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Deuxième partie : Les dispositifs publics au défi de l’intervention dans une copropriété dégradée, la mise en œuvre d’un PRU sur le parc Kallisté à

2. Les dispositifs publics au défi de l’intervention dans une copropriété dégradée, la mise en œuvre d’un PRU sur le parc

2.3 Depuis 2011 et la signature de la convention ANRU, une stratégie plus affirmée

L’ensemble des dispositifs mis en œuvre jusqu’à présent n’ont pas eu les effets escomptés, tant sur les espaces extérieurs que pour les bâtiments les plus dégradés, à tel point que ces derniers sont concernés par des projets de démolition. Cela montre toute la limite des outils à disposition des pouvoirs publics, notamment dans un contexte difficile comme celui-ci. La signature en 2011 d’une convention ANRU permet d’amorcer un projet urbain ambitieux.

58 Convention PRU Notre-Dame-Limite Parc Kallisté – Marseille (15ème arrondissement) 59 Ibid

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2.3.1 Une action plus franche des pouvoirs publics

La signature du PRU « Notre-Dame-Limite – Parc Kallisté » répond à cinq enjeux principaux à l’échelle du Parc Kallisté60 :

- Conforter dans le statut privé les immeubles les moins élevés, à savoir les C, D, E et F, dont le redressement est envisageable à moyen terme ;

- Restructurer les équipements publics existants (polysport, groupe scolaire) mais également intégrer dans le domaine public les espaces sous gestion de l’USL ;

- Démolition des bâtiments B et H, non redressables ; - Réflexion sur l’avenir des bâtiments A, I et G ;

- Revaloriser à long terme le contexte urbain et social du site.

Ainsi, le nouveau programme ANRU court jusqu’en 2025, et comprend des actions sur les bâtiments, les espaces extérieurs et les équipements publics. Pour accompagner les ménages subissant la démolition de leur immeuble, une MOUS relogement est mobilisée.

La satisfaction de ces enjeux demande une intervention lourde de restructuration de l’ensemble immobilier Kallisté, qui se traduit obligatoirement par des opérations de démolition/reconstruction visant à amorcer un processus de mixité de l’habitat et une valorisation du cadre de vie des habitants. A ce titre, le projet de l’ANRU programme la démolition des bâtiments B et H, soit un total de 245 logements privés. Dans l’objectif de dédensifier la copropriété, la compensation de ces démolitions sera réalisée hors-secteur, par la création de 110 logements sociaux. Parallèlement, le bâtiment G est voué à être transformé en immeuble locatif social, essentiellement en PLAI afin de diversifier l’offre de logements sur site. Il est à noter qu’habituellement, l’objectif de mixité sociale prôné par les PRU consiste à diversifier les quartiers HLM par du logement privé, le plus souvent sous la forme d’accession à la propriété ou en locatif privé. Dans notre cas, la situation est inversée et paradoxale. Ce sont des logements sociaux qui sont envisagés comme moyen d’améliorer les conditions d’habitabilité et d’attirer sur le quartier une population davantage aisée. D’autre part, les bâtiments A, C, D, E, F, G et I bénéficieront d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat menée à travers un nouveau plan de sauvegarde (le troisième) sur chacun des immeubles. Globalement, l’intervention sur les logements démontre un changement de stratégie, différenciée de la politique habituelle de l’ANAH qui préconise la seule réalisation de travaux pour l’amélioration des logements.

Concernant les équipements publics sur le quartier, la convention distingue la rénovation des équipements sportifs à la réhabilitation du groupe scolaire. Cependant, la stratégie d’intervention pense conjointement ces deux outils tant leur utilisation est liée : des terrains de sport abandonnés sont attenants à l’école et ces différents terrains sont très utilisés à la sortie des écoles. En ce qui concerne l’école maternelle, une extension de deux classes supplémentaires est programmée afin d’agrandir les cours de récréation et accroitre sa capacité d’accueil. Actuellement les trois entrées de l’école fonctionnent de manière indépendante, le projet cherche donc à les lier par un maillage piétonnier plus confortable que l’existant. Toujours dans l’optique d’améliorer le confort des enfants, la rénovation des plateaux sportifs est également programmée.

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Au-delà des interventions « physiques » sur le bâtiment le projet prévoit des actions sur les espaces extérieurs, lesquels devraient bénéficier d’aménagement, par la formalisation des cheminements piétons et la mise aux normes de sécurité incendie en travaillant sur l’accès des pompiers à certains bâtiments. Le réseau viaire actuellement composé de deux voies sans issue devrait être requalifié et agrémenté de nouvelles voies publiques, facilitant la circulation à l’intérieur du Parc Kallisté.

Les espaces extérieurs intègrent également la thématique de la sécurité et la tranquillité publique, dont le traitement semble indispensable concernant l’amélioration des conditions de vie des ménages et le redressement des copropriétés. Pour articuler ces deux échelles d’intervention, un accord multipartite a été trouvé en 2014 visant à lancer deux consultations d’études : une à l’échelle de Kallisté tournée vers l’élaboration du plan de sauvegarde, par un diagnostic multicritère permettant de définir une stratégie d’intervention et une autre à l’échelle du quartier Notre-Dame-Limite focalisé sur le projet urbain et social. L’étude porte sur le fonctionnement du quartier, son interaction avec la ville, ses besoins en matière de commerces, transports, d’équipements,… L’idée est de croiser ces deux démarches et qu’elles se complètent de manière itérative visant à favoriser l’émergence d’un projet cohérent. En effet, la pertinence du projet s’appuie sur la qualité des études à différentes échelles. L’urbain doit intégrer la copropriété et inversement, cette dernière doit s’intégrer dans son environnement. La signature d’une convention ANRU a favorisé le renforcement des moyens alloués au projet urbain et à son changement d’échelle, en prenant en compte la dynamique du quartier dans lequel il s’insère.

