Chapitre 2 : Méthodologie générale
1. Sites d’étude
1.1. La Nouvelle-Calédonie
La Nouvelle-Calédonie est une collectivité française d’outre mer située dans le Pacifique Sud-Ouest à 1500 km à l’est de l’Australie, entre les latitudes 19°S et 23°S et les longitudes 163°E et 168°E. L’archipel d’une superficie de 19 954 km2 est constitué d’une île principale (Grande-Terre), de trois groupes d’îles (Loyautés, Ile des Pins et Bélep) et de quelques îles inhabitées (Entrecasteaux, Chesterfield, etc.). La Grande Terre présente une superficie de 17 000 km2, allongée sur environ 400 km selon une direction nord-ouest/sud-est et d’une largeur de 60 km au maximum (Paris 1981, Andréfouët et al. 2009) (Fig. 2.1).
Le lagon de la Grande Terre est constitué d’un récif barrière de 1744 km de long entrecoupé de passes (Andréfouët & Torres-Pulliza 2004). La distance entre la Grande Terre et le récif barrière varie de 1 à 65 km. Cette barrière délimite un lagon dont la superficie s’élève à 31 336 km2 et dont la profondeur atteint 40 m en certains endroits (Andréfouët et al. 2009). Depuis 2008, quatre zones du lagon de la Grande Terre sont inscrites sur la Liste du Patrimoine Mondial de l’Unesco (le Grand Lagon Sud, la Zone Côtière Ouest, la Zone Côtière Nord et Est et le Grand Lagon Nord).
1.2. Sites d’échantillonnages
Onze sites répartis autour de la Grande Terre ont été choisis en fonction de différents critères : le type et la présence de certains habitats, les activités minières voisines, l’existence d’études scientifiques antérieures, le statut et les projets de gestions (e.g. inscription au Patrimoine Mondial de l’Unesco ou classement en AMP) et l’accessibilité (Tab. 2.1 et Fig. 2.2). Pour les onze sites, l’échantillonnage est effectué dans deux habitats : la mangrove et le récif barrière interne.
Parmi ces onze sites, quatre sites ateliers situés sur la Côte Ouest de l’île ont été identifiés : deux sites potentiellement « impactés » par des projets miniers majeurs : les régions de Voh (Gatope) (projet Koniambo Nickel-SAS) et Prony (projet Vale Inco Nouvelle Calédonie) et deux sites « non impactés » : Ouano (Patrimoine mondial) et St Vincent. Dans ces quatre sites, quatre habitats sont échantillonnés selon un gradient côte-large: la mangrove, les récifs coralliens frangeants, intermédiaires et barrières internes.
Tableau 2.1: Les onze sites d’échantillonnages (* Sites ateliers; M : mangrove ; RF : récif frangeant ; RI : récif intermédiaire ; RB : récif barrière interne).
N° Sites Caractéristiques n stations Habitats
1 Nouméa Usine pyrométallurgique de Doniambo (SLN : Société Le Nickel) Pollution urbaine
2 M / RB
2* St Vincent Site non-minier dans sa partie échantillonnée Etudes antérieures
4 M / RF / RI / RB
3* Ouano Site non-minier
Inscription au Patrimoine Mondial de l’Unesco
4 M / RF / RI / RB
4 Népoui Exploitation minière de Népoui-Kopéto (SLN) 2 M / RB 5* Gatope Projet minier Koniambo Nickel SAS (KNS)
Développement de la zone urbaine Voh-Koné-Pouembout
4 M / RF / RI / RB
6 Golonne Site non-minier 2 M / RB
7 Amos Site non-minier 2 M / RB
8 Tchambouen
ne Site non-minier Inscription au Patrimoine Mondial de l’Unesco 2 M / RB 9 Paama Site non-minier
Inscription au Patrimoine Mondial de l’Unesco
2 M / RB
10 Port Bouquet Exploitation minière de Thio (SLN) 2 M / RB
11* Prony Projet minier Vale Inco Nouvelle-Calédonie Présences de cheminées hydrothermales
4 M / RF / RI / RB
Figure 2.2 : (A) Sites d’étude : les cercles jaunes et rouges désignent respectivement les sites à 2 et 4 habitats échantillonnés. (B et C) Détails des habitats échantillonnés au sein des sites à 2 et 4 habitats échantillonnés. (Base de la carte : Millennium Coral Reef Mapping (Andréfouët & Torres-Pulliza 2004) ; réalisation : M. A. Hamel).
