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Chapitre 1. Des collaborations entre calcul formel et calcul numérique

1.1. Calcul numérique à l’intérieur d’un système de calcul formel

1.1.4. Modélisation et simulation numérique dans le cadre d’un système de calcul formel

1.1.4.5. Simulation numérique de systèmes industriels ?

L’expressivité des langages proposés par la plupart des systèmes de calcul formel, proches des notations mathématiques usuelles, jointe aux capacités de calcul formel, de calcul numérique, et aux riches possibilités graphiques, semble faire des systèmes de calcul formel des candidats sérieux à la simulation numérique. (Braun 2000) chante les louanges de la simulation utilisant le calcul formel, en énumérant les principales différences avec la simulation numérique : 1. il n’est pas nécessaire de donner une valeur numérique à chaque paramètre ;

2. une solution exacte est calculée, et non pas une approximation numérique ; 3. les modèles peuvent être paramétrés ;

4. les problèmes inverses sont faciles à résoudre ; 5. le calcul formel offre une grande souplesse ;

6. de nouvelles méthodes de résolution sont disponibles ;

7. l’optimisation devient possible car les expressions sont réduites ;

8. les outils proposent une démarche de travail intuitive et adaptée aux ingénieurs.

Exprimés ainsi ces avantages sont caricaturaux et certains erronés. Une solution exacte n’est bien évidemment pas produite pour tout problème et, quand elle l’est, elle peut être difficile à manipuler du fait de sa taille ou de sa forme. Si les problèmes inverses étaient faciles à résoudre, les géophysiciens notamment seraient ravis, qui obtiendraient aisément le profil du sous-sol à partir des sismogrammes ! Par contre, l’intérêt de manipuler des modèles paramétrés est soulignée, et ce point de vue mérite que l’on s’y attarde. L’auteur précise que « la complexité croissante des caractéristiques des produits rend nécessaire une meilleure compréhension des paramètres des procédés ». Selon lui, « les méthodes numériques ne peuvent fournir de l’information relative à l’interaction et à l’interdépendance des paramètres. Elles sont efficaces uniquement si tous les paramètres physiques sont connus avec suffisamment de précision ; dans le cas contraire, l’efficacité est sensiblement réduite par la nécessité de calculer de nombreuses fois le même problème avec des paramètres variant légèrement. » Selon lui, cette analyse de sensibilité aux paramètres du modèle serait donc plus aisée et plus efficace au sein d’un système

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Le nombre de coefficients d’un développement de Taylor à l’ordre l d’une fonction de n variables est égal à la dimension de l’espace Ql(ℜn) des polynômes sur ℜn, de degré maximal l en chacune des variables.

n n

l l

Q ( ) ( 1)

de calcul formel. Cette proposition semble exacte, la dérivation formelle d’expressions analytiques étant un des points forts du calcul formel. Dans le cas de modèles explicites, où les variables d’intérêt x1, x2, …, x s’expriment comme des fonctions explicites des paramètres m

1 p , p2, …, p , les sensibilités n (1,0,...,0) 1( 1, 2,..., ) n p p p x ∂ , 0,1,...,0) 1( 1, 2,..., ) n p p p x ∂ , …, ) ,..., , ( 1 2 ) 1 ,..., 0 , 0 ( n m p p p x

∂ sont faciles à calculer formellement. Dans le cas -bien plus courant !- de modèles implicites, où des équations algébriques, différentielles ou intégrales relient variables et paramètres, sans que l’on puisse exprimer explicitement les premières en fonction des seconds, une expression analytique exacte de la fonction dérivée (x1',x2',...,xm' ) est la plupart du temps inaccessible ! Comme on l’a vu au chapitre 1.1.4.4 la méthode analytique approchée, dite des développements en série des perturbations, comprend le calcul précis des sensibilités à un ordre quelconque, uniquement au point particulier (p1,p2,...,pn) pour lequel le modèle

0 ) ,..., , ,..., (x1 xm p1 pn =

F a été résolu. Afin d’analyser la sensibilité des variables aux différents paramètres du modèle, il semble donc que nous soyons encore obligés, même dans le cadre du calcul formel, « de calculer de nombreuses fois le même problème avec des paramètres variant légèrement. » !

L’intégration systématique de méthodes analytiques approchées dans les nouveaux systèmes de calcul formel ouvrira peut être les portes de la simulation numérique de modèles complexes à ces outils. Pour l’instant, force est de constater que la littérature scientifique ne mentionne toujours pas la modélisation et la simulation de bout en bout d’un système industriel complet, décrit par au moins quelques dizaines de symboles –variables ou paramètres- et au moins quelques dizaines de relations. Les performances des algorithmes utilisés aujourd’hui sont pourtant devenues remarquables. A notre avis, la raison essentielle est le fait que les méthodes numériques apportent, dans le cadre complet d’environnements de résolution de problèmes, spécialisés ou généralistes, une réponse satisfaisante aux questions de la modélisation et de la simulation de systèmes ! Bien que souvent très riches, les systèmes de calcul formels actuels sont loin de couvrir toute l’étendue du processus de modélisation et de simulation. (Houstis & Rice 2000) décrit l’architecture logicielle d’un environnement de résolution de problèmes particulier -

PELLPACK- spécialisé dans la résolution d’équations aux dérivées partielles. Les composants

logiciels de l’environnement se répartissent en quatre catégories : ceux dédiés à la spécification du problème, ceux dédiés à la spécification de la solution, l’environnement d’exécution et enfin l’environnement de visualisation. Si l’on procède à une analyse critique des fonctionnalités des divers systèmes de calcul formel, au vu de cette classification, les manques sont criants :

1. spécification du problème : absence de bibliothèques de géométries, absence d’éditeurs de géométries, absence d’éditeurs de la logique discrète du système ;

Calcul numérique à l’intérieur d’un système de calcul formel

2. spécification de la solution : absence de bases de connaissance ;

3. environnement d’exécution : faiblesse des interfaces de communication avec les environnements tiers ;

4. environnements de visualisation : absence ou faiblesse des outils d’analyse de performance, absence ou faiblesse de l’analyse de données.

L’interaction forte entre les différents éléments d’un système industriel5 se traduit nécessairement par une interaction forte entre les différents éléments modélisant ce système. Aujourd’hui, les systèmes de calcul formels, monolithiques, ne savent pas inter-opérer avec d’autres composants logiciels pour fournir un environnement complet de modélisation et de simulation de systèmes industriels. Leur champ d’application privilégié reste encore les modèles continus dans le temps et dans l’espace, constitués d’un nombre réduit de symboles et de relations.

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En extrapolant les définitions fournies par la norme ISO 15 288 et (Association Française d'Ingénierie Système 2004), un système industriel peut être vu comme un ensemble d'éléments en interaction, organisés pour atteindre un ou plusieurs résultats déclarés, dans un contexte de production ou de transformation de biens et de services. Il est caractérisé par un ensemble de propriétés telles que fonctions assurées, interfaces externes, architectures, activités, ressources ... et est réalisé à l'aide d'un ensemble de constituants (matériels, logiciels, automates, opérateurs, processus ...). Il est rarement isolé et est en interaction avec son environnement (sociétal, économique, politique ...).