Figure 51 : Les écoles situées au cœur du Parc Kallisté Source : Géoportail / Réalisation personnelle, juillet 2017

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2.3.2 Une mobilisation plus large autour du projet urbain

Dans le cadre de la stratégie proposée dans le PRU, faisant la part belle aux acquisitions de logements, une concession d’aménagement a été signée entre la Ville de Marseille et Marseille Habitat en 2012. Ladite concession est pensée dans le cadre des démolitions à court terme des bâtiments B et H, cumulant de nombreux dysfonctionnements. L’objectif affiché par les pouvoirs publics est d’acquérir le plus rapidement possible, par voie amiable ou expropriation des logements dans ces immeubles. Les lots acquis seraient gérés et immobilisés par Marseille Habitat en attendant la démolition. Aussi, la concession d’aménagement permet d’anticiper la déqualification des bâtiments A, G et I, confrontés à une gestion financière et administrative peu rigoureuse. L’acquisition de logements dans ce groupement d’immeuble par le droit de préemption urbain renforcé correspond à la volonté d’intégrer du logement social, après cession des logements à un bailleur.

« C’est un site ANRU particulier car aucun bailleur social n’est présent et on se retrouve face à une copro régie par la loi de 65. On doit avoir une concession pour porter le déficit foncier, reloger, démolir, etc. » (Entretien chef de projet MRU, mai 2017).

Les missions confiées à Marseille Habitat sont les suivantes61 :

- les acquisitions amiables, par voie de préemption ou d’expropriation des immeubles ou lots ;

- la neutralisation des logements acquis dans les immeubles voués à la démolition, - les démolitions et la mise en état des sols,

- la cession de foncier ou de logements à des partenaires institutionnels ou privés, - la gestion et l’entretien courant des logements acquis dans les immeubles à conserver, - les relogements nécessaires préalables aux démolitions et l’accompagnement social

des ménages,

- la coordination d’ensemble et l’animation nécessaire à la conduite des opérations.

Dans le cadre du NPNRU et du positionnement stratégique des copropriétés dans les nouveaux périmètres prioritaires, l’Anah a signé une convention de partenariat 2014-2024 avec l’ANRU. Le rapprochement de ces deux agences s’était déjà amorcé dans le cadre de la création du Programme National de Requalification des Quartiers Anciens Dégradés

(PNRQAD). Ce portage à deux têtes permet une mutualisation des savoirs faire et une répartition des compétences selon les situations rencontrées. Si l’action envers une copropriété concerne uniquement son redressement, l’Anah financera les différents dispositifs (plan de sauvegarde ou OPAH). Par contre, si la démolition est rendue obligatoire par les dégradations avancées ce sont les financements de l’ANRU qui seront alloués à cette opération. Si l’on applique cette règle à notre terrain d’étude, l’intervention sur les bâtiments B et H (démolition) est financée par l’ANRU et celle sur les immeubles C, D, E et F par l’Anah (plan de sauvegarde). Cette distinction se retrouve également dans le portage des

61 Extrait des registres des délibérations du conseil Municipal, séance du 6 décembre 2010, Approbation du

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études où l’ensemble de l’ingénierie préalable à la définition d’une stratégie concernant le logement est attribuée à l’Anah et les études urbaines sont affiliées à l’ANRU. Les interventions les plus lourdes sont régies par l’ANRU, au bénéfice de son expérience passée dans le cadre du PNRU.

« Sur Marseille on a Kallisté en PNRU, Bellevue et Corot en conventions bi-partenarial Anah/ANRU. Pour les immeubles redressables c’est l’Anah et pour les non redressables en démolition/reconstruction c’est l’ANRU qui prend le relais. Ce sont des conventions plus complexes et difficiles car pas évident de rassembler les deux mais ça marche sur Kallisté ». (Entretien chef de projet MRU, mai 2017).

Le pilotage stratégique et opérationnel de ces acteurs est réalisé par Marseille Rénovation Urbaine, en tant que groupement d’intérêt public (GIP). Avec lui, sont associés : l’Etat, la Métropole Aix-Marseille Provence, la Ville de Marseille, le Conseil Départemental, le Conseil Régional, l’association régionale des organismes HLM et la caisse des dépôts et consignation. L’engagement de ces acteurs prend la forme d’une aide financière et d’un suivi de la bonne réalisation du projet urbain.

L’état général des copropriétés de l’ensemble immobilier Kallisté nécessite un appui fort des pouvoirs publics. Comme nous l’avons démontré, les premières interventions publiques n’ont pas apporté les effets escomptés. En réponse au processus de dégradation, la stratégie a évoluée : les interventions individuelles, isolées sur chaque bâtiment ont laissé place à un projet d’envergure, davantage tourné vers l’opérationnel. Si la mobilisation des acteurs est bien présente sur ce projet, il convient de savoir comment ces derniers s’adaptent à la contrainte du logement privé dans un cadre d’intervention pensé pour intervenir en faveur du logement social.

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Troisième partie : Pour les opérateurs, une adaptation obligatoire au statut