1.3. Description des sites ateliers
La baie de Saint-Vincent est située à 40 km au nord de Nouméa. D’une superficie de 172 km2, c’est la baie la plus vaste de la côte ouest (Testau & Conand 1983) qui englobe de nombreux îlots (Fig. 2.3). Les arrivées d’eau douce proviennent de trois rivières : la Tontouta, la Tamoa et la Ouenghi. La zone de mangrove St Vincent/Ouenghi, définie comme un sous ensemble géographique par Thollot (1992b), couvre une surface égale à 2.6 km2. Il existe deux exploitations minières en activité au niveau du bassin versant de la Tontouta : Tomo (SMGM) et Opoué (SLN/SMGM). Le point de chargement du minerai issu des deux sites miniers se situe au sein de la baie de Saint-Vincent, à l’embouchure de la Tontouta. Cependant, les sites échantillonnés étant éloignés du point de chargement, Saint-Vincent est considéré comme non impacté.
Le site de Ouano se situe au niveau de la baie de Chambeyron, à plus de 100 km au nord de Nouméa (Fig. 2.3). Ce site est inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, au sein de la Zone Côtière Ouest et présente des zones protégées juxtaposées à des aires non protégées. La surface de mangrove de la zone Chambeyron/Ouano est égale à 6.5 km2.
La ville de Voh, située à 300 km de Nouméa au nord-ouest de la Grande Terre, est proche du site de Gatope (Fig. 2.3). Ce site se situe au niveau sud de la baie de Chasseloup, d’une superficie de 75 km2 et au sein de laquelle il existe deux arrivées principales d’eau douce issues de deux bras d’une même rivière, la Témala (Testau & Conand 1983). Les premières extractions de minerai se situent sur le massif du Koniambo et ont commencé à la fin du 19ème siècle. L’exploitation minière de Koniambo Nickel SAS, dont les travaux ont commencé en 2008, se situe au niveau de la baie de Vavouto, voisine de Chasseloup (Grenon & Simard 2012). Elle est constituée, entre autres, d’une mine à ciel ouvert, d’une centrale électrique et d’une zone portuaire (chenal d’accès, quai de déchargement, etc.). La production de l’usine a commencé en 2013 et devrait atteindre sa pleine activité en 2015.
La baie de Prony, située au sud de la Grande Terre, est une baie fermée d’une superficie totale de 49 km2 (Testau & Conand 1983) (Fig. 2.3). Quatre rivières principales constituent les apports d’eaux douces : Rivière du Kaoris, Rivière Bleue, Rivière du Carénage et Rivière Kadji. C’est une baie qui présente une transition entre un environnement sous forte influence terrigène et un environnement océanique sur une courte distance, soupçonnée de présenter une microchimie de l’environnement singulière due à la présence de cheminées hydrothermales et à la présence du projet minier Vale Inco Nouvelle-Calédonie (anciennement Goro Nickel) (Bonvallot & Lardy 2012). Les premiers travaux sur le site ont commencé en 1998 et incluent, entre autres, la construction de l’usine, de la centrale thermique et du port. La mine est une exploitation à ciel ouvert en gradins. La production a progressivement démarré depuis 2010 mais, à l’heure actuelle, n’a pas atteint sa pleine capacité.
Figure 2.3 : Détails des quatre sites ateliers: (A) Saint Vincent, (B) Ouano, (C) Gatope et (D) Prony.