout au long de l’œuvre.

Sections Mesures A 1 à 29 B 30 à 62 A1 63 à 98 B1 99 à 142 A2 143 à 164 C (Déconstruction de A) 164 à 172 B2 173 à la fin

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Les sections A et B sont différenciées par leur caractère et par leur activité rythmique. La section A est caractérisée par un mouvement rapide de double-croches se développant par l’ajout de nouveaux éléments alors que la section B consiste en un dialogue entre le piano et les cordes en pizzicato, qui développe un même matériau de différentes façons.

La différence entre ces deux sections est illustrée par les deux exemples suivants (figures 38 et 39) :

Fig. 38 — Extrait de la section A aux mesures 20 à 22

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